Le cinéma et le jeu vidéo ont depuis toujours tissé des liens, l’un s’inspirant de l’autre. Au début des années 2000, en 2001 plus précisément, le studio finlandais Remedy Entertainment sortait Max Payne, un TPS dans lequel vous incarnez un policier qui suite à la mort de sa femme et de son enfant, décide de se venger et de démanteler tout le trafic d’une drogue nouvelle, le Valkyrie.
Dès ses débuts, Remedy affichait ainsi sa volonté d’utiliser les codes du cinéma tout en proposant un langage purement vidéoludique. On retrouve le principe du flic désabusé comme dans de nombreuses œuvres, et les citations au cinéma de John Woo ou de Humpfrey Bogart sont assez fréquentes. Et que dire du fameux Bullet Time, ce procédé que le grand public découvrit au cinéma deux ans auparavant avec un certain Matrix.
Mais ce que l’on ne dit pas, et qui sera également une constante du côté de Remedy, c’est que l’on retrouvait dans les deux épisodes la volonté de nous impliquer au plus profond du personnage avec des séquences de plateforme se trouvant dans les cauchemars de Max, souvent abstrait ou avec une portée surnaturelle. Si on récapitule : scénario fort, TPS, dimension cinématographique, et surnaturel, la formule Remedy ?
C’est ce qui semblait se confirmer avec Alan Wake qui, quant à lui, puisait son inspiration autour de l’œuvre fantastique de Stephen King, plongeant son personnage dans une panne d’inspiration du même acabit que d’un Jack Torrance de Shining. Après une excursion un peu plus horrifique à l’occasion du stand-alone Alan Wake’s American Nightmare tout aussi plaisant, mais beaucoup plus inspiré cette fois d’une série télévisée, La quatrième dimension.
C’est d’ailleurs du côté de ce média que Remedy va lorgner par la suite avec le titanesque projet Quantum Break. A la fois un jeu vidéo mais aussi une mini-série, la volonté de Remedy de faire du cinéma n’aura jamais été aussi claire. Mais c’est également là que le studio a franchi une limite qui les a fait perdre en efficacité et en puissance narrative et vidéoludique. C’est donc trois ans après ce dernier opus que nous retrouvons les Finlandais autour d’un tout nouveau projet, intelligemment communiqué de façon très cryptique, Control.
Conditions de test : Nous avons testé Control sur PS4 Slim et si le jeu est d’une beauté sans nom, nous avons également plusieurs ralentissements sur des séquences où des dizaines d’ennemis étaient présents et lorsque nous créons des explosions en chaîne. Nous espérons qu’un nouveau patch viendra corriger le tout.
Pour l’écriture de ce test, nous avons fini le jeu via les missions principales, en faisant tout de même une partie des quêtes secondaires, pour un temps de jeu d’environ 18-20 heures. Pour boucler l’ensemble du jeu, que ce soit les missions annexes et missions d’urgences, comptez environ 35 heures de jeu.
Sommaire
ToggleBienvenue à la nouvelle directrice
Control est donc un TPS qui vous proposera d’incarner Jesse Jaden. Nous arrivons au moment où la dame arrive au bureau du FBC, le Bureau Fédéral du Contrôle. Elle va devenir malgré elle, au travers d’un happening, la nouvelle directrice du centre et aura pour mission de remettre de l’ordre au siège, en éliminant notamment une menace paranaturelle nommée Hiss. Si les motivations de Jesse sont assez floues au début du jeu, ce sera au fil des missions que vous découvrirez réellement qui elle est et quelles sont ses motivations, mais pas que.
Comme vous avez pu le voir à l’occasion des différents trailers, mais aussi à la lecture de ce résumé, Control est un jeu possédant un univers assez touffu et très cryptique. Voici quelques petites clés de compréhension qui devraient vous aider à vous y retrouver, qui seront d’ailleurs importantes pour la suite de ce test :
- Le FBC est une agence secrète gouvernementale travaillant autour du paranaturel, notamment dans le but de protéger le pays (les États-Unis) des phénomènes.
