Le fan de RTS n’a pas vraiment l’opportunité d’être exigeant tant le genre se fait rare ces derniers temps. Certes il y a toujours quelques valeurs sûres qui tournent toujours comme Starcraft II et les Total War, ou des titres prometteurs tels que le déjà excellent They Are Billions, mais on reste à des années-lumière de l’âge d’or du genre au niveau de la quantité. C’est donc avec un peu d’appréhension, mais aussi un peu de curiosité et d’espoir qu’on plonge en plein Moyen Âge avec Ancestors Legacy.
Sommaire
ToggleD(rakkar)-Day
Le titre a le mérite de débuter très fort avec une séquence d’ouverture entièrement en plan-séquence très réussie. On y suit un guerrier viking qui débarque sur les terres anglaises et se lance dans la bataille en éliminant un à un ses adversaires avant de se faire surprendre par un lancier. À peine la séquence terminée qu’on se pose déjà de grosses questions à la vue de l’interface du jeu. Grossier, tout droit sorti d’une autre époque et absolument pas personnalisable ou ergonomique, la vraie bataille va se jouer sur les contrôles plus que sur le terrain. L’expérience de jeu est grandement handicapée par ces soucis de prises en main et de lisibilité des informations même les plus importantes. Espérons qu’un patch viendra régler ces fâcheux soucis en donnant au moins l’option de réduire la taille de bousin qui prend franchement un gros tiers de l’écran.
C’est malheureusement aussi un gros problème lors des combats qui reposent beaucoup sur la micro-gestion de chaque escouade. Toutes les unités disposent d’une ou deux compétences comme une posture défensive pour les lanciers, ou un mode berserker pour les berserks (bien vu). Le déclenchement de ces aptitudes, souvent limités par des temps de récupération, est rapidement problématique tant il est compliqué de savoir quelle escouade fait quoi lors des affrontements. Il arrive régulièrement que deux escouades alliées soit côte à côte mais qu’une seule des deux soit en train de combattre, le temps de s’en rendre compte c’est déjà une poignée de soldats perdus. Il n’est donc pas rare que l’on déclenche une compétence dans le vent ou sur la mauvaise escouade.
Il faut aussi surveiller que chaque escouade a bien reçu son amélioration d’armure en faisant attention à ne pas lui mettre une armure lourde (qui ralentit sa vitesse mais augmente la défense) par inadvertance. On passe beaucoup (trop) de temps à jongler entre ses escouades pour vérifier que tout est bien en ordre, même après avoir passé un bon paquet d’heures sur le jeu. Un bon point tout de même pour la gestion de la santé des unités et leur montée de rang. Une escouade de haut niveau qui a perdu une majeure partie de ses hommes peut être reformée contre quelques ressources à condition d’être proche d’un camp allié. Chaque escouade pourra aussi se spécialiser dans un domaine : dégât, défense, vitesse, précision. Au joueur de trouver l’équilibre, bien que tout miser sur les dégâts pour les unités au corps-à-corps (et sur la précision pour les unités à distance) semble toujours être la réponse à tout.
Tort Ragnarok
En revanche, on peut dire que Destructive Creations n’a pas menti concernant la violence du jeu, sujet décidément très cher à leur cœur. Il suffit pour cela de voir les soldats tuer à la volée les villageois qui passent un peu trop près d’eux, les tas de cadavres ensanglantés qui jonchent le sol après une bataille, ou encore les soldats qui virent tous au rouge foncé s’ils survivent à suffisamment d’affrontements. Il est possible de plonger au cœur des combats avec une cinematic battle cam qui fait son petit effet (bien que son utilisation soit calamiteuse). Un outil qui fera le bonheur des streamers avant tout car elle n’est là que pour le spectacle, impossible de donner un ordre lorsqu’elle est en action. D’ailleurs si j’ai mentionné la passivité de certaines unités de corps à corps, les archers ont eux la gâchette facile. Les archers sont de loin les unités les plus efficaces du jeu, leur portée et leur puissance en font l’unité la plus féroce du jeu, le problème c’est qu’il a du tir allié. Le positionnement des archers est donc à réfléchir pendant les combats si vous ne voulez pas que la prochaine salve de flèche décime (littéralement) votre escouade coincée entre les ennemis et les arcs.
