SquareOne de Wizama : Notre interview exclusive sur la console de jeu de société
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Rédigé par Julien Blary

A l’occasion de l’AG French Direct, Wizama a présenté sa SquareOne, une console révolutionnaire qui allie jeu vidéo et jeu de société. Le concept : pouvoir jouer à de nombreux jeux de société sur un plateau physique et connecté, en réunissant plusieurs joueurs autour de celui-ci. Après plusieurs années de conception et d’expérimentation, la SquareOne s’approche de sa commercialisation et devrait sortir fin 2022.
Nous avons ainsi pu nous entretenir avec Damien Botta, co-fondateur de Wizama, qui s’occupe principalement de la communication et des relations extérieures. Avec ce long et chaleureux entretien, nous avons ainsi pu en savoir plus sur le concept de la SquareOne, à qui elle s’adresse, les jeux au lancement et les projets à moyen et long terme. Voici notre interview.
Sommaire
TogglePrésentation et concept de la SquareOne
- Pouvez-vous présenter brièvement le concept de la SquareOne ?
La SquareOne, c’est la nouvelle génération de jeux de société. C’est la première console avec laquelle on peut jouer avec des objets physiques qui vont prendre vie sur un écran qui va donner le ton directement aux différents jeux, que ce soit du hardcore gamer, du jeu familial…
Le tout, grâce à un environnement qui va faciliter l’accès à tout le monde. On aura des modes de jeu avec des didacticiels, des explications de jeu avec différents angles avec des personnes autour de la table. Après tout, tout le monde sait utiliser des objets en version physique.
- Quel est votre ressenti sur l’évolution du projet ?
On se sent bien ! Le projet n’a pas toujours été simple, surtout au début. On a eu des trucs terrifiants, des expériences pas faciles. Par exemple, nous sommes allés au CES 2019 à Las Vegas pour présenter notre concept. La même année où Nintendo présentait sa console rétro. Notre console avait à l’époque un autre design et était beaucoup plus fragile. On a ramené deux de nos prototypes par avion, dans des valises en métal bien rembourrées.
Et on avait une soirée presse dédiée aux produits qui avaient remporté un « Innovation Awards ». Première chose, les valises n’arrivent à l’aéroport. On se demandait vraiment ce qu’on allait leur montrer. Puis proche de l’ouverture de cet événement presse, on reçoit un message comme quoi les valises venaient d’arriver à l’aéroport. On y va, on perd un peu de temps et une fois qu’on retrouve nos affaires.
On ouvre la valise et là, c’est le drame : les deux consoles étaient explosées. C’était des prototypes, donc le matériel était forcément fragile et les deux étaient complètement mortes. Les bordures écrasées, l’écran était tassé. On s’est donc retrouvé à un événement presse où l’on n’avait rien à présenter.
Heureusement, on avait une vidéo à montrer, et Franck avait aussi ramené un très ancien prototype mais qui n’avait absolument rien à voir avec l’avancée du projet. Mais disons que ça a fait l’affaire. On a notre ingénieur qui a récupéré les deux consoles cassées, puis il a fait du rafistolage, du resoudage, du recollage pendant toute la nuit avec cette console pour que celle-ci puisse refonctionner pendant le CES.
On a fait ce qu’on a pu et cette console rafistolée a tenu un peu et a lâché quelques jours à peine après l’événement. Voilà un peu ce genre d’histoires que l’on a vécu ! Ce genre d’expériences qui nous donnaient très envie de pleurer !
- Comment se passent les relations avec les éditeurs ? Avez-vous démarché des éditeurs, ou est-ce que ce sont eux qui viennent maintenant ?
Au début, on faisait nos propres prototypes de jeu pour montrer comment ça fonctionnait.
On a présenté ça à différents éditeurs et forcément, au début, ils étaient un peu frileux puisque c’était nouveau et quelque chose qui n’était pas sur le marché.
C’est Ravensburger qui était le premier enclin à se dire « Tiens, et si on allait sur ce terrain-là ? Si on mettait nos plus gros hits qui sont Ramses et Labyrinth sur cette console toute nouvelle ? On va essayer » ! Ils ont été les premiers à nous faire confiance. Puis ont suivi Petersen Games, qui sont derrière Cthulhu Wars.
On a eu un élément déclencheur et ça a suivi, avec Asmodee Digital et d’autres. Les studios indépendants sont plutôt excités : on leur a présenté le projet, il y en a certains qui ont dit « Ah, si je pouvais essayer ! ». On a par exemple un sorte de jeu de football magicien, crée par un studio indépendant, tout comme Urban Rivals, qui sont venus nous voir et qui ont demandé : « nous on a un jeu de cartes en ligne mais est-ce qu’on peut le faire avec des cartes physiques ? ». Donc aujourd’hui on discute encore pour voir comment faire.
