Read Only Memories : Neurodiver – Détective psychique en action
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Rédigé par Neomantis Dee
Développé par les équipes de MidBoss, Read Only Memories : Neurodiver est un Visual Novel se déroulant à Neo-San Francisco, ville déjà au cœur de l’intrigue du précédent jeu du studio, 2064 Read Only Memories sorti il y a maintenant 9 ans. Comme son aîné, ce nouveau volet reprend une esthétique rétro héritée des années 80 et s’inscrit dans un univers futuriste regroupant pêle-mêle d’influences, parmi lesquelles le Snatcher de Hideo Kojima arrive en tête.
Pour ce retour, et autant d’années d’absence, c’est sous le signe d’un certain renouveau que revient ROM. Changement de scénariste avec une toute nouvelle histoire, de nouveaux personnages mais aussi des visuels retravaillés sans perdre la patte de la licence. Le ton global de l’œuvre sera aussi plus lumineux, plus léger que chez son aîné malgré la mention de sujets tout de même sérieux.
Sommaire
ToggleLes extrasens rêvent-ils de papillons dorés ?
Luna Cruz de la Vega n’est pas la descendante de Zorro, mais plutôt une extrasens de Neo-San Francisco et travaillant pour la puissante organisation MINERVA, au sein de laquelle elle est connue sous le nom ES88. L’organisation est par ailleurs spécialisée dans les sciences de l’information, les neurotechnologies et, logiquement, les phénomènes extrasensoriels qui seront au cœur de cette nouvelle intrigue assez décontractée offerte par ce Read Only Memories : Neurodiver.
Ce n’est pas tant leurs yeux jaunes reconnaissables que leurs capacités psychiques qui rendent les extrasens si particuliers. Luna n’est pas la moins talentueuse du lot et utilise un neurodiver afin d’amplifier ses facultés. Un neurodiver est une sorte de créature psychique issue de la bio-ingénierie, mais qui pourrait tout aussi bien provenir d’un film de David Cronenberg. Mix entre un poulpe et un avant bras dotée d’une poigne pour s’accrocher à un sujet humain, afin que, dans le cas présent, Luna puisse enquêter dans des souvenirs.
Mémoires et rêves seront au cœur de l’intrigue de Read Only Memories : Neurodiver. En effet, en tant qu’extrasens, notre héroïne est envoyée en mission capturer le mystérieux rebelle se faisant appeler Papillon doré. Une entité psychique cachée dans les souvenirs des gens. Souvenirs qu’il fragmente et endommage, causant des troubles de la mémoire, notamment. Ces fragmentations sont les sources que recherche Luna quand elle scrute les souvenirs d’un sujet.
Plus Luna en sait sur la personne/sujet, sur ses goûts, ses passions, etc, plus cela facilitera l’enquête dans la psyché. Notre détective psychique devra déambuler dans les lieux du souvenir visité, interagissant avec les éléments du décors et discutant avec des personnages en quête d’indices qui permettront ensuite de réparer les trous de mémoires, les fragmentations présentes. Elles sont représentées par des amas de formes brouillées et douteuses.
Psychic State Society
Cette partie enquête se jouera selon les règles basiques du point and click. Une fois les indices récoltés et les fragmentations ciblées, il faudra associer les bons objets pour effectuer la réparation. Une approche pas loin de renvoyer à la démarche d’un psychanalyste envers son patient, lui aussi scrute les souvenirs et facilite son travail avec des connaissances personnelles. Dans ROM Neurodiver, le résultat n’est pas aussi concluant qu’escompté.
Les informations personnelles récoltées, hormis peut-être concernant le personnage du hackeur, se reposent finalement sur un bouillon de références superflues : manga, animé, jeux vidéo… Les développeurs loupent une occasion de s’approprier des thématiques plus percutantes, de les explorer intelligemment, au même titre que le casting de personnages qui ne manque pourtant pas de sympathie. Au moins, l’intrigue se laisse suivre avec plaisir.
