Pourquoi on aimerait voir un reboot de Bloody Roar ?
Publié le :
2 commentaires
Rédigé par Neomantis Dee
Depuis le retour de la franchise Mortal Kombat en 2011, puis avec l’engouement suscité par Dragon Ball FighterZ, le jeu de combat semble reprendre une place importante dans le cœur des joueurs, rappelant l’âge d’or du genre dans les années 90. Que ce soit en 2D, avec par exemple Samurai Shodown ou récemment Guilty Gear Strive, mais aussi sur la 3D, le retour est généralement gagnant, en plus d’être boosté par les possibilités online. On pense à Tekken 7 qui a passé la barre des 7 millions de copies écoulées dans le monde, et qui s’offre une Legendary Edition à partir de décembre, mais aussi Soulcalibur VI qui s’est refait une petite santé après deux épisodes décevants.
Tandis que récemment Virtua Fighter a fait son grand retour, cela nous a donné l’envie de vous parler d’une autre licence culte pour toute une génération, Bloody Roar. Probablement inconnue pour les moins de 25 ans, la licence aura su marquer les joueurs qui ont eu l’opportunité de s’y essayer. Ce sera au total environ 1 million d’exemplaires écoulés, à peu près autant que l’ensemble des jeux Guilty Gear X. Un score de vente convaincant mais pas suffisant pour survivre face à la féroce concurrence.
Sommaire
ToggleL’ère animale
Initialement publié sur Arcade en 1997, Bloody Roar a été dévoilé lors de l’E3 de l’époque sous le nom Beastorizer. L’univers graphique du jeu ainsi que le charadesign des personnages provient du travail de Mitsuakira Tatsuta et de Shinsuke Yamakawa. Porté sur PS1 en 1998, la série est développée par Hudson Soft, le studio derrière le cultissime Bomberman.
Bloody Roar est un jeu de combat en 3D dans la pure lignée de Virtua Fighter et Tekken, dont il reprend les fondamentaux. La particularité de la licence d’Hudson Soft, c’est de mettre en scène des personnages ayant la capacité de se transformer en animal en plein combat. Ces formes animales apportent des bonus de dégâts, de résistances et de vitesses, mais surtout de nouvelles attaques et un coup spécial dévastateur susceptible de renverser une situation, et ne manquant pas d’insuffler sa dose d’adrénaline. Chaque transformation dispose évidemment de ses propres spécificités en lien avec l’animal correspondant. Entre forme humaine et animale, c’est techniquement deux couches de gameplay qui se superposent sur l’ensemble du roster.
Contrairement à ses concurrents, Bloody Roar ne recherche aucunement le réalisme et la complexité, ce sont le dynamisme, le fun et l’accessibilité qui sont privilégiés, au détriment d’une certaine profondeur de gameplay. A une époque où les jeux de combats sont légion, les développeurs ont choisi de miser sur une ambiance sombre, des mécaniques de jeux uniques et des gerbes de sang omniprésentes dès le deuxième opus. On peut ainsi dire qu’avec Mortal Kombat, la licence fait partie des rares du genre ouvertement destinées à un public plus mature.
Et que dire des bandes-son excellentes dans la quasi totalité des jeux de la franchise, avec des morceaux de rock dynamiques et des rythmiques heavy qui annoncent le tempo à suivre, faisant ressortir toute la bestialité au fond de nous. Si la franchise dispose de nombreuses qualités évidentes, il va de soit qu’elle finira par se faire enterrer par les mastodontes que sont et étaient Soulcalibur et surtout Tekken. Ces derniers ont clairement imposé leur suprématie sur le jeu de combat au début des années 2000, bien plus que Virtua Fighter, pourtant le père du genre sur la 3D. Bloody Roar s’achèvera en 2003 après tout de même 6 jeux sortis.
Du sang et des griffes
Bloody Roar c’est un univers obscur et fascinant. L’histoire du jeu est centrée sur un groupe de guerriers appelés les « zoanthropes » et qui ont le pouvoir de se transformer en créature mi-humaine mi-bête. Ils seront opposés à la Tylon Corporation, une organisation clandestine qui désire utiliser les zoanthropes comme armes et asservir le monde avec ses idéaux. Au fil des opus, les enjeux vont prendre plus de proportion et il sera question d’affrontement entre humain et bête, rappelant ce que peuvent faire les X-Men dans les comics, notamment dans les rapports conflictuels entretenus entre les humains et les mutants. On pensera également, et logiquement, aux enjeux qui guident les agissements de la famille Mishima dans la licence de Bandai Namco.
Côté gameplay, c’est du classique, dès le premier épisode les bases sont posées et clairement définies. La garde est automatique et s’active manuellement avec arrière, il y a une touche poing, une touche pied, également un bouton choppe, puis un bouton réservé à la transformation animale. Comme dit plus haut, une fois en zoanthrope, le personnage acquière de nouvelles techniques, et peut même régénérer de sa vie. Une fois transformés, les combattants deviennent logiquement plus lourds et retombent donc plus facilement au sol. Sans parler des possibilités de rebonds contre les murs et de sauts plus puissants. La transformation va dépendre d’une jauge de bestialité qu’il faudra remplir en encaissant des coups ou en infligeant des dégâts en forme humaine. On aperçoit alors toute une dimension stratégique, puisque vous retrouverez votre forme humaine une fois la jauge vide.
