Pourquoi on aimerait voir un retour de Tobal ?
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Rédigé par Neomantis Dee
Après les vampires de Capcom et les animaux de Bloody Roar, nous revenons vous parler baston avec un jeu du fond de niche développé par un studio que l’on attendait pas sur ce terrain. Parce que si Squaresoft, aujourd’hui Square Enix, a toujours été reconnu pour ses productions de RPG, les studios se sont pourtant attelés à la confection de Tobal, pour une première incursion dans le jeu de combat en 1996. En pleine décennie de versus, qui voit l’émergence de la 3D avec Virtua Fighter dès 1993, Square décide de réitérer sa collaboration avec Akira Toriyama après sa participation sur Dragon Quest. Du fait de leur manque de savoir-faire sur le genre, il feront appel au studio DreamFactory et s’attacher les services de Seiichi Ishii, concepteur de talent ayant œuvré sur Virtua Fighter ainsi que Tekken.
Sorti en 1996 sur PS1, Tobal sera un succès au Japon avec pas moins de 500 000 exemplaires écoulés. Si la présence de la patte graphique de Toriyama, en plus de celle de Square, ont probablement été des facteurs déterminants dans ce succès, la présence d’une démo de Final Fantasy VII dans le jeu a sans doute eu du poids aussi. Surtout qu’en occident le succès ne sera clairement pas au rendez-vous et, bizarrement, la démo de FF n’était pas disponible. Quoi qu’il en soit, comme nous le verrons brièvement dans cette chronique, le titre disposait de véritables qualités et s’imposait comme une véritable innovation pour le genre. Pour preuve, malgré l’échec par chez nous, la presse spécialisée a majoritairement salué les qualités du jeu et son originalité.
Notez que nous ne ferons pas de grandes distinctions entre les deux jeux, étant fortement similaires et sortis à des dates proches. Il va de soi que la suite est un cran au-dessus et on peut la voir comme la version référence.
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Tobal c’est donc un défi que se lancent les studios japonais, désireux de capitaliser sur leur renommée, mais aussi d’imposer leur propre licence de combat. Quoi de mieux pour cela que le papa de Dragon Ball pour la partie esthétique, dont les dessins ont toujours faits sensation. Puis, n’oublions pas qu’à cette époque la 3D n’en est qu’à ses balbutiements, or la licence de Square n’a pas peur de s’y frotter. La 2D étant pourtant plus abordable, bien que subissant une concurrence plus rude. Pour réaliser cet objectif, il faut une équipe de talents. Nous avons cité Seichii Ishii à la conception et Akira Toriyama pour le character design, mais il faut ajouter la compositrice de choc, Yoko Shimomura ainsi qu’Hironobu Sakaguchi en charge de superviser le projet.
Une fine équipe qui se retrouvera dès l’année suivante pour la suite, Tobal 2, qui ne sortira malheureusement pas en occident. Une suite qui reprend le travail de son prédécesseur pour en proposer une version plus aboutie. En outre, ce second opus amène un roster d’environ 200 combattants, un record non dépassé, pas même par Dragon Ball Z : Budokai Tenkaichi 3. Au-delà de ça, les forces principales de la licence, hormis les designs typés DBZ, c’est la qualité des animations. Qu’on se remette dans le contexte d’époque de sortie, ou même avec un regard actuel, force est de constater que les animations sont incroyables. Résultat d’un mélange entre de la capture de mouvements et d’animations « key frame ».
De plus, c’est la première fois qu’un jeu de combat tire autant parti de la 3D. On ne s’attardera pas longtemps sur les prouesses de l’animation dans la licence, mais elles sont nombreuses, en témoignent celles prédéterminées en fonction des zones d’impacts, etc. Une complexité certaine, pas loin de ringardiser la concurrence. Il faut dire qu’avec l’expérience de Seichii Ishii, le résultat ne pouvait que convaincre. Mais l’intelligence des équipes, c’est d’avoir dans un premier temps tout misé sur l’animation, afin de s’inscrire dans une démarche innovante pour le genre. C’est pourquoi, quand on joue à Tobal, on retrouve des inspirations provenant des titres phares de la 3D. Le dynamisme de Tekken, le réalisme de Virtua Fighter. Mais aussi l’importance des mouvements et les arènes d’où l’on peut chuter comme dans Battle Arena Toshinden et Soul Edge (renommé Soul Blade en occident).
Car oui, au fond, Tobal est bien un mix de ces œuvres. Ce qui n’empêche pas le jeu de Square d’être totalement unique. Visuellement déjà. L’esthétique héritée des animés japonais est déjà présente dans le versus 2D, on pense à Darkstalkers, mais pour la 3D c’est tout autre, le réalisme étant systématiquement privilégié. Ici la touche Toriyama donne une direction artistique qui tranche avec la mode en vigueur. Et inutile de dire que les personnages du papa de DBZ sont très stylés et n’ont rien à envier à ceux de la concurrence. Pour peu que l’on aime son travail.
Dragon Tiger Gate
On regrette par contre les arrière-plans et décors d’arènes tous plus pauvres les uns les autres. Mais nous l’avons dit, c’était un choix dans le but d’optimiser le travail sur les animations. Et pour le coup, le soft peut se targuer de tourner totalement en 60 fps, une prouesse remarquable pour l’époque. Malgré des environnements toujours décevant, le deuxième opus profite d’un gap graphique significatif et tournera lui aussi à 60fps. Cela est rendu possible par l’utilisation d’une technique de rendu 3D qui permettait d’amoindrir l’aspect polygonal. Une première dans le jeu de combat. En tout cas, l’univers reste prenant et même si les jeux ont mal vieilli visuellement, sauf les personnages, la direction artistique lui donne encore du charme.
