Les productions à visée écologique fleurissent ces dernières années dans nos salons. Dernièrement, la condition des animaux suite à la déforestation était dépeinte dans Endling: Extinction is Forever par exemple. Le réchauffement climatique, couplé aux agissements de l’espèce humaine depuis l’industrialisation de notre monde étant au coeur des sujets d’actualités, il est normal de voir des développeurs surfer sur cette vague écolo en proposant des projets sortant pour certains du lot.
C’est le cas d’After Us, présenté en décembre dernier, soit il y a seulement quelques mois, et qui nous promettait d’incarner Gaïa, l’esprit de la vie, revenant sur Terre pour rendre leur liberté à des âmes d’animaux aux espèces éteintes, tout en essayant de sauver la Terre laissée complètement à l’abandon par ses locataires, nous. A noter que le jeu sort ce 23 mai sur PC, PlayStation 5 et Xbox Series X/S au prix de 30€.
After Us est développé par le le studio Piccolo basé à Barcelone, studio déjà à l’œuvre sur le magnifique Arise: A Simple Story en 2019. Nous avions déjà eu l’opportunité de nous pencher sur ce titre il y a de cela quelques semaines, et bien que le postulat fût prometteur, nous émettions quelques réserves, notamment concernant sa maniabilité. Alors, qu’en est-il maintenant que nous avons bouclé intégralement l’histoire ? Attention, ça pique…
Conditions de test : Nous avons porté secours à notre chère planète Terre durant près de 12h, temps nécessaire pour sauver 90% des esprits égarés et récolter la quasi-totalité des souvenirs à retrouver, le tout sur PlayStation 5, grâce à une copie du jeu envoyée par l’éditeur.
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ToggleIl y a fort longtemps…
Le concept d’After Us est des plus étonnants. Vous incarnez Gaïa, un esprit immaculé de blanc créé par ce qui semble être Mère Nature, dans le but ultime de préserver une grande quantité d’espèces animales éteintes en récupérant leurs esprits égarés, la planète Terre étant désormais totalement inerte suite à ce que l’on comprend comme étant dû aux agissements de l’espèce humaine. Le cadre écologique et philosophique planté, After Us devient de plus en plus subtil qu’il n’y parait au fil de l’avancée dans sa narration, au point de réellement faire réfléchir les joueurs et joueuses sur la nature humaine, ses faits et méfaits ainsi que ses conséquences à court et long terme.
Sans jamais réellement prendre parti ou dériver dans une fable moralisatrice, After Us tire la sonnette d’alarme en dépeignant le pire ce qui qualifie l’Homme moderne dans la plus grande médiocrité : pêche de gros à foison, chasse de masse, surconsommation, technologies, pollution rendant l’air et les océans inhabitables, mondialisation, travail acharné à la chaine, abattage etc. Que des thèmes effectivement lourds, ce qui nous permet de vous prévenir d’emblée : After Us ne fait pas dans la dentelle et ne vous ménagera pas émotionnellement parlant.
Via ses tableaux d’une justesse et d’une beauté incroyable, les développeurs de Piccolo veulent nous mettre le nez dans nos méfaits quitte à regarder en face ce que les humains ont fait, parvenant même à nous culpabiliser par moment alors même que nous incarnons la salvatrice désignée, par de simples ajouts, un personnage posé ici, un autre posé là, parvenant à nous faire passer leur message, tantôt concernant le poids porté sur nos épaules, tantôt concernant l’aliénation certaine du peuple représenté envers les technologies.
Gaïa va devoir en effet parcourir les terres désolées de notre chère planète bleue, à la recherche d’esprits égarés, tout en parvenant à ramener la flore à la vie par endroits afin de redonner une bouffée d’air frais aux zones concernées et recommencer à produire de l’oxygène. Mais attention, car les dévoreurs trainent dans le coin. Ce sont des êtres humanoïdes aux yeux rouges qui vous chasseront sans pitié pour vous voler toute votre énergie et vous tuer. Des êtres tristes et sans cœur, autrefois humains mais aux souffrances décuplées. Ces mêmes humains que l’on apercevra en très grand nombre, figés, les regards implorants, tels des statues de pierre fuyant le péril, des images à vous glacer le sang.
