Carmen Sandiago n’est pas un personnage de fiction inconnu au bataillon. Pas moins de 40 ans après sa création initiale, une pléthore de dessins animés et de jeux vidéo très inégaux (dont ceux de 2004 et 2009 qui sont d’une médiocrité abyssale), la licence est revenue tout récemment avec un reboot sous forme de série produite par Netflix. Cette dernière n’a pas été renouvelée pour une saison 5, mais la franchise a trouvé le moyen de revenir via un jeu sobrement intitulé… Carmen Sandiego.
Le soft est développé par Gameloft, studio français principalement connu pour des jeux mobiles, et tout récemment le sympathique Disney Dreamlight Valley. La lourde tache de redorer le blason de Carmen Sandiego revient au développeur français, sous un format vidéoludique qui ne lui a pas toujours réussi. Dans ce nouvel épisode de la franchise, il y a du mieux, bien que le budget soit limité. Mais surtout, on se demande encore à qui s’adresse vraiment ce jeu.
Conditions de test : Nous avons terminé les missions principales de Carmen Sandiego en 7 heures de jeu, et en faisant les dossiers d’ACME (obligatoires). Le titre a été testé avec 32 Go de Ram, une RTX 3070 et un i5 12-400 (2.50Ghz).
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ToggleLe retour de Carmen Sandiego face à V.I.L.E.
Si le retour de Carmen Sandiego sous le format vidéoludique fait plaisir, ce n’est pas pour autant que la production de Gameloft va nous proposer une campagne narrative trépidante. Nous allons incarner la voleuse Carmen Sandiego qui, après avoir profité d’un repos bien mérité, va reprendre du service avec le même but, déjouer les plans de l’organisation criminelle V.I.L.E.. Effectivement ces criminels sont de retour, et auront la particularité mystérieuse de commettre plusieurs méfaits en même temps.
C’est alors que notre héroïne et son acolyte Player vont devoir déjouer les plans du V.I.L.E., mais aussi découvrir comment ils peuvent commettre le crime parfait dans plusieurs endroits en simultané. De plus, Carmen Sandiego aura aussi la tâche de bosser avec ACME, une autre organisation lancée à la poursuite du V.I.L.E..
Sur le papier, bien que la trame semble un minimum intéressante, force est d’admettre que le tout est beaucoup trop décousu. En effet, il n’est pas rare de juste résoudre les nombreux vols commis via les missions, et ensuite avoir des miettes de cinématiques qui nous permettent d’avancer sur le véritable cerveau des opérations. Même si la fin peut paraitre un minimum surprenante, nous gardons un sentiment assez amère amère du fait que ladite fin n’en soit pas vraiment une.
Les autres missions devraient visiblement arriver plus tard, et sûrement en DLC par dessus le marché. Autant dire que le geste des développeurs sonne comme un aveux de faiblesse, comme s’ils n’avaient pas pu terminer le titre à temps, ou bien qu’ils étaient simplement désireux de grapiller tout ce qui peut l’être sur le plan mercantile. On se croirait presque au temps de Prince of Persia (2007) et sa fin payante, mais on espère se tromper. Nous verrons bien de quoi il en retourne sur les prochaines semaines.
Pour le reste, notez que le soft reste fidèle à la production de Netflix, nous donnant l’impression que chaque mission correspond à un épisode tout entier. Sur ce point là, et si l’intrigue est inégale, les fans de la série devraient largement s’y retrouver et apprécier l’ensemble, ce qui est déjà ça de pris.
Qui est-ce ? Carmen Sandiego Edition répétitive
Carmen Sandiego fait du neuf avec du vieux dans le gameplay. Un peu comme les vieux titres de cette même licence, le développeur va nous emmener sur un jeu d’enquête et de déduction. Systématiquement, chaque missions de la campagne narrative ou des dossiers d’ACME vous demandera de résoudre le vol d’une pièce historique très rare, et vous avez 7 jours (ou 4 pour les dossiers d’ACME) pour mettre la main sur le coupable. Si ce n’est pas le cas, ou que vous vous trompez de suspect, c’est V.I.L.E. qui l’emporte et vous voilà bon pour recommencer du tout début.
Vous débuterez ainsi sur une nouvelle destination à chaque fois, et vous devrez naviguer entre les trois monuments disponibles de chaque pays, et ensuite partir sur la prochaine destination exacte en vous aidant de divers indices récoltés. Si vous faites une erreur, vous perdrez non seulement des heures de trajet (il en va de même quand vous allez visiter les trois monuments sur chaque destination ou que vous faites une simple action), mais aussi le peu de temps qu’il vous reste pour pouvoir faire vos mini jeux ou phases de gameplay annexes. Car ceux-ci vous permettent de dénicher de potentiels indices sur le futur endroit auquel vous devrez vous rendre, ou bien le portrait robot du suspect en fuite.
Concrètement, la base du gameplay est super solide au premier abord, et il faut dire que l’on prend un malin plaisir à jouer les détectives, et à déchiffrer logiquement les indices afin de trouver la prochaine destination ainsi que le suspect. D’ailleurs il faut l’admettre, le logiciel identikit est franchement sympa pour pouvoir éliminer petit à petit les suspects avec les maigres indices que l’on récolte. Il est possible de filtrer la couleur des cheveux, des yeux, mais aussi la phobie du suspect, son centre d’intérêt ou les marques particulières sur son corps. Qui plus est, et moyennant du temps qui est déjà précieux, vous avez la possibilité d’utiliser une reconnaissance faciale, et éliminer les innocents ou épingler l’un des potentiels criminels, afin d’être autorisé à délivrer un mandat pour l’arrêter quand vous arrivez dans la dernière destination où il se cache.
