Pourquoi on aimerait un retour de Rise To Honour ?
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Rédigé par Neomantis Dee
Eloigné des écrans et des médias depuis plusieurs années à cause de soucis de santé, Jet Li n’en demeure pas moins un artiste martial et acteur remarquable qui connut la gloire des années 90 au début des années 2000. Avant tout reconnu en Asie pour des rôles emblématiques, notamment dans la franchise Once Upon a Time in China, c’est en 1998 que l’occident le découvre véritablement avec L’Arme Fatale 4 et Roméo Doit Mourir. Multiple champion de Wushu, il aurait d’ailleurs pu devenir le garde du corps attitré de Richard Nixon s’il n’avait pas refusé.
Quand on parle d’artistes martiaux asiatiques aujourd’hui, c’est surtout à Donnie Yen que l’on pense, nous en parlions dans nos chroniques sur Onimusha et Sleeping Dogs. Cependant, il ne faut pas oublier qu’avant lui, et sans compter un Jackie Chan à l’aura tout de même supérieure, c’est bien Jet Li qui marquait les esprits, particulièrement par son élégance au combat. Alors forcément, après des jeux sur Bruce lee, le Stuntmaster de la PS1 mettant en scène Jackie Chan, notre champion de Wushu se devait d’avoir son jeu vidéo également.
Ce sera chose faite en 2004 avec Rise To Honour (également orthographié Rise To Honor) qui s’invite sur PS2 et auquel Jet prête ses traits et ses talents. Un soft plus qu’imparfait mais disposant que quelques qualités notables, précisément dans l’esthétique et la dimension cinématographique. Même si la critique a sévèrement boudé le jeu développé et édité par SCEA, un petit tour sur le net nous montre que, pour les joueurs, joueuses les avis étaient finalement plutôt positifs. Faisant partie de ces joueurs que le titre a marqué plus jeune, je voulais en parler sans pour autant réclamer un retour de l’expérience en elle-même, mais plutôt de l’idée globale du projet.
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Il semble qu’à la base le concept général de Rise To Honour était de mettre en scène un jeu reprenant des éléments du cinéma hongkongais, le medium se prêtant bien à ce genre de projet, comme a pu le montrer Enter The Matrix en 2003. Des intentions qui auraient attiré un Jet Li déjà au sommet de sa gloire et curieux d’expérimenter de nouvelles choses. Ainsi, à l’image de ce qui a été mis en œuvre sur la trilogie Onimusha en terme de production, la réalisation de Rise To Honour s’apparentait clairement à un tournage de super production HK.
Outre l’acteur, on retrouvait le talentueux chorégraphe Corey Yuen, monsieur important dans le cinéma d’arts martiaux ayant déjà travaillé avec Jet Li, mais aussi connu pour avoir fait partie des Little Seven Fortunes, un groupe d’artistes martiaux composé, en partie, du légendaire trio Jackie Chan, Sammo Hung et Yuen Biao. De surcroît, Corey Yuen est potentiellement celui qui a revitalisé les films d’action hollywoodiens dès 1985 avec le film Le Tigre Rouge, bien aidé par l’illustre Jean-Claude Van Damme qui ramena par la suite nombre de talents hongkongais sur le sol américain.
Je ne vais pas refaire la carrière du chorégraphe, mais son nom est crédité dans pléthore d’œuvres, collaborant avec les meilleurs artistes martiaux du monde. Sa présence dans Rise To Honour servira considérablement le jeu qui, malgré ses défauts, va impressionner par le réalisme des mouvements du personnage interprété par Jet Li, mais aussi dans sa dimension action totalement ancrée dans l’essence du cinéma HK. Une entreprise qui a pu, potentiellement, inspirer des jeux comme Stranglehold ou Sleeping Dogs sur certains éléments.
Car avant tout, Rise To Honour est bien un jeu vidéo conçu pour imiter les films d’action, précisément hongkongais. Bien que la présence de Jet a recentré la chose sur sa filmographie. Je ne vais pas m’attarder plus que ça sur les spécificités du jeu qui est un pur produit de son époque, aujourd’hui difficilement jouable sans passer un mauvais moment tant les lacunes dans le gameplay sont présentes.
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Pourtant, à l’époque, des forces s’en dégageaient et lui apportaient un petit quelque chose en plus, tout en respirant la volonté de bien faire. Car tout n’est pas à jeter. Je dirai que l’objectif de retranscrire une sorte d’expérience cinématographique est en partie une des grandes faiblesses de Rise To Honour. En effet, cela amène beaucoup trop de séquences automatisées. De quoi foutre en l’air une certaine liberté d’action et rendre les joueurs, joueuses passifs sur certaines séquences que l’on aurait sans doute préféré vivre autrement.
Ceci étant, au vu des nombreux jeux entièrement assistés et narratifs aujourd’hui, je pense que le problème était plutôt dans l’exécution de la chose que dans sa présence. D’autant que les studios ont le mérite d’avoir été au bout de leurs idées. Absence d’écran de chargement, niveaux divisés comme des scènes de films, sans parler du menu reprenant l’esthétique d’accueil d’un DVD avec le choix des chapitres. Et je ne parle pas de la mise en scène qui, pour le coup, était pertinente et pleinement réfléchie.