Bloody Roar 2 : Bringer of the New Age reprend la même recette et l’améliore. Le jeu est plus beau et plus fluide, plus accessible, mais aussi plus bourrin. La licence, qui n’est pas réputée pour sa finesse, va choisir de miser sur un gameplay agressif, sauvage, qui va jusqu’à conditionner les joueurs qui vont alors laisser leurs instincts primaires prendre le contrôle de la manette et bourrer les boutons dans tous les sens. Ce qui est généralement plutôt efficace. Cette suite marque aussi l’arrivée d’un mode story pour chaque personnage, ainsi que 3 nouveaux combattants, pour un total de 11. Ce mode scénarisé est mis en scène efficacement, offrant un vrai background aux protagonistes. On retrouve aussi un mode survie et un mode arcade. Un contenu minime qui sera une des tares de la saga. Ceci dit, à l’instar de Tekken 2, ce second Bloody célèbre le véritable lancement de la franchise en supplantant en tout point son prédécesseur. Autre point notable, graphiquement les jeux ont toujours été maîtrisés, mais c’est surtout vis-à-vis de la qualité des animations en combat, ici particulièrement saisissantes, sans oublier cette rage, ce dynamisme qui se dégage des affrontements qui rendent l’expérience si marquante et originale.
Au moment de sa sortie en 2000, Bloody Roar 3 est le seul jeu de combat proposé sur PlayStation 2. Toujours dans la même logique de production, Hudson Soft n’innove pas et se contente une fois encore d’améliorer le gameplay et les graphismes qui régalent toujours autant. Le passage sur la nouvelle génération de consoles est réussi et pour une fois les combats gagnent réellement en intensité et en complexité. Avec les transformations et les esquives, il faudra bien planifier ses actions pour vaincre, tout ça dans des combats au rythme effréné. De fait, cet opus est le plus abouti de la trilogie, et ce malgré la disparition du mode story et d’un contenu qui fait tâche, tout autant que les décors franchement dépassés. Il parvient à consolider des acquis, à les sublimer, prouvant qu’il y a une signature Bloody Roar sur laquelle il faut surfer.
Un dernier cri
Pour en parler rapidement, Bloody Roar Primal Fury est un épisode spécial exclusif à la Gamecube et qui sera porté sur Xbox en 2003, sous l’appellation Bloody Roar Extreme. Toujours plus beau et plus fluide, le roster passe maintenant à 16 personnages, devenant enfin légitime quoique toujours inférieur à la concurrence. Si le mode story est une fois de plus mis aux oubliettes, en remplacement le mode arcade se voit affublé de cinématiques pour la première fois. Le titre apporte aussi un mode team battle prenant, inspiré de Tekken Tag. Un titre bien fourni mais qui convainc moins dans son gameplay que son prédecesseur.
Le dernier opus sera donc Bloody Roar 4, paru lui aussi en 2003 sur PS2. Cette fois-ci, le titre affiche 18 personnages jouables en plus d’apporter un ajout de taille, le mode carrière. Dans ce dernier, vous pouvez acheter des compétences afin d’améliorer les statistiques de vos combattants. Une customisation bien pensée et intéressante. Complet et novateur pour la licence, ce mode offre un challenge élevé. De surcroît, des personnages sont à débloquer en mode arcade et lui offrent un regain d’intérêt. Les décors sont ici plus détaillés, mieux inspirés et les personnages restent une fois de plus stylés. Il en va de même pour les transformations, impressionnantes et charismatiques.
Signature de la série, les affrontements de ce Bloody Roar 4 sont spectaculaires avec des effusions de couleurs et d’effets de lumières qui rendent l’expérience des plus jouissives. Les combats sont toujours vifs, violents et addictifs, de plus la dimension stratégique est ici exploitée comme il se doit. Plus complexe, car surfant sur la lancée du 3, ce quatrième opus vous obligera à switcher constamment entre vos formes humaines et animales pour survivre, puisqu’il intègre une nouvelle barre de vie spécialement destinée aux transformations. On regrettera juste les arènes un tantinet petites vis-à-vis de l’intensité des combats. Malheureusement enfermé dans ses défauts et son manque de contenu, bien que cet opus fasse un effort considérable, la licence n’aura pas su trouver un public suffisant, et à temps, reléguée aux oubliettes à cause d’un Tekken qui propose des alternatives au contenu plus généreux et avec une meilleure courbe d’apprentissage.
Pourquoi on aimerait un remake/reboot ?
