Après quatre années d’absence, la saga Anno nous revient avec un épisode à la fois ambitieux et prometteur. Anno 1800, tout en conservant les acquis des deux précédents épisodes, s’inscrit très clairement dans la continuité du célèbre Anno 1404, très apprécié des fans. Cette fois, nous serons plongés au cœur de la révolution industrielle à une époque troublée par les conflits sociaux mais aussi portée par des rêves de liberté que la découverte de nouvelles terres pourrait combler. Une fois de plus, Anno nous invite à sortir des sentiers battus, à partir à l’aventure de contrées inconnues propices à la découverte et à l’exploration.
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ToggleL’invitation au voyage
Dès le lancement du jeu, deux choses attirent immédiatement notre attention. D’abord, l’effort significatif opéré sur les graphismes. Que ce soit dans le mode campagne ou dans le mode bac à sable – les deux pivots principaux du titre – on sent, dès les premières images que le moteur graphique développe des environnements plus fluides et réalistes que jamais. Comme tout fan de la série, on prend donc son temps pour observer minutieusement les différentes caractéristiques de la carte, les points d’intérêt, afin de mettre en place sa stratégie de développement. De ce point de vue, le mode bac à sable est un régal. La découverte de ce nouveau monde nous met face à de grandes étendues à la topologie variée. Puisque l’on part de zéro, on comprend intuitivement que l’imagination et l’élan créateur seront vos meilleurs alliés pour vous approprier cette île de prime abord libre et vierge. Tout cela s’accompagne d’une bande son magique dont on ne se lasse pas, même après plusieurs heures de jeu. De même, les voix de la version française nous plonge encore un peu plus dans cette escapade somptueuse aux multiples facettes. Lorsqu’à tout ceci se mêle le plaisir d’explorer les îles environnantes pour y débusquer des merveilles inattendues, l’instinct de l’aventurier vous fait naturellement frissonner. La possibilité de zoomer de manière assez précise, même si elle se traduit parfois par un rendu visuel moins percutant, est un vrai plaisir pour celui ou celle qui aime contempler et apprécier le travail artistique réalisé.
Pour les plus exigeants d’entre nous ou pour ceux qui, après quelques parties confortables souhaitent relever un challenge plus corsé, plusieurs options sont envisageables. En effet, l’un des attraits majeurs de cet opus est la grande liberté de personnalisation des parties. Cette liberté s’articule au moins en deux axes principaux. Vous pouvez d’une part influer largement sur vos adversaires en les rendant plus coriaces ou tout simplement en agissant sur les conditions de victoire. Dans la même veine, vous pourrez librement ajuster vos moyens financiers en début de partie ou encore moduler les coûts d’entretien. En somme, il y en a pour tous les goûts. L’autre versant consiste à laisser l’IA orienter un peu plus vos actions en vous proposant, à chaque étape de votre développement des petits tutoriels par ailleurs très efficaces, vous permettant de vite comprendre ce que l’on attend de vous. Une fois encore, pour les plus téméraires, vous pourrez vous élancer en toute liberté dans l’aventure sans recevoir ces messages afin d’éprouver par vous-même les enjeux de la conquête d’une terre inconnue.
Une campagne passionnante
Avant d’évoquer les autres caractéristiques attractives du titre, focalisons-nous sur la campagne proposée dans cet opus. En effet, une brève présentation s’impose tant la narration est prenante, l’intrigue passionnante. L’autre avantage de ce mode réside dans la multiplicité des conseils et tutoriels de gameplay qu’il recèle. Ainsi, l’air de rien, ce mode, par l’entremise d’une histoire captivante, nous initie aux principales mécaniques du titre et nous place immédiatement sur de bons rails pour aborder le mode bac à sable.
Voyons, à grands traits, les principales composantes de la narration. À la fin du XIXème siècle, vous suivez l’histoire d’une famille jadis réputée en proie à de nombreux drames. Vous incarnez une jeune femme, bouleversée par la mort récente de son père. Attristée et peinée par cette nouvelle, notre héroïne trouve réconfort auprès de son compagnon Aarhant et de sa sœur Hannah. Toutefois, une mauvaise nouvelle ne venant jamais seule, le passé du défunt rattrape cette famille endeuillée. Il est question notamment d’héritage et de dettes à honorer. Au sein même du cercle familial, les vieilles rancunes couplées à l’appât du gain suscitent la cupidité. Ainsi, le père disparu pourtant propriétaire d’une compagnie maritime prospère est traîné dans la boue, soumis à l’opprobre et à l’humiliation publique. Comment tout cela a pu arriver sans l’entremise de forces néfastes ? Justement, Edvard, votre oncle fait montre d’un comportement particulièrement agressif. Prenant le contrôle de tous les biens de votre père, il tente d’étouffer vos velléités en discréditant vos tentatives de repartir de zéro, sur de nouvelles bases. C’est ainsi que le récit commence et que vous serez propulsé, en tant que joueur, sur une île lointaine où tout reste à construire. Le décor est planté. Aidez cette famille dans le besoin à redorer son blason, à récupérer son dû et à prospérer à nouveau.