- Le paranaturel est un terme faisant référence à l’ensemble des éléments qui transgresse les lois de la nature et de la réalité.
- Le Hiss est présenté comme la menace paranaturelle capable de posséder des objets et des personnes.
C’est donc dans un univers où le paranaturel existe que vous évoluerez. C’est d’ailleurs toute une ambiance qui se construit autour de ces aspects-là, que ce soit autant visuel que sonore. Toujours dans une volonté cinématographique, mais aussi sérielle, on sent que Control est né d’une équipe qui passe son temps libre à regarder films et séries. En cela, il y a un vrai mix d’ambiances et d’inspirations. Une sorte de rencontre entre X-Files, l’œuvre de David Lynch et d’autres séries plus modernes tel que Mr. Robot ou Utopia.
Remedy a réussi à créer tout un univers qui est à la fois oppressant tout en restant très minimaliste, très lisse en apparence. Toute cette conception est par ailleurs sublimée par un aspect en particulier, le siège du FBC. Véritable personnage du jeu, le siège, que l’on prénomme également « l’Ancienne Maison », se dévoile au fur et a mesure de notre progression. On visite petit à petit les différents secteurs du bâtiment et on y découvre la vie à l’intérieur de l’agence au fil des différentes lectures de fichiers trouvés ça et là.
Encore une fois, l’équipe a poussé le détail jusqu’au bout, avec des dizaines et des dizaines de documents écrits, audio et vidéo, nous plongeant véritablement au cœur de l’organisation. On peut passer au final plusieurs heures de jeux à lire uniquement des documents récupérés. Un bonheur pour les amateurs de lore qui trouveront ici un vrai terrain de recherche.
Une beauté plastique
Le premier truc qui impressionne, c’est la beauté du jeu. Utilisant le Northlight Engine, précédemment utilisé avec Quantum Break, nous avons affaire à l’un des plus beaux jeux de cette génération. Tout est sublimement modélisé, les effets de lumières sont magnifiques et l’effet de fumée lorsque vous tirerez sur un agent du Hiss est tout simplement à tomber. Le jeu fait d’ailleurs tout pour donner une impression de grandeur, et le réussit très bien.
Utilisant pourtant une caméra TPS assez classique, Remedy réussit à créer avec l’architecture de l’Ancienne Maison tout un grand huit de sensations : de la grandeur dans le secteur de recherche – avec cet immense arbre – a une oppression avec ces parties déformées par le Hiss nous demandant de faire même un peu de grimpette.
Il y a ainsi dans Control un vrai plaisir de simplement se balader dans les différents lieux composant le jeu. Il y a une composition architecturale toujours inspirée, des petits détails présents à chaque endroit. D’autant plus que, et c’est un des aspects visuels qui a été maintes et maintes fois montré, les lieux changent, vivent, et se meuvent. Une fois que vous aurez éliminé l’ensemble des forces du Hiss sur une zone du secteur, vous reconstituerez les lieux tels qu’ils étaient conçus à l’origine au siège du FBC.
Mais Control c’est aussi une mise en scène de tout instant. Ayant clairement appris de ses tentatives passées et de ses loupés avec Quantum Break, Remedy a réussi à proposer quelque chose de plus dense tout en restant très fluide. Si les cinématiques fonctionnent bien et sont très efficaces, le jeu se permet également de faire de la mise en scène en plein jeu, avec notamment des surimpressions de personnages filmés en image live, donnant une tonalité surréaliste à l’ensemble.
Comme nous l’avons dit auparavant, il y a également toute une partie des documents qui a été filmée de façon live pour donner de l’épaisseur à l’ensemble qui fonctionne très bien. On retrouve par exemple des images d’archives du bureau en pleine expérimentation comme d’un faux show de marionnettes pour enfants aux dialogues quelques peu dérangeants. Tout ceci marche et donne pour le coup une autre dimension visuelle au titre.
