Bien avant Avowed, le studio Obsidian n’est pas inconnu au bataillon dans la conception de RPG marquants. Celui qui reste particulièrement en tête, outre South Park: Le bâton de la vérité ou encore The Outer Words, c’est bel et bien Fallout: New Vegas qui a fait vibrer les joueurs de par ses mécaniques complètes. Mais cette fois ci, le développeur se concentre particulièrement sur le lore heroic fantasy de Pillars of Eternity et plus précisément le monde d’Eora, où va se dérouler Avowed. Dans un monde frappé par un fléau qui touche la faune et la flore, force est de constater que cette production made in Obsidian est folle dans la liberté laissée au joueur. Au-delà des quelques polémiques sur le jeu et même si notre dernière prise en main nous avait quelque peu rassuré, restons mesurés sur la qualité finale du titre. Car si le soft est merveilleux sur bien des aspects, Avowed souffre quand même d’une patte relativement archaïque que traine maintenant le studio Obsidian depuis The Outer Worlds.
Conditions de test : Nous avons vadrouillé sur le monde d’Eora durant 25 heures de jeu, en faisant quelques quêtes et contenus annexes à la volée. Nous avons ensuite essayé un autre personnage avec un autre background, pour tenter de déceler quelques différences dans les choix de dialogue. Le titre a été testé avec 32 Go de RAM, une RTX 3070 et un i5 12-400 (2.50 Ghz).
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ToggleLe monde d’Eora se meurt
En matière de narration, Avowed reprend clairement les codes de l’univers heroic fantasy. Situé dans le monde d’Eora déjà aperçu dans la licence Pillars of Eternity, le jeu nous fait incarner un protagoniste ayant reçu des dons d’être divin. Envoyé par un empereur tout puissant sur les Terres Vivantes, votre but sera de mettre un terme au Malrêve, un fléau changeant le comportement des habitants, tout comme la faune et la flore, désormais dangereuse. Pour ce faire, vous vadrouillerez à travers divers royaumes des Terres Vivantes, et rencontrerez des compagnons de voyage qui vous aideront dans votre lourde tâche.
D’ores et déjà, il faut louer la qualité d’écriture du titre, restant dans la lignée des précédents jeux d’Obsidian. Sa patte se fait ainsi ressentir de par ses personnages hauts en couleur, un certain humour mais également un antagoniste particulier qui ne manque pas de prestance. En revanche, et on pouvait s’en douter, une véritable platitude dans l’intrigue vient se joindre à la fête. On pourrait même dire que le soft a peut être attrapé le syndrome The Outer Worlds avec des longueurs parfois pas utiles à la narration, et surtout un classicisme flagrant dans la mise en scène des dialogues. Effectivement, nous retrouvons ces éternels champ-contrechamp n’apportant pas le dynamisme espéré, offrant ainsi un ton ultra monotone. Le chara design, bien que convenable la plupart du temps, va lui aussi se révéler à certains moments juste passable.
Tout ceci est bien regrettable, même si l’intrigue reste plaisante à suivre. La découverte de la véritable origine de ce Malrêve reste à minima surprenante, et les divers thèmes abordés, notamment autour de la divinité, sont plutôt bien traités, avec une écriture qui, comme nous l’avons évoqué plus haut, est finalement soignée de bout en bout. Bien que la fin du jeu va hélas nous laisser de marbre, avec quelques éléments passés en revue bien trop rapidement, le jeu va néanmoins puiser sa force dans les choix de dialogues. En plus de permettre littéralement de résoudre les quêtes d’une pléthore de façons (nous y reviendrons plus tard), ces choix apportent également une certaine liberté aux joueurs.
Des choix tentaculaires au détriment d’une personnalisation en surface
Car oui, Avowed offre de quoi faire aux joueurs en matière de choix à effectuer. Comme dans les dernières productions d’Obsidian, le système de choix n’a pas bouleversé sa formule. Si vous avez déjà joué à Fallout : New Vegas ou The Outer Worlds, vous ne serez ainsi pas dépaysé par les dialogues, disposant de choix des plus cornéliens. En plus d’avoir des lignes de dialogues spécifiques en fonction du background choisi, vous pourrez aussi tenter de désamorcer certaines situations dans les quêtes via vos attributs. En effet, et si votre nombre de points dans la capacité requise est suffisant, vous aurez l’opportunité de débloquer certains choix de dialogues qui permettront d’éviter des effusions de sangs sur certaines missions, et ainsi opter pour des situations plus diplomatiques.
