Pourquoi on aimerait voir un remake de The Order 1886 ?
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Rédigé par Nathan Champion
On a tendance à minimiser l’impact qu’a eu Resident Evil 4 sur l’industrie du jeu vidéo. Sans lui, pas de Gears of War, qui s’est très largement inspiré de sa caméra à l’épaule et de son système ponctuel de couverture. Et sans le Third Person Shooter de Epic Games, qui sait à quoi nos chères petites têtes blondes joueraient aujourd’hui ?! Certainement pas Fortnite en tout cas ! Car en réalité, aussi étonnant que cela puisse paraître, si Resident Evil 4 et Gears of War n’avaient pas vu le jour, le TPS n’aurait pas gagné ses lettres de noblesses, du moins pas aussi tôt. On aurait manqué le séisme provoqué par la légion de shooters en vue de derrière qu’a subit l’ère Xbox 360 / PlayStation 3, et dont on continue de percevoir les répliques sur les machines actuelles.
Tout cela pour dire que nous n’aurions sans doute jamais connu de The Order 1886 si les titres de Capcom et Epic Games n’avaient pas existé. Et cela aurait été ennuyeux puisque, bien qu’imparfait, le shooter de Ready at Dawn (à qui l’on doit notamment les God of War de la PSP) a malgré tout de sérieuses qualités à faire valoir. Trop vite relégué au rang de déception, après une campagne de publicité ayant fait germer une véritable attente chez les possesseurs de PS4, The Order 1886 aurait pourtant mérité une seconde chance. D’ailleurs, vous l’aurez compris en lisant le titre de cet article, en ce qui nous concerne on aimerait beaucoup voir un remake de ce premier essai !
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Si vous possédez une console Sony, alors vous n’êtes peut-être pas sans savoir que le géant japonais s’est constitué un véritable petit harem de développeurs talentueux, sous l’enseigne PlayStation Studios. Parmi eux, peu sont habilités à envisager de réaliser du blockbuster, autrement dit les portes étendards de leurs machines. Cette liste-ci est très courte et compte, au hasard, des noms comme Insomniac Games, Guerrilla Games ou encore Santa Monica Studio. Respectivement développeurs de Ratchet & Clank, Horizon Zero Dawn et God of War. Trois énormes succès qui se passent de commentaire pour la simple et bonne raison qu’ils sont parvenus à conquérir le cœur des joueurs, leur porte monnaie aussi, et évidemment la presse. Un sans faute, en somme.
Et la liste est peut-être courte, pourtant nombreux ont été les prétendants. Parmi eux, un certain Bend Studio, racheté par Sony en l’an 2000, à qui l’on doit la série des Syphon Filter, Uncharted Golden Abyss sur PS Vita, ou encore le récent Days Gone. On pourrait croire que l’essai a été transformé avec ce dernier, puisqu’il s’agit d’un triple A ayant très convenablement fonctionné sur le plan commercial. Nonobstant, ce serait oublier un peu trop vite les exigences de la firme japonaise. Aux dernières nouvelles, ce monde ouvert post-apocalyptique se serait tout de même écoulé à plus de 8 millions d’exemplaires à travers le monde, et cumule par ailleurs des scores très respectables sur Metacritic. Mais ce n’était pas assez.
Vous l’aurez sans doute compris, Ready at Dawn était bien parti pour intégrer ce cercle très fermé à son tour, avec son The Order 1886 très prometteur que le géant japonais édite lui-même. Malheureusement pour l’entreprise américaine, l’accueil critique s’est révélé un brin froid. Et on devine que les ventes n’ont pas été faramineuses non plus, puisque ni Sony, ni le développeur n’ont communiqué dessus. Aucun chiffre donc, et aucun véritable moyen de déterminer combien d’exemplaires ont trouvé preneur. On peut donc supposer qu’aux yeux de la firme nippone, ce TPS uchronique est un échec, quand bien même il aurait vendu quelques millions lui aussi.
