Difficile de faire dans l’originalité lorsque l’on parle d’un RPG orienté J-RPG. La difficulté est double puisqu’il convient souvent de savoir innover du point de vue du gameplay et par l’univers proposé. On ne va pas se mentir, les objectifs visés sont rarement atteints. Au milieu de ça, Kiro’o Games sort Aurion : L’Héritage des Kori-Odan après moult et moult péripéties. Premier jeu du studio camerounais, Aurion se revendique comme appartenant à l’univers de l’African Fantasy, dans son univers comme dans son gameplay. Alors, ce petit poucet du RPG a-t-il réussi son pari ?
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ToggleIl était une fois, au royaume de Zama
Le scénario nous transporte dans le royaume de Zama, où le héros, Enzo Kori-Odan s’apprête à devenir roi et par la même occasion, à épouser sa dulcinée, Erine Evou. Malheureusement, tout ne se déroule pas comme prévu puisque le beau-frère d’Enzo fomente un coup d’état et finit par venir à bout du couple royal, qu’il bannit du royaume. Nos deux héros se retrouvent donc éloignés de leur petit et paisible royaume qu’ils n’avaient jamais quitté jusqu’à présent. Afin de récupérer leur royaume et venir en aide à leurs sujets, nos tourtereaux se mettent alors en quête d’alliés, tandis qu’Enzo compte bien effectuer un pèlerinage aurionique afin de débloquer de nouveaux piliers de son aurion et devenir plus fort. L’aurion est une espèce d’état qui permet aux différents protagonistes de l’histoire d’obtenir plus de puissance.
Mais au-delà d’une formation au combat, Enzo et Erine devront se découvrir eux-mêmes et se confronter à un monde brutal dont ils n’avaient pas conscience, isolés à Zama. Cette aventure, si elle n’a rien de très originale dans sa structure profonde, montre des facettes relativement originales pour un RPG de ce type. En effet, Aurion : L’Héritage des Kori-Odan fait preuve d’une maturité exemplaire par les sujets abordés, loin des travers un peu naïfs des J-RPG auxquels nous pourrions l’assimiler. De nombreux sujets y passent : Corruption, esclavagisme, viol, génocide, immigration… autant de sujets qui ne manquent pas de faire écho à notre propre réalité.
Aurion fait partie de ces jeux qui vous surprennent et vous emportent dans leur histoire.
Mais n’ayez crainte, il n’y a nul besoin d’une boite d’antidépresseurs pour jouer. Kiro’o Games est parvenu à aborder ces thèmes avec justesse, tout en sachant trouver le juste milieu entre le sérieux et l’humour, bel et bien présent. De plus, la relation que l’on voit se tisser entre nos jeunes mariés par les épreuves et les diverses situations comiques qu’ils traversent vient énormément contrebalancer les horreurs auxquels ils sont confrontés, sans pour autant détonner de manière violente.
Aurion parvient en effet à dépeindre cette relation amoureuse qui passe par différents états et que tout un chacun peut connaître, avec ce qu’il faut soutien, de respect mutuel, de forces et de failles, rendant nos deux héros profondément humains et attachants. Clairement, la maturité du scénario ainsi que les relations entre les personnages sont l’un des plus gros points forts de ce RPG. Ce dernier tente également de nous emmener à la découverte de nombreux mythes de la culture africaine au cœur même de son scénario. Si l’on apprécie cet aspect, le trop grand nombre d’éléments et d’explications risquent peut-être de perdre les moins courageux.
Des combats nerveux, peut-être un peu trop
Côté gameplay, nous nous retrouvons face à un action RPG clairement inspiré des premiers jeux de la licence Tales of, avec plus ou moins de succès. Les combats sont en effet assez nerveux, les possibilités offertes sont plutôt nombreuses. Notons d’abord que seul Enzo et Erine sont contrôlables en combat tout au long du jeu. D’autres personnages viendront aussi se joindre au groupe, mais ce sera chaque fois temporaire. Erine et les différents alliés temporaires sont d’ailleurs contrôlés de manière bien particulière puisqu’il faut invoquer leurs attaques par des combinaisons de touches pour qu’ils se manifestent en combat. Enzo reste donc le principal combattant.
Malheureusement, les nombreuses fonctions disponibles font que certains combats deviennent un peu fouillis. Il faut en effet gérer les coups de bases, les coups donnés en état aurionique tout en sachant surveiller sa barre de vie, de AP (assimilons ça à la mana) et enfin l’endurance, chacune pouvant se régénérer avec des consommables, directement accessibles via les raccourcis de la croix directionnelle. N’oublions pas non plus les combinaisons de touches à gérer pour Erine, ses propres attributs vitaux… et un autre allié, éventuellement. Imaginez ceci dans un combat avec cinq à dix ennemis… on est vite perdus, à tel point que l’on finit parfois par mourir bêtement. De ce fait, certains combats contre des monstres en nombre un peu trop élevé peut parfois s’avérer plus difficile à gérer qu’un combat de boss.
