Blacksad est une bande dessinée illustrée par Juanjo Guarnido et écrite par Diaz Canales. Elle se déroule dans les États-Unis des années 50 mais dont tous les habitants sont des animaux anthropomophes. On y suit les enquêtes de John Blacksad, un chat détective privé. 5 albums sont déjà parus aux éditions Dargaud, et un jeu vidéo, Blacksad : Under the Skin, est maintenant disponible. Il est édité par Microids et développé par YS Interactive et Pendulo studios, ces derniers étant connus pour la série des Runaway. Alors, qu’est-ce qui pourrait mal se passer ?
Conditions de test : Ce test a été réalisé sur la version PC, avec un ordinateur récent mais ne possédant pas la configuration optimale. La qualité des graphismes a tout de même pu être poussée au maximum sans problème. Le jeu a été terminé une fois au bout de 12 heures.
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ToggleUne histoire inédite
James Dunn, le propriétaire d’un club de boxe, a été retrouvé pendu. Yale, son challenger, devant affronter le champion en titre dans deux semaines, est porté disparu. Sonia, la fille de Dunn, demande à Blacksad de mener l’enquête pour retrouver Yale et les conditions qui ont poussé Dunn au suicide. Mais s’agissait-il vraiment d’un suicide ?
Dans Under the Skin, nos confrontations avec les différents personnages nous mèneront dans une affaire de corruption sportive tortueuse, allant jusque dans les facettes les plus sombres de l’humain. L’histoire plaira aux amateurs de polars ou d’enquête policière car tout y est : le détective en imperméable, la jolie cliente éplorée, les milliardaires corrompus, les assassins aux discours malfaisants…
Tous est là pour nous mettre dans une ambiance de film noir, dans un New York d’après-guerre, encore en pleine ségrégation raciale. Bien que des références soient faites aux albums, il n’est pas nécessaire de les avoir lus pour comprendre et apprécier le jeu. On a affaire à une histoire inédite et assez proche du matériau original, même si elle n’a pas été écrite directement par Diaz Canales.
Un gameplay à la Telltale
Le jeu possède principalement des phases de recherche, où on contrôle Blacksad à la manette. On peut aussi utiliser les touches du clavier, mais vous verrez très vite que ce n’est pas une bonne idée. On dirige simplement Blacksad dans un lieu imposé par notre avancée dans l’histoire, et on clique sur les endroits où il est possible d’interagir. Pour vous aider à savoir où chercher, la caméra s’oriente vers les points d’intérêt. Il est aussi possible de parler avec les personnages présents dans la scène pour leur soutirer des informations.
En dehors de ça, certains moments seront rythmés par des phases de QTE, et vous serez souvent amenés à faire des choix qui influenceront le reste de l’histoire de façon plus ou moins importante. Vos décisions auront une influence sur la fin et permettront de découvrir et résoudre certains « mystères » annexes.
Ce point sera ce qui apportera le plus de tension pendant l’aventure, car une mauvaise décision peut amener à un moment d’embarras, ou, plus préoccupant, à la mort. Si vous voulez une idée sur votre façon de jouer, elle se retrouve résumée dans « votre Blacksad ». C’est un diagramme à barres vous indiquant votre comportement face aux personnages ou à vos réflexions jusque là, mais aussi si l’affaire vous sera profitable financièrement ou non.
On peut aussi être amené à utiliser les sens de Blacksad dans une sorte de « cat-o-vision » : la vue, l’odorat et l’ouïe de Blacksad sont mis à profit pour mieux analyser un personnage ou un détail de la scène. Cela sert à collecter plus d’indices ou à mieux décider de la suite d’un dialogue. Car oui, contrairement à d’autres jeux d’aventure plus classiques, nous n’avons pas d’inventaire. Il vous faudra combiner des indices collectés pour avancer dans l’enquête.
