Sur le papier, la promesse d’Astria Ascending est plus que prometteuse. Associer le savoir-faire d’une équipe francophone, au talent reconnu d’artistes japonais ayant œuvré sur des JRPG désormais cultes, ça a de quoi intriguer. Le titre d’Artisan Studios se présente comme une vraie lettre d’amour au genre, mais au-delà de sa direction artistique séduisante et du retour aux sources proposé, cette déclaration est autant sincère qu’elle est maladroite.
Conditions de test : Nous avons pu jouer durant une trentaine d’heures à Astria Ascending sur la version PS5, en oscillant entre le mode Normal et le mode Facile.
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ToggleDemi-Dieux, mais Demi-Morts aussi
Né sur les cendres de Zodiac: Orcanon Odyssey, sorti en 2015 sur mobiles et PS Vita, Astria Ascending reprend le même univers et ramène avec lui certains personnages, pour nous présenter les huit Demi-Dieux qui formeront notre équipe de héros.
Dans ce monde, huit personnes sont choisies à chaque cycle afin de devenir les protecteurs de l’Harmonie, qui permet aux différentes races de vivre ensemble sans créer de tension ou d’inégalités entre elles. Être choisi comme un Demi-Dieu est un véritable honneur, mais cette bénédiction a tout d’un fardeau, puisqu’elle signe également l’arrêt de mort de la personne qui n’a alors plus que trois ans à vivre (et qui doit consacrer ces trois ans à sa tâche).
Cela ne semble pourtant pas peser sur nos héros au début de l’aventure, qui n’ont plus que trois mois à vivre. On nous présente une troupe éclectique, qui a la joie de vivre et n’hésite pas à plaisanter sur le temps qu’il leur reste, jusqu’à ce que surviennent des perturbations dans l’Harmonie qui vont les toucher au plus près, avec l’arrivée d’Interférences, des monstres mettant à mal la paix dans le monde. Dans cet univers, les habitants doivent ingurgiter des harmelons, sorte de nourriture étrange permettant à l’esprit de conserver son envie d’Harmonie. On comprend alors vite que ce système cache une certaine forme de servitude et amène des questions sur l’identité, sur les rapports entre les peuples, et bien d’autres sujets qui vont plus loin que le simple sauvetage du monde.
Un récit qui souffre de son rythme
Astria Ascending concentre également son récit sur les relations familiales et présente alors un récit plus intimiste que l’on ne pourrait croire, malgré une intrigue qui englobe le destin du monde. Et si la proposition est intéressante, elle a du mal à nous captiver sur la longueur, notamment à cause d’informations qui sont trop distillées dans le temps. La caractérisation des personnages n’aide pas non plus, puisque ceux-ci sont pour la plupart assez effacés en dehors de 3 ou 4 protagonistes qui ressortent plus que les autres.
C’est surtout la structure du récit qui plombe les efforts de construction de cet univers, très riche au demeurant. La première partie du jeu ne cesse de répéter le même schéma sans nous expliquer clairement les enjeux de nos actions, avec trop de questions qui restent sans réponse durant les premières heures. On est alors aussi perdu que les personnages, et pour ne rien arranger, le rythme de la narration est constamment en dents-de-scie, avec des cinématiques trop longues et un manque d’énergie dans les dialogues, eux aussi assez inégaux.
Dommage, car ceux-ci sont doublés, notamment en japonais. Le casting vocal est plutôt qualitatif avec des voix de seiyus très connus, et est clairement à recommander face au doublage anglais, moins réussi. On tiendra le coup grâce à ces prestations vocales, ainsi qu’à une seconde partie nettement plus intéressante et bien plus rythmée.
Un système classique sans folie
C’est en vérité tout le problème du jeu : Astria Ascending prend trop de temps avant de démontrer son vrai potentiel. Et pourtant, tout démarre in medias res. A peine entré dans le jeu, on a déjà le contrôle des huit personnages, et l’on est balancé de combat en combat sans qu’un vrai gros tutoriel vienne nous expliquer les tenants et aboutissants du système. Certes, les habitués du genre vont vite retrouver leurs marques étant donné que l’on reste sur un système de tour par tour classique, mais les néophytes auront plus de mal à maitriser les outils qu’on leur présente.
