Pourquoi on aimerait un retour de Devil’s Third ?
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Rédigé par Nathan Champion
Deux mois d’absence, ou plutôt de vacances bien méritées dans l’ombre de nos salons, caves ou chambres, nous ont permis de prendre un peu d’avance sur le programme que l’on prévoyait initialement pour la seconde saison de notre chronique. Et surtout de nous lancer dans des jeux qui, sans ça, seraient très probablement passés à la trappe, la faute à leur durée de vie gargantuesque, leur âge parfois rebutant, ou encore leur support… peu ragoûtant.
Oui, on s’est penché sur la Wii U ! Alors non, ça n’a pas toujours été une partie de plaisir, notamment parce qu’il fallait brancher le gamepad après une poignée d’heures de jeu. Mais qu’on se le dise, sur les quelques titres que l’on a essayé et terminé, certains valaient vraiment le coup d’œil, notamment Xenoblade Chronicles X qui avait droit à sa chronique il y a quelques semaines. C’est aussi le cas de Devil’s Third, un TPS complètement décomplexé, qui aurait presque pu être développé par un Suda51.
Note : Puisque nous étions dans l’incapacité de réaliser des captures d’écran, les images que vous trouverez dans cet article ne proviennent pas de chez nous.
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On les reconnaît peu par chez nous, pourtant au Japon les créateurs sont de véritables petites stars, quand elles ne brillent pas plus que leurs studios. On peut évidemment vous citer l’incontournable Hideo Kojima, à l’origine de la série Metal Gear Solid chez Konami, et plus récemment de Death Stranding pour Sony. Mais il y a aussi quelques noms moins connus, pas forcément moins prestigieux, tout dépend d’où vous vous placez ! Le créateur de Deadly Premonition par exemple, Sweary65 de son pseudonyme, a le don de rameuter une certaine communauté de fans de son travail dès qu’il annonce un nouveau projet. Et que dire de Suda51 ? Qui est un peu le créateur par excellence, un homme qui n’en fait qu’à sa tête, développant ce à quoi il a envie de jouer, concrètement.
Entendons nous bien, le jugement de valeur n’a pas sa place dans cet article, pour la simple et bonne raison qu’il est écrit par un amoureux du travail des indépendants, et des créateurs d’expériences différentes. En somme, un fan invétéré de Grasshopper Manufacture, le studio de Suda, ou encore de ce fameux Sweary65 que je vous citait plus haut (et que, j’imagine, vous êtes peu à connaître). D’ailleurs, on ne vous cache pas qu’avant l’annonce d’un retour de Lollipop Chainsaw il y a quelques semaines, on comptait bien écrire une chronique dessus… encore une qui passe à la trappe !
Vous l’aurez compris, si je vous écrit tout ça c’est parce que l’on va parler d’une tête, et pas n’importe laquelle, puisqu’il s’agit de Tomonobu Itagaki. Son nom ne vous dit probablement pas grand chose, pourtant sachez qu’il s’agit du créateur de la série Dead or Alive, et qu’il est aussi à l’origine du reboot de la licence Ninja Gaiden sur la première Xbox, ainsi que de ses suites. Un grand monsieur donc, qui aime visiblement beaucoup les ninjas et les poitrines opulentes. Mais pas que, puisque ce que l’on retient finalement de son travail, c’est son amour pour le gameplay. On ne se rappelle pas du scénario de ses projets, et c’est parfaitement normal : celui-ci ne fait office que de figurant.
C’est en 2008 que Valhalla Game Studios voit le jour, fondé par Satoshi Kanematsu. Le monsieur est rapidement rejoint par quelques têtes, notamment le fameux Tomonobu Itagaki, à qui l’on confie un projet de taille : développer une première licence exclusive au studio. Un titre qui sera prévu pour Xbox 360, PlayStation 3 et Nintendo Wii U. Malheureusement, et nous avons peu d’informations à ce sujet, le développement ne semble pas se passer aussi bien que prévu. Ainsi, lorsque Devil’s Third débarque en 2015, il ne reste plus que la console au Gamepad sur le marché… et impossible de porter ce projet déjà dépassé sur une console de nouvelle génération. Du moins, pas sans s’attirer la foudre des joueurs et des critiques !
La suite est assez prévisible : développer un jeu sur une console déjà morte, c’était une opération trop risquée financièrement parlant. Ainsi, le studio subsiste quelques années encore, développe une version PC du mode Online de Devil’s Third, puis un jeu 3DS inconnu au bataillon, et s’éteint de sa belle mort fin 2021.
L’école du gameplay d’argent
Mais alors, Devil’s Third, c’est quoi ? Eh bien les images parlent d’elles-mêmes, il s’agit d’un Third Person Shooter, comprenez un jeu de shoot plaçant la caméra derrière son protagoniste, usant autant d’armes à feu que de corps à corps. L’idée n’est pas bien originale, on vous le concède volontiers. Et c’est d’ailleurs la même chose concernant l’univers du jeu, qui ne détonne pas vraiment dans le paysage vidéoludique de l’époque, si ce n’est par sa relative platitude. On fait face à une organisation terroriste commandée par une poignée de généraux se voulant charismatiques… mais dont le design et les idéaux ne vous resteront pas longtemps en tête, croyez moi !
