Contre toute attente, 2024 sera l’année des insectes géants. Non pas qu’ils aient décidé d’envahir notre système solaire de sitôt, mais il faut le dire, nos consoles et PC sont gâtés dans le genre expériences loufoques et shoot décomplexé sur grosses bébêtes dégoûtantes. Vous n’avez pas pu passer à côté de Helldivers 2 en février, mais il ne sera étonnamment pas le seul représentant de son étrange catégorie cette année, puisque deux titres de la franchise Earth Defense Force sont encore à prévoir pour l’été, et un certain Starship Troopers : Extermination à l’automne. Tout un programme, qui ferait presque craindre une surcharge, si les trois derniers ne risquaient pas tout simplement de se noyer dans l’océan de sorties déferlant sur cette année d’une richesse surprenante.
Earth Defense Force 6, puisque c’est de lui que nous allons discuter aujourd’hui, était attendu par les fans de la franchise. Disponible depuis 2022 au Japon, et exclusivement sur l’archipel, le titre est la suite directe du cinquième volet, autant en termes de scénario que de tout ce qui gravite autour. Bonne nouvelle, en un sens, puisque Earth Defense Force 5 est assurément l’un des meilleurs opus de la série. Cela dit, pour une première incursion sur nouvelle génération, on s’attendait peut-être à plus d’efforts, ne serait-ce que sur de basiques éléments de confort visuel. Enfin, si vous êtes un fan de la franchise, alors vous n’avez évidemment pas attendu cet article pour vous ruer sur cette nouvelle sortie. Pour les autres, tâchons de découvrir si ce TPS explosif est pour vous.
Conditions de test : Nous avons passé une petite trentaine d’heures sur la version PlayStation 5 du titre, puis environ deux heures sur PlayStation 4 Pro. À noter que les deux versions ne diffèrent pratiquement en rien. Les images que vous trouverez dans cet article proviennent toutes de la version PS5.
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ToggleDieu est mort…
Comme un faux ami de Shin Megami Tensei V, Earth Defense Force 5 vous menait, à force de combats acharnés contre diverses créatures sorties des enfers (et de l’esprit malade de quelques japonais très doués pour inventer les pires horreurs), à vous confronter à Dieu. Rien de moins. Alors en un sens, on vous gâche la fin du récit du précédent volet en vous le disant, mais est-ce vraiment un problème ? Quoi qu’on en dira, l’histoire des Earth Defense Force est anecdotique, tient chaque fois sur un timbre poste malgré des retournements de situation nombreux (et souvent loufoques), et se suit difficilement, puisque narrée via pavés imbuvables de texte et dialogues kitchs en pleine action…
Alors évidemment, Earth Defense Force 6 se voulant la suite directe du cinquième volet, on reprend exactement les mêmes pour recommencer globalement de la même manière. Pourtant, Vaas nous avait prévenu dans Far Cry 3 : la folie c’est recommencer une chose encore et encore, en espérant que le résultat ne soit pas le même. Mais qu’à cela ne tienne, les japonais de D3 Publisher et Sandlot sont têtus comme des mules, et n’ont toujours que peu de piécettes à leur disposition pour réaliser leurs jeux destinés à un public de niche. La chance qu’ils ont, cette année, c’est qu’un concurrent étrange et pourtant édité par Sony est passé par là pour préparer le terrain.
Helldivers II, puisqu’il faut bien aborder l’éléphant dans la pièce, a ouvert les yeux du grand public sur ce que peuvent être les Shooters décomplexés, et on espère que cela permettra à EDF de gagner en popularité. Même si, les fans de la franchise nippone le savent bien, les deux n’ont pas grand chose à voir en dehors de leur amour pour les gros robots et les insectes géants. Mais on ne peut s’empêcher de les ranger, malgré tout, dans la même catégorie. Les deux sont des Third Person Shooters grisants, défoulant même, avec une propension singulière à l’action en multijoueur et aux interactions sociales étranges en ligne.
Ce que Earth Defense Force a en plus, c’est toute une dimension RPG, aussi étrange que cela puisse paraître, avec la récupération méthodique d’armes et d’armure dans ses niveaux, faisant lentement mais sûrement croître votre barre de vie et votre collection de flingues. Une recette qui ne bouge pas, ou peu, depuis Monster Attack sur PlayStation 2, et fonctionne toujours aussi bien, malgré une limitation évidente : le temps. Parce qu’on ne va pas se mentir, récupérer de l’armure sur les cadavres d’insectes fraîchement tués, c’est amusant au début, mais ça devient rapidement fatiguant, surtout quand la barre de vie associée monte aussi lentement.
… et maintenant ?
Ce sixième volet reprend donc tout ce que faisait le précédent (qui reprenait lui-même globalement tout ce que faisait Earth Defense Force 4.1). Ce qui est autant une bonne qu’une mauvaise nouvelle. Mais commençons par la mauvaise, si vous le voulez bien. Parce qu’il faut dire ce qui est, au premier regard Earth Defense Force 6 n’est, une nouvelle fois, guère engageant. Absolument immonde sur le plan graphique, le titre « jouit » par ailleurs d’idées de design discutables, qui n’arrangent en rien son aspect agressif à la rétine. Notamment la diffusion au sol et sur les murs du sang de nos ennemis, d’une couleur chaque fois pétante.