Que ce soit au gré des discussions ou des interactions de décors distillant du lore, l’univers proposé semble cohérent et regorge d’une richesse narrative, malheureusement sous exploitée ici. C’est dommage car la matière est là. On aimerait passer davantage de temps en compagnie de Luna, apprendre à connaître la mystérieuse Fortuna, Gate et les autres. Mais en deux ou trois heures de jeu c’est difficile. Cela ne rend pas justice à la solide prestation des doubleurs qui donnent vie au casting de Read Only Memories Neurodiver.
L’ambiance du soft n’est pas en reste. Visuellement, la patte rétro fonctionne très bien, les visages parviennent à être suffisamment expressifs pour dynamiser les conversations et transmettre leurs émotions, c’est lisible. L’espace sonore soutient efficacement l’ensemble avec des bruitages bienvenus et des musiques qui sonnent juste. Des personnages ont leur propre thème à chaque conversation, ce qui fait son petit effet.
Sleeper
L’ambiance rétro ressort bien et renvoie aux sons des ordinateurs d’époque, terminant de poser cette atmosphère propre à Read Only Memories : Neurodiver. Ce soin apporté à la partie sonore du soft, incluant les doublages, permettent d’éviter des lourdeurs induites généralement par le genre du Visual Novel. Et puis, ici, les ellipses sont peu utilisées et le jeu impose les déplacements manuels en mode point and click, malgré la composante ludique discutable de la chose.
Une impression de se traîner dans les locaux, subissant nombreux allers-retours, ainsi que la routine obligatoire à jouer. Ca n’aide pas pour l’immersion, cela étant dit, comme cette routine est également imposée à Luna de façon diégétique : se lever, récupérer le neurodiver, prendre l’air sur le balcon, retrouver Gate, pointer à l’accueil, etc… ce rythme inscrit le quotidien dans une réalité, celle de la puissante organisation MINERVA qui affirme son emprise sur le personnel employé, limitant leurs libertés, entre autres. Sans trop en dire, ROM Neurodiver tente des choses pour nous impliquer au côté de Luna.
L’exemple des rêves sous formes d’une série tv qui concluent les chapitres ou bien les eyecatch rappelant ces mêmes séries, vous savez, la pause illustrée avec un jingle en milieu d’épisode d’un animé. Le soft esquisse des thématiques et réflexions intéressantes aussi. Esquisse oui, car seule la surface sera effleurée, aucune profondeur d’exploitée malgré des pistes prometteuses. Sans compter que la conclusion narrative survient bien trop vite, sans nous avoir laissé le temps de nous immerger totalement dans le récit. En outre, parmi les soucis notables, l’absence de réelle incidence dans les choix de dialogues possibles.
Aucune incidence, si ce n’est d’apporter de nouvelles lignes de dialogue, et puis le ton joyeux et parfois enfantin n’aide pas à poser une tension suffisante pour rendre l’histoire mémorable. Les enjeux peinent à nous impliquer, tout va trop vite en besogne, les personnages sont trop détachés et enjoués pour crédibiliser la menace. L’approche chaleureuse peut être intéressante, elle est peu attendue dans un univers SF comme celui de ROM Neurodiver. Mais si rien n’est pris sérieusement, difficile de s’investir et d’y croire. Qui plus est en l’absence de folie, ce qu’un Paradise Killer, explicitement cité, maîtrisait.
Trop convenu pour réellement sortir du lot, trop limité pour espérer satisfaire des joueurs, joueuses cherchant du gameplay un minimum engageant, Read Only Memories : Neurodiver reste un Visual Novel avant tout, n’espérez pas un point and click avancé. Côté scénario, si l’ambition manque et que les thématiques sont systématiquement effleurées, le récit reste agréable à parcourir, avec un casting de personnages tout de même convaincant et attachant.
Tout ce beau monde méritait davantage de temps de présence c’est certain, ne serait-ce pour la curiosité qu’ils peuvent susciter. ROM Neurodiver c’est une ambiance rétro des plus charmante et un univers aussi intéressant que sous exploité, certes, mais suffisamment soigné pour susciter un minimum d’intérêt. Les plus curieux et curieuses y trouveront peut-être des choses à prendre, mais attendez-vous à rester sur votre faim, au risque d’être déçu si vous avez l’habitude des jeux du genre.
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Date de sortie : 16/05/2024