Le Guerrier des Altaï : Présentation et avis sur le livre de chez Bragelonne
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Rédigé par Nathan Champion
Si vous êtes amateur de littérature orientée fantasy, alors il y a peu de chance pour que vous soyez passés à coté de Robert Jordan. L’auteur de la saga culte La Roue du Temps a en effet écoulé des dizaines de millions de romans à travers le monde, cela grâce à ses talents de conteur reconnus. Mais si on le connaît avant toute chose pour cette série de romans exceptionnelle, que certains comparent même à l’œuvre de Tolkien – et qui continue d’ailleurs sa route grâce au concert de sa veuve et de Brandon Sanderson – ce grand homme qui s’est éteint en 2007 a aussi écrit d’autres ouvrages.
Parmi eux, quelques travaux affiliés à l’univers de Conan le Barbare, notamment, ainsi que la série des Fallon, jamais parvenue jusqu’à la francophonie, et écrite à quatre mains. Récemment, un certain Le Guerrier des Altaï faisait surface, contre toutes attentes. Un roman que Robert Jordan écrivait bien avant de se lancer corps et âme dans La Roue du Temps, et que Bragelonne nous livre cette année dans un format qui le met joliment en valeur.
À grand renfort de citations d’autre auteurs reconnus en première page, notamment George R.R. Martin ou Brent Weeks, Bragelonne – éditeur à qui l’on doit le récent ouvrage sur Death Stranding ou encore T.I.M.E Stories – nous a concocté une présentation qui fait clairement saliver. Tout en n’oubliant pas de rappeler en grandes lettres qu’il s’agit d’une œuvre rédigée par l’homme derrière La Roue du Temps, bien que les deux n’aient absolument rien en commun. Alors, que vaut ce roman écrit par Jordan avant de devenir le célèbre écrivain mondialement connu ? Pour le savoir, suivez le guide.
Sommaire
ToggleJe me nomme Wulfgar
Ce roman prend place dans un univers bien à lui. Au centre de son histoire, un certain Wulfgar, chef d’un détachement d’un millier de guerriers barbares de la tribu des Altaï. Robuste leader, que ses hommes suivent pour son charisme plutôt que par devoir, il entraîne ses troupes depuis des années à piller les caravanes de marchands qui s’aventurent, de près ou de loin, dans La Plaine. Un lieu terrible, habité notamment par des bêtes sauvages et féroces, et où voyagent en permanence plusieurs tribus, qui la considèrent en quelque sorte comme leur foyer.
À l’est de La Plaine, se tient une ville fortifiée et imprenable, nommée Lanta. Du haut de ses deux murs d’enceinte épais comme plusieurs hommes, les Lantaniens se croient en sécurité, face à toute menace potentielle. Même face aux barbares, avec qui ils ont pris l’habitude de commercer, sachant pourtant pertinemment d’où proviennent leurs provisions volées et leurs esclaves récemment enchaînés. Il faut dire que cette cité gigantesque est convoitée depuis sa construction, et que nombreuses sont les armées à s’être cassées les dents sur ses remparts.
Un matin, alors qu’il sillonnait La Plaine comme à son habitude, Wulfgar perçoit des signes de mauvaise augure. Le placement des lunes, pour commencer, mais aussi la présence d’un gromit à deux orteils sous sa tente. Une créature qui ne nous sera pas décrite précisément, comme beaucoup d’autres au cours de ce récit. Il faut croire que Jordan aimait, alors, à laisser l’imagination du lecteur faire sa tambouille. Certains y verront peut-être un défaut, y trouvant un obstacle à l’immersion. D’autres, au contraire, auront l’occasion de s’imaginer les bêtes de leurs fantasmes.
Suite à cette augure inquiétante, Wulfgar, son frère Harald, et un détachement de leurs barbares respectifs se rendent à Lanta. Sur place, ils sont particulièrement mal reçus ; eux qui, par le passé, venaient en paix et repartaient sans histoires. Au cœur d’un banquet, donné par les deux reines de la cité, ils s’en prennent même à ces dernières, se sentant injuriés par la façon ingrate dont on les traite. Wulfgar menace même l’une d’entre elles d’en faire son esclave personnelle, ce qui n’est visiblement pas du goût de la royauté.
