S’il y a bien un sous-genre de RPG qui reste difficilement accessible pour les néophytes, c’est bien celui des Dungeon-Crawler en vue à la première personne. Souvent considérés comme jeux de niches, ces expériences peuvent vite sortir chez nous dans la confidentialité la plus totale, hormis quelques titres qui commencent à tirer leur épingle du jeu comme la série des Etrian Odyssey. Avec bien souvent des mécaniques rêches et un style plutôt exigeant au premier abord, ce sous-genre ne possède que très peu de portes d’entrée et peine donc à accueillir un nouveau public. C’est peut-être dans cette réflexion qu’est né Demon Gaze II, nettement plus simple à appréhender que son prédécesseur sorti sur PS Vita ou qu’un bon nombre d’autres œuvres du même type. Le titre n’en oublie pas sa nature complexe pour autant et même s’il est un bon moyen de découvrir le genre, certains défauts risqueraient bien de jouer en sa défaveur.
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Tout d’abord, il est important de préciser que vous n’avez pas besoin d’avoir joué au premier opus pour comprendre les tenants et les aboutissants de l’histoire. Quoi de mieux pour débuter un récit qu’un héros amnésique, véritable cliché de tout « bon » héros de JRPG, et qui servira d’excuse pour vous faire comprendre les particularités de cet univers. L’intrigue se situe donc quelques années après le premier épisode, dans la ville d’Asteria dans laquelle la résistance gronde face au joug du dirigeant de la cité, Magnastar. Après votre réveil et votre cavale, vous serez amenés à rejoindre cette résistance qui prend la forme d’une émission de radio et qui lutte contre les différents démons du dictateur. Vous ne serez pas démunis face à cette menace, puisque votre héros (ou héroïne) se réveille avec un tout nouveau pouvoir énigmatique logé dans son œil, le Demon Gaze, qui lui permettra d’enrôler les démons vaincus dans votre camp. C’est donc à vous qu’il incombe de retourner la propre armée de Magnastar contre lui, et de faire rugir la résistance dans les rues à l’aide de votre émission de radio.
Vous l’aurez constaté, on reste dans des concepts éculés qui peineront à évoluer durant toute l’aventure, même si deux ou trois surprises rendent le récit plus digeste. L’intérêt de cette histoire ne tient en fait qu’à ses personnages, eux aussi frappés par le syndrome du déjà-vu, mais qui restent assez sympathiques à découvrir. Au-delà de Muse et de tous les membres de la résistance, les démons capturés bénéficient aussi d’un véritable développement même s’il est plus en retrait. Pour découvrir un peu plus les personnalités de vos compagnons, vous aurez l’opportunité d’obtenir des rendez-vous avec chacun d’entre eux, ce qui donne l’occasion de les voir sous un nouveau jour. Il vous faudra donc passer par un mini-jeu de séduction des plus étranges avant d’obtenir un date avec eux, qui renforcera votre lien en combat une fois celui-ci terminé. On ne va pas vous mentir, l’intérêt n’est pas des plus importants selon les personnages, mais cela reste assez divertissant pour peu qu’on ne soit pas complètement allergique au « moe ».
Les rendez-vous avec vos démons offrent quelques moments sympathiques au ton très léger et parfois amusant.
Ces « dates » représentent en fait la seule vraie échappatoire à la linéarité du jeu, qui laisse peu de places aux quêtes annexes. L’histoire se révèle être vraiment dirigiste, dans le souci de bien encadrer le joueur lors de sa découverte des mécaniques, mais peine à en sortir même après une quinzaine d’heures de jeu. On trouvera ici et là quelques petites quêtes de collecte pour certains de nos compagnons, mais rien de bien captivant. Tout est calibré selon un ordre bien défini, ce qui pourra déplaire aux vétérans du genre – aux dépens des débutants – et entraîne une certaine lascivité au fil des heures, d’autant plus que la répétitivité s’invite rapidement à la fête. On se rend alors très vite compte que l’on est enfermé dans le même schéma qui tourne en boucle : celui de partir à la recherche d’un démon, le déloger de sa tanière, le capturer, et tout recommencer encore et encore.
Donjons & Démons
Au moins, cela nous permet de bien prendre notre temps pour nous familiariser avec le système de combat du titre, l’un de ses points forts. Comme nous l’avons déjà précisé, Demon Gaze II vous fera parcourir des donjons à la première personne dans lesquels vous affronterez divers ennemis avec le même type de vue. Doté de mécaniques complètes mais abordables pour tous, le titre réussit véritablement à nous apprendre les bases sans trop de difficulté, malgré le fait qu’il ne soit pas traduit en français (l’anglais reste d’un niveau assez abordable, peut-être plus qu’un Persona 5 par exemple). Ce que l’on nous présente ne relève pas d’une inventivité folle ni d’une profondeur ahurissante en comparaison à d’autres dungeon-crawler, mais reste efficace sur toute la durée de l’aventure avec quelques particularités intéressantes.
Le pouvoir de Demon Gaze permet tout d’abord d’adopter diverses stratégies en combat. En éveillant cette capacité, vous rendrez à vos compagnons leur forme démoniaque originelle, leur permettant de lancer de nouvelles attaques et d’augmenter un peu leur puissance. Cela vous offrira aussi un nouveau panel de techniques à utiliser avec parcimonie, puisqu’elles puiseront dans votre « Star Gauge », cette barre qui vous permet de garder vos démons éveillés. Ces nouvelles compétences sont d’ailleurs obtenues lors des différents rendez-vous avec vos compagnons, de quoi vous donner une bonne raison de passer plus de temps avec eux.
