Days Gone est le premier gros projet de Bend Studio, une structure qui a développé des jeux pour Sony depuis la PS1 avec les Syphon Filter, et qui s’est illustrée dernièrement avec le très sympathique Uncharted Golden Abyss sur PS Vita. Est-ce que le passage sur console de salon est réussi avec ce projet de grande envergure ?
Le test a été réalisé sur PS4 Pro uniquement, de plus nous vous garantissons des impressions sans spoil majeur.
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ToggleDes motos et des mutants
Days Gone propose de nous plonger dans un monde post-apocalyptique comme il en existe beaucoup désormais, on peut dire plus ou moins la même chose concernant le genre du monde ouvert qui s’est largement démocratisé ces dernières années dans l’industrie. On retrouve ces deux aspects à travers certaines exclusivités de chez Sony avec des titres comme Horizon Zero Dawn et The Last of Us, entre autres. Bend Studio nous expose leur vision avec ce titre même si l’on retrouve les standards de qualité de la marque japonaise, mais aussi les tares malheureusement. Bien qu’il emprunte beaucoup aux films et séries qui font la part belle aux zombies comme The Walking Dead ou World War Z, que ce soit dans l’ambiance ou la narration, Days Gone préfère se démarquer de ce côté-là en présentant un monde ravagé par des « Freakers », traduit simplement en français par « mutants ».
Suite à une pandémie mondiale qui a transformé une bonne partie des habitants en morts-vivants affamés, le monde est en proie au chaos. C’est dans ce contexte peu réjouissant que nous incarnons, deux ans plus tard, Deacon St John, un ancien biker reconverti en chasseur de prime. Histoire de ne pas trop passer pour une caricature des modèles évoqués, le soft emprunte beaucoup à la culture des fameux motards américains pour personnaliser son héros. C’est également un moyen habile de mettre en avant le fidèle destrier qui nous accompagne tout au long de notre aventure, autrement dit la moto. Et pourtant, l’histoire commence plutôt mal puisque suite à un accident blessant son ami (et confrère biker) Boozer, notre drifter (terme pour désigner les chasseurs de primes du No man’s land) se fait faucher sa moto. Alors que les deux compères voulaient partir vers le nord pour s’offrir un nouveau départ, ces désagréments vont les forcer à rester dans l’état de l’Oregon qui sera notre terrain de jeu.
Malgré beaucoup de clichés du genre, l’histoire de Days Gone s’apprécie comme une série à la The Walking Dead avec un découpage qui offre plusieurs intrigues, et des personnages authentiques.
Évoluer dans cette partie du nord-ouest des Etats-Unis est une bonne surprise puisque c’est une région peu exploitée même si le Montana de Far Cry 5 ne se trouve pas très loin. En outre, ce coin de campagne souligne plutôt bien le côté « rustique » des personnages. A l’instar du héros, ces derniers ne sont pas marquants ni vraiment charismatiques, toutefois leur authenticité fait que l’on s’attache tout de même à eux. Pour reprendre l’exemple précédent, on se croirait vraiment devant une série à la The Walking Dead où quelques personnages secondaires arrivent à briller grâce aux interactions et à leurs backgrounds. Sans trop en dire pour ne pas gâcher la surprise, on peut citer des gens comme Rikki ou encore Iron Mike.
Quand il n’est pas sur les routes, notre drifter rend service à différents camps de réfugiés qui se sont créés dans la région. Il a ainsi affaire à plusieurs personnalités bien distinctes, cela nous permet aussi d’observer les nombreuses facettes qu’a engendré l’apocalypse. En revanche, on tombe également dans de nombreux clichés du genre car la narration de Days Gone se calque énormément sur celles de ces séries, d’où nos nombreuses références à TWD allant jusqu’à l’adaptation de Telltale. L’exclusivité PS4 se découpe en plusieurs intrigues comme des saisons que l’on enchaîne dans un seul jeu. Parfois elles se chevauchent, néanmoins ce n’est qu’une manière habile de cacher la linéarité générale de l’intrigue. On n’échappe pas non plus aux ralentissements dans la narration, sans parler des antagonistes très plats.
