Test Batman: The Telltale Series – The Enemy Within – Episode 2 : Derrière le voile
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Rédigé par Jordan
Le premier épisode de The Enemy Within avait su lancer cette nouvelle saison sur les chapeaux de roue, en proposant un rythme soutenu, un vilain efficace et charismatique, mais il avait aussi posé les bases d’une plus grande menace à venir pour le Chevalier Noir et Gotham. Ce deuxième épisode avait donc fort à faire pour continuer sur la lancée, d’autant plus qu’il nous promettait l’introduction d’un visage familier, particulièrement apprécié des fans et de plus en plus populaire, Harley Quinn. Voyons ensemble si « Derrière le voile » parvient à rendre honneur au personnage, tout en continuant de remanier de façon unique l’univers de Batman.
Avant de commencer ce test, nous rappelons qu’aucun spoil majeur sur l’épisode en lui-même ne sera formulé. En revanche, nous allons évoquer les événements survenus dans le premier épisode, nous vous conseillons de ne pas continuer la lecture de ce test si vous n’avez pas encore terminé « L’Énigme ». Nous vous conseillons aussi d’attendre quelques jours pour débuter cet épisode, car de nombreux soucis de traduction sont à déplorer. Nous y reviendrons un peu plus tard.
Sommaire
ToggleIl est temps de raccrocher le costume
Après la confrontation avec l’Homme-Mystère dans le premier épisode, Batman réalise que le vilain n’était que la face visible d’un iceberg terriblement dangereux, prêt à heurter Gotham de plein fouet. En mettant fin aux agissements du premier criminel masqué de la ville, notre bon vieux héros s’est attiré la curiosité d’Amanda Waller, directrice de l’Agence, qui en plus d’être une pénible épine dans le pied de Batman, possède des informations très compromettantes sur ce dernier. La fin du premier épisode annonçait une révélation fracassante pour notre héros, puisque Amanda lui avouait connaître l’identité du justicier, à savoir Bruce Wayne.
Démasqué et quelque peu déboussolé de voir son secret connu des services de l’ordre – du moins d’Amanda, Batman n’aura pas beaucoup le temps de digérer l’information, puisque Gotham subit des attaques simultanées qui ne laissent aucun répit pour notre chauve-souris. Alors qu’il se lance dans un combat contre un ennemi bien connu des fans – dont on taira le nom pour plus de surprises, Batman va subir de graves blessures, l’empêchant alors de remettre son costume pendant une petite période. C’est donc Bruce Wayne qui va devoir prendre le relais malgré les nombreux risques, le mettant dans une situation de fragilité qui le poussera à faire quelques sacrifices, toujours sous l’œil affûté de l’Agence qui guette ses moindres mouvements…
Plus que jamais, c’est bien Bruce Wayne qui est au centre de l’intrigue, mettant de côté son alter-ego durant la quasi totalité de l’épisode.
La particularité de cet épisode réside dans le fait que les dynamiques entre les différents personnages offrent des situations réellement intrigantes, au profit même de l’intrigue de « Derrière le voile », qui n’a finalement rien de novateur à raconter sur le fond. On ne va pas se mentir, de ce côté-là, cet épisode est une semi-déception dans le sens où il ne met en scène qu’un team-up entre vilains déjà vu de nombreuses fois dans les aventures de Batman. L’arrivée de criminels si nombreux est malheureusement synonyme de fan-service, que Telltale avait pourtant su bien éviter jusque-là. Sans trop dévoiler l’identité de ces personnages, sachez que sur les trois nouveaux bad guy de la série, seule Harley Quinn bénéficie d’un traitement de qualité, tandis que les deux autres ne sortent pas de leurs carcans habituels. On peut le regretter, surtout quand on voit le talent qu’a le studio à réécrire et à se réapproprier complètement les personnages qui entourent la mythologie du Chevalier Noir.
En rajoutant autant de personnages, l’intrigue de cet épisode à tendance à s’enliser et à provoquer une baisse de rythme significative. Un constat assez étrange dans la mesure où il se passe finalement beaucoup de choses dans cet épisode, mais le dosage et la répartition des événements ne convainc pas. Le plus gros problème provient notamment d’un ventre mou durant le troisième et quatrième chapitre, qui manque de concision pour garder une vraie efficacité. Résultat, on se retrouve avec un rythme en dents de scie, avec un excellent début et une conclusion forte, tandis que le reste ne parvient pas vraiment à marquer les esprits.
