Avant toute chose, il faut savoir qu’Agony est issu d’un projet Kickstarter ayant brillamment réussi sa campagne – un peu plus de 120.000 € récoltés sur environ 40.000 € demandés. De plus, il s’agit bien évidemment de la toute première grosse production du studio polonais. D’ailleurs, on ne le sait que trop bien, la Pologne est en plein essor dans l’industrie du jeu vidéo, et notamment grâce à un certain CD Projekt et sa licence The Witcher, voire Techland et ses titres zombiesques avec Dead Island et Dying Light. Aujourd’hui, c’est Madmind Studios qui nous sort Agony et justement, le studio polonais nous a-il pondu une vision de l’enfer particulièrement réussie après moult reports ? Réponse dans notre test.
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ToggleUne Agony sans fin
La production de Madmind Studios vous place dans la peau d’une âme torturée, tout fraîchement arrivée dans le plus profond des enfers. Le bougre ne se souvient plus vraiment de qui il est, ni de comment il a atterri là. Son objectif principal sera de sortir de cet enfer des plus glauques et sanguinolents mais pour ce faire, notre protagoniste devra aller chercher des réponses du côté de la mystérieuse Déesse Rouge. Et qu’on se le dise, cette dernière, transpirant de perversité, pourra bien donner du fil à retordre à notre personnage, qui aura besoin de son aide pour sortir des enfers.
D’entrée de jeu, la narration d’Agony est aguicheuse, et nous donne surtout affreusement envie d’en savoir bien plus sur toute sa finalité. On reste tout le long du jeu intrigué de savoir qui est véritablement notre personnage, sans que l’on n’ait toutefois une réponse véritablement claire à ce sujet. Il faut d’ailleurs noter que le soft comporte pas moins de sept fins. Mais lors de votre première partie, vous obtiendrez assurément la fin normale, qui reste d’une part décevante mais d’autre part, cela permet aux joueurs de se faire une libre interprétation de ladite fin. En revanche, la grosse ombre au tableau est qu’il sera totalement impossible de savoir comment obtenir les autres fins, étant donné que l’on nous donne assez peu d’indications sur comment les obtenir, et c’est plutôt frustrant. On aurait pu penser que les rares choix de dialogues puissent apporter quelque chose, mais il n’y a que seulement deux petits choix disponibles systématiquement…
Côté censure pour passer à autre chose, qu’en est-il à propos d’Agony ? Eh bien, il faut savoir que les développeurs avaient déclaré que le patch anti-censure ne verrait finalement pas le jour. Mais, a priori, cela n’a vraiment que peu d’incidence sur le contenu du titre. En effet, Agony s’offre malgré tout un gros côté sexuel très malsain, organique et affreusement gore, présent tout le long du jeu. En fait, ce qui semble avoir été censuré, ce serait un peu plus de vingt secondes de jeu, vis-à-vis de deux des fins d’Agony. Reste que tout cela paraît flou, et on ne saura probablement jamais ce qui a été réellement censuré car le soft se permet tout entre vulgarité, scènes de sexe, violence extrême, nudité, et gore.
Justement, que vaut qui plus est l’atmosphère d’Agony ? Cela reste tout simplement le point fort du soft. Tout d’abord, il y a cette direction artistique, nous plongeant dans les abysses les plus profondes de l’enfer. On s’amusera à parcourir des environnements à base d’organes en guise de portes, des rivières ensanglantées où gisent des membres humains, et j’en passe. De plus, le studio a clairement mis le paquet en ayant le moindre soucis du détail sur cette atmosphère complètement crade, avec des créatures qui ont de quoi être oppressantes au niveau de leur design. De ce côté là, Madmind Studios a réussi son pari de proposer une vision de l’enfer vraiment très dérangeante, et qui fonctionne du début à la fin. Le studio polonais s’est également pour le coup inspiré de pas mal de mythologies de-ci de-là, comme la mythologie biblique par exemple.
Un gameplay à l’Agony ?
