Vous avez certainement passé vos dimanches en famille à regarder des épisodes des aventures de Zorro et autre Sergent Garcia. Les adaptations de films de cape et d’épée sont particulièrement absentes depuis les années 50 et les jeux vidéo ne se sont jamais vraiment intéressé à cette catégorie d’aventures.
Il faut croire que le studio français Fireplace Games, basé à Montpellier, a décidé de profiter de cette absence d’exposition pour proposer sa propre relecture des œuvres du genre en développant En Garde !, une expérience burlesque, aux dialogues savoureux et au gameplay aussi affûté que jubilatoire, mettant en scène l’épéiste renommée Adalia de Volador dans une vision fantasmée du 17e siècle. A l’origine véritable projet d’étudiant, l’équipe s’est ainsi reformée pour nous proposer cette première production bourrée d’humour et d’action, disponible dès ce 16 août uniquement sur Steam.
Conditions de test : Nos lames et autres poudrières ont fait valser des assaillants durant environ 4h30 de jeu, le temps de terminer l’aventure principale et de s’essayer au mode arène complétant l’expérience, à la manette sur PC via Steam.
Sommaire
ToggleAdalia de Volador n’a pas sa langue dans sa poche
Est-ce que les cavaliers ont de l’humour d’après vous ? En tout cas dans En Garde !, il vaut mieux. Véritable veine centrale de l’aventure d’Adalia de Volador, célèbre épéiste de la ville, celle-ci utilisera à foison son cynisme et son second degré pour se rire de ses assaillants, de la dictature du vil Comte-Duc, son ennemi juré, mais aussi de son frère Alejandro ou de sa meilleure ennemie Zaïda.
En lutte perpétuelle contre le système, les privations et les taxations à outrance du gouvernement en vigueur, la jeune femme espiègle, audacieuse et à la confiance inébranlable va tout faire pour ridiculiser davantage le Comte-Duc, récupérer les clés de la ville, le trésor qui va avec, pour les rendre au peuple méritant. Une version médiévale de Robin des Bois, en quelque sorte, pour cette D’Artagnan du 17e siècle au style flamboyant pouvant rappeler la célèbre épéiste Julie d’Aubigny.
Bien entendu, vous l’imaginez, ce ne sera pas de tout repos, les sbires du Comte-Duc étant constamment à la recherche de la jeune femme, qui croisera des hordes de soldats à tout coin de rue. À travers quatre chapitres autonomes pour un total d’environ 3h30 à 5h de jeu en fonction de votre niveau de difficulté, l’aventure principale de En Garde ! peut ainsi s’étaler sur une seule longue session ou en plusieurs fois, grâce à ces quatre petites histoires indépendantes les unes des autres, mais au fil rouge vindicatif en filigrane, telle une série TV des années 80-90.
La jeune femme ne sera d’ailleurs pas toute seule pour briser l’influence du vil chef de la ville, puisque son frère Alejandro, sera de la partie pour la motiver… ou lui mettre des bâtons dans les roues sous son ridicule déguisement d’El Vigilante, une sorte de pâle copie de notre héroïne charismatique. Zaïda, en quelque sorte une pirate cambrioleuse, viendra compléter le tableau des personnages principaux, avec une relation ambiguë, respectueuse mais aussi teigneuse avec notre reine du fleuret.
Et on peut le dire, les acteurs interprétant nos héros d’un jour campent bien leur rôle et jouent parfaitement la partition demandée. Du grandiloquent Comte-Duc imbu de sa personne, ne supportant aucune critique et avide de pouvoir et de richesses, au petit frère aux talents d’orateur et théâtraux plus que douteux, jusqu’à la vieille amie intime qui ne jurera que par sortir vainqueur d’un éternel conflit amical, tous les personnages sont caricaturaux, virants parfois même dans l’absurde pour notre plus grand plaisir.
Sentiment renforcé par la présence de nombreuses lettres, dialogues et autres affiches, qui nous font dire que c’est trop gros pour être vrai, tant les situations sont surréalistes par moment, telle une satyre d’une population assiégée, aliénée par un gouvernement aux œillères trouées sur la pauvreté, les conditions de vie et les taxations à outrance, mais toute ressemblance avec des événements réels serait purement fortuite… ou pas. On constate notamment cela lors des combats de boss, concluant chacun des chapitres, à la mise en scène originale à chaque fois, où vous allez pouvoir faire profiter l’assemblée de votre gouaille légendaire, tout en vous servant à la perfection de votre lame.