Si les phases d’apprentissage sont souvent trop longues et rébarbatives dans les JRPG, elles restent essentielles. En voulant accélérer le processus, Astria Ascending finit par nous perdre dans ses premières heures de jeu, surtout lorsque l’on fait face à un mur de difficulté d’entrée de jeu. Un mur qui est surtout fréquent durant les affrontements normaux, contre des monstres basiques, plus que contre les boss.
Le titre fait heureusement preuve d’une grande accessibilité via ses réglages qui permettent de régler la difficulté à l’envie, jusqu’au mode très facile qui permet à tout le monde de profiter simplement de l’histoire, si les combats sont trop ardus. Il y a d’ailleurs beaucoup d’options appréciables, comme celle de désactiver les rencontres aléatoires, la remontée des PV entre chaque combat, celle de partager ou non l’expérience reçue en combat par les personnages en réserve, etc. On aurait cependant aimé qu’il y en ait d’autres, comme la possibilité d’accélérer le rythme des affrontements, bien trop longs contre les monstres lambdas.
Ça fait le job
Réaliser un JRPG au tour par tour en 2021 est un exercice plus complexe que l’on ne pourrait le penser. Si la nostalgie de ce système permet d’attirer immédiatement les fans du genre, il ne faut pas oublier de les moderniser pour autant. Chose que fait Astria Ascending, mais pas assez, en dehors de son système de Concentration, qui permet d’économiser le tour d’un allié pour augmenter l’attaque d’un autre personnage. On peut également accumuler des points de Concentration en visant les faiblesses de l’adversaire, et en perdre si l’on attaque l’un des points les moins vulnérables.
Tout le système joue autour de cette mécanique. On a alors parfois l’impression qu’il vaut mieux favoriser l’utilisation d’un seul personnage, en passant le tour des autres. Autant dire que ça n’aide pas à accélérer le rythme des affrontements, mais l’ensemble du système reste solide, quoi qu’un peu trop classique.
Le titre propose pourtant de belles choses dans son système grâce à la personnalisation de vos combattants via un système de job, qui fera évidemment écho à Final Fantasy. On est libre d’orienter le job de nos personnages vers plusieurs choix, avec par exemple un mage qui pourra devenir Chamane, Mage Noir ou Chronomancien, etc. Cela débouche sur des arbres de compétences différents, non-loin du Sphérier de Final Fantasy X, avec un large choix offert dans le build de vos personnages pour les rendre complétement uniques.
Des grands noms pour porter l’héritage du genre
Les renvois aux autres JRPG sont nombreux, mais c’est bien normal lorsque l’on jette un oeil aux artistes japonais présents dans le processus de création. On retrouve Kazushige Nojima (derrière l’écriture de nombreux Final Fantasy) au scénario, et surtout Hitoshi Sakimoto (Final Fantasy XII, Vagrant Story) à la bande-son, qui nous sert ici un travail d’orfèvre. On est particulièrement convaincu par les thèmes plus doux d’Astria Ascending, comme celui de la résidence principale des Demi-Dieux, qui rentre immédiatement dans les meilleurs thèmes de cette année grâce à cette douce nostalgie qui s’en échappe.
Il faut dire que globalement, Astria Ascending fait un sans faute sur sa direction artistique. Akihiko Yoshida (Vagrant Story) et Hideo Minaba (Granblue Fantasy) participent d’ailleurs à l’identité visuelle du titre, qui n’est parfois pas sans rappeler les travaux de Vallinaware. Même si l’on pestera contre des bugs visuels (avec du retard dans les animations qui n’apparaissent parfois pas), Astria Ascending reste un plaisir pour les yeux. Tous les personnages sont réussis et on reste émerveillés par chaque panorama que nous offre le titre, en dehors des donjons assez répétitifs.
C’est l’autre point noir du titre, qui nous fait parcourir des donjons à la structure sommaire, malgré la volonté de varier un peu les approches grâce à des énigmes et des anneaux à utiliser à bon escient pour progresser. On a ainsi droit à une exploration un peu plus verticale, ce qui pousse un peu plus à aller fouiner dans chaque salle.
On passera sans doute plus de temps dans les différentes villes à la recherches d’adversaires pour le mini-jeu du J-Ster, dont on aurait bien du mal à expliquer les règles, mais qui fait agréablement passer le temps. Une activité annexe plus réussie que les rares phases de shoot’em up, que l’on mettra de côté pour se concentrer sur les chasses de la Guilde et la quarantaine de quêtes annexes proposées.
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