Les FMV (Full Motion Video) sont de drôles de bêtes. Créés au milieu des années 80 sur borne d’arcade, ces films interactifs ont eu la côte pendant une courte période du jeu vidéo. C’est dans les années 90 que le genre connaît notamment ses lettres de noblesses sur PC et consoles avec des titres aujourd’hui cultes pour un petit groupe d’initiés tels que Phantasmagoria ou Night Trap. On se retrouvait d’ailleurs avec des jeux de qualité discutable, s’amusant surtout à montrer des situations érotiques ou horrifiques.
L’intérêt vidéoludique était le plus souvent limité : certains jeux fonctionnaient comme des point’n’click, d’autres fonctionnaient avec un système de choix ou de QTE mais limités par la technologie de l’époque. Rapidement, le genre à été abandonné et les point’n’click ont muté, avec la démocratisation de la 3D évoluée, en véritables jeux que l’on appelle aujourd’hui narratifs.
Certaines productions sont d’ailleurs très proches des FMV, empruntant de nombreux codes du genre et des inspirations cinématographiques. En tête, les jeux du studio Quantic Dream, où Detroit qui en est le représentant le plus récent.
Mais si aujourd’hui nous vous parlons de tout cela, c’est car Erica, le jeu du jour, est un FMV ! Initialement annoncé à la Paris Games Week de 2017, le titre était présenté déjà comme un FMV compatible avec le système PlayLink de Sony, c’est-à-dire que le jeu est jouable à l’aide du smartphone en lieu et place de la manette. Préparez votre pop-corn, la séance commence maintenant.
Conditions de test : Nous avons regardé/joué à Erica en essayant diverses possibilités : changement de langue du français vers l’anglais, et aussi en utilisant la manette et le téléphone pour avancer dans le film intéractif. Il faut compter deux petites heures pour en voir le bout.
Sommaire
ToggleUn film-jeu interactif
Erica est un film interactif réalisé par le studio Flavourworks dont c’est la première production. Les Londoniens ne viennent tout de même pas les mains vides mais avec un système de jeu maison appelé le Touch Video. Ce système est au centre de l’expérience et c’est ce qui vous fera interagir pendant l’ensemble du film avec celui-ci.
Pour expliquer simplement le principe, l’ensemble du jeu se joue de façon tactile : vous devez poser votre doigt à un endroit, faire glisser des objets ou encore choisir des lignes de dialogue. Tout se fait via l’écran de votre téléphone ou bien le pavé de votre DualShock 4.
Plutôt bien conçu, le système fera en sorte de vous impliquer sur l’ensemble des scènes et petites actions faites par Erica. La volonté est ici de plonger le joueur dans le personnage et pour le coup, c’est quelque chose de très réussi.
Il sera possible d’explorer certaines scènes de façon plus précise, en regardant des tableaux ou des vielles photographies par exemple, ou bien en questionnant les différents personnages. Il y a dans Erica toute une dimension de choix à effectuer et ayant des conséquences. Il y a une certaine rejouabilité donc de ce côté, et il faut compter environ deux heures pour voir le bout de l’histoire.
La grande force de ce Touch Video, c’est également la quasi absence totale d’interface. En effet, vous ne verrez que quelques lueurs vous indiquant le geste à effectuer et puis c’est tout. Un vrai tour de force pour ce genre de jeu, qui a pour habitude de montrer les combinaisons de touches ou de mouvement à effectuer de façon très graphique, nous sortant de l’expérience de jeu.
Un thriller efficace ?
L’histoire, parlons-en ! Nous suivons l’histoire d’Erica, une jeune femme qui part à la recherche du tueur de son père. Cependant, Erica commence à avoir des visions et notamment des réminiscences de son enfance, plus précisément du meurtre de son père. Le tout tournant notamment autour d’un symbole pour le moins original. Lors de son périple elle va rencontrer différents personnages notamment le mystérieux Mr Flowers, gérant le mystérieux manoir Delphes.
Le film suit une structure pour le coup assez classique en plusieurs actes, multipliant les flashbacks et scènes de visions du personnage. L’ensemble est assez classique mais efficace. On s’implique assez rapidement dans l’intrigue. On aurait voulu un peu plus de fulgurance narrative, mais pour le coup, Erica remplit son contrat. Attendez-vous tout de même à quelques clichés et ressorts connus pour peu que vous ayez vu 2 ou 3 films du genre dans votre vie.
Chose également importante dans un film interactif, la réalisation, et il n’y a rien à reprocher de ce côté-là. Le jeu emploie des plans plutôt classiques dans le genre du thriller, permettant de créer des scènes de tension, tandis que d’autres plans sont mis en place afin de permettre les interactions avec le titre. L’ensemble fonctionne plutôt bien, même si pour le coup, on voit un peu trop distinctement la différence entre ce qui est filmé, et ce qui est animé en post-production comme le mouvement d’un ruban.
Mais en définitive, si cette différence se voit véritablement, elle n’est pas pour autant choquante véritablement. Pour une première production utilisant une telle technologie, l’ensemble fonctionne vraiment bien durant toute la durée du film. Par contre, les amoureux de montage cinématographique pourront reprocher, dû à l’aspect purement vidéoludique du titre, de se reposer quasiment uniquement sur cette ficelle-là.
Tout tourne autour de Delphes
Ce que l’on retiendra le plus dans ce Erica, c’est son ambiance. Cette atmosphère qui est en grande partie créée grâce à la partition d’Austin Wintory (Journey). Le jeu d’acteur est plutôt passable mais réussi tout de même à nous plonger dans le titre, et au bout du compte on ne voit pas trop ces deux heures passer.
Le jeu est d’ailleurs disponible en version anglaise sous-titrée française, mais aussi avec un doublage intégral de plutôt bonne facture. On peut voir qu’il y a un soin tout particulier autour de la localisation du jeu. La volonté du studio et de Sony est ici assez claire : proposer un titre accessible à tous pour marquer le plus grand nombre. D’autant plus que le titre est vendu pour une dizaine d’euros, un tarif convenable pour une telle expérience, revenant au même prix qu’une place de cinéma aujourd’hui.
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