Nous sommes donc face à du déjà vu à tous les étages mais à moins que cela ne soit un frein pour vous, on apprécie globalement tout ce qu’il nous fait vivre. Encore une fois, Deacon n’est pas le plus marquant des protagonistes principaux de jeux vidéo, cependant les nombreux flashbacks avec la femme qu’il a perdue, son côté je-m’en-foutiste, et sa personnalité revancharde violente (il n’hésite pas à enfoncer le clou verbalement en massacrant ses ennemis, et en jurant à tout-va) lui donne une certaine profondeur. C’est l’idée que l’on se fait du biker américain en somme. Qui plus est, l’excellent jeu d’acteur du doublage français (et anglais d’ailleurs) permet de s’immerger dans de très bonnes conditions. Dans le même domaine, on note un sound-design impeccable et quelques musiques qui font leur effet, principalement les chansons mélancoliques lors de moments clefs sur notre bécane.
Un monde ouvert qui Deacon zéro
La plus grande force de Days Gone est sans conteste l’ambiance de son monde ouvert qui est particulièrement réussie. Visuellement, nous sommes devant la crème de la crème des jeux AAA. Que ce soit les paysages de l’Oregon avec ses forêts, ses déserts, ses montagnes ou encore les zones urbaines dévastées, il nous en met plein la vue. Le soin apporté aux détails force le respect, il suffit de rentrer dans n’importe quelle maison au hasard pour s’en rendre compte, et ce n’est qu’un petit aperçu.
Les balades en moto sont donc un véritable régal d’autant que les sensations de conduite sont impeccables. On pestera éventuellement en début de jeu concernant l’impression de vitesse, mais les améliorations que l’on apporte à la bécane par la suite corrigent le tir en quelque sorte. Mention spéciale aux effets météos qui ont une incidence directe sur la tenue de route en plus d’être splendides. Les effets de lumière sont également à saluer, on peut facilement s’arrêter quelques instants pour admirer un lever de soleil qui éclaire une vallée petit à petit. Du fait de ces qualités graphiques, le mode photo est plus pertinent que jamais à l’image du Spider-Man d’Insomniac Games. Les options diverses (filtres, expressions faciales, cadres…) permettent de prendre de très beaux clichés en personnalisant le tout, voire même de s’amuser avec des situations plus humoristiques.
Le monde ouvert de Days Gone est visuellement irréprochable avec un soucis du détail qui reflète parfaitement le chaos ambiant, en outre l’ambiance de cet univers post-apocalyptique est bien maîtrisée avec de nombreux dangers qui croisent notre route.
L’environnement de Days Gone n’est pas seulement beau, il est aussi dangereux. L’hostilité de cet univers post-apocalyptique est parfaitement retranscrite grâce aux nombreux dangers présents un peu partout. On pense de suite aux mutants qui sont surtout nombreux la nuit, mais il ne faut pas non plus négliger les animaux (infectés ou non) et les maraudeurs qui peuvent vous poursuivre à moto ou tendre des embuscades en vous éjectant brutalement de votre bécane. Heureusement, toutes ces rencontres sont plutôt bien dosées ce qui permet de ne pas se faire harceler en permanence. Le frisson ultime reste toutefois les confrontations avec les hordes, ces énormes amas de mutants qui vous foncent dessus à la première occasion. Il s’agit du plus gros challenge du jeu, la préparation est la clé pour y faire face. Parfois, la zone vous offre même des opportunités pour ralentir les hordes tout en diminuant sa taille progressivement avec des barils explosifs présents sur le chemin.
La gestion et la customisation de la moto sont d’autres petits plaisirs liés au monde des biker, et cette dernière est indissociable de Deacon.