Agony ne révolutionne pas vraiment le genre du survival-horror, et s’inspire assez largement de la licence Amnesia dans son gameplay, qui ressemblerait presque à un walking simulator par moment. Vous êtes dénués d’armes et vos meilleurs amis durant votre périple seront votre furtivité, votre torche, ou bien encore la possibilité de posséder bon nombre de créatures des enfers. Effectivement, notre personnage pourra dans un premier temps se baisser pour entrer en mode furtif, mais aussi retenir sa respiration pour éviter de devenir le plat de résistance des nombreuses créatures démoniaques qui rodent non loin de là. Cette mécanique n’invente absolument rien qu’on soit clair, mais on pourra être frustré par l’I.A., parfois bien trop sur ses gardes, même si vous passez en mode furtif. Du coup, vous serez parfois obligé de prendre vos jambes à votre cou, et ainsi espérer arriver à la prochaine zone suivante, et trouver un précieux checkpoint à activer. Cet aspect « infiltration » est donc un peu raté de ce côté là voire complètement inexploité, et c’est bien dommage. On ne parlera pas de certains monstres qui peuvent vous chopper et vous tuer d’un seul coup, sans que vous ayez la possibilité de vous débattre…
Pour le reste, nous avons la faculté de posséder n’importe quels monstres des enfers. De base, au début de l’aventure, vous ne pourrez contrôler que des martyrs, qui sont les créatures de base des enfers, et ne pouvant donc attaquer, juste se la jouer fine. Mais, au fur et à mesure de votre progression, le jeu vous donnera la possibilité de contrôler des créatures un peu plus imposantes, et cela procure un bon sentiment de puissance comme on l’aime. Par contre, ces derniers ne se contrôlent que de manière temporaire, et vous devrez donc soit les posséder de nouveau, ou soit trouver un martyr non loin de là, qui est la seule créature que l’on peut posséder indéfiniment. Cette fonctionnalité de jeu devient finalement très lourdingue à la longue, et nous vous recommanderons fortement au passage de passer directement en possession automatique, car le mode manuel est complètement chaotique à manier avec cette caméra totalement à l’agonie… Il y a également un système d’aptitudes avec des fruits défendus à récupérer pour vous octroyer un point de compétence. Vous pouvez ensuite le répartir sur seulement trois très petits arbres à compétences, mais ce système est encore une fois sous-exploité, et totalement dispensable car les différences ne se voient pas en jeu.
Entre les créatures qui vous colleront aux basques et vous donnent un gros sentiment d’oppression mine de rien, il y aura quelques phases d’énigmes. Vous devrez les passer obligatoirement afin de progresser dans le jeu. Au programme, vous aurez un peu trop souvent des crânes ou des cœurs à récupérer et à placer aux endroits indiqués, mais aussi des puzzles à base de symboles, dont vous devrez trouver le bon, le dessiner avec le sang de votre martyr, et ainsi continuer à progresser. Les développeurs tentent parfois de varier le tout rien qu’avec ces simples mécaniques de jeu, mais on sent assez vite le côté répétitif de ces énigmes, qui sont au passage d’une facilité déconcertante et peu inspirées.
On pourra toutefois compter sur des niveaux relativement grands. En effet, le soft de Madmind Studio dispose de quatre chapitres, mais découpés cependant en plusieurs zones à explorer. Il est juste impossible de toutes les visiter sur une première partie, et le nombre de choses annexes à réaliser reste juste colossal – collecter des statuettes, découvrir des chambres dorées, rouges etc… -, et pourrait certainement vous permettre d’accéder aux autres fins d’Agony. Cependant, on pourra souffler sur la lisibilité de l’action, parfois relativement confuse, due à une luminosité assez basse – il faut augmenter significativement les gamma pour y voir au moins quelque chose -, à un effet de flou dérangeant et surtout, à des décors un peu trop chargés à notre goût. Aussi, le peu d’indications données pour savoir où aller devient vite gavant, même si vous avez toujours la possibilité d’utiliser une ligne du destin, vous permettant de voir approximativement où aller et encore…
Hormis également quelques déplacements lourds et rigides, saupoudrés de petites phases de plateformes archaïques, que nous propose Agony au niveau de sa difficulté ? Concrètement, le titre se dote de trois modes traditionnels de difficulté à savoir facile, normal et difficile. Il est également possible de choisir le nombre de lignes de destin en illimité ou non, tout comme le nombre de mort avant que le checkpoint, représentant un miroir, se brise. Tout est assez personnalisable pour que le joueur casual ou hardcore y trouve son compte. Dans l’ensemble, Agony ne se révèle pas être si difficile que ça, surtout si vous êtes un amateur de survival horror.
