Oubliez le soleil de l’été et le sable chaud, c’est le sang bouillant de la chair qui vous attend ici. Si vous connaissez Blasphemous vous savez où vous allez mettre vos pieds et votre lame. Pour les autres, attendez-vous à entrer dans un monde aussi sublime que violent, dans lequel religion et souffrance sont la norme. À l’instar du personnage du Penitent incarné, Blasphemous 2 ne compte pas vous tenir par la main. Si c’est le cas, c’est que vous êtes déjà mort.
Développé par le studio espagnol The Game Kitchen, la licence puise ses inspirations dans des jeux comme Castlevania, mais aussi dans des œuvres diverses allant des peintures de Goya, entre autre, ou la Divine Comédie de Dante Alighieri, sans oublier l’omniprésence de la religion et du folklore andalou, parmi pléthore d’autres références. Succès critique à sa sortie, le premier volet a su toucher son monde, et cette suite compte bien définitivement s’imposer.
Condition de test : Nous avons joué pendant 18 heures sur la version Xbox Series. Nous n’avons pas terminé le jeu à 100%, mais misez sur une moyenne de 15 à 20 heures pour le finir une première fois, un peu plus pour faire un tour suffisant.
Sommaire
ToggleLa Passion du Christ
Blasphemous 2 reprend là où s’arrêtait son prédécesseur, après les événements narrés dans les DLC de ce dernier. La quête désespérée du Penitent dressé contre Dieu était loin d’être terminée. Wounds of Eventide amorçait les enjeux à venir dans ce nouvel opus en prédisant la naissance d’une progéniture de Miracle. Pas de spoils, nous vous laisserons découvrir cette nouvelle histoire, mais sachez que nous sommes immédiatement baigné dans l’ambiance gothique et macabre du soft une fois dans la peau du Penitent. Les très belles mélodies donnent le ton, se lançant et nous accompagnant dans cette croisade infernale au cœur même d’un monde en pleine souffrance.
Les doublages réussis et les PNJ plus ou moins marquants que l’on rencontrera ne manqueront pas de nous maintenir dans cette atmosphère tenace, n’hésitant pas à déclamer des phrases grandiloquentes qui, certes, ne plairont pas à tous, mais collent à l’ambiance générale. À cette folie spirituelle qui hante chaque être en ces lieux. À cette aura pesante et presque morbide qui habite ce monde. Sur la question de l’immersion, Blasphemous 2 vous enlace sans que vous puissiez aisément en réchapper. Parce que si votre ouïe sera saisie, il en sera de même pour votre vue.
Une fois de plus, les équipes de The Game Kitchen offrent un rendu saisissant. On ne compte plus les superbes panoramas traversés et la myriade d’environnements intelligemment détaillés pour révéler une narration environnementale qui a des choses à dire. Nous laissant entrevoir un lore à la richesse certaine. Cela participe à notre implication dans l’aventure, et dans la quête du héros. En effet, bien que l’histoire souffre d’une narration morcelée ne facilitant pas la compréhension, d’autant plus si l’on n’a pas suivi le récit du premier opus, Blasphemous 2 semble un peu plus accueillant sur ce point.
Le découlement de l’intrigue principale se fait bien, le fil rouge reste visible. Le plus difficile à appréhender c’est plutôt la richesse du lore présenté. Que ce soit dans des discussions ou via les décors, le soft n’hésite pas à partir dans diverses citations intéressantes et intrigantes, mais qui peuvent nous perdre. Il faudra y revenir plusieurs et fois et prendre le temps de se poser et réfléchir pour rassembler le puzzle complexe de cet univers. Une richesse qui puise dans pléthore de références artistiques, dont des reprises de peintures de peintres espagnols célèbres, ainsi que du folklore andalou.
Des Hommes et des Dieux
Au même titre que pour Blasphemous premier du nom, ces choix artistiques vont aussi puiser dans tout ce qui touche de près ou de loin à des représentations et considérations religieuses, notamment christiques, pour pervertir, si l’on peut dire, les visuels, les baptiser de toute la violence et la brutalité qui vivent dans l’espèce humaine. Aussi épique que mythique, l’épopée contée sait attiser notre curiosité et soudoyer nos bas instincts pulsionnels. L’histoire est riche de réflexions et d’inspirations. Difficile de ne pas penser aux divers cataclysmes religieux ou à la Divine Comédie, ou encore aux œuvres de Goya.
Le jeu peut aussi être vu comme une relecture de moments historiques du Moyen-Age, apportant également son lot de réflexions sur la foi, l’espoir et le rapport des humains avec la croyance et le divin. Il faut gratter et faire des recherches en conséquence, mais on ne peut nier que Blasphemous 2, comme son aîné d’ailleurs, ne lésine pas sur les références qui, pour beaucoup, ne sont pas les plus évidentes à repérer. Et, une fois de plus, tout ceci participe à créer une dépendance chez le joueur ou la joueuse, compliquant l’envie de lâcher la manette.