Le travail de Yoko Shimomura et ses collègues sur l’OST participe aussi à imposer une ambiance reconnaissable, très cool et posée, loin de l’épique et du drame de la bande-originale d’un Tekken par exemple. Autre atout, Tobal c’est les prémisse de la customisation de personnages, précisément sur les couleurs. C’est aussi le premier jeu à pousser aussi loin le rendu des poses de victoires avec des visuels bien plus travaillés qu’en pleine partie. Et que dire de l’atout de taille, son mode quête. Un petit mode aventure, qui paraîtra grossier aujourd’hui, notamment visuellement, mais qui était novateur en son temps. Le principe est de parcourir des donjons labyrinthiques générés aléatoirement. A l’intérieur vous croiserez des pièges, des objets à équiper, ainsi que des ennemis à vaincre. La difficulté va monter crescendo, mais en récompense il y aura pléthore de combattants à débloquer, car il est possible de les capturer une fois qu’ils n’ont plus beaucoup d’énergie.
A côté de ça, une dimension RPG est présente même si relativement basique. Il y a de quoi améliorer un personnage significativement, ce dernier pourra même être joué dans les autres modes et profiter de sa puissance supérieure. Du contenu intelligent pour prolonger l’intérêt du titre, en plus de souligner l’importance de la partie solo pour le genre. Ce n’est pas le mythique Tekken 3 qui nous fera dire le contraire. Et le gameplay dans tout ça ? Tout bonnement excellent. Fort d’une prise en main rapide et d’un gameplay qui tient toujours plus de 20 ans après, le jeu impressionne par sa fluidité et ses animations comme nous l’avons dit. Mais cela n’enlève en rien le flow des mouvements, plusieurs persos valent vraiment le détour sur leur style de combat. Le système de choppe est aussi particulièrement prenant. On peut donner des coups en tenant l’adversaire, le projeter ou se déplacer avec lui.
Quant aux mouvements, nous en parlions, le fait de pouvoir tourner autour de son adversaire dynamise toujours plus les affrontements, l’approche du combat est tout autre et les possibilités s’en trouvent multipliées, surtout chez Tobal 2. Précisons que nous jouons ici à 3 boutons principaux, un coup bas, un moyen et un haut. Ensuite les gâchettes entrent en jeu, avec une attribuée à la garde, qui permettra aussi d’effectuer une choppe en ajoutant un bouton, puis une autre gâchette pour sauter. Après vous êtes libres de changer la disposition de vos touches. Des attaques à base de boules d’énergie sont évidemment de la partie. De surcroît, si vous recevez trop de coups lors d’une choppe, vous pouvez être sonné et vous retrouver sans défense. Le second volet de la licence est aussi précurseur dans les combos aériens, prenant d’ailleurs en compte le poids des combattants. Les plus lourds restant logiquement moins longtemps dans les airs.
Pourquoi un retour de Tobal ?
Le moins que l’on puisse dire c’est que manette en main c’est quelque chose Tobal 2, et ce aujourd’hui encore. Devant tant de prouesses sur le gameplay et la vision ambitieuse du titre, notamment sur sa partie solo, et nous n’avons pas mentionné le mode entraînement qui a l’intelligence de servir des apprentissages aux contres et combos, comment ne pas vouloir un retour de cette licence. Il suffirait d’avoir des graphismes plus convaincants, une personnalisation plus poussée et un mode quête digne de ce nom, sous forme de jeu dans le jeu, et nous serions comblés. Difficile de vendre un tel projet, pour autant, peut-être que dans le monde actuel il pourrait plus facilement trouver son public, surtout avec la patte Toriyama et la multiplication des esthétiques inspirées d’animés, mais toujours rares dans les jeux de combat en 3D.
Ces derniers sont d’ailleurs en manque de propositions, et au vu des qualités d’animation du soft de Square, il n’y aurait qu’à enrichir un peu plus le tout pour atteindre quelque chose d’aussi solide qu’il pouvait l’être dans les années 90. En fait, il y a peu à dire sur ce qu’on aimerait voir pour un retour. Au fond, tout était plus ou moins déjà là. La vision était la bonne, les ambitions aussi, sans parler du gameplay. Par conséquent, un retour post 2020 signifierait logiquement de se mettre aux standards du marché actuel, donc étoffer les bases lancées avec les deux Tobal. Un retour c’est un peu comme donner une seconde chance à la licence, et au moins se faire (re)connaître à sa juste valeur, car la licence avait, et a toujours, ce qu’il faut pour s’imposer comme une figure incontournable. Pour preuve, son influence sur l’industrie, notamment les concepteurs japonais de jeux de combat, est plus importante qu’elle n’y paraît.
Après, nous n’y croyons clairement pas, mais au moins on aura eu l’occasion, par cette chronique, d’en parler, de raviver des souvenirs, voire même faire découvrir l’œuvre aux plus curieux. Parce qu’au risque de se répéter, Square nous a offert une pépite comme on en fait peu, aux ambitions pertinentes, une sorte de synthèse de ce qui se faisait de mieux à l’époque. Et il faut s’en souvenir, tout en gardant l’espoir, potentiellement vain, qu’un jour peut-être nous reverrons quelque chose de ce calibre, pour ainsi donner un nouveau souffle au genre.
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