Le tout est dans l’ensemble équilibré, et pour voir le bout du mode histoire sur une première partie en rushant, comptez entre six et sept heures. Pour assurer la rejouabilité, le soft s’offre un mode succube, qui comme son nom l’indique vous propose de contrôler directement un succube dans une histoire alternative, puis le mode agonie. Ce mode-là vous permet de parcourir diverses chambres générées de manière procédurale, avec une composante multijoueur pour comparer vos stats avec vos amis que ce soit en mode survie, ou en contre-la-montre. Pour un jeu tarifé à 39.99 € sur consoles puis à 29.99 € sur PC, les joueurs en ont pour leur argent car la rejouabilité est assurée, notamment si vous voulez cherchez à obtenir toutes les fins du jeu.
Une technique et un sound design maîtrisé
Tout ce que l’on pouvait attendre d’Agony en matière de graphismes, c’est que ce soit forcément assez joli car le titre tourne sur de l’Unreal Engine 4. Indéniablement, et en dépit d’une lisibilité parfois calamiteuse, le titre semble correct sur PC, avec des textures tantôt agréables pour la rétine, et des textures tantôt moches avec des retards d’affichage… Côté arrière-plans, ce n’est vraiment pas la joie non plus par moments, mais Agony se paie le luxe de se sublimer avec quelques beaux effets de lumière, et surtout des graphismes d’un gore se révélant particulièrement efficaces. Honnêtement, sans être non plus une immense claque technique, Agony s’en tire pas trop mal sur PC.
A contrario, on pourra être frustré par des animations manquant cruellement de finitions, quelques gros bugs de collision en sus d’un moteur physique parfois bugué. Franchement, cela ternit parfois l’expérience sur PC et c’est bien regrettable, car les développeurs avaient littéralement le souci du détails en ce qui concerne l’atmosphère horrifique et cauchemardesque. Concernant le titre sur consoles, on ne sait pas de quoi il en retourne concrètement, mais on se doute que le bébé de Madmind Studio s’offrira certainement un downgrade graphique sur PS4 et Xbox One. Néanmoins, et malgré quelques crashs et parfois quelques saccades sur la version PC que nous avons testée, Agony s’offre une optimisation plutôt correcte avec du 60 FPS pratiquement constant, lui permettant d’être tout à fait jouable.
Pour ce qui est du Level-design maintenant, Madmind Studios semble aussi maîtriser son sujet. Agony jongle entre level-design horizontal et vertical, et il faut dire que le tout reste bien foutu. Mais évidemment il y a quelques exceptions à la règle, comme notamment plusieurs passages parfois tellement labyrinthiques, que l’on ne sait concrètement plus où aller, même si la ligne du destin nous donne au moins une légère indication sur où aller. A boire et à manger en somme, il y avait mieux à faire même si tout n’est pas à jeter.
On finit en trombe avec la bande-son du jeu, qui reste également un énorme point fort du jeu avec sa direction artistique. Les bruits de souffrance, de personnes qui pleurent ou encore de bébés criant à l’agonie nous procure un gros sentiment de malaise dans cette ambiance déjà morbide à la base. Les diverses musiques nous font parfois ressentir un assez gros sentiment d’oppression et de tension, surtout lorsque certains démons se mettent à notre poursuite. Y’a pas à dire, c’est réussi de ce côté là, tout comme les doublages en V.O. du titre, tout simplement impeccables, qui nous font particulièrement ressentir tout l’aspect pervers de la Déesse Rouge notamment, qui visiblement trouve toute sa jouissance dans la douleur et la souffrance d’autrui.
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