Parce que oui, malgré sa difficulté évidente, mais pas insurmontable loin de là, le soft s’avère mieux équilibré que le précédent, Blasphemous 2 fait en sorte que l’on garde la foi. Maintenir notre foi envers le Penitent et sa mission, résistant aux supplices de ses morts à répétition. Car ici, dans ce monde, la moindre erreur commise conduit au trépas, parfois de manière rapide et brutale. Si les éléments du décors peuvent causer votre perte, le bestiaire ne vous fera pas de cadeau non plus.
Jour de Colère
La diversité d’entités croisées faisant, il est impératif de prendre le temps de comprendre et apprendre les patterns de chaque ennemi pour espérer survivre. C’est un voyage en enfer que propose The Game Kitchen, et les pièges seront monnaie courante. Généralement juste dans son côté punitif, on regrette tout de même l’absence de frame d’invulnérabilité lors des mises au sol. On se retrouve rapidement pris dans une spirale d’assauts adverses sans possibilité de s’en défaire.
Loin de gâcher l’expérience, ça reste un parti pris assez cruel, bien qu’à l’image des supplices endurés par notre personnage. Vous haïrez vos erreurs, au même titre que la ténacité de certains ennemis et les pics croisés durant votre périple. Mais rien n’est insurmontable pour le Penitent désireux de châtier ses opposants sans pitié. Le gratin venant une fois face aux imposants et pas moins inquiétants boss qui ponctueront l’aventure.
De véritables ponctuations et épreuves venant tester votre habileté. Le challenge généré alors et la variété des patterns des boss en font des moments grisants. Il y a une satisfaction à anéantir ces adversaires dans Blasphemous 2, comme si on se purifiait de toute colère et frustration qu’auraient pu causer nos erreurs. Cependant, il y a toujours moyen de s’améliorer et de surmonter l’épreuve. Déjà parce qu’on dispose d’une bonne liberté de mouvements pour appréhender la map, rendant possible de mettre un boss problématique de côté pour aller voir ailleurs.
L’exploration étant le plus souvent bien récompensée, vous gagnerez à errer afin de dénicher passages secrets et autres collectables utiles. Si certains objets ne se révèleront qu’une fois rapportés à un PNJ spécifique, d’autres sont de l’ordre de l’équipement. Blasphemous 2 propose de débloquer plusieurs aides, que ce soit en terme de résistance élémentaire ou boost d’attaque, voir de régénération de santé. Un build correctement construit pourra vous sauver de nombreuses situations, en plus de grandement faciliter les affrontements de boss.
Sur le chemin de la Rédemption
Une manière d’apporter de l’équilibre à l’expérience et de donner un peu de profondeur supplémentaire au gameplay. Notre personnage est bien plus souple et mobile qu’avant et n’est plus restreint au maniement d’une seule arme. De quoi décupler le plaisir et ajouter de la diversité aux combats. Il est toujours possible d’améliorer ses armes afin de débloquer de nouveaux coups et enchainements. Quelques combos gratifiants sont réalisables ce qui, couplé aux très bons feedback visuels et sonores, confère de superbes sensations. À fortiori quand on termine un ennemi avec une punition brutale.
Avec facilement 20 heures de jeu pour faire le tour des vicieuses contrées du monde de Blasphemous 2, il y a de quoi faire, sans pour autant que l’on se sente surmené ou même perdu malgré du backtracking logique. L’ergonomie a été revue, et ne serait-ce que dans les déplacements du Penitent et le gain de précision des séquences de plateformes, vagabonder est rarement pesant. La montée en puissance du personnage et de nous-mêmes se ressent aussi et participe à cette réussite.
Bien entendu, le titre a encore de la marge de manœuvre, ne sortant finalement que trop peu des carcans du genre. Particulièrement sur les combats et la dimension Metroidvania. Ceci étant, la licence a déjà su imposer son identité et son style, qui passe peut-être moins dans la créativité du gameplay que chez d’autres concurrents. Le tout en maintenant un haut niveau de maîtrise sur la totalité des aspects de son game design. Aucun élément n’a finalement été négligé, et c’est une démarche respectable qui donne cette force évocatrice au soft de The Game Kitchen.
Précisions qu’il n’est pas obligatoire d’avoir parcouru le premier Blasphemous et ses DLC pour apprécier cette suite. Le scénario nébuleux facilite l’entrée dans l’univers et n’en demeure pas moins suffisamment intriguant pour intéresser un néophyte. En revanche, ça ne peut qu’être plus appréciable de connaître l’univers et plonger à nouveau dans les méandres de cette mythologie particulière.
Cet article peut contenir des liens affiliés