Notre héros peut esquiver, se protéger et se mouvoir très rapidement. Il est même possible d’attaquer l’ennemi soit au sol, soit dans les airs en utilisant avec parcimonie les capacités de nos personnages. Alors oui, sur le papier tout cela parait vraiment excellent (et ça l’est sur quelques aspects), mais gérer tout cela en combat devient très vite délicat. Les affrontements ne sont pas vraiment compliqués, mais disons plutôt que dans le feu de l’action, on utilise les fonctions les plus primaires et cela suffit bien. Il est donc dommage que tout cela ne soit pas mieux géré, mais traduit justement d’une trop grosse envie de bien faire de la part des développeurs.
Certains pouvoirs proposés sont purement jouissifs !
Cela étant, le système de combat fourmille de très bonnes idées, et l’on appréciera particulièrement le fait de pouvoir passer en mode héritage – permettant d’utiliser l’Aurion – en tirant parti des différents éléments qui viennent s’ajouter à ces transformations (feu, eau, lumière, ténèbres, etc.). Chaque état bénéficie de deux attaques basiques et d’une attaque ultime qui se débloque après avoir asséné suffisamment ces attaques de base.
Enzo débloque, au fur et à mesure de son aventure, de nouveaux états que l’on nomme piliers et au bout de quelques heures de jeux, il sera même possible de fusionner ceux-ci en plein combat afin d’en obtenir de nouveaux. Alors oui, les combats d’Aurion ne sont pas parfaits, mais ils parviennent tout même à se montrer efficaces et à offrir des sensations assez grisantes, dignes des meilleurs action-RPG et même de quelques mangas propres au genre du shonen, bien connus (Naruto, Dragon Ball, etc.). Certaines capacités sont d’ailleurs purement jouissives et contribuent nettement au plaisir de jeu.
Soulignons également l’énorme soin apporté à la mise en scène des cinématiques des combats, que l’on peut souvent voir avant ou après un affrontement important. Ces séquences sont clairement des références à de nombreux mangas, et force est de constater que les chorégraphies sont fort bien pensées et vraiment plaisantes à regarder.
Le système de progression des personnages reste lui aussi assez classique pour nos héros sachant qu’il s’agit de combattre et d’utiliser un maximum les techniques et héritages obtenus pour les améliorer. L’un des points intéressants est qu’il est possible d’améliorer certaines compétences d’Erine en améliorant sa relation avec Enzo, notamment en faisant appel à elle lors des combats, ou en utilisant certains objets.
Une réalisation envoûtante
Graphiquement, Aurion se présente dans un bel écrin 2D avec des environnements plutôt soignés et vivants, faisant honneur à la culture africaine, maintes et maintes fois revendiquée par le studio camerounais. En revanche, on regrettera le fait que certains sprites manquent de précisions dans le découpage et que quelques textures soient beaucoup trop étirées, alors que la majorité d’entre elles sont justement plutôt réussies. On se retrouve ainsi avec des textures et des effets (par exemple, celui de la transition de combat) trop pixellisés, comme si ces éléments étaient prévus pour de la basse résolution.
D’autres points noirs sont malheureusement à noter côté esthétique, avec par exemple des animations parfois trop peu nombreuses pour les personnages, ou encore des problèmes techniques comme des ralentissements qui viennent un peu plomber certains combats, notamment ceux sous l’eau, heureusement peu nombreux. Bien heureusement, ces soucis n’empêchent aucunement de prendre du plaisir et il faut bien prendre en compte qu’il s’agit du premier jeu de Kiro’o Games, qui plus est, réalisé avec des moyens limités. Les bugs et quelques plantages rencontrés n’arrangent pas tellement les choses, mais l’on peut espérer que le suivi du titre soit à la hauteur, étant donné que plusieurs mises à jour sont déjà sorties.
La direction artistique est dotée d’un charme indéniable.
Et si la direction artistique fait clairement honneur à Aurion, la musique n’est pas en reste non plus, puisqu’elle se montre vraiment immersive et enchanteresse. Même si l’on a tout de même une impression de déjà vu, il n’empêche que l’ambiance bénéficie d’un charme particulier qui parvient à nous happer dans l’aventure.
Côté contenu, le soft devrait pouvoir tenir occupé au moins une vingtaine d’heures si ce n’est plus, compte tenu du fait qu’il soit possible de choisir le niveau de difficulté. Réglé en moyen, le titre reste assez accessible et n’oppose pas grande résistance. Et s’il est possible d’acheter de l’équipement et autres objets de soins, ceux-ci ne sont pas forcément nécessaires sachant que l’on trouve suffisamment d’objets sur le sol, pour peu que l’on explore suffisamment. Mais ne pinaillons pas, de nombreux RPG rencontrent ce problème, et nous n’allons pas demander à un jeune studio de régler des soucis qui ne datent pas d’hier.
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