Networking, Intelligence Artificielle et Rétro-Gaming : le salon professionnel bordelais Horizon(s) signe une seconde édition réussie
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Rédigé par Florian
Prenant place pour la seconde fois au cœur de la capitale de Nouvelle-Aquitaine, Bordeaux, le salon Horizon(s) Bordeaux Videogames Forum s’est tenu ces 27 et 28 septembre en co-organisation avec SO Games, ICO Partners et Côte Ouest. L’occasion pour ce salon davantage tourné vers les professionnels de l’industrie de faire le point sur le milieu du jeu vidéo aujourd’hui mais aussi d’aborder le futur en traitant de sujets centraux comme l’intelligence artificielle. Nous nous y sommes rendus avant d’assister à un concert rétro-gaming orchestré par l’Opéra National de Bordeaux, en association avec le forum Horizon(s).
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ToggleDe Masterclasses en conférences avec l’IA au cœur des enjeux
Horizon(s) est un jeune salon réservé aux professionnels, davantage orienté business et réseautage, mais aussi dans lequel des conférenciers du monde entier viennent s’exprimer sur divers sujets. Pour cette seconde édition, les deux thèmes phares étaient un état des lieux de l’industrie à date en France mais aussi à l’international, sur notamment les tractations financières, les financements, le transmédia, l’édition etc. mais aussi l’avenir, concernant notamment l’Intelligence Artificielle (IA), définitivement au coeur des préoccupations du milieu.
A travers une vingtaine de focus ou tables rondes, ces conférences, volontairement très techniques car s’adressant à un public professionnel averti, venu débattre, défendre son avis et présenter ses retours d’expérience, grâce à la présence de nombreux acteurs de différents univers. Professionnels provenant cette année de toutes les régions de France mais aussi de l’étranger, avec de nombreux conférenciers et spectateurs américains, d’Europe de l’Est mais aussi vietnamiens, ou associations régionales, pour renforcer cette volonté de placer Bordeaux au coeur du jeu vidéo mondial.
L’IA plus que jamais au centre des réflexions de l’industrie, avec ses bienfaits mais aussi ses doutes et craintes, comme nous l’exprime Laura Gouthez, présidente de SO Games :
« L’Intelligence artificielle générative est en plein essor, notamment avec ChatGPT, provoquant un bouleversement du secteur. La volonté est ici de se prémunir, de poser les aspects éthiques pour réussir à s’adapter à l’IA et l’intégrer à nos métiers plutôt qu’à la rejeter face à son explosion récente. »
Arnaud Richard, de chez Shiro Games, nous a exprimé la volonté du studio d’utiliser l’intelligence artificielle avec parcimonie, comme c’est déjà le cas dans les jeux procéduraux, avec une volonté de continuer à mettre en avant le talent des artistes, tout en suivant les débats éthiques et en surveillant les nouvelles technologies qui émergent (génération de voix de PNJ traduites automatiquement incluant la synchronisation labiale par exemple) pour rester compétitif tout en protégeant la propriété intellectuelle et veillant à la régulation européenne et internationale, une sphère internationale qui ne possède pas forcément le même regard sur l’IA que nous français et européens.
Parallèlement à ces conférences faisant intervenir près d’une trentaine de conférenciers se succédant tout au long de ces tables rondes, Horizon(s) a également souhaité la tenue de masterclasses, dirigées par Ubisoft Bordeaux et Shiro Games, à destination des étudiants, dans des salles plus intimistes, notamment au sujet de la génération procédurale ou la création d’un monde ouvert par une petite équipe. Ces cours un peu particuliers étaient également l’épicentre de la réflexion autour de l’élaboration du forum Horizon(s) et de son aspect networking et recrutement.
Finalement, ce sont plus de 320 personnes qui ont répondu présents cette année, bien plus nombreux que l’année dernière, preuve en est que ce type de regroupement est demandé et apprécié par l’industrie, qui ne propose pas d’autres évènements de ce format sur le territoire national, hormis le GameCamp de Lille qui ne propose pas cette orientation business/networking que veut enrichir Horizon(s), et loin d’une Paris Games Week quasi exclusivement tournée vers le grand public.
Bordeaux, future capitale mondiale du jeu vidéo ?
