Medal of Honor, Call of Duty, Commando, Battlefield 1942, Return to Castle Wolfenstein, Hearts of iron… deux possibilités, soit vous êtes jeunes et ces noms sonnent vaguement familiers, soit vous avez été gamer à la fin des années 90 et vous êtes en train de foncer sur gog pour revivre vos grands souvenirs de l’époque. On en a eu des jeux sur le sujet, et des sacrés bons jeux. Alors quand Activision annonce un retour aux sources pour Call of Duty, c’est tout une génération de joueurs qui retrouve une curiosité perdue pour la série. Fini les mauvaises copies de Titanfall, fini la guerre moderne, on replonge dans la France de 1944 pour chasser l’armée allemande et flinguer du Waffen-SS. Sur le papier, Call of Duty World War II à tout pour réconcilier les fans avec la série et réunir deux générations de joueurs sur un seul et même terrain de jeu.
Sommaire
ToggleC’était pas ma guerre
Le ciel est gris, la mer est calme, l’air est frais, mais les frissons sur la nuque de l’homme devant nous ne sont pas la faute du froid. Entouré de nos camarades, photo de notre fiancée en main, on subit un premier, puis un second tir de mortier. Les embarcations voisines fument et les hommes à leurs bords se jettent par-dessus bord pour survivre aux flammes, une autre percute la vôtre et fait tomber votre barrière de protection, et sous vos yeux se dévoile une plage à peine visible sous lune nuée de balle qui s’abat sur vous et les cadavres qui s’empilent. Cette scène, la plupart d’entre vous l’avez déjà « vécue », que ce soit dans un certain débarquement allié ou bien dans Call of Duty 2 (qui lui choisissait le débarquement de la Pointe du Hoc), et si l’excellent sound design du jeu nous en met déjà plein les oreilles, le soufflet retombe très vite. À peine arrivé sur la plage que l’on a déjà capturé trois bunkers et repoussé l’armée allemande. Pas vraiment aussi dantesque que ce que l’on serait en droit d’espérer en 2017.
Bon, on peut se rassurer sur un point, le retour aux sources fait tout de même plaisir. Cela faisait bien longtemps que l’on attendait un nouveau titre ambitieux sur la guerre la plus meurtrière de notre histoire. Call of Duty s’appuie sur son héritage et son aspect toujours très hollywoodien pour nous resservir ce que l’on avait en 2001 avec les moyens techniques d’aujourd’hui. Le titre s’affiche fièrement en 1080p natif (du moins la plupart du temps, un doute sur une résolution dynamique subsiste) et à 60 fps stable pratiquement tout du long. C’est la moindre des choses car le rendu n’est pas toujours réussi. Certains passages sont même tout simplement laid malgré une direction artistique plutôt maîtrisée. Le titre ne tient clairement pas la comparaison avec son principal concurrent Battlfield 1 beaucoup plus soigné visuellement.
Le « déjà-vu » est inévitable, certes le jeu ouvre sur le débarquement, mais on retrouve aussi les situations « Call of Dutienne » auxquelles nous somme habitués. Ainsi on ne compte pas les fois où l’on se retrouve à terre après avoir été étourdi par une explosion à proximité, les incontournables QTE si chères à l’ADN de la série sont aussi très présentes. Cet épisode a tout de même le mérite d’aborder les aspects les plus noirs de la guerre. Les crimes de guerre ont une place importante dans la narration en arrière-plan du jeu (ces deux soldats qui se rendent et sont brûlés vif sous les rires appuyés des allemands), mais aussi les corps démembrés et mutilés des soldats après un bombardement ou le long de la plage pendant le débarquement. Les développeurs ont même été jusqu’à représenter très frontalement toute l’horreur des camps de concentration presque sans retenue.
Quand les aigles attaquent
Il fallait bien cela pour rehausser l’intérêt malgré tout limité du scénario et des protagonistes. C’est bien simple, l’histoire va exactement là où l’on se l’imagine. Les personnages sont tous des archétypes dont l’arc narratif est prévisible au moment même où l’on fait leur connaissance. Le lieutenant en second intraitable pour qui rien n’est jamais assez bien et frôlant la folie, le meilleur ami un peu grande gueule et attachant, le chef du groupe dévoué à sa mission à ses hommes plus qu’à sa propre vie, etc… On ne peut que regretter de ne pas avoir eu quelque chose de plus osé, surtout que le jeu nous a été vendu comme traitement des aspects les plus noirs du conflit et de l’impact émotionnel sur les soldats. L’émotion du joueur ne sera titillée qu’à de très rares occasions et on aura tout le mal du monde à s’attacher à ce groupe de héros. On peut tout de même noter le bon travail de doublage du casting anglais qui apporte beaucoup à la crédibilité et l’immersion.