On a aussi Roberto Fraga, qui travaille beaucoup avec Hasbro, qui avait des concepts dans les cartons qui ne pouvaient pas faire ça en cartonné et où la console répondait aux besoins. Par exemple, avoir des raz-de-marée, des tremblements de terre ou encore un phare qui bouge et qui permet de voir ce qu’il y a sous l’eau. C’était quelque chose de compliqué sur un jeu de société carton.
Accessoires et achats de jeu
- Comment ça va se passer pour les accessoires ? Est-ce qu’il faut les acheter à côté ou est-ce que l’on a déjà une base d’accessoires avec la console ?
Il y a deux types de jeu : Il y a ceux qui seront 100% dématérialisé qui peuvent être joués de 2 jusqu’à 8 joueurs avec une interface qui sera développée pour avoir ce confort. Ensuite, il y aura les jeux qui vont vraiment nécessiter de la figurine spécifique, comme Cthulhu Wars. Je vois très mal ce jeu sans ses propres figurines.
Je suis quelqu’un qui aime le physique, mais je vois mal certains jeux sans physique. Je suis sensible au touché, le fait de jeter des dés, d’avoir le comptage des dés, toucher son pion… C’est important. Avoir un environnement qui va rajouter quelque chose à cette figurine-là, c’est pour moi quelque chose qui a beaucoup de sens.
Par exemple, le jeu Labyrinth sera 100% dématérialisé. Et Ramses, on aura une loupe qui sera directement vendue avec la console. Il y a des pions qui seront vendus avec la console, et des cartes standards avec un jeu de 52 cartes. Rien qu’avec ces accessoires, on pourra déjà faire plusieurs jeux. (Ndlr : la console sera donc vendue avec le plateau de jeu, un jeu de carte, des pions, et un dé, compatibles avec plusieurs jeux et d’autres accessoires seront vendus à côté pour des titres plus spécifiques).
- On aura donc un store au sein de la console, c’est bien ça ? Comment fonctionne l’achat d’un jeu qui nécessite des accessoires en plus ?
La Fnac par exemple. Ou via ce store, on commande et on reçoit les accessoires ensuite chez soi. On avait aussi dans l’idée que les rôlistes composent leur propre figurine pour les avoir. Si vous imaginez une tête bien précise pour votre personnage, le créer sur le store et le recevoir. Mais c’est vraiment une idée pour l’instant.
- Effectivement, on a vu que la SquareOne avait aussi l’envie d’intégrer les jeux de rôle, est-ce qu’on pourrait imaginer la possibilité de faire, par exemple un panneau du maître du jeu ?
On peut effectivement imaginer ça. Ce n’est pas encore dans les plans. On n’a pas encore trouvé d’éditeur ou de studios pour un jeu de rôle. Cela demande beaucoup de développement et je pense que les personnes concernées vont attendre encore un peu.
Editions collector et créations originales
- Vous avez évoqué des créations originales, pouvez-vous un peu nous les présenter et nous dire comment ça se passe ?
Avec les studios indépendants ou les auteurs de jeux de société, on va soit les chercher, soit ils viennent nous voir. Par exemple, quand on est allé au Game Camp, on y est vraiment allé avec cette envie spéciale de faire des rencontres avec des studios pour créer sur SquareOne.
On a une offre spécifique pour les développeurs : on sait très bien qu’ils prennent un risque sur un produit qui n’existe pas encore sur le marché. Et on souhaite aussi prendre un risque sur les royalties qu’ils vont recevoir une fois que le jeu est vendu. C’est un risque des deux côtés. Nous on sait ce qu’on veut offrir et donner, on sait ce qu’on peut donner et c’est aussi à eux de faire le job. Les studios avec lesquels on travaille aujourd’hui, ça se passe bien.
- Comment vous comptez convaincre les amateurs du physique et lâcher les boîtes pour la SquareOne
Moi, je suis un grand amateur de jeux de société donc je ne cherche pas à être convaincu *rires*. Pour moi, le plateau en carton, ça a son odeur et son charme, et je vais le conserver malgré le fait que j’ai une SquareOne, parce que la SquareOne va justement apporter quelque chose de nouveau que je ne trouverais pas sur une console ou un jeu de société.
Ne serait-ce que pour les sons, pour sauvegarder, la prendre avec sous le bras et voir ses potes pour jouer à des jeux, tout ça, a du sens pour moi.