N’ayons pas peur de le dire : cette formule si chère à Obsidian marche toujours autant. Elle permet de personnaliser notre expérience de jeu, mais également de favoriser la rejouabilité. Cette mécanique donne le loisir aux joueurs de non seulement de modifier le cours des quêtes, mais va aussi vous rappeler des choix précis que vous avez fait en cours de route arrivé vers la fin du jeu. De plus, vos compagnons ne manqueront pas d’en faire de même, qu’ils aient trouvé vos choix raisonnables ou non. Cette feature organique est plaisante, et offre des moments plus intimistes avec vos frères d’armes, qui peuvent par la suite se confier à vous sur leur background, et vous gratifier de récompenses pouvant améliorer par exemple vos attributs.
Il n’y a pas à dire, la notion de choix dans Avowed ne semble pas artificielle, et a des influences concrètes sur votre passé, sur la fin du jeu mais aussi sur vos compagnons de route qui seront plus ou moins proches de vous. Il est d’ailleurs dommage que le studio n’ait pas opté pour un aspect romance à la Baldur’s Gate 3, ce qui aurait pu apporter du piment à tout cet ensemble. Mais il faut aussi parler de son éditeur de personnage, complet mais manquant d’un peu de profondeur. Hormis le choix de votre background qui influencera les choix de dialogues et l’arme de départ, sachez que vous pourrez personnaliser le visage de notre personnage, et même lui ajouter quelques cicatrices ou excroissances divines. Pour le reste, en dehors de la taille et la corpulence, il faut reconnaitre qu’Avowed a joué la carte du minimum syndical sur la création de notre personnage.
La grande aventure Avowed
Au delà de tout ça, que donne la jouabilité d’Avowed ? Eh bien, le soft est dans un premier temps jubilatoire. Dans son feeling, le titre a des airs de The Elder Scrolls V: Skyrim que ce soit dans les déplacements, le système de parade voire des coups portés aux ennemis. Ce n’est pas un mal de s’être inspiré de ce mythique jeu, et il faut admettre que les premières heures sont grisantes avec des combats techniques, et où il va falloir gérer notre jauge d’endurance pour les esquives et l’attaque. Les dégâts élémentaires auront leur importance dans les combats, et pourront grandement vous faciliter la tâche. Notez par ailleurs que les armes à feu ou arcs ont des munitions illimitées, chose qui n’est pas dérangeante car empêchant de casser le rythme du jeu, qui se focalise avant tout sur l’aventure certes, mais aussi sur l’action pure.
Chaque erreur n’est pas forcément pardonnée face aux créatures et adversaires en tout genre, mais on aperçoit vite des écueils. Si les développeurs ont fait des efforts afin de faire ressentir l’impact dans les coups, force est de constater que cela manque encore d’un petit quelque chose, que ce soit dans les attaques classiques ou chargées. Seules les attaques aux armes à feu ou à la baguette magique façon Harry Potter seront vraiment satisfaisantes dans l’impact des coups, et encore. Qui plus est, si le système d’étourdissement façon Sekiro fera globalement plaisir afin d’enchainer temporairement des coups critiques sur nos adversaires on ne pourra pas s’empêcher d’y voir des imprécisions et une lisibilité discutable dans le feu de l’action, ce qui nous fera souffler fort plus d’une fois. L’aspect infiltration à la The Outer Worlds est aussi de retour et, sans surprise, cela ne va marcher que pour un voire deux ennemis, sans gros plus à cause d’une IA discutable.
Toutefois, la notion de liberté laissée aux joueurs se poursuit jusque dans la spécialisation de notre personnage. Ici, il n’est pas question d’avoir une classe prédéfinie, étant donné que vous serez totalement libre de façonner votre propre personnage selon votre style de jeu. A loisir, vous pourrez choisir votre chemin via un arbre de compétences complet. Vous pourrez, selon vos désirs, vous spécialiser uniquement sur les compétences de magicien en vous focalisant sur cet arbre, comme mélanger des compétences de combattant ou de rôdeur. Concrètement il n’y a pas vraiment de limite, et le joueur pourra se concocter un personnage comme il l’entend. Vous aurez par ailleurs la possibilité d’avoir une arme primaire et secondaire, si jamais vous voulez avoir deux spécialisations à la fois.
