Présent lors de notre édition de novembre 2021 de l‘AG French Direct, Broken Pieces est une production française développée par Elsewhere Experience et éditée par Freedom Games. Qualifié comme étant un thriller psychologique, le jeu met en scène une jeune femme, Elise, seule depuis la disparition soudaine de toute la ville de Saint-Exil en Bretagne, ainsi que de son fiancé dont elle est sans nouvelles. A vous de mener l’enquête sur les créatures fantomatiques qui prennent possession des lieux, mais aussi sur une secte occulte qui semble bien plus liée aux événements qu’il n’y parait.
Le jeu est sorti d’abord exclusivement sur PC via Steam et Epic Games Store le 9 septembre dernier contre 25€ puis est depuis devenu disponible sur PlayStation 4, PlayStation 5, Xbox One et Xbox Series X|S. Si vous vous demandez à quoi ressemble cette nouvelle production française, nous vous proposons de faire un arrêt en Bretagne, à la découverte de mystères touchant une petite ville à l’apparence tranquille.
Conditions de test : Nous avons terminé l’aventure principale de Broken Pieces sur PC, la plupart du temps à la manette et au casque, via Steam, en conditions graphiques hautes.
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Saint-Exil, Bretagne. En 1993, une vague de disparitions inquiétantes plonge cette petite bourgade dans le chaos. Elise, une jeune trentenaire récemment installée avec son conjoint Pierre, se retrouve seule, errante, sans aucune nouvelle des habitants de la ville ni de son compagnon et doit apprendre à se débrouiller seule. Des camions de l’armée sont sur place, des traces d’un mystérieux culte sont présentes un peu partout, tandis que de gigantesques colonnes d’eau sortent de mer.
Dans Broken Pieces, les joueurs et joueuses vont devoir tenter de percer les mystères de cette ville tout en aidant Elise à faire face à ses cauchemars et de mystérieuses créatures fantasmagoriques qui apparaissent en ville (un peu comme dans Alan Wake) sans crier gare et qui l’attaquent à vue. Voilà le postulat de départ de ce thriller psychologique made in Dinard, en Bretagne et développé par Elsewhere Experience.
Durant les 8h environ que dure l’aventure proposée par le jeu, nous sommes confrontés à un ensemble de propositions pas toujours originales mais qui néanmoins fonctionnent ensemble ici : énigmes environnementales ou puzzles à résoudre, combats contre les forces venues du brouillard, enquête sur les disparitions, écoutes d’enregistrements audios et gestion de l’inventaire sont les 5 piliers de l’expérience proposée par Broken Pieces.
Broken Pieces réside dans son côté aventure-exploration avec un concentré d’énigmes, d’allers-retours et autres recherches d’objets nécessaires à la poursuite de l’histoire avec un côté qui pourrait lorgner vers les premiers Resident Evil ou encore Silent Hill. La plupart des énigmes pourront vous donner du fil à retordre car rien n’est jamais vraiment clairement indiqué dans Broken Pieces.
En effet, vous cherchez la combinaison d’un tableau électrique ? Pensez à passer en vue à la première personne et levez les yeux. Ou encore, déclenchez une tempête grâce à votre cristal magique pour faire tomber un pont grâce au vent. Pensez à abaisser le niveau de l’eau grâce à vos talents de saisons à la volée via des fontaines magiques etc. Une variété de puzzles environnementaux qui constituent un des points positifs du jeu bien que l’on aurait des tonnes de choses à reprocher au jeu, notamment dans la construction de son univers et de son aventure.
En effet, nous regrettons amèrement l’absence d’une carte de l’île accessible via le menu afin de mieux se repérer. L’accès se faisant via des grilles présentes un peu partout en ville, il vous faudra un sacré sens de l’orientation pour ne pas oublier où se situe l’église qui est après la plage accessible via le cimetière dont la grille est ouverte grâce à un fusible récupéré sur le port. Vous êtes perdus ? Nous aussi et c’est bien dommage car les allers-retours sont légion et feront grandement avancer le temps de la journée, vous poussant à raccourcir vos périples alors que la construction de l’île et ses décors se dévoilant au fil de l’eau est très bien amenée.
Tous les cris les S.O.S.
D’ailleurs, sachez qu’Elise dispose d’une montre lui indiquant l’heure de la journée. Il vous faudra à tout prix éviter d’être dehors entre 20h et 7h du matin sous peine de devoir affronter énormément plus de créatures et ainsi risquer la mort. Pour éviter cela, rentrez chez vous en tenant compte des temps de trajets indiqués sur les zones de transition et couchez-vous pour faire passer la nuit.
On touche ici un autre point qu’il nous faut aborder et qui nous a un peu refroidis : afin de faire progresser votre enquête, vous devrez souvent aller vous reposer et faire passer la nuit. Mais ce système peut être vraiment redondant et peu passionnant surtout quand vous venez d’aller chercher un livre à l’autre bout de la ville dès le soleil levé et que vous n’avez pas d’autre choix pour progresser que de vous reposer à nouveau. Néanmoins, un des seuls avantages de vous reposer sera la fabrication automatique de munitions grâce aux éléments contenus dans votre coffre, l’occasion pour nous d’aborder les combats. Et attention, ça va piquer !
