Pourquoi on aimerait un retour de Yakuza : Dead Souls ?
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Rédigé par Nathan Champion
Afin de patienter jusqu’à la sortie de Like a Dragon Ishin!, que j’attendais de pied ferme, j’ai décidé de m’essayer à un autre spin-off de la franchise de SEGA, Yakuza : Dead Souls. Un opus dont vous n’avez peut-être jamais entendu parler, quand bien même vous seriez fan du travail du Ryu ga Gotoku Studio, puisqu’il n’a pas fait grand bruit par chez nous. Et en jetant un œil à l’accueil critique assez froid qu’il a reçu, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi. Le jeu tourne à 64 sur Metacritic, ce qui demeure plutôt bas, et même si le User Score est un peu plus généreux, le peu d’infos que l’on trouve sur les ventes les décrivent comme très moyennes.
Pourtant, tout semble réuni pour en faire un must have de la PlayStation 3 ! On reprend les têtes marquantes des épisodes parus à cette époque, le titre sortant après Yakuza 4 au Japon et dans le reste du monde. De quoi promettre aux fans une aventure plus légère encore, qui prendra pour toile de fond une invasion de zombies en plein Kamurocho, avec la sempiternelle abduction de la jeune Haruka en début de partie. Un clin d’œil non dissimulé à une autre série fort connue et appréciée de SEGA, The House of the Dead, dont nous vous parlions il y a quelques semaines dans une autre chronique du dimanche… le hasard fait bien les choses.
Reste qu’à en croire une grosse partie de la presse en 2012, le titre n’est finalement qu’un Yakuza au rabais, qui ne réussit pratiquement rien de ce qu’il entreprend… Un constat qui m’a personnellement semblé à côté de la plaque, manette en mains, puisqu’en dehors d’un changement de gameplay sur lequel nous reviendrons plus bas, Yakuza : Dead Souls fait pratiquement tout comme ses aînés. Le ton est là, les protagonistes que l’on aime aussi, et l’écriture est bonne. Quant au fait qu’il s’agisse d’un jeu de zombies, je ne sais pas vous, mais moi je salue la prise de risque… et je me léchais les babines d’avance, en insérant le disque dans ma PS3.
Note : Ne possédant pas le matériel nécessaire pour la capture de screenshots sur PlayStation 3, nous avons été contraints d’improviser en piochant dans ce que nous trouvions sur le net.
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Il y a beaucoup à dire sur la série Yakuza, ou plutôt Ryu ga Gotoku, que SEGA traduit désormais Like a Dragon, depuis la sortie du très chouette Ishin! partout dans le monde. Souvent comparée à tort à Grand Theft Auto en Occident, la faute à son monde « ouvert » et à son postulat mettant en scène des gangsters japonais, cette franchise complètement à part aura mit un temps fou à s’offrir la visibilité qu’elle méritait outre archipel. Ce qu’elle doit finalement à Judgment et Yakuza 7 : Like a Dragon, qui lui offrirent ce que l’Europe réclamait depuis longtemps, des traductions.
Il n’est toujours pas possible de faire l’intégralité de la série dans la langue de Molière, seul le premier opus ayant été traduit, uniquement dans sa version PS2. Ce qui est aussi valable pour Kiwami, Kiwami 2 et Dead Souls. C’est bien avec le spin-off Judgment, puis l’opus canonique Yakuza 7 que la franchise de SEGA va enfin s’offrir une traduction en bonne et due forme. Et cela change beaucoup de choses, puisque toutes les itérations parues par chez nous rivalisent de complexité dans leur scénario. La localisation anglaise faisant un travail d’orfèvre pour rendre justice aux dialogues originaux, ce qui ne facilite pas leur compréhension chez ceux qui ne lisent pas à la perfection la langue. D’autant que la série est connue pour sa générosité.
Pour ce qui est de Yakuza : Dead Souls, le constat est un brin différent. Comme je l’écrivais dans mon test de Like a Dragon Ishin! (un peu de pub n’a jamais fait de mal), il s’agit d’un opus plus en surface que ses congénères. Ce qui signifie qu’il vous sera possible de le traverser en une petite quinzaine d’heures. On est loin de ce que proposent les épisodes canoniques. Mais cela ne compte finalement que pour le scénario principal, puisque tout le contenu autour n’est pas en reste. On peut même dire que Dead Souls fait pratiquement tout comme ses grands frères.