Les choix multiples imposés par le jeu sont au final assez intéressants, car notre sens moral est plusieurs fois mis à l’épreuve. On comprend bien qu’une décision peut faire prendre un sens tout à fait différent à l’histoire, et on est curieux de savoir ce qui se serait passé si on avait choisi autre chose. La tentation de recommencer l’histoire est bien présente. Seulement, pour un jeu d’enquête, on aurait peut-être aimé avoir plus de moments de réflexion et d’énigmes.
Une direction artistique fidèle, mais des graphismes qui peinent à suivre
Blacksad : Under the Skin est le premier jeu entièrement en 3D de Pendulo Studios. Ils ont été aidés dans ce projet par YS Interactive, auparavant spécialisé dans les jeux éducatifs et les serious games. Le projet était d’obtenir quelque chose au plus proche de la bande dessinée malgré le passage à la 3D. Il a fallu pour cela concilier le style très expressif des dessins de Guarnido et les moyens à disposition, ce qui n’a pas été facile. Et ça s’en ressent sur le résultat.
Soyons plus directs : le principal problème du jeu concerne les graphismes et les animations. Beaucoup de textures sont très brouillonnes, les textiles forment des angles étranges, les personnages s’animent parfois comme des robots, leurs cheveux restent solides comme du roc…
Il y a une foule de bugs et d’oublis qui, sans freiner la progression, brisent l’ambiance que le jeu cherche à donner. Même les menus et l’interface manquent de soin : parfois les textes sont trop longs pour apparaître entièrement dans un cadre, quand il n’est pas simplement remplacé par un malheureux <TEXT_NOT_FOUND>.
Ces problèmes deviennent de plus en plus présents à mesure de la progression : le pire reste les scènes les plus dynamiques où l’animation rigide et les angles de caméra étranges détruisent la tension qu’elles veulent donner. Tout le jeu a cet aspect « pas terminé » assez désagréable. C’est dur de dire ça car le jeu ne mérite pas non plus l’indifférence la plus totale, les développeurs ont voulu faire évoluer leur technique à travers ce projet, mais ils ont manqué de moyens. On ne peut que les encourager de s’améliorer.
De bonnes idées mais une mise en scène bancale
Voir Blacksad s’animer était une suite logique, au vu du parcours de ses créateurs. Mais adapter une bande dessinée est plus difficile qu’il n’y paraît. A trop vouloir ressembler à des cases de BD, les plans des cinématiques sont assez fixes, et parfois mal cadrés (qui a envie de regarder un gros plan sur une porte d’ascenseur pendant 20 secondes ?). Le découpage est lent même pendant les quelques scènes d’action, et les effets d’ombre et de lumière sensés rajouter une ambiance « film noir » ne font que rendre la scène et les environnements incompréhensibles.
Pour ce qui est du son, le doublage français est de qualité et donne aux personnages exactement les voix qu’on leur imaginait. Malheureusement, le mixage est aussi maladroit : parfois la musique couvre les dialogues, et on trouve des erreurs comme des clips qui sont coupés en plein milieu ou qui se jouent quand il ne faut pas. Il arrive même parfois que des moments devant être sonorisés se passent dans le silence complet.
Et c’est là qu’on commence à être triste : on arrive à voir toute l’ambition qu’avait le jeu au départ, mais qui se trouve entachée par un tas de problèmes montrant un manque de maîtrise. Peut-être qu’il aurait fallu préférer la réalisation d’un jeu d’aventure en 2D plus « à l’ancienne », demandant moins de moyens.
On ne peut tout de même pas retirer l’envie d’évoluer à Pendulo Studios, car leurs autres jeux se ressemblent beaucoup graphiquement. Il faudrait peut-être passer au-delà de ces problèmes, acheter Blacksad pour le découvrir et les encourager à continuer sur leur lancée. Il a de toute façon été prévu qu’un patch sortirait pour corriger une grande partie des bugs, et il concernera probablement la version PC.
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