Avec la possibilité de répéter les mêmes commandes à l’aide d’un seul bouton, les combats gagnent véritablement en dynamisme.
Un peu plus tard dans le jeu, de nouvelles mécaniques s’ajoutent comme le système de fusion. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, il ne s’agit pas de fusionner vos démons entre eux pour en obtenir un plus puissant, à la manière d’un Shin Megami Tensei, mais de les fusionner avec vous pour obtenir un tout nouveau pouvoir. Selon le type de démon avec lequel vous fusionnerez, votre transformation aboutira à une forme prédéfinie, soit orientée davantage vers la magie, soit vers la force ou sur un équilibre entre vos diverses statistiques. Vous serez alors le seul à pouvoir attaquer pendant plusieurs tours, et ce avec les compétences des deux personnages fusionnés, de quoi offrir un avantage certain. Mais là encore, une contrepartie vient équilibrer la balance puisque à la fin de cette fusion, votre démon sera considérablement diminué et tombera facilement au combat.
En somme, les nombreuses batailles qui vous attendent ont de quoi renforcer votre intérêt pour le titre, malgré un certain manque de profondeur une fois avoir dépassé la vingtaine d’heures. On ne s’ennuie jamais véritablement, mais il faut rappeler cependant que le grind est souvent nécessaire dans ce type de jeu, ce qui peut vite nous faire revenir à cette impression de répétitivité énoncée il y a quelques lignes. C’est avec plaisir que l’on constate que les développeurs ont pensé à cela et nous offrent un système de combat rapide, qui répétera les actions des tours ou des combats suivants en un instant, de quoi boucler des joutes trop simples en quelques secondes. On prend alors un peu moins de peine à parcourir les donjons grâce à cela, ce qui permet de ne pas trop casser le rythme de notre avancée.
Les dédales du loot
Parlons-en de ces donjons justement. Avec leur forme labyrinthique et les quelques pièges posés ici et là, ces lieux servent de repère pour les démons et étendent l’influence néfaste de Magnastar. La traversée de ces lieux est elle aussi facilitée par une option qui permettra à votre héros de se rendre à n’importe quel endroit déjà visité automatiquement, sauf si la route n’est pas sécurisée. Une bonne idée qui là encore, facilite la vie du joueur et rend ces phases d’exploration moins pénibles. Il vous faudra donc parcourir ces donjons pour dénicher le démon qui s’y cache en détruisant les « cercles de démons ». Après en avoir anéanti quelques-uns, le maître des lieux viendra vous faire face une première fois dans sa forme humaine, avant que vous ne le débusquiez définitivement lors d’un second combat bien plus difficile.
Outre le fait qu’ils servent de points de repère dans votre progression du donjon, ces cercles de démons vous permettront d’acquérir de nouveaux équipements ou items selon votre préférence. Pour en activer un, il vous faudra posséder des gemmes qu’on vous demandera de sacrifier. Ces gemmes définiront la nature de l’équipement que vous obtiendrez à la fin du combat, ce qui est plutôt utile pour ne jamais manquer de rien. Notez qu’il est possible d’en placer trois différentes sur un cercle afin d’obtenir plus de récompenses, ou trois de la même nature pour looter un équipement plus rare.
Les cercles de démons offrent un challenge plus important mais aussi une récompense du type de votre choix.
Parcourir les différents dédales à la recherche de ces cercles sera donc votre vrai intérêt pour progresser dans le jeu et devenir plus puissant. Malheureusement, le nombre de donjon est ridiculement faible et ce même s’ils comportent plusieurs zones déblocables, rendant les environnements assez redondants au fil du jeu. D’autant plus que Demon Gaze II est avant tout un titre à la destination de la PS Vita, et que malgré son portage son PlayStation 4, le titre ne brille pas par ses performances techniques. On pourrait lui excuser cette esthétique faiblarde, mais face aux décors qui ne sont pas visibles à plus de deux cases et aux textures qui font saigner des yeux, on se dit qu’un effort sur ce point-là n’aurait pas été de trop. Le poids du portage se fait aussi ressentir dans l’interface archaïque du titre, avec des menus peu lisibles et police qui pique les yeux.
On se console alors avec le character-design, bien plus réussi que la partie technique du jeu. Tous les personnages, humains comme démons, bénéficient d’un travail bien plus conséquent. Typiquement inspirés de l’animation japonaise, les différents protagonistes sont assez charismatiques pour donner envie au joueur de suivre les interminables dialogues. Pour ceux qui ne seraient cependant pas foncièrement fan du design d’un démon en particulier – car ils ne sont pas tous fantastiques il faut le reconnaître, le jeu vous propose un autre character-design en guise de skin avec un trait qui tranche radicalement et qui rappellera peut-être de loin le style de Hiroshi Minagawa (Vagrant Story, Final Fantasy XII). On est cependant un peu sceptique face au design général des formes démoniques, au style un peu cartoon et en décalage avec le reste du jeu, et qui est loin de satisfaire les yeux.
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