Le bal des clowns
Pour contrebalancer tout cela, on ne peut pas dire que ce deuxième épisode manque d’enjeux et de tension. En nous plaçant dans la peau d’un Bruce Wayne constamment en danger durant la majeure partie de l’épisode, l’intrigue parvient à créer de vrais moments de doute et d’anxiété, rendant intense chaque petit choix de dialogue. En n’hésitant pas à sacrifier des têtes connues des fans, Telltale a su implanter une tension de tous les instants dans nos choix les plus infimes, qui prennent d’autant plus d’importance ici, avec un Bruce Wayne désarmé et contraint de mettre sa vie en danger. Cela nous mène vers des gimmicks d’intrigues bien connus, mais néanmoins assez peu courants pour notre justicier.
Pour exposer brièvement les choses, nous n’évoquerons que le simple fait que Bruce Wayne doit s’infiltrer dans le réseau de criminels, sous sa propre identité, tout cela grâce aux faveurs de ce bon vieux Jo(ker)hn Doe. Un pitch assez sommaire en somme, mais qui fonctionne terriblement bien lorsqu’il est associé aux personnages qu’on nous présente. Il faut rajouter à cela que le fait d’être placé dans la peau de Bruce Wayne pendant la quasi-totalité de l’épisode rend notre héros plus fragile, moins indestructible. Le playboy se retrouve ainsi confronté à ses propres limites, ce qui amène des questionnements intéressants concernant le fameux code du chevalier masqué. Jusqu’où Batman, ou plus précisément Bruce Wayne, peut-il aller pour sauver tout le monde ? C’est la question qui hantera le beau brun, au point de se dire qu’entre deux maux, il faut parfois choisir le moindre et se salir un peu les mains.
Bruce se retrouve dans une situation classique mais néanmoins inédite pour le personnage, créant ainsi de nombreux instants de tension vraiment grisants.
Heureusement pour lui, Bruce peut compter sur l’aide indéfectible que lui procure John Doe, du moins pour l’instant. Clairement, cet épisode – ainsi que la série entière – n’est jamais plus brillant que lorsque que ce personnage monopolise l’attention. John crève littéralement l’écran, et sa relation avec Bruce est probablement le meilleur élément de The Enemy Within. Cet épisode en est la preuve avec une mise en avant plus importante, qui confirme que les scénaristes de Telltale ont assuré la réécriture du mythique du Joker avec brio. Tout fan averti sait pertinemment que cet homme va un jour devenir le plus grand ennemi de notre héros à oreilles pointues, mais l’écriture du personnage est si juste qu’il est parfois difficile de ne pas le prendre en pitié, voire même de ne pas collaborer avec lui. John Doe est ici le soutien le plus utile de Bruce, bien plus qu’Amanda, Gordon ou même Alfred. Cette relation entre les deux futurs ennemis se révèle être encore plus fascinante qu’annoncée, et on ne peut qu’avoir hâte de voir comment naîtra le Prince du crime.
En parallèle de cela, ce dernier entretient dans cet épisode une relation inédite avec son plus grand amour, la lunatique et dangereuse Harley Quinn. Alors qu’il était à l’origine de la naissante folie de l’ancienne psychiatre d’Arkham dans les comics, et que la belle blonde lui courait après sans cesse malgré les traumatismes que le clown lui faisait subir, John Doe devient ici l’amoureux transi. Le rapport de force entre les deux personnages est donc basculé, et ce pour le meilleur. Débarrassé de sa dépendance vis-à-vis du Joker, le personnage d’Harley Quinn peut enfin prendre son véritable envol et devenir une menace à part entière. On regrette cependant que son origin story paraisse si peu développée et expéditive, un peu à la manière des autres vilains de cet épisode. Elle parvient tout de même à tirer son épingle du jeu en montrant un peu plus de complexité que ses comparses, étant moins portée sur la folie habituelle du personnage que sur une soif de sang inexorable et un talent de leader qu’on ne lui connaissait pas.
Les oubliés de la Bat-histoire
Avec tout cela, il y a forcément de nombreux personnages laissés sur le bas-côté de l’intrigue. On pense notamment à Tiffany, dont le cas semble presque réglé en une seule scène alors qu’elle méritait assurément davantage, mais c’est surtout la relation entre Batman et Gordon qui est reléguée en second plan. Avec l’arrivée au pouvoir de Waller et le casting all-star de cet épisode, le commissaire se fait tout petit alors que sa dynamique avec notre héros était l’une des forces du premier épisode. On espère le voir reprendre une place importante par la suite, tout comme Alfred, dont le cas semble être mis en parenthèse pour mieux se concentrer sur les agissements de la bande de super-vilains.
A force de vouloir introduire trop de nouvelles têtes, l’intrigue semble avoir oublié les personnages qu’elle avait mis en place dans le premier épisode.
Tout ceci pourrait tout de même faire de cet épisode un bon cru, surtout avec la mise en scène toujours aussi explosive et viscérale – notamment lors des combats – qu’il nous propose. Cependant, Telltale semble avoir fait un pas en arrière dans la place accordée à l’interaction, en ne donnant presque jamais l’occasion de réellement contrôler Bruce. Vous pouvez donc oublier vos phases d’investigations et mettre le titre de meilleur détective du monde au placard, puisque votre liberté d’agir est presque nulle dans cet épisode.
