Semblance est disponible depuis le 24 juillet 2018 sur PC, Mac et Switch, développé par Nyamakop, un studio indépendant situé en Afrique du Sud et publié par Good Shepherd. Le projet débute à l’université de Wits en 2015 pour être présenté à un examinateur nommé Judd Simantov (ex-lead de Naughty Dog). Celui-ci, impressionné par le potentiel du prototype, suggéra à l’équipe d’aller plus loin dans le développement.
L’imperfection, moteur d’inspiration
Ce qui paraît évident lors des premiers pas dans le jeu Semblance c’est son appropriation du genre de la plateforme pour remodeler la recette en quelque chose de plus moderne. En effet, le petit personnage Squish que l’on contrôle, outre ses capacités tout à fait standards de course et de saut, sait se servir de son environnement à son avantage. Ici la plateforme prend une tout autre dimension car on peut enfin déformer ces fameuses plateformes à notre avantage plutôt que de subir leurs agencements.
L’originalité réside dans l’oubli de ce que les autres jeux de plateforme nous auront appris.
Le jeu synthétise le genre à ses racines revenant à une esthétique tout en 2D. Les contrôles très simples ne permettent pas de s’emmêler les doigts, mais au contraire avec un peu d’expérience dans le maniement de la petite boule caoutchouteuse, on parvient à se frayer un chemin en déformant son environnement et c’est un vrai plaisir. Mais c’est aussi un casse-tête qui fera réfléchir à deux fois avant de se lancer tête baissée vers l’inconnu. À ne pas s’y méprendre, la recette n’a rien à voir avec un Super Meat Boy ou, plus récemment, Céleste.
Il faudra canaliser sa patience pour bien examiner les lieux afin d’élaborer un plan d’attaque pour s’en sortir. Pour dévoiler toute la vérité à propos de Semblance, le cœur du jeu provient d’un petit glitch de collision qui inspira les développeurs. C’est ainsi que les plateformes de Semblance deviennent modulables, ce concept est devenu le gameplay principal du jeu. La découverte renverse tout le gameplay préétabli, le jeu se voit intégré d’autres petites anomalies afin de varier les plaisirs du jeu.
La volonté de ses créateurs est de faire ressentir l’univers comme étant composé d’une matière douce, pour ainsi justifier également la présence du personnage principal tout en courbes et souple dans ses mouvements. On retrouve tout de suite l’inspiration provenant de jeux tels que Hohokum, World of Goo, Thomas Was Alone, Loco Roco ou les dessins animés estampillés par Cartoon Network. Le choix d’associer des couleurs de manière atypique a tout de suite fait ressortir le jeu par son identité propre malgré le nombre de sources d’inspiration.
« S’approprier les idées d’une personne est du plagiat ; s’inspirer de celles de plusieurs personnes est une démarche propre à la recherche. » – Charles Caleb Colton, 1820
Pour revenir à nos moutons, la situation typique d’un jeu de plateforme est d’exécuter une série de mouvements pré-déterminés pour dévoiler la suite du cheminement à entreprendre. Toutefois Semblance vous propose autre chose : déformer l’environnement, d’une part pour déjouer les obstacles parfois mortels et d’autre part pour collecter des petits orbes nécessaires pour guérir le monde dans lequel on évolue d’une terrible corruption.
Combien de fois un jeu de plateforme nous aura donné le désir de pouvoir changer la disposition des éléments ? C’est toute l’idée de Semblance que de créer la solution au problème en déformant l’environnement pour créer un tout autre niveau et ainsi une des possibles solutions pour récolter ces petits orbes salvateurs. Attention, le jeu procure quand même du challenge durant les niveaux plus avancés, la frustration pourrait revenir au galop sans prévenir. Le plaisir de jeu tout à fait unique lui permettra tout de même de s’en sortir haut la main grâce à la bonne dose d’amusement qu’il procure.