En somme, Devil’s Third c’est un peu la rencontre entre Platinum Games et Grasshopper Manufacture. En d’autres termes, l’histoire est subsidiaire et seuls quelques personnages sortent du lot, avec un design et un surjeu qui leur confèrent un aspect maladroit, très kitch, que ne renierait pas le créateur de Vanquish. L’aspect graphique est on ne peut plus désuet à sa sortie, autant parce que la technique est à des années lumières de ce que peut faire la console, que parce que les chutes de framerate sont monnaie courante. Un peu comme chez un No More Heroes III, donc, le génie du design en moins ! Mais on ne va pas se mentir, on se moque des graphismes, et ce coté kitch apporte finalement une certaine saveur à cette quête explosive.
Ce qui compte finalement dans cette aventure très scriptée, qui nous fait parcourir ses couloirs en ligne droite sans jamais s’arrêter, c’est le gameplay. Et justement, celui-ci, à défaut d’être novateur, est une véritable pépite. C’est bourrin à souhait, jouissif, et l’hémoglobine coule à flots ! Autrement dit, on reprend tout ce qui faisait le sel des productions de Tomonobu Itagaki par le passé, en le dépossédant des poitrines généreuses et des jeunes femmes dénudées (à une exception près, faut pas déconner), et on y ajoute une bonne dose de cover-shooter à la Gears of War. Le tout avec une difficulté un brin relevée, parfois complètement injuste, mais des checkpoints presque aussi réguliers que dans un jeu mobile !
Alors dit comme ça, vous devez penser que je vous parle d’un TPS bête et méchant, générique, comme on en a vu des centaines depuis la sortie de Resident Evil 4, le messie du genre. Et d’une certaine façon, je serais bien incapable de vous faire penser le contraire sans vous mettre le Gamepad entre les mains. Parce qu’il n’est pas facile d’expliquer pourquoi un gameplay est grisant. Tout ce qu’on peut dire concernant Devil’s Third à ce niveau, c’est que sa prise en main est immédiate, intuitive, et que les affrontements à l’arme à feu, au katana ou à la hache sont brutaux et sanglants. Des qualités que très peu de jeux peuvent se targuer de posséder finalement. Et ce que cela traduit, c’est un savoir faire malheureusement gâché par tout le reste.
Pourquoi on aimerait un retour de Devil’s Third ?
Ce que je vous ai décrit, ce n’est pas un jeu exceptionnel, vous en conviendrez. Et je ne vous ai même pas parlé du multijoueur, qui n’est plus en activité, et qui n’avait rien d’original. Mais force est de reconnaître que, parmi ceux qui ont su apprécier Devil’s Third, une idée ressort très souvent : on y prend un pied monstrueux. Et ce malgré des défauts évidents, notamment du coté de sa structure on ne peut plus prévisible, de ses graphismes à peine passables, de ses chutes de framerate, de sa durée de vie tournant autour des huit petites heures… Il en sort étrangement qu’on a rapidement envie de relancer une partie une fois la première bouclée !
Alors en somme, il n’y aurait qu’à garder le protagoniste complètement cliché, une poignée de généraux au charisme tout droit sorti de mauvais films d’action des années 80, et à reprendre ce gameplay qui tache, pour faire un jeu d’action grisant comme on savait les faire il y a quinze ans. Parce que finalement, si j’aime autant Devil’s Third, et si je tenais à l’aborder dans cette chronique, c’est parce qu’il représente une sorte de quintessence d’un savoir faire qui semble complètement perdu. Certains indépendants continuent de pencher pour l’école du gameplay, au détriment d’une histoire ou de mécaniques de Lite-RPG, c’est un fait. Mais elle semble bien loin, cette époque où un gameplay pouvait faire un jeu, à de rares exceptions près.
Ce que j’aurais aimé, c’est que Devil’s Third ait droit à un reboot, ou même à une suite, avec un peu plus de moyens, et une équipe un peu plus grande, voire talentueuse. Qu’on garde aux commandes Tomonobu Itagaki, et qu’on lui laisse carte blanche. Bon, ok, ça risque de se traduire par de courts vêtements et quelques trucs qui passent un peu moins bien à l’écran en 2022… mais qu’à cela ne tienne, il faudrait pour compenser un univers encore plus loufoque, encore plus kitch, qui semble se prendre encore plus au sérieux malgré son ridicule apparent. S’inspirer de ce que fait Sweary65 n’est pas une mauvaise idée.
Et bien sûr, il faudrait aussi que le gameplay pousse encore plus loin ses ambitions ! Qu’on mette encore plus l’accent sur l’hémoglobine, quitte à ce qu’elle recouvre l’écran par moments, pourquoi pas pendant les finish moves qu’on aimerait encore plus brutaux que dans le titre original. Il faudrait que le titre embarque plus de coups au corps à corps aussi, pour se rapprocher d’un Beat’em All d’une certaine façon. Que le shoot soit revu et corrigé pour qu’aucun problème de caméra ne vienne s’immiscer dans l’action.
Mais surtout il semble évident qu’un nouvel opus devra revoir sa copie au niveau du level design, qui était bien trop dirigiste et franchement limité dans l’original. On ne demande pas un jeu en monde ouvert, ça irait complètement à l’encontre de l’esprit de Devil’s Third. Mais prendre exemple sur ce que fait la concurrence, notamment The Order 1886 ou Gears 5, ne serait pas idiot. En somme, rendre les environnements plus organiques, et effacer un brin l’impression désagréable d’avancer dans un couloir bête et méchant ! Si même Uncharted 4 sait le faire, c’est que ça ne doit pas être bien compliqué !
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Date de sortie : 28/08/2015