Difficile de dire que Bloody Roar a laissé une trace notable dans l’industrie vidéoludique, plus particulièrement sur la scène du jeu de combat, même si des petits clins d’œil sont décelables. Cependant, la folie du gameplay et le délire des transformations animales ont quelque chose d’incroyablement stylé et fascinant. Les joueurs qui ont passé du temps sur les jeux de la licence s’en souviennent forcément et ont, eux, été durablement marqués. Avec son système de combat nerveux et fluide sans temps mort, Bloody ne laisse pas de place pour la réflexion et privilégie l’instinctivité, la réactivité, faisant passer la série Tekken pour un jeu lent. Ce faisant, la franchise est un exemple de facilité de prise en main, exception faite du dernier épisode plus technique que ses petits frères, tout joueur étant capable de maîtriser rapidement un personnage. Dès lors, la qualité des animations alliée aux character design, ainsi que les mises en scène bien pensées des attaques ultimes, se suffisent presque à eux-mêmes. En effet, ce sont bien l’univers graphique et la bestialité, la sauvagerie qui transparaît du gameplay et des affrontements qui font l’essence de ce qu’est Bloody Roar.
Qui plus est, la réalisation a toujours été un point fort de la saga d’Hudson Soft. Les zoanthropes sont systématiquement superbement modélisés, au point que l’on peut retrouver des gestuelles et postures dans Tekken 7, comme avec les personnages de Katarina et Anna. Citons aussi les Rage Drive et Power Crush dans ce même Tekken, qui renvoient explicitement à des attaques spéciales présentes dans Bloody Roar. Puis, les transformations sont dingues en tout point, cristallisant à elles-seules toute la puissance de la saga. Parce qu’un jeu de combat attire d’abord par son univers et ses personnages, avant de dévoiler son gameplay, facteur fatidique quant à son avenir. Des points qui légitiment un reboot, malgré tout il faudra faire en sorte d’amener plus de profondeur dans le gameplay afin de pouvoir se positionner à côté de la concurrence. Si l’accessibilité et l’aspect bourrin sont une force, à l’heure actuelle il faut être capable d’allier cela avec un gameplay riche et profond dans la veine de ce que faisaient les épisodes 3 et 4.
Il faut qu’à l’instar de la franchise de Bandai Namco, Bloody Roar parvienne à s’installer un minimum sur le compétitif. Tout en offrant la possibilités aux joueurs d’avoir une véritable marge de progression d’un personnage à l’autre. Cela va passer par l’enrichissement du panel de coups et combos, l’ajout de nouvelles attaques ultimes, ainsi qu’un mode entrainement digne de ce nom. Les jeux Arc System Works sont souvent très bons sur ce terrain de l’apprentissage. Bien entendu, un service online de qualité serait une plus-value non négligeable, pour ne pas dire indispensable. Par ailleurs, si l’on songe à l’importance des transformations lors des combats et de leur impact sur la victoire finale, il y a clairement une dimension stratégique. Trop souvent sous-exploitée, pour un retour de la franchise il faudra jouer là-dessus et en faire une donnée essentielle pour la victoire. C’est à dire améliorer la recette du dernier opus.
L’axe de l’accessibilité est peut être le terrain le plus évident pour un nouveau Bloody. Les jeux de combat tentent de rassembler de plus en plus de joueurs dans le monde, mais beaucoup sont freinés par la difficulté et le temps d’apprentissage nécessaire. En généralisant des manipulations identiques pour tous le roster, en laissant la spécificité des coups changer en fonction du personnage utilisé, cela pourrait faciliter la prise en main. Un peu comme ce que proposent les jeux NetherRealm qui ont considérablement simplifié leur gameplay par rapport aux générations précédentes. Non sans amener toujours plus de profondeur. De plus, tout bon jeu de combat embarque une bande-son de qualité. Les Bloody Roar avaient pas mal de morceaux mémorables, d’une énergie folle, et il faudra capitaliser là-dessus si la licence veut s’imposer. Sachant qu’avec son univers si particulier l’alliance des deux pourra faire des merveilles, comme à l’époque.
Finalement, le point le plus important sera bien entendu le contenu. C’est un problème encore trop récurrent dans l’industrie, précisément dans le Versus Fighting où les contenus solo sont quasi inexistants. Pourtant, les jeux qui fonctionnent le mieux, Mortal Kombat et Super Smash Bros. Ultimate sont des plus généreux. C’est une donnée qui peut justifier le prix de jeux qui sont logiquement répétitifs et très axés multi. Du contenu, même du fan service, mais du contenu efficace. L’idéal sera d’ajouter un mode Beat’em All comme le Tekken Force en son temps. Disons-le, tous les jeux de combats devraient se positionner là-dessus, surtout que la violence d’un Bloory Roar dans un Beat’em All donne terriblement envie. Pourquoi pas broder un scénario et de réelles cinématiques qui consolideraient le lore Bloody. Une autre option, en dernier recours, serait un jeu free-to-play. Il est difficile de cautionner ce modèle économique, pour l’ouverture des jeux de combat à un public plus large, et cela pourrait être pertinent. C’est aussi une potentielle solution pour pérenniser le genre si les développeurs sont incapables de proposer un contenu adéquat qui ferait oublier le prix de ces jeux aux DLC systématiques…
Cet article peut contenir des liens affiliés