Clairement, les combats dans Broken Pieces, on s’en serait allègrement passé. Lourds, inintéressants, au gameplay d’au moins 20 ans en arrière et très peu diversifié, nous ne sommes pas parvenus à comprendre où souhaitaient nous emmener les développeurs. Vous ne disposerez en effet que d’une seule arme, avec deux types de munitions : les munitions classiques et illimitées, ainsi que les munitions HQ en quantité limitée mais beaucoup plus efficaces.
Votre cristal brillant pourra aussi vous aider en provoquant une vague de répulsion d’ennemis, tandis qu’une attaque chargée permettra d’en éliminer directement, permettant de vous sauver d’une mauvaise passe. Associez à cela des zones très fermées pour les affrontements, une caméra pas toujours bien placée (pas de panique, on y revient), un lock des ennemis pouvant devenir problématique par moments, et une esquive aussi efficace qu’un impact de foudre sur un paratonnerre, et vous obtiendrez un cocktail pas très plaisant et qu’on expédie le plus vite possible pour relancer notre enquête.
A noter par ailleurs que la plupart du temps, Elise sera très bavarde et commentera énormément d’actions dans le jeu. On pourrait croire que ceci est dérangeant dans l’absolu, mais cela s’intègre au final très bien dans le quotidien d’une femme seule depuis quelques semaines et qui cherchera l’interaction pour briser le silence assourdissant des environs.
Silence qui d’ailleurs sera trop présent entre les phases auditives puisque très peu de sons seront présents. Heureusement, Elise est équipée d’un magnétophone lui permettant d’écouter des cassettes trouvées sur le terrain, notamment du culte mystérieux des Dévoués, mais aussi des chansons enregistrées par son mari disparu, permettant de combler les phases trop monotones. On regrettera une exécution un peu maladroite cependant avec une interruption lors d’événements importants avant une reprise comme si de rien n’était.
De multiples influences pour une proposition bancale
On le disait plus tôt, Broken Pieces n’hésite pas à lorgner sur des références solides du paysage vidéoludique notamment Resident Evil ou Silent Hill (dont le remake du deuxième épisode vient d’être dévoilé). Mais il faut savoir qu’à de multiples moments, nous aurions très bien pu nous imaginer dans une œuvre à la Kojima (et notamment Death Stranding) par ses événements peu cartésiens, ces énormes colonnes en plein milieu aquatique, ces créatures fantomatiques etc., tandis que l’autre moitié du temps, les références lovecraftiennes seront tout à fait présentes.
Des influences qui iront jusqu’à provoquer une fin que nous n’avons pas entièrement pu décrypter et qui nous a finalement tout de même déçus, laissant penser à une ou plusieurs suites si le succès est au rendez-vous, mais qui ne clôture pas comme nous l’aurions souhaité les aventures d’Elise, surtout après une aventure et un déroulé aussi cryptique qu’il ne fut durant ces environ 8 heures de jeu nécessaires pour terminer l’histoire..
Nous avons du mal à comprendre comment cette jeune femme parvient à garder autant son calme après tous ces événements et comment elle en vient à ne pas être surprise de quelconques pouvoirs magiques émanent de son mystérieux cristal. Comme nous l’évoquions plus haut, votre cristal vous permettra, en plus de repousser vos ennemis, de déclencher des tempêtes ou de changer les saisons en cours passant d’une saison sèche à l’hiver en quelques secondes (et ses habits aussi par la même occasion).
Nous pourrions également reprocher le manque d’accompagnement du joueur durant l’aventure. Nous ne sommes pas contre être laissés à nous-mêmes et ceci est même appréciable dans une époque où tous nos jeux sont balisés et nous prennent par la main, mais perdre 1h de temps réel à se « balader » pour retrouver ce fichu disjoncteur laissé sur un dispositif qui n’est plus utile et sans indication, n’est pas des plus engageants pour la rétention du joueur dans le jeu. Sachez toutefois qu’Elise notera tout ce qu’elle trouve ou déduit dans son carnet, un ajout pas très original mais qui fonctionne très bien.
Abordons enfin l’aspect technique et graphique. Globalement, le jeu a été stable sur notre bécane, mais on ne pourra que constater un important taux d’aliasing dans l’image ainsi que des bugs de collision classiques. La direction artistique proposée est très convaincante avec des paysages faisant vraiment penser à nos contrées bretonnes et rendant un parfait hommage à ce coin de France si joli et l’immersion sera globalement présente avec l’ensemble des panneaux et autres journaux présents en français.
Mais là où le bât blesse, c’est sur son aspect graphique pur. Pour un jeu de 2022 et même pour un petit studio, nous pouvons exprimer notre déception. Le jeu n’est pas globalement moche mais n’est clairement pas très beau non plus, avec des textures pas très fines qui arrivent même à « popper » pas très loin de nous, tandis que le choix de placer des angles de caméra fixe comme dans les premiers Resident Evil desservira plus souvent le propos que l’inverse.
Bien que le choix soit réservé à tout moment aux joueurs et joueuses de passer entre deux angles de caméra, cette option, qui est ici pour renforcer le caractère isolé et esseulé de notre protagoniste ne rend pas service à des déplacements devenus hasardeux ou des placements de caméras que l’on aurait préféré plus soignés, voire proposant une caméra à l’épaule, beaucoup plus actuelle.
Enfin, un mot sur la localisation française, qui est plutôt de très bonne facture bien que parfois certaines répliques ou réactions n’ont pas obtenu l’adhésion souhaitée. Ceci dit, les voix françaises ont le mérite d’être présentes et cela apporte un certain cachet à cette production bretonne.
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