Liberté, inégalités et complémentarité
On l’aura compris, le mot d’ordre de cet opus est clairement la liberté. La liberté d’entreprendre d’abord, impétueusement défendue par cette famille brisée mais courageuse. La liberté également de repartir de zéro sans avoir à souffrir des appétits d’autrui. Ce principe accompagne tout autant le mode bac à sable dont il convient de dire un mot. Ce mode vous permet en effet d’avancer à votre rythme, selon vos envies, vos règles, vos plans. On l’a dit, la possibilité de personnaliser vos parties, vos cartes et vos adversaires participe au caractère jubilatoire du titre. Ainsi, en façonnant un défi sur mesure à l’image de nos ambitions, la sensation de liberté se mêle immédiatement à l’impression d’immersion. Celle-ci trouve écho au déroulement de chacune des parties sur Anno. En effet, comme évoqué lors de nos impressions concernant la bêta privée, Anno 1800 se fonde au moins sur deux principes phares : l’élaboration d’une pyramide sociale équilibrée et l’interconnexion des chaînes de production et des corps de métiers.
Dans ce dernier opus, vous êtes invités, en premier lieu, à lancer les bases d’une économie simple fondée sur les besoins primaires. Ainsi, vos habitants – au départ des fermiers – auront besoin d’habitations pour se loger. Ils profiteront, dans un premier temps, des denrées récoltées via le vieux continent, leur permettant de lancer les premières constructions. Une fois les stocks initiaux épuisés, il conviendra d’établir les premières chaînes de production (bois, scierie) permettant d’extraire les matériaux nécessaires à la construction des bâtiments de première nécessité. Un marché semble rapidement indispensable à l’établissement des premiers échanges. Des pêcheries permettront également à la population de se nourrir. Voici les balbutiements de l’économie des besoins. Toutefois, ce n’est que le début de l’aventure. Les travailleurs auront rapidement besoin de divertissements et exigeront de nouveaux produits à consommer. Par ailleurs, point central du jeu, la force productive sera particulièrement sensible aux conditions de travail et à la productivité que vous exigerez d’eux. Ainsi, leur utilité dépendra de ces facteurs ainsi que de leur confort, de leur divertissement, de leur accès à différents biens de subsistance. Ce n’est qu’en prenant en compte cette dimension que les fermiers deviendront des ouvriers.
C’est à partir de ce moment que le deuxième étage de la pyramide pourra s’établir sur la base du premier. Il conviendra ensuite de bien respecter l’équilibre entre les effectifs des fermiers et ceux des ouvriers pour faire vivre et avancer cette société encore précaire. Sans fermiers, pas de bien de première nécessité, pas de satisfaction des besoins, les ouvriers auront donc envie de quitter votre île. Symétriquement, sans un nombre conséquent d’ouvriers, pas de mines extractives, pas de développement du port de commerce donc pas d’expansion et votre économie sera stagnante. Cela ne voudra pas pour autant dire qu’une fois ce problème géré, vous serez tranquilles. À de nouveaux besoins correspondent de nouvelles exigences, de nouveaux droits. Le développement du syndicalisme et la lutte pour l’amélioration des conditions de vie des travailleurs pourraient miner la stabilité d’ensemble de votre île. Et ce ne sont pas les forces de l’ordre qui vous permettront de régler définitivement le problème. Là encore il faudra veiller à ne pas laisser s’accroître les inégalités. Vous pourrez, pour cela, manipuler la presse, dire que tout va bien alors que tout va mal, à vos risques et périls. C’est ainsi que fonctionne Anno.
Un dernier point à souligner enfin : l’invitation à l’exploration que propose Anno. La découverte des îles environnantes, qu’elles soient colonisées ou non, recèlent une importance capitale. D’abord pour établir des liens diplomatiques et commerciaux indispensables à votre expansion mais aussi pour étendre votre empire et accéder à des ressources trop rares pour être négligées. La possibilité d’un avantage comparatif accentuera pour sûr votre ascendant sur l’IA ou sur les autres joueurs. Ainsi, le voyage mémorable que propose le titre mobilise une multitude de situations, de dimensions que le joueur devra apprendre à gérer au gré de ses tentatives : de la diplomatie, en passant par le commerce et la gestion de votre main d’œuvre. Pas le temps de s’ennuyer donc, pour notre plus grand plaisir.
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