Double identité
L’histoire de Semblance passe au second plan, ce n’est pas vraiment un défaut à vrai dire. Pour faire bref, l’univers de Squish a été envahi par des surfaces angulaires qui, lentement, sont en train de corrompre la faune et la flore. Simple, efficace, et coloré. L’histoire se dévoile petit à petit par endroits sur les murs des lieux à visiter, parfois dans des zones bien cachées. Du coup, les quelques petites précisions sur l’univers permettent de s’imaginer des possibles péripéties anecdotiques.
Semblance est très linéaire dans sa construction.
Le jeu se divise en trois grands niveaux, représentés par trois grands arbres corrompus chacun abritant six autres arbustes infectés. Par cela, le jeu est un peu à l’image d’un Super Mario Bros où chaque monde possède son propre univers coloré introduisant chaque fois des nouvelles mécaniques. Sans spoiler le contenu des mondes, les nouveautés consistent soit en de nouveaux obstacles, soit en une nouvelle aptitude. Dans chaque monde sont éparpillés des orbes qu’il faut récupérer pour restaurer la forêt à son état d’origine. Le plaisir de jeu est constamment renouvelé et rien ne semble répétitif durant l’exploration. Un vrai game design de qualité !
La courbe de progression se fait tout en douceur. On commence par des simples puzzles pour arriver à des situations beaucoup plus complexes. Les déformations comme rehausser ou enfoncer le sol pour esquiver un ennemi ne sont que des solutions primaires. Rapidement, de nouvelles possibilités s’ajoutent aux aptitudes de Squish. Des pièges qui semblent bloquer toute progression deviennent, avec un peu d’imagination, partie intégrante de la solution. Le personnage en lui même est déformable par impact avec des surfaces plus dures, changeant ainsi le gameplay. C’est LA meilleure idée du jeu qui change non seulement sa physique mais également la façon de jouer. Les puzzles semblent parfois impossibles car la mauvaise forme du personnage est adoptée… Attention à la physique qui pourrait s’avérer capricieuse sur de petits terrains : le blob a tendance à glisser à pleine allure !
Semblance n’est pas un simple jeu de plateforme axé uniquement sur la déformation d’environnement, c’est également un vrai puzzle-game. Les phases de récupération d’orbes, inatteignables par défaut, deviennent de vrais casses-têtes. Maîtriser les possibilités de déplacement et façonner l’environnement à son idée feront atteindre le Graal. Si malgré tout l’orbe semble impossible à atteindre, mieux vaut le laisser pour plus tard. L’idée de mettre à plus tard une situation trop pénible à résoudre dans l’immédiat est souvent une bonne solution. Les niveaux permettent une navigation facile entre les différents mondes. Autant en profiter pour visiter d’autres lieux et jouir du dépaysement proposé.
Semblance cache son côté puzzle-game pour nous surprendre.
À la fin de tout ce parcours, une fois assez d’orbes collectés : l’arbre final se dévoile ainsi que son boss. Loin d’une balade de courtoisie, c’est le niveau ultime qui mettra à rude épreuve votre dextérité et expérience accumulées. Ne pas perdre patience est souvent une consigne à respecter rigoureusement. La petite anecdote est que la vraie fin est accessible uniquement une fois tous les orbes récupérés. Attention, une fois le jeu terminé, la partie est réinitialisée ! Impossible de conserver les essences de vie déjà collectées, il faut tout refaire depuis le début !
Tout comme son approche visuelle, la bande-son de Semblance reste très minimaliste. Cependant, encore une fois, cette approche sonore restreinte sied très bien au jeu d’où son charme unique. Une musique d’ambiance, des petits bruitages sans prétention appuient le choix des visuels minimalistes colorés. La musique aux percussions africaines joue merveilleusement bien son rôle pour donner du volume aux visuels et à sa narration. Une recette servie tout au long de l’aventure : l’immersion assurée par l’harmonie bien équilibrée entre game design et sound design.
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