L’objectif global du jeu est de parvenir à retrouver 8 réceptacles de grande envergure comme un requin, un cochon, un chien etc., symbolisant 8 animaux majeurs ayant disparu. Sur le chemin de ces réceptacles se trouveront 100 esprits éparpillés dans l’environnement, souvent bien cachés, et qu’il vous faudra également ramasser en guise de collectibles. Rien d’obligatoire ici, mais ceux qui adorent collectionner dans les jeux seront ravis. A noter qu’une fois l’histoire terminée, vous pouvez revenir sur vos pas pour refaire les tableaux non complétés à 100%.
En parlant d’histoire, il vous faudra compter environ 8h en ligne droite et près de 12h si vous souhaitez tout ramasser, les esprits blancs étant accompagnés de souvenirs jaunes, à ramasser sur vos ennemis les dévoreurs, et au nombre de 89 au total, ce qui faut au total un joli pactole. Pas de panique, Gaïa dispose d’un sens accru pour repérer les objets à ramasser, en pressant Carré, des lucioles colorées de la couleur de l’objet décolleront de la jeune sauveuse pour se diriger vers la cachette. De quoi aider les plus fainéants mais restant tout à fait optionnel pour ceux ou celles voulant un peu plus de challenge.
Il faut noter que la narration d‘After Us est tout particulièrement réussie. Bien que l’on note quelques longueurs, notamment dans le second quart du jeu, la multitude de biomes à traverser et aux mécaniques différentes de surcroît suffisent à nous faire continuer l’aventure jusqu’à son apogée surprenante dans sa réalisation, mais prévisible. A noter qu’en toute fin de jeu, vous récoltez un élément unique et caractéristique (un NFT gratuit en quelque sorte), histoire de symboliser votre réussite, mais aussi celle des autres joueurs et joueuses, mais nous ne vous en dirons pas plus à ce sujet.
La bêtise humaine fait froid dans le dos
Le gameplay d’After Us se compose de seulement quelques touches, permettant ainsi de gagner en assurance, rapidité d’exécution et d’adresse au fil de l’aventure. Gaïa est capable de marcher, mais le jeu vous encourage à la faire glisser sur le sol, à l’instar des deux héros de Haven, avec une trainée blanche se transformant en fleurs derrière son passage, symbolisant à nouveau la pureté de l’être que vous incarnez. Vous disposez d’un saut, d’une double-saut mais aussi d’un dash (accessible avec R2), qui constitueront le coeur de vos déplacements.
S’ajoutent à cela une touche pour envoyer son coeur d’âme en direction d’objets à ramasser, éléments du décor à activer ou encore ennemi à désarçonner, les combats faisant également partie intégrante de l’aventure, nous y reviendrons. Une simple pression sur L1 ou L2 vous permettra d’envoyer votre coeur, tandis qu’un appui prolongé vous permettra de créer une onde de choc et de verdure, vous permettant de sécuriser votre périmètre direct, mais aussi de faire disparaître une partie de la boue noirâtre encadrant votre terrain de jeu.
Nous l’avons vu, le sol de la planète étant littéralement dévoré par la pollution, une substance noire et vivante par ailleurs balise votre chemin, transformant After Us en un jeu couloir et très loin du monde ouvert, ce qui est appréciable car la narration est ainsi globalement mieux maitrisée. Le simple fait de s’approcher d’un peu trop près suffira à vous faire engloutir et c’est le Game Over.
Les routes demeurent alors très bien balisées et les chemins à emprunter lors de zones plus ouvertes sont très bien identifiés grâce à une narration environnementale au poil, comme par exemple avec la présence de lampes à pétroles, de planches en bois discrètes, de lianes etc., rendant l’ensemble cohérant et ne nécessitant donc pas de gros curseurs ou traces de peintures, After Us ne bénéficiant d’ailleurs pas de mini-map, la seule carte accessible étant celle des constellations formées par les esprits, vous permettant de voyager rapidement entre les raccourcis débloqués, certains chemins se séparant en plusieurs autres vous forçant à revenir plus tard pour accéder à d’autres réceptacles.
Il n’y aura pas vraiment de puzzles à élucider dans les niveaux traversés mais certaines mécaniques vous demanderont un timing parfait comme des voitures volantes dans les usines, ou encore de la rapidité, on pense notamment à l’extinction de mèches faisant exploser des barils dans la carrière, ou encore des courses poursuites contre un filet de pêche ravageur par exemple. Une multiplicité de situations bienvenues, qui renouvellent l’expérience et qui sont souvent propres au niveau traversé. Mention spéciale aux arbres magiques qui poussent et vous transportent dans les hauteurs dans le niveau du parc national, que l’on aurait aimé retrouver ailleurs.