Ces soldats ne vous accompagneront pas uniquement lors de cutscenes, ils seront aussi à vos côtés lors des phases de gameplay grâce à un nouveau système d’escouade. Chacun de ces personnages vous assistera à sa façon en vous envoyant des munitions, des grenades, des explosifs ou un kit de soin supplémentaire à la demande. Comment ça un kit de soin ? Par souci d’authenticité (on y reviendra), la vie ne remonte plus magiquement au bout de quelques secondes dans la campagne solo. On se coltine une barre de vie qu’il va falloir chérir et régulièrement remplir à l’aide des ces fameux kits pour éviter de mourir. Petite révolution pour la série qui a très largement contribué à faire de la régénération automatique une norme dans les fps, mais aussi une blague qui fait pouffer les fans de Doom au fond de la salle. « Vous n’êtes pas un super-héros », disait le producteur du jeu pour justifier ce choix. C’est pourtant l’impression que l’on a en difficulté « normale » tant l’opposition est faible, je recommande ainsi de jouer au moins en commando si vous ne voulez pas jouer au cousin qui ne s’assume pas de Wolfenstein. La durée de vie prendra aussi un petit coup de boost, même si le jeu dépasse difficilement les six heures. Et ne comptez pas sur une quelconque rejouabilité car outre quelques collectibles sans intérêt et des actions héroïques à réaliser (sauver un soldat d’une exécution, mettre un blessé à l’abri), qui soit dit en passant apportent elles un peu d’authenticité, rien ne donne envie de relancer l’aventure, mais ceci est quelque chose auquel Call of Duty nous a habitués.
Bien que les quelques séquences les plus fortes du jeu ne suffisent pas à justifier un second run, elles ont le mérite d’être là et de nous scotcher à notre siège par instants. Parmi ces moments de bravoure, le bombardement d’une forêt dans les Ardennes à la frontière Belge et le paysage dévasté qu’il laisse derrière lui est épatant de maîtrise et de justesse dans sa mise en scène. D’autres moments, plus grand guignolesque et très Uncharted font aussi leur effet « wow » malgré la débauche d’exagération de ces passages. Surtout qu’encore une fois l’équipe sonore nous régale, mais on fleurte tout de même un peu trop près de la série B et c’est très dangereux pour une histoire aussi premier degré.
Ces instants purement narratifs trouvent aussi leurs équivalents dans certaines séquences de jeu. L’infiltration de la Kommandantur de Paris et la lutte pour la libération de la ville qui s’ensuit font partie de ces moments parfaitement rythmés qui osent quelque chose de différent. Le niveau est étonnamment ouvert et offre plusieurs chemins pour atteindre son but. Bon on reste sur du Call of donc n’imaginez pas non plus quelque chose de la carrure d’un MGS V mais l’effort mérite d’être souligné et pose la question de pourquoi n’avons-nous pas plus de moments comme celui-ci, plaisant à jouer et qui n’est pas une énième vague infinie de nazis.
Du plomb dans l’aile
Mais pour cette poignée de moments forts on a un jeu entier qui souffre d’un level design peu inspiré répétant les mêmes situations que l’on vivait déjà dans le premier Call of Duty. Ainsi on n’échappera pas aux séquences au cours desquelles il faudra couvrir nos alliés avec un sniper pour qu’ils aillent détruire un objectif. On se coltine aussi des phases de tourelles où on abat à nous seul la moitié de la Luftwaffe (qui a dit que c’était compliqué de gagner une guerre ?) ou l’inévitable séquence en tank dans les rues de Paris. Évidemment, il est difficile de constamment renouveler le gameplay d’un genre et d’un contexte surexploité pendant des années, mais le jeu se montre par instants capable de sortir de sa zone de confort avec brio alors pourquoi ne pas avoir insisté dans cette direction ? Reste un sens du rythme qui permet de faire passer la pilule avec un peu plus de facilité. Malheureusement, lui aussi souffre d’une action souvent beaucoup trop statique où l’on peut littéralement attendre derrière un mur sans rien faire que ça passe pendant quelques minutes avant de reprendre. On peut aussi parler de ces séquences d’infiltration en couloir ni amusantes, ni inintéressantes qui ne donnent même pas l’impression de vraiment jouer. Et ces maudits pop-up qui vous rappellent constamment que « L3 SERT A SPRINTER » ou nos collègues qui passent leur temps à hurler « J’AI DES MUNITIONS POUR TOI » alors qu’il y a un indicateur sur le côté. On a vraiment le sentiment d’être pris pour de gros idiots.
En soi, que le jeu manque d’originalité dans son déroulement ou son level design, passe encore. Mais comment expliquer que certaines séquences soient encore moins réussies, voire pires, souffrent de la comparaison avec les premiers épisodes de la série ? Le débarquement en est un parfait exemple, malgré une longue mise en place et montée de tension, dès qu’il devient question de commencer à jouer on prend la plage dans les 30 secondes qui suivent. C’est une chose de rajouter une barre de vie pour être plus authentique, c’en est une autre de transformer le débarquement en un séjour au Club Med à peine dérangé par votre voisin de chambre amputé d’une jambe. Certaines séquences entièrement scriptées manquent cruellement de punch. Les qte sont mous, faciles, et la plupart du temps totalement inutiles. Le jeu se permet en plus de répéter les mêmes séquences à plusieurs reprises, sans même changer quoi que ce soit à ces dernières. On se paye aussi des phases en Jeep d’une nullité effarante. Quant à la mission finale, elle consiste simplement à empêcher un pont d’exploser et ressemble à n’importe quelle autre mission de milieu de jeu. Triste.