Comprenant qu’ils ne sont plus les bienvenus, et craignant les retombées suite à leur comportement déplacé, les deux hommes et leurs soldats se carapatent à toute vitesse de Lanta. Mais c’est trop tard, la machine est lancée, et ils ne tarderont pas à être, tous deux, au cœur d’un conflit qui les dépasse complètement. Wulfgar verra ses menaces se retourner contre lui, en étant attaqué par un assassin dans son propre camp, tandis que Harald disparaîtra purement et simplement, probablement enlevé par la couronne. Heureusement, le héros semble avoir les dieux de son coté.
Ainsi, alors que tout semble perdu, La Plaine s’asséchant et les Lantaniens voulant la peau des Altaï, une vagabonde nommée Elspeth fera son apparition. Venue d’un autre monde, aux coutumes bien différentes et ne connaissant pas la magie, cette jeune femme posséderait la clé pour permettre à Wulfgar et les siens de rester en vie, et peut-être même de gagner une guerre que tout indique pourtant perdue d’avance. Cela n’empêchera pas ce héros, pourtant guerrier reconnu et endurci, de se faire sauvagement maltraiter par le destin.
Roman de jeunesse
Difficile de dire à quel moment de sa vie Robert Jordan a pu écrire Le Guerrier des Altaï. Mais une chose est sûre : c’était bien avant La Roue du Temps. Nous l’aurions en effet deviné sans même que Bragelonne le précise sur la quatrième de couverture, au vu du style quelque peu hésitant adopté tout au long du récit. Jordan étant connu comme l’un des maîtres incontestés de la fantasy – reconnu pour sa plume comme pour son imagination – il apparaît clairement que ce roman n’a pas pu être rédigé par l’auteur aguerri dont on célèbre encore le travail treize ans après sa mort.
En effet, derrière une belle présentation fournie par l’éditeur, qui ne fera pas tâche dans votre bibliothèque, ce roman sent l’écrit de jeunesse à plein nez. Hésitant, pour commencer, avec des informations pas toujours bien amenées, des personnages dépeints parfois trop, parfois pas assez. Un monde qu’on peine aussi, quelque peu, à se visualiser pleinement avec les descriptions données par l’auteur. Heureusement, sur ce point, l’ouvrage propose une petite carte quatre pages après la couverture, joliment dessinée.
L’histoire de Wulfgar et de ses hommes est intéressante, difficile de le nier. On le prend d’ailleurs vite en pitié, ou on sent monter sa rage et ses élans héroïques en même temps que Jordan les peints. Ce qui est en grande partie dû au fait que le récit est écrit à la première personne. Un choix assez rare, il faut le reconnaître, notamment parce qu’il n’est pas toujours aisé de se projeter assez pour se le permettre. Mais à ce niveau, l’auteur sait ce qu’il fait, c’est indéniable, malgré ses quelques hésitations parfois gênantes.
Néanmoins, ce roman n’est pas dénué de défauts, c’est indéniable. Avec pour commencer un style loin d’être transcendantal, hésitant donc, des tournures de phrases pas toujours bien pensées. Que ce soit clair, Jordan nous a habitué à bien mieux. Et c’est avant tout ce point qui nous fera dire qu’il s’agit d’un roman de jeunesse, écrit avec un talent pas encore pleinement développé. Parce que l’on sent bien l’imagination du roi de la fantasy derrière ces lignes, il ne manque finalement que de maîtrise pour relier tous les événements dans un enchevêtrement de phrases joliment construites.
Faut-il craquer pour Le Guerrier des Altaï ?
Que ce soit bien clair : si vous espérez trouver dans Le Guerrier des Altaï un récit du même acabit que ce que propose la série La Roue du Temps, alors vous pouvez passer votre chemin. Non, ce roman que l’on imagine de jeunesse n’est pas un opus exceptionnel, bien qu’il laisse déjà entrevoir les immenses talents de narration de Robert Jordan. On lui reprochera avant tout sa construction, pas des mieux pensées, et nombre de tournures de phrases moins littéraires que ce à quoi nous a habitué ce génial romancier.
Acheter Le Guerrier des Altaii sur AmazonCela étant dit, il s’agit d’une première immersion intéressante dans le monde de Robert Jordan, qui dépeint ici des coutumes et des personnages originaux, quoique souvent expédiés un peu vite. On le recommandera donc, peut-être, avant tout aux jeunes lecteurs – malgré quelques portions un peu crues – ou aux amoureux de l’auteur, prêts à passer outre les défauts de ce récit.
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