À commencer par son histoire qui, si elle se révèle bien plus brève que ce à quoi nous a habitué le Ryu ga Gotoku Studio, ne démérite pas au niveau de son écriture. On retrouve des personnages que l’on connaît bien, à commencer par Shun Akiyama que l’on incarnera pendant toute la première partie de l’aventure, Goro Majima, Ryuji Goda, et bien entendu le charismatique Kazuma Kiryu. Un casting de rêve qui va se relayer à la barre pour une aventure condensée, certes, mais offrant quelques beaux moments. Bien que les retournements de situation se voient venir, et qu’on sente à plusieurs moments que le scénario est artificiellement rallongé.
D’une certaine manière, Yakuza : Dead Souls parodie les codes de la série, notamment en débutant une nouvelle fois sur l’enlèvement de la jeune Haruka. Un véritable running gag, qui prend une tournure un peu différente ici, quoique l’aboutissement soit assez similaire à ce que l’on connaît. Mais il s’évertue aussi à faire référence, de manière plus ou moins subtile, à d’autres licences, traitant notamment de morts vivants. Les amateurs de zombies retrouveront donc quelques allusions à du Resident Evil, du Dead Rising, ou même différents films de Romero. Rien de bien tape à l’œil, et l’intention est plutôt louable.
The House of the Dead Souls
L’intention première du studio à la barre peut sembler étrange. En effet, ces vétérans de chez SEGA ont une idée en tête : faire se rencontrer leur franchise phare, Yakuza, et l’un des plus grands classiques des bornes d’arcade du géant japonais, The House of the Dead. Curieux, il faut bien l’avouer, et pourtant pas si bête qu’on pourrait le penser en premier lieu. La licence du Ryu ga Gotoku Studio étant, de toute façon, très tournée arcade et humour absurde, il y avait de quoi pondre une aventure drôle, outrancièrement gore, et au gameplay facile d’accès. Et d’une certaine façon, c’est ce que nous avons eu.
Parce que comme ses homonymes, Yakuza : Dead Souls est drôle, absurde, et bien écrit. Et comme tout jeu de zombie qui se respecte, il ne lésine pas sur l’hémoglobine, le démembrement, l’explosion très graphique de boîtes crâniennes… Quant au gameplay, qui cherche donc à s’inspirer de The House of the Dead, on est effectivement sur quelque chose qui se prend en main aisément. Une touche pour tirer, une touche pour viser tout ce qui bouge dans une direction donnée, et un joystick pour bouger… vous remarquerez que le titre de SEGA fait mieux que Resident Evil 5 à ce niveau, en permettant à ses protagonistes de se mouvoir tout en tenant une arme. Malheureusement…
Malheureusement on est très loin du degré de maîtrise d’un Capcom au niveau des mécaniques de Third Person Shooter. Parce qu’on peut effectivement dire que Yakuza : Dead Souls est passé de Beat’em Up à jeu de tir, malgré la présence de quelques objets du décors (notamment des armes blanches) à utiliser en combat. Or, il faut bien reconnaître que le résultat manque de précision, que le retour manette en mains est peu agréable, que la caméra fait un peu n’importe quoi. Bref, le résultat peine à convaincre, et c’est finalement ce qu’a le plus retenu la presse à l’époque. Ce qui est parfaitement compréhensible.
Il faut dire aussi que l’aspect graphique peine à convaincre. Non content de reprendre le moteur de Yakuza 4, reconnu comme un peu dépassé en 2011, le titre fait preuve d’une technique défaillante dès lors que trop d’ennemis sont à l’écran, ou lorsque l’on utilise certains outils de mort un peu trop voraces (comme des bobonnes de gaz). Ce qui se traduit par un framerate en dents-de-scie, ralentissant drastiquement par moment, jusqu’à provoquer des lags très désagréables. Ajoutez à cela des décors post-apocalyptiques inégaux, et une propension à nous faire arpenter des couloirs intérieurs peu inspirés, et vous obtenez une réalisation qui fait tache. Difficile de se dire que Yakuza : Dead Souls est sorti la même année que Far Cry 3, Dishonored ou Max Payne 3.