Elle manie sa pointe comme personne
Durant les quatre chapitres composant l’aventure d’En Garde !, Adalia va se retrouver de nombreuses fois en fâcheuses postures. Entendez par là que notre héroïne va devoir affronter pléthore d’ennemis, allant du simple combattant à l’épée, au lanceur de bombes incendiaires, mais aussi aux assaillants avec bouclier ou soldats d’élite.
Votre but à chacun de ces affrontements : vous arranger pour vous mesurer à chacun en duel, car les affronter en groupe sera souvent synonyme d’échec ou de difficultés. Pour cela, vous disposez de multiples objets dans l’environnement vous permettant d’étourdir, distraire ou éloigner vos adversaires. Votre coup de pied redoutable vous permettra par exemple d’envoyer des caisses et autres tables sur vos ennemis pour les faire tomber, mais vous pourrez aussi donner du talon pour envoyer les scélérats dans des rangements d’armes les faisant s’écrouler sur eux, etc.
Vous pourrez également vous saisir de lanternes enflammées, de sacs de poudre, de seaux pouvant recouvrir leur tête, tout un arsenal de projectiles permettant d’enflammer vos adversaires, de les étourdir le temps de vous volatiliser, ou pour les déstabiliser afin de les achever. Vous pouvez aussi leur sauter par-dessus, les faire tomber d’une surface ou dans l’eau, décrocher des lustres ou des objets accrochés à des cordes, bref tout un ensemble de mouvements sont à votre disposition, pour un gameplay solide, dynamique, fun et qui fonctionne très bien !
Pour vous aider dans votre approche, le jeu vous signale via plusieurs indicateurs l’état de vos assaillants. D’un coup d’œil, vous devinerez si votre ennemi est surpris, étourdi, perdu, ou s’il est fatigué (jauge rouge présente lorsque vous aurez brisé leur garde) ou alors s’il dispose d’une jauge d’élite (en jaune) ou d’un bouclier (en bleu).
L’interface utilisateur de En Garde ! est pour le coup vraiment bien fichue pour vous permettre de progresser sans heurt particulier. À noter que si vous affrontez plus d’un seul ennemi à la fois, les mécaniques de combat vont légèrement évoluer. Alors que vous devrez « uniquement » parer ou bloquer un coup au bon moment en duel simple avant de pouvoir répliquer, il vous faudra également esquiver les coups identifiés en rouge, car ceux-ci ne peuvent être parés et vous infligeront des dégâts à coup sûr, dès lors que vous affronterez minimum deux ennemis simultanément.
Pour esquiver, vous disposez d’une touche dédiée, mais vous pouvez aussi accomplir une roulade pour vous défaire de ces infortunes. À vous de parfaire votre technique pour parer, esquiver, attaquer, rouler, distraire, mais aussi utiliser vos bottes secrètes. Celles-ci sont au nombre de trois et vous aurez le choix entre un coup de pied dévastateur, une attaque tournoyante ou encore un coup puissant localisé sur un de vos ennemis qui interviendront principalement en vagues.
Ces coups spéciaux sont débloqués régulièrement pour vous permettre de remporter l’avantage, grâce au remplissage d’une jauge de panache (en jaune en bas de l’écran), remplie petit à petit grâce à vos coups et vos affrontements réussis, dynamisant encore plus les combats. Attention, nous le disions, vous devez vous prémunir des coups adverses pour ne pas tomber en game over et devoir recommencer le combat.
Et cela pourrait arriver souvent, car le défi est plutôt ardu, et ce même en mode normal. Pensée spéciale aux soldats d’élite (quelle plaie) qui vous en feront baver durant de longues minutes si vous n’êtes pas synchronisés avec eux. En effet, ceux-ci vous attaqueront en alternant coups normaux à parer/bloquer et coups à esquiver avant de vous laisser attaquer. Si vous utilisez la mauvaise touche, leur jauge d’élite se remplira instantanément, vous forçant à recommencer toute une séquence. Mais heureusement, de nombreuses options d’accessibilité vous sont offertes pour personnaliser votre expérience et vous amuser quelque soit votre skill ou vos envies.
Sous ses plus belles coutures accessibles
En effet, de nombreux ennemis disposant de plusieurs barres de vie symbolisées par des points au-dessus de leur tête, les combats pourront durer plusieurs minutes dans un effort constant pour rester en vie. Afin de soulager votre frustration, En Garde ! met donc à votre disposition tout un attirail d’aides en jeu, comme la possibilité d’activer une parade automatique pour les coups « simples », ou encore d’activer un mode invincible dans lequel vous ne prenez aucun coup, voire une visée automatique vers le prochain ennemi proche, à défaut d’offrir un suivi de caméra automatique pour ne pas avoir à gérer votre personnage et la caméra.