Nous l’avons vu, dans le cadre du forum, nous avons pu nous entretenir avec Laura Gouthez, la nouvelle présidente de SO Games, une entité relevant de la région Nouvelle-Aquitaine, venant de la fusion de Bordeaux Games et d’Angoulême Jeu Vidéo, les deux villes pionnières du jeu vidéo dans la région. Elle s’exprime sur la place de Bordeaux aujourd’hui dans l’industrie :
La région Nouvelle-Aquitaine, mais aussi Bordeaux Métropole et Angoulême ont « très bien compris l’intérêt et la portée que peut avoir le jeu vidéo, désormais la première industrie culturelle au Monde, et mettent ainsi en place des initiatives et nous soutiennent pour faire en sorte que Bordeaux, Angoulême et la Nouvelle-Aquitaine soient un des pôles phares du territoire national ». Laura Gouthez
Mais SO Games, ce n’est pas qu’Horizon(s) et les autres événements soutenus par l’association. Grâce à son équipe, Laura Gouthez mène parallèlement plusieurs gros chantiers, incluant notamment l‘inclusivité, afin d’aider les femmes à rejoindre plus facilement l’industrie, mais aussi la sobriété numérique, l’association étant en plein labeur en participant à un consortium pour créer le premier outil de mesure environnementale pour le jeu vidéo, JYROS, qui devrait être disponible dès le début du mois d’octobre et qui permettra aux équipes de développement de mesurer leur impact carbone, pour répondre aux nouvelles normes gouvernementales et du CNC.
SO Games est également fortement impliquée dans la formation et la fédération des écoles publique et privées pour assortir les enseignements aux besoins locaux, avec notamment l’arrivée de Gaming Campus dès septembre 2024, troisième ville d’implantation de l’école après Paris et Lyon, là où l’ENJMIN d’Angoulême continuera de renforcer son statut de seule école publique du jeu vidéo en France.
Finalement, avec la tenue de ce forum Horizon(s) dont le bilan est déjà très fortement positif, l’association ainsi que la région disposent désormais de fortes ambitions pour renforcer également la visibilité internationale avec pour objectif ultime à long terme que Bordeaux en tant que plus grande ville de la région, mais globalement la région Nouvelle-Aquitaine soient le lieu de choix pour parler du jeu vidéo français.
Networking et recrutement comme fil rouge de l’événement
Pour les professionnels déjà établis, une toute autre opportunité s’offrait à eux puisque grâce à l’application Brella, il leur était possible de réserver un créneau de networking, afin de se rencontrer dans un cadre plus intimiste et échanger sur des pratiques, diversifier les approches, proposer d’éventuels partenariats et autres associations de studios ou de développeurs, car plusieurs décideurs de grosses structures étant présents sur place. Une feature très appréciée des professionnels présents et qui a connu un sacré essor entre la première et cette seconde édition d’Horizon(s) et qui tendra donc à évoluer fortement sur les prochaines sessions du forum.
Car s’il est une chose qui tenait absolument aux organisateurs de ce nouveau forum Horizon(s), c’était la possibilité pour les professionnels présents d’échanger avec des pairs, mais aussi des décideurs et autres recruteurs. Effectivement, via Pôle Emploi et l’AFJV notamment et grâce à la présence d’offres publiées en amont du salon, plus de 200 candidatures ont été déposées, sélectionnées et triées en fonction de leur intérêt et leur potentiel.
Et ce sont près d’une centaine de personnes qui ont ainsi pu accéder à des entretiens en bonne et due forme, au coeur de l’Opéra de Bordeaux, au plus près de leurs futurs collègues donc, afin d’espérer décrocher un poste au sein d’un des studios partenaires de ce job dating un peu particulier, tels qu’Asobo Studio, Ubisoft Bordeaux ou encore Shiro Games.
Shiro Games, partenaire d’Horizon(s), co-organisateur du concert Rétro-Gaming (voir plus bas) et acteur désormais majeur du paysage vidéoludique bordelais, portant en ses gênes l’évolution régionale depuis sa création en 2012. De studio presque individuel à plus de 60 personnes désormais aujourd’hui, Shiro Games est notamment à l’origine de jeux comme le très récent Dune: Spice Wars (un 4X disponible depuis 14 septembre après une phase d’accès anticipé) mais aussi Wartales (déjà vu lors de nos précédents AG French Direct), Evoland ou encore Northgard et Darksburg.