Il faut donc bien faire attention à l’attitude de ses hommes et ne pas hésiter à battre en retraite pour sauver une poignée d’hommes et reformer l’escouade plutôt que de repartir de 0, ainsi cette dernière conservera son expérience et ses améliorations. L’issue d’un combat peut facilement être devinée à l’avance, nous laissant la possibilité d’éviter l’affrontement dans la mesure du possible. Outre les différences de niveau entre les escouades, il faut aussi penser que la lance bat la hache, qui elle bat l’épée, qui elle bat la lance etc. Oh et n’espérez pas obtenir quoi que ce soit de la cavalerie qui n’a pour elle que sa vitesse de déplacement mais qui se fera décimer par n’importe quelle unité d’infanterie. Pareil pour les armes de siège, trop lentes et trop dangereuses pour nos hommes. Au final, on se retrouve souvent avec 3 ou 4 escouades d’archers et le reste en infanterie et l’issue des combats peut se jouer uniquement sur une embuscade bien placée ou l’arrivée préméditée de renfort sur le flanc de ses adversaires. Bref, le tout est vraiment très brouillon et pas toujours agréable à prendre en main, mais les nombreuses animations de combats et le sound design rend les affrontements globalement divertissants.
Not quite my tempo
Les dix escouades maximales par joueur sont le symbole de la volonté des développeurs de proposer un RTS au rythme élevé qui met clairement l’emphase sur la destruction et la capture de village. Toutes les maps sont relativement petites, même celles prévue pour des 3v3. Le premier objectif de chaque joueur sera de capturer des villages qui sont synonymes de ressources supplémentaires. Ils font office de points d’intérêts autour desquels vont s’organiser l’essentiel des escarmouches. Il faut être capable de gérer la défense des villages déjà capturés tout en avançant vers le camp ennemi et en capturant toujours plus de villages. Si la formule est plutôt fonctionnelle à 2v2 ou 3v3, il en va tout autrement pour le 1v1 surtout contre l’IA. C’est très simple, le jeu n’est pas fait pour être joué en 1v1 car la formule ne marche pas. Il est pratiquement impossible de passer le cap de l’early game. Le début de partie est très mal conçu et le rythme ne décolle jamais. Au final, les 1v1 durent bien plus longtemps que les autres parties tant il est compliqué de cumuler suffisamment de ressources pour fabriquer des unités, capturer des villages et repousser l’ennemi en solo.
C’est l’histoire de l’étudiant qui galère à trouver son premier emploi parce qu’il n’a pas « assez d’expérience professionnel ». Les villages, même neutre, se défendent férocement et il faut bien deux escouades pour les capturer. Sauf que pas de villages pas de ressources, pas de ressources pas d’escouades. Il faut en plus compter sur une IA ultra agressive quel que soit le mode de difficulté qui vient sacrifier ses unités sur les vôtres sans même chercher à prendre le moindre village… Bref, heureusement le rythme est beaucoup mieux géré en 2v2 ou 3v3 avec des alliés qui peuvent vous épauler s’il faut se replier pour reprendre des forces sans forcément que cela signifie perdre un village qu’il faudra recapturer juste après. Attention je n’entends pas par là que le titre est beaucoup mieux qu’en 1v1, mais simplement qu’il est praticable et un poil moins lourd.
Petit point sur les quatre factions disponibles : les Vikings, les Saxons, les Germains et les Slaves. Chacune a ses points forts et points faibles et il a encore un gros travail à produire sur l’équilibrage du jeu. Les Vikings dominent aisément le champ de bataille grâce à des unités au moral pratiquement inépuisable et de faibles délais de recrutement, alors que les Saxons avec leur moral faible et l’impossibilité de recruter des unités de corps à corps avant d’atteindre le deuxième âge les rendent tout bonnement inutiles (surtout en 1v1). Dans l’ensemble, la stratégie ne change pratiquement pas d’une faction à l’autre à l’exception du choix des unités.
Erasmus pour galériens
La cohérence des langues est quelque chose qui a posé quelques soucis à la série Vikings avec de l’anglais sous toutes ses formes, du vieux français et bien d’autres. Ancestors Legacy se contente de faire parler ses personnages en anglais avec un accent en fonction de la faction choisie. Le doublage n’est clairement pas exempt de défauts mais le véritable problème vient de la traduction française partielle du jeu. Il manque encore un bon 30% de textes à traduire dont des choses essentielles comme l’effet de certains bonus ou des prières (des buffs temporaires). Rien d’insurmontable, mais les vrais allergiques à la langue de Beckham devraient patienter un peu s’ils décidaient de claquer leurs 40€.
40€ c’est ce qui justifie 6 campagnes solo (de 5 missions chacune pour 10 heures de jeu environ), un mode escarmouche contre l’IA et en ligne. C’est donc très limite au niveau du contenu, mais aussi au niveau de la finition. Outre les problèmes de traductions, le titre souffre encore de nombreux bugs techniques avec des unités qui prennent des décisions toutes seules, qui se coincent dans le décors ou encore des problèmes de pathfinding. Cela dit, les développeurs ont déjà réglé une partie de ces problèmes et d’ici quelques patchs on peut espérer que tout roule, méfiance tout de même pour le moment. Pas grand-chose à dire au niveau de l’optimisation qui est solide (merci l’unreal engine 4), ni sur l’aspect visuel plutôt propre bien que totalement dénué d’identité en dehors de l’ultra violence.
Cet article peut contenir des liens affiliés