Ajoutons en plus à cela le plan astral, un monde abstrait qui servira dans un but bien précis, et vous retrouvez ici un bon panel de ce à quoi vous attendre concernant Control. Au final, concernant la partie visuelle, c’est un quasi sans faute pour Remedy, à l’exception de certaines scènes entrecoupant les missions principales plongées dans un noir profond à l’exception d’un personnage. Ces passages sont un peu gratuits et n’apportent finalement pas grand-chose, en dehors d’être une prémonition de la suite des aventures.
Le son est également un des aspects très importants du côté de Control. Que ce soit la musique assez discrète et très rythmique la plupart du temps, à l’intelligent sound design nous faisant de subtiles indications concernant la résolution d’une énigme, le son est une pure réussite. Du côté du casting vocal également avec un doublage anglais vraiment réussi, où l’on retrouve notamment des acteurs issus de Max Payne et de Alan Wake, comme si Control était finalement l’œuvre somme du studio.
Jesse shoote tout ce qui bouge
Parlons maintenant du centre nerveux, autrement dit son système de jeu. Control se propose, à l’image de l’histoire de Remedy, comme d’un jeu de tir à la troisième personne. Vous incarnez donc Jesse Jaden, une femme qui possède de nombreuses habilités : si vous retrouvez les classiques courses et sauts, vous avez avec vous différentes capacités de combat et de défense. A commencer par notre unique arme à feu, pas vraiment comme les autres. Elle est… comment dire… vivante.
Véritable couteau suisse cette arme vous suivra du début à la fin de l’aventure et ne quittera jamais votre main, comme greffée à votre membre droit. A l’origine un semi-automatique, vous pourrez rapidement débloquer de nouveaux modes pour celui-ci : mitraillette type uzi, cinq coups inspiré des fusils à pompe… Pour cela il faudra obtenir les bons matériaux pour pouvoir débloquer ce nouveau contenu. Et pour cela, la condition est d’éliminer des ennemis à la pelle.
Nous vous l’avons présenté précédemment, le Hiss est une force qui corrompt les êtres vivants, ce qui entraîne bien entendu que de nombreux soldats vous feront face. Que ce soit des militaires somme toute classique aux ennemis plus vénères à l’image de télékinésistes, vous devrez leur faire face par escouade pour progresser de zone en zone dans Control. Du côté du bestiaire, on retrouve un setting assez complet et varié. Au fur et a mesure de votre progression, les ennemis monteront en grade. Il faudra donc s’équiper et améliorer ses armes en conséquence.
De nombreux mods sont d’ailleurs disponibles que ce soit sur le corps de vos ennemis comme dans des cubes/coffres disposés un peu partout dans l’Ancienne Maison. Vous trouverez des mods pour vos armes, mais aussi pour vous qui amélioreront un peu tout ce qui est possible d’améliorer : santé, dégâts des balles, durée de rechargement, cadence de tir… Des améliorations qui vous seront pour le coup très utiles si vous souhaitez progresser sainement dans le jeu.
Bien entendu ce n’est pas tout car, comme vous avez pu le voir ou le lire, Jesse Jaden possède également des capacités psychiques ! Débloquées au fur et à mesure de votre progression grâce à des objets de pouvoir. Vous aurez l’occasion, au travers d’une phase de tutoriel, d’expérimenter cette nouvelle mécanique s’ajoutant à votre panel de mouvement. Vous pourrez ainsi balancer tout bout de décor à vos ennemis, créer un bouclier de défense voire même contrôler pendant un court laps de temps vos ennemis.