Tout ceci sans compter les niveaux de difficulté générale, qui viendront jouer sur les fenêtres d’esquive, la puissance de vos attaques ou de celles de vos ennemis, etc., le tout associé à de multiples options dédiées aux personnes déficientes visuelles ou handicapées, de plus en plus fréquentes dans les productions actuelles, et qui sont à saluer ici.
Vous l’aurez perçu, le gameplay de En Garde ! est très copieux, dynamique, rigoureux, pointilleux même, tout en étant accessible au plus grand nombre, rendant grâce au travail effectué par les équipes montpelliéraines de Fireplace Games menées par Anaïs Simonnet, pour avoir créé un ensemble aussi solide et avenant. Et comme cela ne retranche rien, l’univers du jeu est de toute beauté, associant décors variés et mises en scène réussies.
Effectivement, chacun des niveaux traversés dispose de son propre environnement, complet, très joliment décoré au style cartoon et savamment mis en scène, grâce à une structure très couloir, mais qui permet ici de baliser le terrain aisément. La lecture des panoramas est simple au premier coup d’œil, et permet d’associer également des phases de plateforme ou d’énigmes simples entre deux sessions de lames tranchantes.
Car oui, alors que nous ne l’avons pas du tout abordé encore, le Parkour est un des éléments caractéristiques du gameplay de En Garde ! Adalia virevolte, saute, se balance, roule, chute, dans un ensemble de tableaux s’enchaînant à merveille de manière fluide et révélant un Parkour franchement très agréable, qui aurait même gagné à être étoffé pour devenir encore plus jouissif.
Bien entendu, tout cela est loin d’être aussi complet qu’un jeu Assassin’s Creed ou même un Mirror’s Edge, mais tout est si simple à prendre en main que l’on prend plaisir à virevolter au creux de grottes sombres, de souterrains de prisons ou encore d’une ville ocre et fleurie. À vous les caisses suspendues se déplaçant en temps réel, les filets rebondissant ou les crochets et autres barres parallèles pour montrer vos talents de gymnaste.
Adalia et les 40 voleurs
Mais En Garde ! regorge encore d’autres secrets, avec la possibilité d’accéder à un mode Arène une fois le second chapitre terminé. Il s’agit ici d’une expérience d’arcade rejouable et modifiable à l’envie, selon des règles vous mesurant à tout un panel de combats aléatoires et des vagues d’ennemis se languissant de vous attraper. Mais attention, puisqu’en chaque arène, de nouveaux modificateurs de gameplay viendront pimenter votre expérience, corsant encore un peu plus l’exercice, vos ennemis gagnant en améliorations.
Rassurez-vous, un système de bonus sera également prévu pour vous aussi, à choisir entre trois modificateurs positifs. A savoir que plus d’une soixantaine de modificateurs sont présents, tous combinables, rendant l’ensemble quasiment illimité, et ce, toujours dans l’ambiance absurde et old-school du jeu principal. Une vraie plus-value que nous avons particulièrement apprécié durant nos sessions, même si nous avons eu quelques bugs de collision et de caméra, plus présents que dans l’histoire principale qui contenait également quelques phases de popping.
Mais ce n’est pas tout, puisqu’en parallèle des chapitres et du fil conducteur vous menant au combat final de chaque zone, chacun des chapitres dispose de ses propres défis et secrets, plus ou moins cachés, plus ou moins évidents, allant de trouver un ananas dissimulé derrière un tableau, à la réussite d’un niveau sans être touché, voire éviter de casser des piédestaux etc., tout un ensemble d’actions et défis renforçant la durée de vie et vous poussant à rejouer les niveaux pour tous les accomplir. Associez à cela un minuteur chronométrant vos meilleurs temps, visible en fin de niveau et un compteur de morts, et vous obtenez un potentiel de rejouabilité assez impressionnant, bien que l’on gardera des réserves sur l’effet de surprise absent dans ces cas-là sur les événements et environnements traversés.
Enfin et pour rappel, à date, le jeu est disponible uniquement sur Steam pour une petite vingtaine d’euros avec une réduction de 10% pour le lancement. Un contenu annexe contenant également une bande-son numérique d’une quarantaine de minutes (16 titres composés par Jean-Claude Charlier) aux allures de combat épique, des thèmes orchestraux d’inspiration hispanique couplés aux films d’aventure d’antan. Un contenu qui devrait être disponible également en bundle.
Il y a fort à parier que les équipes de développement attendront les premiers retours pour potentiellement entamer des portages consoles, ce qui serait forcément une très bonne nouvelle afin qu’un plus grand nombre de joueurs et joueuses puissent profiter de cette aventure complètement décalée et fort agréable à jouer.
Cet article peut contenir des liens affiliés