« Je reviens très vite » ; ou pas
The Order 1886 c’est donc avant toute chose un Third Person Shooter. Un détail qui a toute son importance dans le contexte, puisqu’il sort en 2015, alors que la génération PlayStation 4 / Xbox One est toute jeune, et que le jeu vidéo en général ne s’est pas encore complètement remis du raz-de-marée de Gears of War-like de l’ère précédente. Il est par ailleurs l’un des premiers blockbusters de la PS4, qui manque alors cruellement d’expériences solo marquantes et exclusives. Certes, la machine pourra bientôt compter Bloodborne et Until Dawn dans sa bibliothèque. Mais les précédentes tentatives de la firme nippone n’eurent rien d’exceptionnel. Infamous : Second Son et First Light sont des mondes ouverts sans grande saveur, Killzone : Shadow Fall n’est pas la claque escomptée, Knack se contente d’être un bon divertissement… Bref, l’annonce de The Order 1886 tombe à point nommé, malgré le fait qu’il s’agisse, une fois encore, d’un jeu de shoot en caméra à l’épaule…
Cela étant, il n’est pas qu’un simple TPS bateau, et nourrit même des ambitions bien supérieures à ses homologues. Ready at Dawn a voulu en faire une véritable expérience de nouvelle génération, décidé à faire tourner la machine à plein régime, et à laisser une trace indélébile dans le cœur des joueurs. Malheureusement, seule la moitié du contrat est honorée. Le titre est fluide, profite d’une direction artistique bien sentie et d’un univers diablement accrocheur, le tout enrobé par une technique bluffante pour l’époque. Et on ne va pas vous mentir, après avoir fait le jeu sur PS4 Pro en 2022, la claque est toujours là, la réalisation fait encore son petit effet. Ce que le casting vocal francophone trois étoiles ne gâche en aucun cas !
Nous incarnons un certain Galahad, chevalier au service de la couronne d’Angleterre, évoluant dans un Londres aux penchants Steampunk, véritable uchronie où se côtoient loups garous, figures historiques réinventées, et même table ronde. Ce qui fait beaucoup d’informations à ingurgiter en peu de temps lorsqu’on lance le titre sans savoir à quoi s’attendre. Toutefois, l’histoire ne décolle jamais vraiment, malgré des personnages forts qui se développent de manière intéressante au fil de l’aventure. On nous narre une intrigue bateau, qui ne fait que reprendre le sempiternel combo : trahison, retournement de situation prévisible et fin ouverte appelant à une suite directe. Mais là où le titre de Ready at Dawn se veut plus ambitieux que la moyenne, c’est dans sa mise en scène, qui se révèle paradoxalement être son tombeau.
Parce qu’il est bon, au cours de la première heure, de constater que l’équipe américaine a mis le paquet pour nous immerger dans son univers. À grand coup de cinématiques, souvent un peu trop longues, de dialogues en pagaille, et de changements de rythme subtils. Enfin, subtils jusqu’à un certain point cela dit. Car le vrai problème de The Order 1886, au delà du fait qu’il soit trop bavard pour ce qu’il a à raconter, c’est son rythme bâtard. On s’attend logiquement à un énième Gears of War-like, pêchu et percutant. Mais on tombe vite des nues en constatant que les fusillades ne constituent, en réalité, qu’une partie minime d’une aventure mettant plutôt le paquet sur une approche lente et contemplative de couloirs au level design pas toujours très inspiré. S’ajoute à cela une propension à abuser d’actions contextuelles, ce qui donne souvent l’impression très désagréable de ne pas jouer, mais de simplement regarder des cinématiques un peu molles.
Quant aux phases d’action en elles-mêmes, peu de choses seraient à redire si The Order 1886 était sorti sur PlayStation 2. Le tout est linéaire à l’excès, ne nous laissant jamais le moindre petit sentiment de liberté, ce que n’aide pas un level design au summum du dirigisme. L’arsenal est relativement limité en nombre, mais surtout peu d’armes à feu ont réellement du punch. Le titre embarque aussi deux ou trois phases d’infiltration qui sont à la fois molles, fastidieuses et frustrantes. Et pour ne rien arranger, aucun objet à collecter, aucune proposition quelconque en dehors du fil dépeint par l’histoire. Aucune rejouabilité non plus. Autrement dit, une fois les quelques cinq à six heures de campagne bouclées, rien ne peut nous donner envie de revenir sur le titre. Ça fait cher l’heure de jeu, surtout au prix de lancement !
