Pourquoi on aimerait un retour d’Oddworld : La Fureur de L’Étranger ?
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Rédigé par Neomantis Dee
Oddworld, oui, mais Oddworld : La Fureur de L’Étranger (Stranger’s Wrath en VO). Un western comme on en fait peu, et loin de la naïveté des habituels mudokons, dont le plus fier représentant n’est autre que le célèbre Abe, petit être rachitique et courageux qui a fait les beaux jours de la PS1 avec son Odyssée. Puis son exode, même si là, le développement fut assez cauchemardesque pour les équipes, comme l’a régulièrement rappelé Lorne Lanning, président du studio.
L’avenir ne s’est pas montré tendre avec la licence, jusqu’au sursaut de l’opus qui nous intéresse aujourd’hui. Malgré son exclusivité sur Xbox en 2005 – date de sortie initiale –, l’épisode est parvenu à s’écouler à pas moins de 600 000 exemplaires. Malheureusement, cela n’avait pas suffi pour rentabiliser les coûts du projet, ni pour motiver la mise en chantier d’une potentielle suite.
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ToggleLe Dîner de mudokons
Logiquement développé par Oddworld Inhabitants, dont le nom plutôt explicite atteste de leur mainmise sur la franchise, c’est le quatrième opus à voir le jour. Jusqu’au récent reboot New N’ Tasty et sa suite Soulstorm, le spin-off qu’est La Fureur de l’Étranger resta longtemps la dernière itération en date. Il fit les beaux jours de la grosse Xbox, exclusivité oblige, avant de suivre la mode du lifting HD, en 2011, dans le but de ressortir sur les consoles plus récentes.
Le couvert fut remis en 2020, sur Nintendo Switch et la console de Sony. Nous étions revenus sur le titre dans sa version PS4, l’opportunité de redécouvrir sa myriade de qualités et d’être témoin d’une aventure qui vieillit bien. On n’échappe pas à des couacs inhérents à son ancienneté. Cependant, le concept d’Oddworld : La Fureur de l’Étranger n’a jamais été reproduit, apparaissant toujours comme une proposition unique en son genre. La singularité de cette proposition se joue d’ailleurs à plusieurs niveaux.
Déjà, l’ambiance western avec son protagoniste mystérieux mais pas moins charismatique, loin d’être un fébrile mudokon bon qu’à prendre la fuite comme Abe et les siens. Ici, nous sommes un chasseur de primes redoutable, muni de sa fidèle arbalète dont les munitions sont des petites créatures animales. Il faut chasser ses munitions – toutes n’étant pas nécessairement létales –, entre autres contrats plus « normaux » avec une cible à capturer, morte ou vive, moyennant une récompense.
Le but étant, pour notre protagoniste sobrement nommé « L’Étranger », d’amasser suffisamment d’argent pour se payer une opération médicale aussi coûteuse que vitale. À l’instar des autres épisodes de la franchise, Oddworld : La Fureur de l’Étranger aborde des thématiques intéressantes, plus matures qu’on pourrait le croire de prime abord. L’humour est bel et bien présent et le ton est globalement comique.
Serious Business
Une certaine légèreté se dégage, sauf que, comme sur les premiers volets, les enjeux ne prêtent finalement pas tant à la rigolade si l’on s’y attarde. Le secret longuement gardé par le héros, qui n’aurait pas dépareillé dans un western spaghetti de Sergio Leone, notamment, aura son impact sur le récit. Sur le ton de celui-ci également. Le jeu se veut relativement linéaire dans son approche, mais le virage brusque, qui scinde distinctement l’expérience, offre un second souffle à l’aventure.
En termes de structure, la linéarité des débuts de jeu laisse place à une certaine liberté. La démarche peut déconcerter, mais elle a du sens et permet d’éviter la redondance. En outre, cela rend compte d’un monde habilement façonné. Le level design fait le boulot et donne à voir un vaste espace connecté. De manière organique. Nous avons presque l’impression de nous balader dans un monde ouvert digne de ce nom. Mais je ne vais pas m’étendre davantage, au risque de faire de la redite avec ma critique du jeu déjà existante.
Retenons simplement qu’en se référant aux dires du président d’Oddworld Inhabitants, l’histoire de la franchise n’est quasiment que succession de conflits avec les éditeurs, en particulier Electronic Arts sur La Fureur de l’Étranger. Selon les sources, l’éditeur américain ne voulait pas d’une exclusivité, mais d’une œuvre multiplateforme, en réponse à quoi le marketing fut volontairement négligé et le soutien financier amoindri. Salué par les critiques presses et par les joueurs et les joueuses, ce spin-off prend le risque d’abandonner Abe et les mudokons, autant que l’ambiance moins chaleureuse des usines, dirons-nous.
Et ce, au profit d’une expérience plus aérée, davantage portée sur la liberté d’action. Le personnage de L’Étranger évolue également dans un espace entièrement modélisé en 3D, faisant suite à la tentative ratée sur Oddworld : l’Odyssée de Munch, tout en s’opposant à la 2D qui colle à la peau de la franchise. Une véritable prise de risque des studios, ce qui rend l’échec commercial de l’opus assez frustrant. De surcroît, en sachant qu’aucune piste pour un nouvel épisode à la sauce conquête de l’Ouest ne semble prévue.
Pourquoi on aimerait un retour ?
Parce que le titre est encore rafraîchissant dans le paysage vidéoludique actuel, malgré son climat aride. Les jeux empruntant les codes du western ne sont pas suffisamment représentés non plus, à mon sens en tout cas. Même si, il est vrai, quelques tentatives virent le jour : Desperados III, Weird West, Red Dead bien sûr, et d’autres. Oddworld : La Fureur de l’Étranger n’a pas eu le succès mérité à son époque, ni même lors des diverses ressorties, alors même que le potentiel n’a pas été entièrement exploité.
Y rejouer, c’est passer un super moment, mais aussi enfanter le désir d’un nouvel opus dans ce même cadre, avec l’ambition d’aller plus loin dans le game design. Une franchise qui a besoin d’une indépendance créative pour s’épanouir. Les membres du studio aussi. Leurs meilleurs travaux ont été générés par l’envie et la passion commune des équipes. Difficile d’être au top lorsqu’un flingue est pointé sur votre tempe en même temps qu’une deadline absurde à honorer.
Oddworld Inhabitants est un studio talentueux qui aime par-dessus tout son univers, cela se ressent. Il ne manque qu’un soutien en adéquation avec leur vision, ce qui n’aurait pas obligatoirement à coûter le PIB d’un modeste pays. Le succès improbable que fut Oddworld : L’Odyssée d’Abe, en son temps, peut, à moindre échelle, se réitérer avec un nouvel épisode dans la lignée du très bon La Fureur de l’Étranger, que je ne cesserai de recommander.
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Date de sortie : 21/12/2011