Mais les développeurs étaient conscients des lacunes du projet, surtout au niveau de son gameplay, et ont adapté en conséquence quelques mécaniques. Ainsi, ramasser les objets au sol se fait sans pression de touche, juste en marchant dessus. L’esquive peut être améliorée, et permet de se sortir de pratiquement toutes les situations sans encombre, ce qui contrebalance un brin les problèmes de caméra. Le jeu est généreux en points d’expérience, qu’il distribue au combat, mais aussi à la fin des missions principales (présentées sous la forme de niveaux) en fonction d’une notre attribuée à nos performances. Dead Souls est résolument arcade.
Pourquoi un retour ?
Contrairement à beaucoup de nos chroniques, celle-ci est un brin nuancée. Et pour cause, Yakuza : Dead Souls souffre d’une technique dépassée et d’un gameplay peu intéressant, qui manque d’un petit quelque chose pour le rendre agréable. Or, si l’on peut passer outre un aspect graphique désuet, un peu comme chez toutes les productions de Suda51 (papa de No More Heroes et Killer7), c’est plus compliqué lorsque la prise en main ne suit pas. En cela, ce spin-off signé Ryu ga Gotoku Studio est agréable à suivre pour son histoire, propose un contenu annexe intéressant, mais se révèle trop souvent frustrant.
Ainsi, je ne peux guère vous conseiller d’investir dans la version originale, qui se vend quand même aux alentours d’une trentaine d’euros en occasion. Parce que malgré le fait que tout amoureux de la franchise y prendra assurément son pied à suivre un Goro Majima au top de sa forme, et un Kazuma Kiryu fidèle à lui-même, il y a des chances pour que son gameplay rebute rapidement quiconque l’essaierait aujourd’hui. Ce qui est quand même dommage, quand on constate toutes les qualités que le jeu aligne, ne serait-ce que concernant son contenu. Pour un spin-off, il fait fort, même s’il n’est pas au niveau d’un épisode canonique.
Ainsi, c’est plutôt pour un retour officiel de cet opus que je compte militer. Une version remise aux goûts du jour, comme l’a fait le Ryu ga Gotoku Studio avec Like a Dragon Ishin! plus tôt dans le mois. Plus belle, évidemment, pourquoi pas en reprenant le même moteur, à savoir l’Unreal Engine 4. Mais inutile d’en faire trop : une refonte graphique simple, sobre, qui permette simplement de ne pas s’érafler la rétine à chaque instant, ou de ne pas voir le framerate sauter sans parachute à chaque fois que plus de cinq ennemis sont affichés à l’écran. Pour le reste, peut-être un peu plus de détails dans les environnements intérieurs, et un level design un peu moins dirigiste, c’est bien tout ce que l’on peut exiger.
Mais bien sûr, c’est au niveau du gameplay que Dead Souls devrait revoir sa copie. Avec pour commencer un aspect TPS à repenser complètement. La visée doit être implémentée, avec un réticule dédié, et pas simplement une touche pour lever son arme bêtement et allumer tout ce qui se trouve en face. Il faudrait s’inspirer de ce qui se fait de mieux dans le genre, par exemple Gears of War ou Ratchet & Clank, quitte à virer complètement dans le surréaliste et l’arcade. Mais inutile de changer tout ce qui tourne autour, à savoir un système d’expérience assez grisant, un armement bien fourni à améliorer, et de rares objets du décors à utiliser en combat. Pourquoi pas faire appel à Platinum Games ?
Inutile de retoucher son scénario, par ailleurs, ou sa mise en scène. Bien que celle-ci ne soit pas toujours très inspirée, elle fait parfaitement le travail, et permet aux différents doubleurs de briller, en offrant aux protagonistes leur charisme reconnaissable. En somme, tout ce que je demande, c’est un travail assez similaire à ce qu’a connu Ishin, qui conserve pratiquement trait pour trait la recette de l’opus original, en plus joli. Mais avec une emphase placée sur le gameplay, qui ne doit à aucun prix revenir tel quel, sous peine de desservir une nouvelle fois cet épisode injustement oublié.
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