Le coup de la bougie d’anniversaire du Vietnam !
Pour beaucoup, la campagne solo ne fait qu’office d’amuse-gueule avant de se lancer dans le grand bain, le mode multijoueur. Ces derniers seront vite rassurés par la montagne de contenu qui s’élève devant eux. Première nouveauté, le QG qui sert d’hub central au multijoueur. On peut s’y balader seul ou avec des amis qui auront alors tout le loisir de nous voir déballer nos lootbox sous leurs yeux, on ne perd pas le nord chez Activision. Il est même possible de défier les autres joueurs en 1vs1, à l’ancienne. Ici on peut se rendre sur le terrain d’entraînement pour tester les nombreuses récompenses de « killstreak » avant de sélectionner nos préférés. On peut aussi accepter plusieurs contrats ou missions qui correspondent à des défis réalisables dans un certain laps de temps. Par exemple, éliminer 35 personnes en 10 minutes de Team Deathmatch, réaliser 15 frags avec une tourelle en mode WAR, réaliser tant d’assists, etc… Réussir ces défis permet de gagner de l’expérience supplémentaire, mais surtout des lootbox, toujours plus de lootbox. Et attention, on nous avait promis uniquement du cosmétique, mais j’ai trouvé des armes, des modificateurs dans les boîtes cadeaux. Qui a dit quenelle ?
Le QG est donc la refonte de façade choisit pour se rapprocher du copain Destiny et développer l’aspect social du multijoueur, mais la vraie nouveauté, celle qui nous intéresse, c’est le mode WAR. Écrit en grosses lettres majuscules qui tâchent, ce mode n’est ni plus ni moins qu’un enchaînement d’objectifs à accomplir. D’un côté, une équipe doit au choix, construire un pont, escorter un tank ou planter une bombe, de l’autre, la seconde équipe doit repousser les assauts adverses suffisamment longtemps pour l’emporter. En gros c’est Overwatch, mais dans CoD. Pour le coup, le mode fonctionne vraiment bien et a le mérite de forcer le team play dans un jeu toujours aussi basé sur la performance individuelle, tout en donnant un véritable aspect « chair à canon » de l’infanterie qui colle parfaitement au contexte. Voir tous ces braves soldats se sacrifier un à un pour grappiller quelques centimètres sur la construction du pont pendant que d’autres les couvrent à quelque chose que la campagne solo ne trouve jamais en terme d’authenticité. Malheureusement le mode est limité à 6vs6 (comme tout le reste du multijoueur), et manque donc d’envergure. Cela dit ce nouveau mode de jeu reste une excellente surprise et renouvelle l’intérêt du multijoueur à lui seul.
Pour le reste, rien de nouveau à l’horizon. On a simplement remplacé le mot « classe » par « division », mais le but est toujours de choisir son équipement et ses compétences avant de se lancer dans des joutes nerveuses à travers l’Europe. On dit adieux aux jets-packs et rayons lasers futuristes pour retrouver des choses plus terre à terre. Mais il ne faut pas non plus trop en demander, on a le droit à des réticules lasers, des radars de position et il n’y a absolument aucun recul sur les armes automatiques, même les plus lourdes. Au diable le contexte historique, il faut bien que la jeune génération retrouve ses marques, adieu les kits de soin la régénération automatique de la santé reprend ses droits. Les allergiques au multijoueur égocentré de Call of Duty n’y trouveront toujours pas leur compte, les autres se sentiront comme chez eux. On cherche donc avant tout à être premier et pas forcément à faire gagner son équipe. À noter que malgré les nombreuses plaintes sur l’état des serveurs, je n’ai eu aucun problème au cours du test.
The rise of the Nazi Zombies part 7
Lui aussi a fait vendre des palettes de Call of Duty à lui tout seul, le mode zombie est aussi de la partie. Il se paye un casting bien plus prestigieux que la campagne solo avec David Tennant (Docteur Who, mais aussi Killgrave dans Jessica Jones), Élodie Yung (Elektra dans la série Netflix Daredevil), Ving Rhames (Marsellus dans Pulp Fiction) et Katheryn Winnick (Lagertha dans Vikings). Autant dire que ça a de la gueule, surtout qu’on se paye un David Tennant en roue libre avec son pire accent écossais, un régale. Le mode en lui-même est fidèle à son ADN, avec des vagues de zombies qu’il faudra repousser tout en réalisant un certain nombre d’objectifs. Le tout fonctionne plutôt bien et s’avère idéal entre amis, mais de là à acheter le jeu juste pour ça alors que d’autres font ça mieux…
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