Mais lors de notre entrevue, Arnaud Richard, Global Marketing Director chez Shiro Games (après plusieurs années chez Bethesda France, Bandai Namco et Electronic Arts) nous indiquait que le studio « tient à son approche artisanale sans avoir l’ambition de devenir un studio de 200 personnes » tout en diversifiant son expertise en ouvrant en 2021 un label publishing sous le nom Shiro Unlimited pour accompagner les plus petites productions, les conseiller, les mentorer et leur donner une visibilité tout en garantissant un éclectisme des genres et des expériences, comme le très bien reçu Decarnation de Studio QDB ou encore le prochain Abyssals de Overpowered Team.
Du JV à l’Opéra, il n’y a qu’un pas… et c’est grandiose
Notre périple bordelais s’est clôturé en assistant à la seconde et dernière représentation d’un concert se tenant au coeur de l’Auditorium de Bordeaux ayant pour thème le rétro-gaming. La trentaine de membres de l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine présents sur scène ont ainsi pu jouer durant près de deux heures des extraits provenant tout droits de bandes originales de jeux des années 80-90, réorchestrées pour l’occasion pour coller aux standards et aux impératifs d’un orchestre symphonique, comme cela a pu être le cas lors de la Paris Games Week Symphonic en 2018.
L’association de ces deux univers semblait pour la moins surprenante mais il faut bien avouer que ce fut une incroyable réussite, le tout sous le commandement de la jeune cheffe russe Hannah von Wiehler, dont ce fut les premières représentations au sein de l’Auditorium de Bordeaux cette semaine. Malgré sa jeune carrière, elle est parvenue à diriger son orchestre d’une main voluptueuse tout en apportant un dynamisme apprécié du public et une partition parfaite.
Au programme nous attendaient des jeux comme Super Mario (1985), Pokémon Jaune (1996), Super Castlevania IV (1986), Earthworm Jim (1994) ou encore Tomb Raider (2001 – version PlayStation). Mais nos moments favoris ont incontestablement été ceux mettant en lumière Street Fighter II Turbo (1991) et Tetris (1984), l’orchestre en trans pour délivrer une prestation provoquant l’ovation d’un public comblé, assortis de très longs applaudissements après chacun des 17 morceaux résonnant dans l’Auditorium à l’acoustique élégante et à la mise en lumière raffinée.
Et bien que la proposition était déjà fort originale, l’Opéra de Bordeaux et Shiro Games, ont tenu à associer le public au spectacle qui se jouait devant eux. Effectivement, après un tirage au sort se tenant suite aux inscriptions disponibles avant le concert, une vingtaine de spectateurs de tout âges ont pu venir jouer aux jeux dont il était question directement sur scène, la plupart sur consoles d’origine, et retransmis en direct sur écran géant, pour provoquer également un choc transgénérationnel.
L’occasion pour le reste du public d’associer ces deux arts complets de manière dynamique et vivante, l’assistance s’exprimant à coup d’onomatopées ou d’applaudissements quand il s’agissait d’une séquence de jeu réussie, ratée ou au contraire étonnante. Un décalage évident avec l’atmosphère qui règne habituellement dans ce temple de la musique classique, mais une fois n’est pas coutume, l’assemblée étant relativement jeune ce soir là.
Et il faut dire que même les officiels se sont prêtés au jeu, puisque Emmanuel Hondré, Président de l’Opéra de Bordeaux et Harmonie Lecerf-Meunier, adjointe au Maire de Bordeaux en charge de l’accès aux droits, des solidarités et des seniors, Vice présidente de l’Opéra de Bordeaux et grande gameuse depuis de longues années, sont montés sur scène pour donner de leur personne, s’essayant respectivement à Tetris et à The Legend of Zelda : A Link to the Past (1986). Des séquences appréciables pour démocratiser une fois de plus l’industrie vidéoludique.
Ce concert fut donc une réussite sur tous les plans, réunissant chaque soir plus de 1200 personnes, alors à quand un nouveau concert sur des musiques de jeux vidéos contemporaines ?
Nous tenons à remercier chaleureusement Amélie et Rémy pour leur accueil durant cette journée au plus près des développeurs et entreprises qui contribuent à faire rayonner le jeu vidéo en France et à l’international. Nous remercions également Laura Gouthez et Arnaud Richard pour leur temps consacré afin de répondre à nos questions ainsi que l’Opéra de Bordeaux pour nous avoir accueillis en ce lieu iconique. Crédit photos : Valentin Videgrain et photos personnelles.
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