Les bonnes idées ne manquent pas, comme pour les compagnons. Ces derniers ne sont pas laissés sur le banc de touche, et participent activement à votre aventure et aux combats. Ils sont d’une utilité folle dans la mesure où en montant de niveau, vous pourrez leur assigner des points de compétences, pour les doter de leurs propres compétences de combat. Il est ainsi possible de les utiliser lors de vos affrontements via un petit menu circulaire. Pour l’intuitivité nous repasseront vu la pauvreté dans les raccourcis donnés, mais il faut bien avouer que les combats deviennent encore plus passionnants avec vos compagnons d’armes à côté, qui ne rechigneront pas à utiliser leurs compétences quand vous leur demanderez.
Quid de l’interface globale ? Tout en restant traditionnelle, elle reste bien pensée. Si nous avons déjà évoqué le menu circulaire pas forcément ergonomique et faisant parfois office de fourre tout, le reste de l’inventaire que ce soit dans le choix des armes ou des compétences est plutôt agréable dans la navigation, sans réels accrocs. Notez que le titre dispose aussi d’une vue à la troisième personne, activable depuis les menus. Si cela permet d’avoir un autre point de vue intéressant dans le gameplay, vous repasserez vite à la vue FPS qui, à notre sens, est plus aboutie, se dote d’une meilleure immersion et d’un gameplay beaucoup mieux calibré.
Du crafting à l’artisanat, pour un résultat divin
Le campement sera également un élément central du jeu dans tout ce qui est amélioration et artisanat. Une fois arrivé à l’un des camps éparpillés un peu partout sur chacune des grandes zones ouvertes, la nuit tombera automatiquement. Nous sommes plutôt déçus qu’un cycle jour/nuit ne soit pas véritablement présent en jeu, mais passons. Dans ce fameux campement, vous pourrez tout d’abord perfectionner vos armements, accessoires et armures à l’aide de ressources, afin de monter leur niveau de rareté et leur conférer des statistiques plus importantes. Pour ce faire, vous devrez bien sûr trouver des ressources particulières.
Indéniablement, Avowed repose sur des mécaniques d’amélioration et de crafting solides, d’autant qu’il est aussi possible de démanteler quelques armes qui vous sont parfaitement inutiles afin d’y récupérer de précieuses ressources. L’artisanat est également de la partie, afin de créer des ressources un peu plus rares à l’aide d’autres éléments. On trouve aussi de la cuisine, avec la possibilité de concocter au choix des plats qui vous conféreront de la santé, de l’essence (votre mana), ou encore vont vous booster pendant quelques instants sur certains domaines, voire annuler des malus en cours de combat comme le gel ou le poison.
Il n’y a pas à dire, c’est complet, d’autant qu’il est aussi possible d’enchanter vos armes. Toutefois, attention, seules des armes uniques que vous dégoterez lors de votre périple pourront être enchantées. Autrement dit, vous pourrez juste améliorer les effets que produisent certaines armes qui font d’office des dégâts élémentaires (gel, feu, poison etc…). Cela perfectionnera votre arsenal unique, toujours à l’aide de ressources à trouver ça et là. Il faut bien l’admettre, tout le système de jeu basé sur l’upgrade propose quelque chose de bien fourni, bien que l’on puisse parfois pester sur un grind un peu trop forcé, avec l’obligation d’améliorer tout son stuff afin de mieux aborder quelques affrontements parfois tarabiscotés.
C’est le principe même d’un jeu de rôle, certes, mais la récolte de ressource devient parfois très barbante, même si nous avons vite trouvé une parade. En effet, il est tout à fait possible d’économiser votre argent un maximum, et acheter des équipements tout aussi intéressants auprès de marchands, pour ainsi être paré à casser à nouveau de la créature. Seulement voilà, passé la troisième grande zone de jeu, attendez-vous à avoir des prix mirobolants si vous voulez acquérir certaines pièces… Cela prouve une fois encore qu’Obsidian encourage à l’exploration, et ce n’est pas plus mal.
Enfin, en dehors de changer de vêtements pour le côté purement cosmétique ou stocker vos objets, vous pourrez parler à vos compagnons. En fonction de vos actions, vous aurez la possibilité ou non de papoter avec eux plus en profondeur, et ainsi en apprendre un peu plus sur leur lourd passé. Cela peut permettre, comme nous l’avons expliqué plus haut, de bénéficier de bonus supplémentaires qui peuvent augmenter artificiellement vos attributs. Si le manque d’un côté romance se fait cruellement ressentir, toute cette mécanique a le mérite de fonctionner, et de tenter de nous attacher à nos compagnons. Néanmoins, au risque d’encore nous répéter, le chara design nous en empêche parfois.