Enfin ça, c’est bien sûr le cadet de nos soucis, puisque dans le feu de l’action on ne voit de toute façon pas grand chose, ce qui est encore plus valable en multijoueur qu’en solo. On ne comprend donc pas toujours ce qu’il se passe à l’écran, ce que l’on doit à un déluge d’ennemis toujours plus impressionnant, et surtout des explosions toujours plus massives et nombreuses. Le résultat, il fallait s’y attendre, c’est un framerate qui a tendance à toussoter par moments, n’arrangeant rien à la lisibilité de l’action, évidemment. Et pour rester dans la lisibilité, si vous êtes allergique aux pavés de texte austères, alors vous allez rapidement déchanter.
Parce que l’arsenal a beau être massif, ce qui demeure une des plus grandes forces de la franchise, il faudra néanmoins se cogner la description de chaque outil de mort pour être certain de ne pas faire une erreur en modifiant son équipement. Les différentes armes ont leurs forces, mais aussi leurs faiblesses, et l’on a tôt fait de se retrouver en mauvaise posture en choisissant instinctivement le lance roquettes le plus puissant que l’on a en stock. Que ce soit parce que le nombre de ses projectiles disponibles est trop mince, ou parce que le temps de recharge est fatiguant. Ajoutez à cela une narration toujours imbuvable, et un récit toujours anecdotique.
Mais surtout, des nouveautés qui peinent à se voir, et des attentes flouées. Vous espériez une nouvelle classe dans cet opus ? Eh bien vous pouvez passer votre tour. Des graphismes un peu plus beaux, puisque l’on passe sur PS5 ? C’est raté. Peut-être la correction de quelques uns des gros problèmes du précédent, comme le tir allié du Air Raider ou le sprint dégueulasse du Ranger ? Dommage… Un Fencer moins lent dans les débuts ; des véhicules pilotables ? Non plus. Une difficulté mieux dosée ? Toujours pas… Et la liste pourrait continuer encore un petit moment, vous l’avez compris. Alors, que reste-t-il à Earth Defense Force 6 ?
De la joie des petites choses
Eh bien il lui reste tout ce qui fonctionnait dans les précédents opus, à commencer par une ambiance inimitable. Earth Defense Force a ses défenseurs, et nous en faisons partie, notamment parce qu’il est le seul à faire ce qu’il fait. C’est loufoque, débile, décomplexé, et le fun y est immédiat grâce à la simplicité de sa proposition. On tire sur de grosses bébêtes, ça explose dans tous les sens, que demander de plus finalement ? Et Earth Defense Force 6 ne déroge pas à cette règle, ni à celle du loot qui dépend du niveau de difficulté choisis, se révélant aussi grisant que chez un Diablo III par exemple, pour un résultat palpable dès que l’on change d’arme.
Bien entendu, en solitaire la proposition très basique de ce Shooter se révèle rapidement limitée, répétitive et ennuyeuse, quoique certains prennent beaucoup de plaisir à faire et refaire les campagnes de chacun des titres de la franchise dans ces conditions. Mais c’est évidemment en multijoueur que Earth Defense Force 6 montre tout son potentiel, avec des parties qui vont parfois trop vite, ou peuvent se révéler bien trop longues au contraire, mais un fun décuplé par le nombre de camarades en jeu, et des interactions sociales absurdes. Comme chez un Helldivers, on se sent proche de nos coéquipiers, et un véritable sentiment d’unité irradie toute l’expérience.
On notera aussi la présence d’un écran splitté, permettant de jouer à deux sur la même TV, ce qui demeure non seulement un plus non négligeable, mais surtout une feature de plus en plus rare. On l’apprécie en particulier ici, autant parce qu’elle est ancrée dans l’ADN de la série, que parce que cela fait longtemps que l’on n’a pas eu droit à une expérience nous permettant de nous défouler à deux dans le même canapé. Même si, évidemment, cela n’arrange rien à la lisibilité catastrophique de l’expérience, collant elle aussi à la peau de la franchise de D3 Publisher. Détail qui, couplé au friendly fire, rend le tout plus fun encore, de toute façon.
Finalement, ce que l’on regrette le plus de cette expérience qui ressemble à s’y méprendre à toutes celles développées par Sandlot, c’est une ambition qui ne bouge pas d’un iota, malgré des itérations réalisées par Yuke’s (notamment Iron Rain) sortant un peu du lot. Et aussi, évidemment, l’absence de traduction en français, ce qui empêchera certains joueurs de chez nous de l’apprécier à sa juste valeur. Pour le reste, on serait bien mal avisé de cracher sur cette expérience. Certes, vu de l’extérieur ça a l’air affreux, mais prenez la manette et vous comprendrez rapidement que Earth Defense Force 6 est l’un des jeux les plus funs que la PS5 ait à offrir.
Un petit mot sur le review bombing que subit le titre sur PC. EDF 6 n’y est visiblement pas moins bon sur ce support, mais l’obligation de passer par une connexion sur Epic lorsque l’on joue à la version Steam rend les choses à la fois chaotiques et agaçantes. Néanmoins, la réaction des joueurs concernés nous semble assez disproportionnée. On espère toutefois que ce problème sera rapidement réglé.
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