Nous l’évoquions plus haut, dans After Us, les combats sont partie prenante de votre épopée et à de maintes reprises. En effet, de nombreux dévoreurs se lanceront à vos trousses, il vous faudra donc esquiver leurs attaques pour les prendre à revers la plupart du temps et leur envoyer votre cœur pour les affaiblir puis faire disparaître leur souvenir agressif. Parfois, ils vous attaqueront même en horde, vous forçant donc à fuir par moments, rajoutant du stress à l’action et aux phases de plateforme. Rassurez-vous, les points de sauvegarde sont légion, gardant en mémoire les ennemis abattus et les plateformes traversées, ce qui nous permet de tempérer vos ardeurs contre la technique du jeu, qui est, disons-le franchement, complètement à la ramasse.
Gaïa se prend les pieds dans le tapis
Aïe. Même si les premières heures nous ont semblé assez bien peaufinées et sans trop de bug à signaler, nous ne pouvons en dire autant de la seconde moitié du titre. Un ou plusieurs patchs seront nécessaires pour corriger tous les problèmes rencontrés durant notre test, mais il vous faut savoir que, bien que cela a légèrement dégradé notre expérience, et par conséquence notre verdict ici, cela n’enlève rien à la qualité narrative, ludique et artistique du jeu, qui par ailleurs parvient à tirer parti de la DualSense, correctement mise en œuvre ici avec des lumières adaptées et de fines vibrations haptiques à des moments précis.
Mais malheureusement, durant notre test sur PlayStation 5, nous avons été confrontés à de maintes chutes de framerates, sans raisons apparentes et résolutives après un redémarrage du titre, de gros freezes de plusieurs secondes à certains moments de sauvegarde ou de changements de lieux, mais surtout énormément de bugs de collision et pas moins de 7 crashs, nous demandant de redémarrer le jeu. Nous aurions pu minimiser ces aspects techniques mais notre devoir est de vous prévenir de ce genre de bévues : dans l’état actuel, vous pourriez être démunis face au manque de polish de la seconde moitié du titre et les patchs post-lancement doivent absolument corriger cela, d’autant plus que nous sommes sur consoles de nouvelle génération. Il en est de même des textures par moments, par toujours très bien définies, surtout en lieux étriqués.
Et que dire des phases de plateforme, qui pour certaines, relèvent pratiquement de la catastrophe, tout simplement à cause d’une gestion de caméra mauvaise. Vous devrez de nombreuses fois retenter votre chance en croisant les doigts que votre saut ou votre dash passe, sans que votre caméra ne vous gêne dans les coins exigus, caméra étant par ailleurs placée trop loin de votre personnage la plupart du temps, n’aidant pas à identifier sa position exacte, Gaïa étant par ailleurs minuscule dans les décors.
Mentionnons également les contrôles, dont la fluidité et la responsivité ne sont pas des plus optimales, avec la nécessité de faire une pause avant de retenter un saut sur la plateforme suivante, sans quoi vous risquez de vous embourber. On aurait aimé davantage de souplesse dans ces phases qui sont en plus nombreuses avec même la possibilité de se hisser par exemple. On pense notamment aux voitures ou aux petites plateformes rocailleuses flottantes, dont le cercle concentrique situé sous Gaïa lorsqu’elle se trouve en l’air ne suffit pas à la placer correctement, ou quand elle glisse et tombe alors qu’elle atterrit correctement sur une plateforme adaptée.
Heureusement, tout n’est pas à jeter dans la production de Piccolo Studio, surtout si l’on aborde le soin apporté aux mélodies du jeu, certes quasiment toutes mélancoliques et peu enjouées, mais qui collent parfaitement à l’atmosphère voulue par le message qui nous est transmis. Il en est de même finalement pour la direction artistique et ses magnifiques panoramas de désolation rencontrés à maintes reprises : bâtiments décharnés, orages au loin éclairant partiellement des structures défoncées, une ferme touchée par une horrible sécheresse, et tant d’autres. Un coup de poignard même par moments, tant la tristesse des lieux transparaît à l’écran grâce à un choix de couleurs, d’éclairages et de juxtapositions de plans mûrement réfléchis, bravo !
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