Bien entendu, Deacon n’a pas que sa « bike » et son couteau pour affronter ses ennemis. Il dispose d’un arsenal complet (arme de mêlée, une arme de poing, une arme principale, et une arme spéciale), des projectiles (cocktail molotov, grenades…), des pièges, et d’autres gadgets bien pratiques. L’inventaire rapide disponible avec R1, bien que difficile à appréhender au départ notamment pour sélectionner le bon objet, est hyper intuitif. Le changement d’arme ralentit le temps, ce qui évite de trop casser le rythme en pleine action. C’est en outre très pratique pour fabriquer rapidement ce dont on a besoin, même au dernier moment donc. D’ailleurs, pour obtenir de nouvelles armes, il faudra les acheter dans magasins des camps de survivants, de même que les pièces pour améliorer votre moto. On rappelle que Deacon est avant tout un motard fier de son cuir, sa monture mécanique est donc une extension de lui-même. On ressent assez bien cette connexion entre l’homme et la machine puisque l’on prend soin de son deux-roues en permanence en effectuant des réparations ou remplissant le réservoir d’essence quand c’est nécessaire. Sans oublier l’apparence que vous pouvez personnaliser à votre guise.
Les sujets qui fâchent
C’est évident, Days Gone a beaucoup de qualités, toutefois il déçoit terriblement dans son approche du monde ouvert qui arrive à être plus basique que ses collègues sur PS4. Il reprend tous les codes principaux sans prendre aucun risque, en faisant même moins bien par moment. On nous offre un terrain de jeu magnifique mais affreusement vide en matière d’activité. C’est simple, vous enlevez les missions principales, quelques missions annexes répétitives (qui consistent souvent à tuer tous les ennemis d’une zone ou sauver un otage), les nids de mutants à brûler pour débloquer le voyage rapide, quelques checkpoint du NERO où Deacon peut améliorer ses statistiques (santé, endurance, concentration), et vous avez la liste grossière du contenu disponible sur la carte. Mis à part les hordes, il n’y a pratiquement rien à faire, ou plutôt rien d’intéressant après avoir fini le jeu. Les événements aléatoires sont bateaux, même chose pour les collectibles dont certains qui ne méritent clairement pas ce statut dans les menus. On se retrouve ainsi à explorer les alentours pour, principalement, ramasser des composants pour le craft, et c’est à peu près tout. Il y a bien quelques flyers et panneaux pour jouer les touristes mais rien de très réjouissant.
Days Gone a manqué le coche pour rendre l’exploration de son monde ouvert attractif, le tout est terriblement convenu et pauvre en activités annexes.
L’univers n’est qu’un théâtre servant de décor à l’intrigue principale. Plus on avance, et plus il est difficile de sortir des routes qui nous emmènent droit aux objectifs. Bend Studio a oublié de nous donner envie de sortir pour le plaisir de vagabonder. Pas de chasse au trésor, pas d’énigme, pas de mini-jeux, la liste des manques – pourtant tout aussi basiques – est longue comme le bras. La chasse et la cueillette sont pour ainsi dire inutiles car les fruits de ces récoltes servent uniquement à augmenter la confiance des camps à faibles doses (et débloquer de nouvelles choses dans les magasins). Parlons des camps justement qui ne proposent rien de plus que les services de base évoqués précédemment. C’est vraiment dommage que cet énorme environnement soit sous-exploité.
Pourtant quelques bonnes idées étaient là comme les courses-poursuites en moto qui se comptent sur les doigts de la main. Pour ne rien arranger, le soft souffre un peu techniquement lorsque l’on roule avec notre pétrolette. On constate quelques chutes de framerate, des mini-freezes et du clipping lorsque le regard se porte un peu plus loin devant nous. L’IA est des ennemis est aussi très gentille dans la mesure où sa « naiveté » (pour ne pas dire son aveuglement) autorise des phases d’infiltration la main dans le slip. Cependant, à l’heure où l’on écrit ces lignes, le patch day one n’est pas encore déployé, nous mettrons donc ce test à jour si nécessaire.
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