Pourquoi un remake ?
Mais alors pourquoi vouloir un remake de The Order 1886 s’il s’agit d’une déception ? Eh bien en premier lieu parce que tout est histoire de contexte. L’expérience de Ready at Dawn a déçu, c’est un fait indéniable. De là à décréter qu’il s’agit d’un mauvais jeu ? Il y a un pas que nous ne franchirons pas. Les possesseurs de PlayStation 4 attendaient quelque chose de marquant, après une année et demie sans rien d’exceptionnel à se mettre sous la dent. Beaucoup d’espoirs reposaient sur le titre, qu’on nous vendait alors comme une expérience bourrée d’action. Mais les faits son là, The Order 1886 n’avait simplement pas les épaules !
Or on ne peut clairement pas dire qu’on passe un mauvais moment sur le jeu de Ready at Dawn. Comme dit plus haut, il bénéficie d’un univers très accrocheur et d’une réalisation qui fait encore aujourd’hui mouche. Bien que les bandes noires sur les contours de l’écran, pour donner un effet cinéma, ne soient pas du plus bel effet. Malgré tout, sa mise en scène est léchée et ses fusillades plaisantes, si l’on fait abstraction du dirigisme du level design. Les combats de boss ne manquent pas d’idées, mais tombent dans la facilité de l’abondance de QTE. Et la fin n’est pas mauvaise, bien qu’elle ne boucle pas l’histoire. Elle donnerait même envie d’attendre la suite, qui n’a malheureusement aucune chance d’arriver un jour.
Bref, on sent bien que Ready at Dawn a mis du cœur à l’ouvrage, mais surtout que l’on n’est vraiment pas passé loin d’un titre excellent. Il ne faudrait pas grand chose pour faire de The Order 1886 une pépite. Et si remake il y a, bien que l’espoir soit difficilement permis, plusieurs choses seraient impératives à mettre en place. À commencer par une narration moins intrusive, et un rythme mieux dosé. Plus d’action, en somme, et moins de causette. Il faudrait aussi que le titre, tout en restant linéaire, parvienne à restituer un certain semblant de sentiment de liberté. Car il est très frustrant de découvrir un Londres aussi beau, aussi original, mais de ne pouvoir en arpenter que de rares rues crasseuses et couloirs de manoirs. Quelques zones plus ouvertes auraient clairement leur place, notamment pour les phases d’action, qui peuvent très bien rester scriptées malgré tout.
Aussi, il faudrait se départir de quelques unes des lubies irritantes du développeur, à commencer par les actions contextuelles. Il y a un temps pour toute chose. Shenmue l’a bien compris. Un QTE s’inscrit dans une logique, dans la continuité d’une action qu’on ne peut mimer autrement, la faute aux limitations du support. Or The Order 1886 fait dans l’abondance jusqu’à l’étourdissement. Les combats de boss, par exemple, ne proposent pas vraiment d’action. On se contente d’appuyer sur les touches apparaissant à l’écran à intervalle régulière, et boum, on sort victorieux. On fait nettement plus épique et percutant. Il faudrait aussi jeter aux oubliettes ces moments où le jeu nous ordonne d’observer des objets sous tous les angles en les faisant tourner dans la main de Galahad. Certes, à l’époque c’était beau, blindé de détails… mais soyons honnêtes deux secondes, ça n’a jamais eu aucun intérêt !
Enfin, s’il n’est pas nécessaire de changer grand chose au scénario, on aimerait quand même qu’un remake éventuel étoffe son contenu. Une durée de vie doublée ou triplée pour commencer, quelques objets à collecter dans les environnements, mais aussi de petites phases changeant de gameplay au cours de l’aventure. Un gunfight sur une calèche par exemple, du saut en parachute pourquoi pas, de la pêche à la grenade… enfin n’importe quoi qui pourrait casser la monotonie excessive de l’expérience de 2015.
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Date de sortie : 20/02/2015