On notera également, pour les plus connaisseurs, un grand nombre de références à la filmographie de l’acteur, sans compter les quelques costumes à débloquer et rendant hommage à des rôles emblématiques de Jet Li. Je me souviens encore du plaisir procuré par la découverte de réfs ou de la tenue qu’il portait dans Once Upon a Time in China. La filmographie de l’acteur irrigue totalement Rise To Honour et en fait un hommage intéressant, ainsi qu’un jeu forcément pensé pour les fans de la première heure.
Difficile alors de bouder son plaisir. On ressent la sincérité et l’amour des équipes de développement dans le projet, eux qui n’ont pas lésiné sur les séquences d’action. Constat similaire pour Jet Li qui s’est clairement investi dans l’expérience, prenant plaisir à découvrir une liberté nouvelle sur le tournage. Bien loin des soucis et obligations inhérents au cinéma. Ce qui frappe encore aujourd’hui c’est surtout le système de combat à mains nues. Parce qu’au-delà de reprendre le style martial signature de Jet Li et reconnaissable entre mille, les sensations, en 2004, étaient là.
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Et c’était une volonté assumée des développeurs. Le but étant de faire ressurgir la fluidité et l’élégance presque dansée des mouvements de l’acteur tout en opérant, comme dans ses films, des combats à 360°, sans être obligé de gérer une caméra et de se retourner avec le personnage. Pour réussir cette prouesse, les coups et combos s’exécutent via le stick analogique et non pas les habituelles touches de la manette. Déconcertant, mais intéressant.
Le résultat pouvait se montrer bancal, cependant j’estime que cela donne une singularité, une saveur unique à ces combats que je n’ai retrouvé nulle part. Si ce n’est peut-être dans Sifu. Certes il n’y a pas de délire à base de stick analogique, ce qui enlève une certaine fluidité je trouve. Mais on gagne en profondeur et richesse de coups. Les approches restent assez différentes, mais je ne peux m’empêcher de penser au soft français qui reste la meilleure représentation martiale dans un jeu.
Si l’influence vient surtout de Jackie Chan, on est en droit de penser que les devs connaissaient Rise To Honour. D’autant que les interactions avec les objets du décors étaient déjà présentes sur le jeu de PS2, avec même quelques trouvailles jouissives que Sifu ne possède pas. On les retrouvera plutôt dans Sleeping Dogs, plus proche du soft avec Jet Li dans ses ambitions cinématographiques. Pour le reste, le jeu emprunte à droite à gauche et tente des choses pour renouveler son gameplay, avec le plus souvent des maladresses, mais toujours l’envie de bien faire.
Je pense notamment aux scènes de gunfights usant du Bullet-Time repris de Max Payne. Objectivement peu convaincantes, ces séquences avaient au moins le mérite d’emprunter une mécanique de jeu terriblement prenante, mais aussi de faire sens avec la note d’intention cinématographique de l’œuvre. Et, une fois de plus, cela réapparaît dans Sleeping Dogs. Et il est vrai, qu’à y repenser, ce dernier est peut-être une sorte d’enfant de Rise To Honour, délaissant Jet Li pour englober plus généralement tout un pan du cinéma HK.
Pourquoi on aimerait un retour de Rise To Honour ?
Comme dit en introduction, ce n’est pas un retour du jeu que je souhaite, bien que j’adore Jet Li et que j’aimerai clairement revoir cela en mieux réussi. Je voulais seulement mentionner un jeu qui a marqué ma jeunesse. Quand bien même ses défauts qui ont rebuté pas mal de monde, particulièrement la critique, les fans y trouvaient leur compte et je pense que c’est l’essentiel sur ce point. Nous étions à une époque où tout paraissait possible avec la PS2 de Sony. Où l’expérimentation était de mise, et c’est peut-être cela, au fond, que j’espère revoir.
Avec bien entendu toute cette touche hongkongaise que j’aime tant et qui influence encore énormément aujourd’hui le cinéma, entre autre. C’était aussi un exemple à suivre en terme d’approche cinématographique, bien que maintenant ce soit monnaie courante. Alors oui, des titres déjà mentionnée dans nos chroniques surfaient sur ce terrain, mais comme dit plus haut, Rise To Honour embrassait pleinement cette approche, jusque dans son menu. Il y avait vraiment quelque chose d’assez rafraîchissant dans cette proposition vidéoludique.
J’aurai aimé un jeu du même acabit mais beaucoup mieux maîtrisé. Le mélange parfait entre un Sifu et un Stranglehold. Je reste tout de même nostalgique du système de combat si atypique du soft, que je trouve toujours cohérent avec le Wushu pratiqué par Jet Li. C’était tellement bizarre comme approche, que j’y pense encore des années après. Ceci étant, durant l’écriture de cette chronique j’ai trouvé l’œuvre parfaite pour reprendre spirituellement l’essence de Rise To Honour. Un John Wick AAA.
On pourrait retrouver un visage familier, dans l’ère du temps, en la personne de Keanu Reeves. Et puis, si Rise To Honour était un jeu se voulant film, la franchise John Wick propose des films se réclamant du jeu vidéo, comme le montraient peut-être timidement les deux premiers volets, avant de clairement s’assumer sur le 4e opus.
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