Close to the Sun est un jeu d’horreur à la première personne mêlant enquêtes et science-fiction au coeur d’un XIXe siècle animé par une ferveur grandiose pour les découvertes scientifiques. Le titre est développé par Storm in a Teacup, un studio italien fondé en 2013. Portée par cette ardeur débordante, Ada, une jeune journaliste, est conviée à rejoindre sa sœur Rose, célèbre physicienne, sur l’Hélios, fleuron de la recherche scientifique. Ce navire, symbole de la réussite insolente de Nikola Tesla, se veut à la pointe des découvertes dans le domaine de la physique et de la biologie. Inauguré en grande pompe, cet immense paquebot pourrait faire basculer l’humanité dans une nouvelle ère si l’équipe de brillants chercheurs parvient à combiner à profit les dernières avancées de la science. Pourtant, rien ne s’est passé comme prévu.
Quarantaine
Les premiers pas d’Ada aux abords de l’Hélios sont peut aisés. Une atmosphère fantomatique tout à fait étonnante plane sur les lieux. Tout semblait installé et prêt pour une belle et grande cérémonie, une fête. Un vibrant hommage à ce projet pharaonique semblait attendre ce navire imposant. Pourtant, tout semble figé dans la nuit. Le temps paraît suspendu. Rose a toutefois expressément demandé à sœur de la rejoindre, par lettre. Elle lui a même fourni un récepteur afin de rapidement pouvoir la retrouver et communiquer d’ici là. Mais aucun comité d’accueil ne se manifeste, rien ne bouge et rien ne vit aux alentours. Comble de l’étrangeté, les portes du cargo se referment précipitamment dès l’entrée d’Ada en ces lieux. Poussée à s’engouffrer plus en avant, Ada parvient enfin à contacter sa sœur par le biais d’un appel de détresse qu’elle semble entonner à tout l’équipage. Du moins à ce qu’il en reste. La première étape du périple consistera donc pour les deux sœurs, à se rejoindre. L’urgence est d’autant plus criante qu’en réalité, Rose n’a pas écrit à sa sœur, et à partir de là, le mystère s’épaissit.
Ce qu’Ada va progressivement découvrir à bord est particulièrement inquiétant. Non seulement, il n’y a plus âme qui vive mais de longues traînées de sang jonchent le sol par endroit. Certains mécanismes permettant de passer de pièce en pièce semblent avoir été volontairement obstrués. Plusieurs éléments du décor sont sans dessus dessous, laissant imaginer des scènes de lutte, de fuite… et d’horreur. Ça et là, des passeports et des brochures de presse nous renseignent sur l’équipage et l’espoir fou qui devait animer Nikola Tesla, à l’origine du projet. Ce que l’on comprend entre les lignes, c’est que ce magna de l’énergie avait pour ambition de découvrir une technologie capable de révolutionner l’approvisionnement mondial. Si seulement il était possible d’astreindre le temps et la matière aux exigences du progrès ! Le projet, sur le papier, est grisant. Tesla pourrait être un visionnaire. Mais plus Ada s’aventure dans les entrailles de cette machine assaillie par la brume, plus le tableau vire au drame. Les corps en état de décomposition s’accumulent, des ombres se dissipent dès qu’elle approche, des portes claques et de terribles inscriptions de sang tapissent certaines parties du bateau. Aurait-on ouvert la boîte de Pandore, et relâché par la même occasion tous les malheurs de la création ? Ou finalement, le navire a-t-il été happé dans une sorte de triangle des Bermudes maléfique annihilant toute trace de vie ?
C’est ce qu’Ada tâchera de découvrir par l’entremise de plusieurs petites énigmes la rapprochant un peu plus de sa sœur. Celles-ci particulièrement accessibles et parfois simplistes lui permettront de comprendre que certains membres de l’équipage ont survécu mais qu’une force obscure les empêche de s’échapper. C’est ce que tous cherchent. Enfin presque. Certains semblent avoir trouvé la folie, la déraison. En jouant avec la science, en brisant les règles et les codes, le mal s’est infiltré. L’autre dimension qui se surajoute à ce cauchemar, c’est cette étrange affaire d’espionnage qui semble avoir parcouru de part en part toute l’intrigue du titre. Tesla, pour se prémunir de l’éventuel vol de ses découvertes aurait engagé des espions pour flairer d’éventuels contrevenants à bord. Ces deux intrigues pourraient-elles être malencontreusement entremêlées ?
Un gameplay poussif et frustrant
Le scénario, plutôt original et bien ficelé, est toutefois desservi par un gameplay particulierement problématique. Avec bienveillance et ouverture d’esprit, il apparaît qu’un nombre limité de commandes peut faire partie intégrante d’une histoire et bien s’agencer avec la problématique d’ensemble. Toutefois, l’économie de mouvements ne saurait se traduire par une forme de lourdeur qui viendrait frustrer le joueur. Et c’est malheureusement le cas. Dans Close to the Sun, Ada court à peine, saute très difficilement et démontre une habileté très limitée à réagir instinctivement aux menaces qui l’entourent. La crise de panique qu’elle traverse au début du jeu pourrait nous inciter à croire que sa psychologie générale est vacillante et bancale. Pourtant, rien ne l’indique, ne le soutient, après cette première alerte. Ainsi, lors de ses courses, de ses fuites ou tout simplement lorsqu’elle tente de s’engouffrer dans un passage étroit, Ada est pataude, lourde et particulièrement maladroite. La sensation, clavier ou manette en main est la même : le tout manque de fluidité, de légèreté. Dès lors, recommencer des dizaines de fois un passage pourtant anodin d’un chapitre sous prétexte qu’Ada n’a pas été placée au centimètre près de l’endroit où il a été prévu qu’elle saute, ou qu’elle enjambe un obstacle, finit par faire enrager le joueur, surtout lorsque la scène se termine par une tuerie injuste… que l’on revit donc 25 fois.
Le titre ne manque pourtant pas de bonnes idées. L’apparition soudaine de spectres phosphorescents face à Ada laisse imaginer que des dimensions se superposent peut-être et renforcent l’impression du triangle des Bermudes mentionnée plus haut. Par ailleurs, l’aspect graphique mobilisant de somptueux décors rappelant BioSchock, – n’en déplaise aux développeurs (comme ils l’indiquent sur leur site) – est du plus bel effet. Les immenses statues, symboles de la mégalomanie de Tesla, éparpillées sur l’Hélios ajoutent à l’immersion. Le doublage en français, également très soigné, donne tout autant un effet d’empathie et de sympathie pour l’aventure des deux soeurs. Outre le problème des déplacements évoqués plus haut, la trop grande simplicité de certaines énigmes trouve écho dans une durée de vie relativement courte (entre 6 et 7 heures au maximum) du titre. On passe donc sur Close to the Sun assez rapidement, sans avoir véritablement eu l’envie ou le temps de mieux savourer l’histoire. Peut-être d’ailleurs que le huis-clos de l’Hélios et sa narration très balisée ne permettent pas d’étendre l’intrigue. Si on ajoute à cela une héroïne sans compétence et sans arme, l’équation devient difficile à tenir. Le jeu tire ainsi plus vers l’œuvre cinématographique, malgré tout digne d’intérêt.
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