Une exploration vivante et un contenu généreux
Nous avons parlé assez peu de l’exploration, mais sachez qu’elle est palpitante. Chaque recoin des Terres Vivantes déborde d’éléments à se procurer. Au choix, nous pouvons avoir des énigmes environnementales à y débusquer, des coffres ou objets spéciaux, voire des camps d’ennemis. Chaque map déborde de vie, et il n’est pas rare de croiser de grosses créatures à terrasser à l’aide de vos compagnons. Le titre offre d’ailleurs une progression à base de niveau de menace allant de 1 jusqu’à 5. Et bien évidemment, la difficulté se fait à un moment ressentir significativement si vous n’avez qu’un équipement de niveau 2, alors que vous affrontez directement des ennemis de niveau 3 qui peuvent vous faire la peau en un instant. Le côté organique de cet élément réside aussi dans les dialogues de vos compagnons en plein combat, qui peuvent vous faire comprendre que vous n’avez peut-être un équipement pas suffisamment puissant pour vous débarrasser de vos adversaires.
Justement, c’est pour cela que l’exploration est encouragée. Vous aurez par ailleurs un système de contenu annexe à base de primes, vous donnant pour objectif d’éliminer des personnages ou monstres recherchés, et pourquoi pas trouver par la suite quelques armes ou armures puissantes. Ce système fonctionne vraiment du feu de dieu, et il est fréquent de croiser quelques PNJ vous donnant une quête qui vous récompense en général en monnaie, mais aussi en objets ou accessoires en fonction de vos choix.
Les différentes zones d‘Avowed sont par ailleurs interconnectées. En plus des grandes cartes à explorer, vous devrez parfois entrer dans quelques grottes ou souterrains, qui feraient presque office de « donjons » à la Skyrim. Il faut dire qu’Obsidian a pensé à tout, et même le level-design dans sa globalité est une pure réussite. Par ailleurs, le jeu offre un contenu des plus généreux avec des quêtes annexes à perte de vue, les primes que nous avons évoqué, mais aussi les quêtes de compagnons qui ont leur importance, et permettent d’explorer de façon plus intimiste le lore de chaque personnage. Et si vous pouvez certainement finir le jeu en 25h en ligne droite, vous perdrez cependant ce qui fait toute la sève d’Avowed, à savoir un contenus annexe gargantuesque qui pourrait bien vous tenir plus d’une cinquantaine d’heures minimum.
Beau, mais imparfait
En termes de technique, le bébé d’Obsidian ne fait pas d’étincelle, mais dispose d’une esthétique accrocheuse. A mi-chemin entre cartoon et réaliste, Avowed reste visuellement agréable à l’œil. La plupart des panoramas visités sont incontestablement saisissants, prouvant une fois encore le savoir faire du studio quand il s’agit de construire tout un habillage artistique riche. Bien évidemment, faire un jeu dans l’univers de Pillars of Eternity est un peu plus facile car il y a déjà du lore, certes, mais force est d’admettre que le studio est parvenu à ajouter sa petite touche rendant le jeu très chatoyant, et doté de textures pour le moins soignées, ou presque.
Effectivement, la faiblesse du jeu va se voir sur les divers bugs et divers manques de finition. Fréquemment, nous allons nous trouver en face de modèles 3D aux textures un peu folles et partant dans tous les sens, mais aussi des animations d’un autre âge dans les dialogues, n’aidant pas à dynamiser le tout. Les bugs de collision sont aussi légion. Le soft arrive à se sauver avec une optimisation plus que convenable, ce qui est déjà ça de pris. En somme, le jeu, même s’il est réussi artistiquement parlant, pêche de par son inégalité sur le plan graphique.
Au moins, le côté sonore du jeu est beaucoup plus convaincant. Avec des thèmes pour la plupart épiques, Avowed arrive à nous faire sentir cette soif d’aventure à travers notre héros fraichement créé, ce qui est très fort. De plus, les doublages proposés en VO sont convenables, mais il faut bien admettre qu’il y a bien mieux que ça en matière d’acting. Ce sera déjà mieux que la version française de Kingdom Come Deliverance II me direz-vous. Enfin et il faut le souligner, le sound design a bénéficié d’un soin particulier afin de rendre encore plus vivant le monde coloré d’Avowed.
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