Et c’est là que Control se montre aussi efficace dans son game design. A chaque nouveau pouvoir débloqué, ce sont tout un nouvel éventail d’enchaînements qui se créent et de combinaisons qui se multiplient, ne vous laissant comme limite que votre imagination. Le jeu se dévoile ainsi petit à petit, tout en vous laissant toujours le temps d’appréhender chaque mécanique, de l’expérimenter et de la maîtriser. Si vous souhaitez prendre votre temps, Control vous le laissera.
D’autant plus que ces pouvoirs pourront également être améliorés au fur et à mesure de votre progression grâce à un petit arbre de talents, vous permettant par la suite de pouvoir utiliser des ennemis comme projectiles, ou simplement d’augmenter la durée de tel ou tel pouvoir. Ces améliorations seront bien entendu très importantes pour la suite car sans elles, il sera difficile d’arriver au bout de l’aventure. Ajoutez à cela quelques puzzles reposant sur l’observation ou sur une mécanique spécifique et vous avez un panel assez complet du game system de Control.
Un Metroidvania 3D dans la pure veine !
Vous l’avez bien lu, Control est un jeu empruntant au Metroidvania ! Si jusqu’à présent, Remedy a toujours proposé des expériences vidéoludiques très linéaires, avec pour volonté de nous faire vivre leur histoire comme eux le voulaient. Cette fois-ci, les choses ont changé et l’équipe semble avoir assez confiance en leur récit pour proposer un découpage narratif beaucoup plus libre pour le joueur.
C’est ainsi que nous allons avoir tout d’abord une histoire principale basée sur des missions, où vous allez tout d’abord découvrir et débloquer les différents secteurs du bureau, vous permettant assez rapidement une liberté de mouvement quasiment totale. Si le jeu limite l’accès de certaines zones par des cartes d’accréditations de niveau différents, ce n’est pas non plus castrant pour le joueur étant donné que cette progression se fait assez naturellement.
Certaines zones vous seront également accessibles grâce à vos pouvoirs et on peut même voir que certains niveaux principaux avancés vous demanderont d’avoir au préalable obtenu ces pouvoirs, démontrant de la construction et de l’évolution logique de notre progression. Une grande force du titre est également d’avoir réussi à ne pas nous faire trop d’allers-retours. De plus, de nombreux points de voyage rapide sont proposés, permettant d’éviter les dizaines de minutes à passer de zone en zone.
En plus des missions principales, vous aurez des missions annexes qui vous seront données par le concierge Ahti par exemple, ou bien trouvées via des documents disposés à différents endroits de l’Ancienne Maison. Ce sera donc à vous d’explorer les différents secteurs pour obtenir de nouvelles missions, aux récompenses souvent très intéressantes.
D’autres missions pourront également arriver en croisant des personnes. On se souviendra longtemps de ce pauvre Philip coincé à devoir fixer du regard sans arrêt un frigidaire, une mission avec une conclusion pour le moins étonnante. Plus vous ferez de quêtes secondaires, plus vous en saurez autour de l’univers et de l’histoire de Control, au point de développer entièrement de nouveaux arcs narratifs.
Dernier type de mission, vous aurez assez fréquemment des appels en urgence, vous demandant de vous rendre à tel ou tel endroit, afin de débarrasser la zone d’une horde de corrompus du Hiss. Cela donne un sentiment d’urgence assez sympathique et pour le coup logique et cohérent avec le jeu et son ambiance. Si vous souhaitez obtenir plus de récompense, il y a des petits challenges que vous pouvez activer sur un point de déplacement rapide, vous demandant par exemple de tuer un certain nombre d’ennemis sans mourir.
On voit que tout ce système de progression et de mission est une véritable réussite. Si une sorte de routine de jeu se crée, Remedy arrive toujours à nous surprendre, que ce soit via les décors, les situations dans lesquelles nous sommes, ou encore via les personnages que nous rencontrons. On ne ressent au final à aucun moment de sentiment de répétitivité sur l’ensemble de l’expérience de jeu, ce qui est vraiment plaisant.
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