Là encore, ce point était l’une des bonnes surprises de « L’Énigme », car on pouvait constater que ces phases contribuaient au rythme global de l’aventure, tout en nous laissant nous impliquer davantage au récit. Ici, on se contentera de quelques déplacements limités, sans aucun réel intérêt. En supprimant une bonne partie de cette interactivité, le ventre mou que nous évoquions auparavant semble encore plus long qu’il n’aurait dû être. On ira même jusqu’à dire que cela provoque un ennui de quelques longues minutes, certes pas vraiment gênant, mais relativement notable dans une série qui avait su éviter ce genre d’écueil dans le passé.
Do you speak français ?
Pour ne rien arranger, nous devons vous prévenir que durant notre test, c’est-à-dire le jour de la sortie de l’épisode, nous avons rencontré de très fréquents soucis de traduction. Une habitude pour le studio, mais qui avait su se reprendre en main au fil des années, notamment avec le premier épisode de cette saison. Dans « Derrière le voile », une phrase sur deux semble ne pas avoir traversé l’Atlantique et on se retrouve avec une traduction partielle vraiment gênante, variant de langue une phrase après l’autre. On retrouve cela même lors des choix, qui peuvent être à la fois en anglais et français, ce qui est une situation assez surréaliste.
Si l’on met de côté ce problème qui sera, espérons-le, réglé dans les prochains jours via un patch, on peut déplorer la qualité de la traduction française, très inégale. Sans vouloir trop chipoter, voir Alfred tutoyer Bruce alors qu’il le vouvoie depuis toujours est quelque peu déconcertant, sans oublier les quelques fautes et les mots manquants à certaines phrases. Rien d’extrêmement grave en soit, mais combiner ceci au problème de localisation rend l’expérience de cet épisode frustrante, et ce même si l’on se débrouille bien dans la langue de Ben Affleck.
La traduction de cet épisode est au mieux ratée, avec de nombreux passages non traduits en français.
Bien que ne faisant pas de merveilles et restant fidèle à lui-même, le moteur du jeu ne semble pas trop souffrir durant les deux heures qu’il vous faudra pour terminer cet épisode. On notera quelques ralentissements pas très méchants et des transitions un peu longues, mais Batman semble vraiment bénéficier d’un soin plus important sur cet aspect-là que les autres séries du studio. Reste néanmoins qu’il serait grand temps de passer la vitesse supérieure plutôt que de ronronner avec un moteur vieillissant, qui ne supportera pas les attentes des prochaines années. Si la qualité visuelle ne donne pas de quoi sauter au plafond, l’aspect sonore et en revanche un véritable plaisir auditif.
À l’instar du premier épisode, les musiques se démarquent de plus en plus et installent une ambiance pesante pour notre héros, en n’oubliant pas pour autant les envolées de bravoure lorsque que Bruce revêt sa cape et son masque. Tout comme les personnages, Telltale a su se réapproprier convenablement l’univers musical du Chevalier Noir et semble s’améliorer d’épisode en épisode. C’est aussi le cas du casting vocal, avec un Batman qui ne déçoit jamais, et un John Doe au meilleur de sa forme, qui rend complètement justice à la folie du personnage et montre qu’il est décidément la meilleure chose que la série a à offrir.
Avec une introduction efficace qui donnait le la, cette seconde saison s’embourbe quelque peu avec « Derrière le voile », délaissant son excellent rythme à la présentation d’une profusion de personnages, sans jamais vraiment les développer. En délaissant les phases d’investigation, l’épisode souffre d’un milieu peu convaincant en opposition avec un début in medias res et son combat épique, ainsi qu’avec sa conclusion explosive. On se consolera avec de belles promesses à venir, d’autant plus que si l’épisode loupe parfois le coche, il parvient à instaurer un climat unique et passionnant presque inédit pour Batman.
Avec cela, la relation entre Bruce et John peut enfin être approfondie, et la dynamique qu’elle apporte joue avec notre connaissance de la mythologie pour nous faire douter, pour nous mettre réellement à la place de Bruce. Harley Quinn parvient elle aussi à apposer son sceau sur cet épisode, en dévoilant une facette plus complexe du personnage que l’on connaît tous, libérée de l’emprise du Joker et plus indépendante. Finalement, l’absence d’une intrigue forte favorise la mise en avant de la psychologie des personnages, tout en nous faisant attendre de grandes choses pour la suite, qui promet d’être plus épique que ne l’est cet épisode. Croisons toutefois les doigts pour que Telltale ne fasse pas de faux pas et que l’interactivité regagne la place qu’elle avait pu avoir dans le premier épisode.
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Date de sortie : 08/08/2017