Parce que partir avec plus de 150 boîtes de jeux de société… Va falloir un mini-van ! Là on s’en sort avec seulement 4 kilos.
Pour ce qui est de l’expérience que j’en ai, pour avoir participé à de nombreux salons et autres conventions, dès que les gens voient le concept, ils trouvent ça génial. On a des graphismes et des choses que l’on ne retrouve pas ailleurs. La séduction se fait au delà de la division entre le physique et le dématérialisé.
- Est-ce que l’on aura droit à des éditions collector ou des contenus exclusifs ?
Oui, clairement, il y aura des éditions collector.
Tarifs de la console et des jeux
- Quel sera le prix de la SquareOne ?
Pour l’instant, je ne peux pas encore vous dire le prix exact que l’on aura sur le marché, comme par exemple à la Fnac. Je ne sais pas encore en fait. Mais on est bien sur un prix premium, dans l’ordre des 400/500€. Aujourd’hui, nous n’avons pas encore composé les packs, avec les jeux qui seront inclus etc… Il y aura sans doute des packs avec des jeux, mais vu que rien n’est encore fixé, je ne préfère ne pas m’avancer davantage.
- Et pour les jeux, quel prix visez-vous ?
Vu que l’on sera sur du dématérialisé, on sera sur quelque chose de moins cher que ce que l’on retrouve dans le commerce en version physique cartonnée. D’autres, par exemple, Cthulhu Wars, si on a une édition premium comme on l’imagine, ça pourrait coûter 80€, sachant que le jeu de société de base coûte dans les 200€. Mais là, on est sur un jeu avec des figurines spécifiques.
- On reparlera du jeu en ligne après, mais puisque l’on parle des prix : est-ce qu’il faut payer pour jouer en ligne ? Est-ce qu’il y a un abonnement nécessaire ?
Aujourd’hui, le joueur ou la joueuse ne payera pas d’abonnement en ligne pour jouer : il se connectera, il trouvera quelqu’un à l’autre bout de la planète et ils joueront ensemble.
- On aura donc du matchmaking ?
C’est en tout cas l’objectif. Mais on pourra jouer avec ses amis qui se trouvent à l’autre bout du monde.
- En parlant d’abonnement, est-ce que l’on peut imaginer – à moyen ou à long terme – un abonnement mensuel qui permettait aux joueurs d’avoir un catalogue fixe, un peu comme on a sur les consoles plus classiques ?
C’est quelque chose qui est envisageable mais qui n’a pas encore été étudié. Je pense que cela se fera au fil du l’eau et en fonction des besoins de chacun. On essaye vraiment d’être à l’écoute de notre communauté et si c’est quelque chose qui leur plait, pourquoi pas le mettre en place.
- Comment ça va se passer pour les protections et la garantie ?
Il y aura des protections sur l’écran. Celui-ci sera déjà bière-proof, donc pour faire tomber son verre dessus. On pourra même faire tomber du liquide dessus et cela ne va pas forcément l’abîmer. On sait que c’est un élément qui est au milieu de la table et qu’il faut faire attention, pas comme une console standard qui est généralement rangée dans le meuble-télé. On a pris en compte cet élément et ça rejoint un peu notre expérience évoquée plus tôt avec les consoles cassées.
- Combien de jeux devrait-on avoir au lancement de la console ? Quel est le rythme de sorties ensuite ?
Je pense que l’on aura entre 20 et 30 jeux au lancement. Pour la suite, on n’a pas encore de roadmap prédéfinie mais ça viendra.
Une console pour les gouverner tous
- Comment voyez-vous l’évolution du catalogue à long terme ?
Aujourd’hui, si on prend l’exemple de Cthulhu Wars, il s’agit d’un jeu de niche. C’est vraiment un jeu hardcore gamer pur et dur. Je doute que ma mère y joue. Elle pourrait essayer mais je ne suis pas sûr qu’elle soit prise dedans *rires*. Par contre, Labyrinth ou Ramses, on pourrait y jouer avec plaisir. Ce n’est pas forcément la première cible.
Notre cible se situe entre 28 et 35 ans, voire 40 et ce sont des personnes qui ont soit une vie de famille, soit des personnes qui aiment beaucoup partager des moments avec leurs amis. On a voulu avoir un catalogue suffisamment large avec des titres qui vont de Labyrinth à Cthulhu Wars et aussi des jeux indépendants qui ne sont pas forcément des jeux accessibles à tous mais qui pourraient toucher ce public. Ce public-là, comme ils ont souvent des enfants, autant mettre des jeux pour enfants.
- Justement, en parlant des enfants, est-ce qu’il est prévu quelque chose pour eux ?