L’outil proposé est donc complet, mais force est de constater que la recette n’est pas réellement adaptée à une longue session de jeu, devenant vite écœurante de répétitivité et manquant d’inventivité sur le long terme. Une fois le gameplay pris en main, on ressent une forte redondance, et même si le côté procédural sur l’indentification du suspect est appréciable, force est d’admettre que les situations ne se renouvellent jamais vraiment sur les séquences de jeu, ce qui va vite laisser place à une lassitude évidente. Il restera bien les dossiers d’ACME à faire outre la campagne narrative, mais sachez que le système sera de la même trempe, avec juste des phases de jeu en moins que sur le mode histoire, ce qui est bien décevant.
L’autre élément aussi très agaçant, montrant que cela a été fait à la vite, c’est le système de levelling qui sert juste à rallonger artificiellement la durée de vie. En finissant les missions ou en terminant avec succès certaines séquences, vous gagnez de l’expérience, et cela vous fait monter en niveau. Cependant, ne vous attendez pas à un système d’amélioration car la montée en niveau va finalement servir à débloquer les prochaines missions du mode campagne, mais aussi des dossiers d’ACME. Autrement dit, cette feature dispose d’un game design favorisant le grind…
Aussi limité que les gadgets de Carmen Sandiego
On en vient au cœur du jeu, qui résidera dans les mini jeux et les autres phases « d’enquête », dignes d’un jeu mobile sans saveur. Car oui, il faut savoir que le titre est aussi sorti sur mobile, ce qui va porter préjudice aux version consoles et PC de Carmen Sandiego, avec un gameplay très limité. Nous avons d’abord ces passages avec des mini jeux à effectuer. La plupart restent amusants avec des nœuds à remplir, un coffre à ouvrir voire une serrure à aligner pour ouvrir une porte. Ces derniers sont variés mais parfaitement inégaux, et finissent par vite se répéter et devenir une vraie corvée pour certains.
Cet aspect est finalement une déception profonde, au même titre que les moments où l’on prend enfin le contrôle de Carmen Sandiego. Encore une fois, on se heurte au gameplay très vieillot avec des séquences où vous êtes sur des environnements minuscules et fermés. Il s’agira de parler à des personnages voire interagir avec des objets, ce qui déclenchera des mini-jeux comme faire les poches des sbires de V.I.L.E., et bien d’autres. De plus, chose au moins positive à noter, Carmen Sandiego joue la carte de la culture générale. Et surprise, nous sommes forcés de constater que tout ceci donne la possibilité d’en apprendre un peu plus sur l’histoire des pays que l’on visite au fil du jeu.
Un élément à souligner qui devrait faire plaisir aux joueurs de tous âges. Par ailleurs, vous aurez également des moments où Carmen devra suivre des agents de V.I.L.E. sans se faire repérer, utiliser un planeur ou sauter de toit en toit avec son grappin. Cette dernière phase est elle-aussi inintéressante, car il s’agira de cliquer pile dans le réticule au bon moment pour progresser. L’ensemble est rudimentaire, et ce gameplay proposé est beaucoup trop archaïque pour espérer convaincre. Ce que l’on voit, c’est un portage d’un jeu mobile sur consoles et PC, et le résultat ne prend jamais. Néanmoins, des passages avec des choix à faire sur une situation précise récompenseront le joueur avec des indices supplémentaires à récolter.
Vous l’aurez compris, tout ce qui est proposé dans Carmen Sandiego est au mieux correct, au pire parfaitement maladroit. D’ailleurs, on se demande encore une fois à qui s’adresse réellement le soft. En effet, s’il offre une difficulté accessible au début, le jeu a tendance à se corser par la suite. La faute à des indices qui se font de plus en plus compliqués pour pas grand-chose, voire terriblement hasardeux. Sil y a cet aspect ludoéducatif avec de la culture générale, ce n’est toutefois pas un titre que l’on pourrait vivement conseiller à un enfant. Idem pour un adolescent ou un adulte, ces derniers pouvant vite lâcher l’affaire, après seulement une petite heure voire moins.
La technique et les jeux tirés de séries Netflix, pas le grand amour…
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la production de Gameloft fait de la peine graphiquement. Le titre est tristounet à voir sur consoles et PC avec de l’aliasing à foison, des animations d’un autre âge, ou encore des textures ultra grossières, que ce soit sur sur les bâtiments, les effets graphiques ou sur les personnages. Le soft a clairement plusieurs années de retard. Toutefois, le jeu est bien optimisé (encore heureux), et l’esthétique cartoon fait quand même plaisir à voir, surtout que l’ensemble reste fidèle à la série animée Netflix.
On se consolera avec ça, mais le constat reste malheureusement le même avec le sound design. Faisant dans le minimaliste à son maximum, Carmen Sandiego est dénué de doublages. La seule chose que l’on retiendra, ce sera quelques soupirs ou deux trois mots doublés, qui rappellerait presque ce qu’on trouve chez les Sims. On pourra néanmoins souligner les musiques, qui restent celles de la série animée. Enfin ça n’empêche pas le résultat d’être à revoir…
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