Et même mieux encore, on pense avoir un timing sur le jeu.
- Et est-ce qu’il y aura des IA si l’on veut jouer tout seul ?
Pour l’instant, les IA ne sont pas encore prévues pour jouer tout seul parce que ce qu’on souhaite vraiment, c’est que les gens partagent des moments ensemble. C’est plutôt le mode en ligne qui correspond à ça. Après, l’IA, ça pourrait venir dans le futur mais pour l’instant, on veut que les gens jouent entre eux.
Je ne sais pas si vous avez déjà fait des jeux de société avec des personnes que vous ne connaissez pas, dans des salons ou autre, eh bien au bout de 5 minutes, ça commence à s’insulter alors que ça ne se connait pas. Je trouve ça génial ! C’est convivial !
- En parlant de convivialité, il y a une fonctionnalité pour traduire les règles, c’est bien ça ? Est-ce qu’on l’aura dès le lancement ?
Oui, on espère que ce sera-là pour le lancement. Quand on joue à la SquareOne, on entoure la console. On n’est pas tous du même côté de la table face à l’écran et on entoure la console. On a fait en sorte que les images qu’il y a, puissent être vues de chacun des côtés. Avec un angle différent mais que cela reste facile à regarder.
Chacun aura ses propres pop-up, qui seront spécifiques à chaque joueur, dans lesquels la langue pourra être différente. Le didacticiel, par exemple, les explications seront en anglais pour quelqu’un qui parle anglais.
Imaginez Yu-Gi-Oh prendre vie ou Fallout sur la Square One
- On va faire le parallèle avec le jeu vidéo, à long terme, est-ce que vous prévoyez des partenariats avec des licences de jeu vidéo ou des jeux de société qui reprennent des jeux pour les adapter sur la SquareOne, comme le jeu de société Metal Gear Solid ou Horizon Zero Dawn ?
C’était au FIJ de 2019 ou de 2020 je crois, j’étais passé à côté d’une table de jeu qui présentait le jeu de société Fallout. Je suis un fan des anciens Fallout où l’on regardait en 3D isométrique. Et quand j’ai vu ce jeu de société, je me suis dit « Je veux ça ! ». Donc oui, c’est prévu, j’aimerais beaucoup que ça se fasse.
- Question un peu plus folle : est-ce qu’on pourrait imaginer du Magic ou du Yu-gi-oh! adapté sur la SquareOne ?
Ouais large, je me vois bien avec mes cartes Magic où le dragon apparaît sur l’écran et l’autre pose sa carte en face de moi sans que je sache ce que c’est. Ce serait le rêve. On a eu des discussions avec les créateurs de Magic et ils sont intéressés mais on est encore trop en avance. Une fois qu’on sera commercialisé, peut-être qu’ils verront pour mettre leurs cartes Magic dessus.
- Un mot de la fin ?
C’est vrai qu’aujourd’hui, on a toujours eu un super accueil dans les salons. Que ce soit dans le milieu du jeu vidéo ou celui du jeu de société. j’ai toujours vu cette scission qui était proposée par des speakers ou autre en mode « jeu de société contre le jeu vidéo », et j’ai toujours trouvé que c’était un manque de maturité. je trouve que les deux se complémentent avec une telle force qu’aujourd’hui, avec la SquareOne, on va vraiment pouvoir tester cette fusion entre les deux. C’est vraiment comme ça que je vois les choses.
Tout le côté social que je retrouve dans le jeu de société, c’est à dire, insulter son partenaire, qu’on ne connait pas toujours, au bout de deux minutes, je l’ai retrouvé sur SquareOne. Pareil, j’ai eu un moment très touchant dans un salon : c’était à la Gamescom de Cologne, il y avait un enfant qui devait avoir 8/10 ans qui était avec son grand-père qui devait avoir 60/70 ans.
Et il y avait une console qui était disponible, le gamin s’est assis, à commencer à jouer avec, le grand-père l’a rejoint et ils ont commencé à jouer ensemble sans que personne ne leur dise rien. J’ai trouvé ça tellement fort. Je trouvais cette scène vraiment touchante parce qu’on avait deux générations complètement distinctes qui étaient dans la même phase de compréhension et il y avait personne qui avait besoin de leur expliquer. J’ai trouvé ça génial.
Un grand merci à Damien Botta pour son temps et pour cette interview. La SquareOne est prévue pour la fin d’année 2022, avec des premiers envois pour les préventes en septembre. Il est encore possible de faire partie des premiers acheteurs en réservant la console avant le 15 novembre à cette adresse. Celles et ceux qui préachètent auront droit à quelques bonus en plus.
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