Premier titre du jeune studio québécois Yellow Brick Games, Eternal Strands nous avait rapidement tapé dans l’œil lors de ses différentes présentations, notamment au sein de notre AG French Direct 2024. Si le studio se doit de faire ses preuves, il compte tout de même des vétérans de l’industrie tels que Mike Laidlaw, connu en particulier pour son travail sur Dragon Age lorsqu’il était employé chez Bioware. Avec de grands noms et des présentations alléchantes, c’est avec une certaine attente que nous nous sommes lancés sur le jeu.
Conditions de test : Nous avons terminé l’histoire principale et la quasi totalité des quêtes secondaires en un peu moins de 20h sur Xbox Series X. L’ensemble de la proposition du titre a été couverte, y compris les améliorations de pouvoir, camp et équipement.
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ToggleUn monde mystérieux à la narration inégale
Eternal Strands nous fait incarner Brynn, une jeune Tisserande au sein d’un groupe de compagnons. Chacun joue un rôle spécifique dans ce groupe (intendance, forge, enchantement, etc.) et Brynn y occupe la place de Pointe. C’est à elle qu’incombe le fait de partir en expédition, assistée par le reste du groupe grâce à l’Augure, une technologie permettant de communiquer ensemble et de la téléporter en sécurité en cas de risque de décès.
Assez rapidement, notre petite troupe se retrouve piégée par une sorte de brume magique qui la force à fuir pour finalement se retrouver au sein de l’Enclave. Région dévastée par la tempête survenue quelques décennies plus tôt et ayant coupé l’Enclave du reste de Mayda, le continent fictif créé pour le jeu.
Sans vous dévoiler tous les rebondissements et révélations scénaristiques, Brynn va faire la rencontre de nouveaux alliés et devra faire face à une menace pour l’Enclave, et par extension Mayda tout entier. Le titre bénéficie d’un véritable soin dans la construction de son monde et son univers avec différentes races, régions et événements. Si le jeu n’en effleure qu’une partie, la lecture du codex proposé permet de constater une vraie cohérence dans l’ensemble.
Malheureusement, la narration a eu beaucoup de mal à nous accrocher. Très lent à démarrer, il nous a fallu de nombreuses heures avant de véritablement se prendre au jeu et apprécier l’histoire proposée. Cette dernière reste cependant très voire trop classique et sans véritable surprise, cochant toutes les cases et clichés du genre.
La faute incombe probablement aussi à la structure narrative choisie par les équipes de développement. Eternals Strands propose des quêtes principales et secondaires qui vont nous faire arpenter différents lieux afin d’y accomplir divers objectifs. Cependant, en dehors du côté un peu plus narratif des quêtes principales, la façon d’accomplir les objectifs ne diffère presque pas et on est régulièrement amené à faire de très nombreux allers-retours entre les régions. Une certaine lassitude vient alors s’immiscer pendant les 12 à 20h (selon votre dévouement à l’accomplissement des quêtes secondaires) nécessaires pour terminer le titre.
Concrètement, la boucle de progression se résume à se rendre dans un des lieux pour y effectuer sa ou ses quêtes puis, une fois le ou les objectifs accomplis, revenir au camp de base. Là, on valide les quêtes dont les objectifs sont accomplis (on en récupère de nouvelles au passage), on passe ensuite chez les différents compagnons pour au choix : améliorer/forger son équipement, améliorer ses pouvoirs, alimenter le codex, améliorer le camp ou tout simplement épuiser les sujets de discussions de chacun.
Notons d’ailleurs que ces discussions profitent de la présence d’une version française intégrale avec des doublages de qualité et des noms connus de l’industrie tels qu’Audrey Sourdive ou encore Armelle Gallaud.
Un terrain de jeu ludique mais imprécis
Au gré de nos allers-retours au sein des différents lieux proposés dans l’aventure, un constat demeure : ces derniers proposent de jolies possibilités de gameplay. De base assez variés visuellement, leur apparence se voit également quelque peu modifiée à chaque visite.
En effet, les conditions climatiques vont varier ce qui pourra provoquer des vagues de froid ou à l’inverse une chaleur intense, des miasmes d’essence magique présents en plus grande quantité ou simplement un climat plus clément.
Sans pour autant offrir la superficie des mondes ouverts dont on a l’habitude dans l’industrie, Eternal Strands nous offre des lieux tout de même plutôt grands et surtout avec une certaine liberté d’exploration. Brynn peut escalader à peu près n’importe quelle paroi pour peu d’avoir suffisamment d’endurance disponible. Cela rappelle évidemment la mécanique d’escalade de The Legend of Zelda : Breath of The Wild (depuis utilisée dans beaucoup d’autres jeux) et offre au titre une exploration verticale fort appréciable.
Si les objectifs de quête sont affichés sur l’interface, de nombreux coffres et collectibles sont cachés et récompensent les plus curieux. L’escalade n’est d’ailleurs pas la seule possibilité puisque certains de ces trésors peuvent se trouver derrière des éléments de décor (portes, barrières, roches, etc.) qu’il faut détruire avant.
Et c’est là une des forces du monde d’Eternal Strands, rendre la plupart des objets destructibles ou pouvant servir de projectile lors des combats. L’environnement devient ainsi une composante principale dans les affrontements. Vous pensiez pouvoir vous abriter de cette Wyverne derrière votre maison ? Vous serez surpris de voir cette bâtisse réduite en cendres après quelques boules de feu, le tout accompagné par des flammes se propageant alentour dévorant tout sur leur passage. Pourquoi ne pas ensuite récupérer ces débris enflammés et les projeter sur votre adversaire ? Et si en plus le climat actuel est une grosse chaleur, vous pourrez être certains que les flammes seront encore plus nombreuses.
Eternals Strands offre une véritable palette de combinaisons entre l’environnement et les pouvoirs de Brynn, permettant de varier les plaisirs en combat. Au nombre de neuf, les pouvoirs reposent sur trois éléments : le feu, la glace et l’énergie cinétique. Il est tout à fait possible de combiner leur utilisation, ce qui permet par exemple d’emprisonner ennemis et flammes dans un champ de force, infligeant alors de premiers dégâts avant de libérer l’énergie accumulée via une explosion dévastatrice. L’ensemble fonctionne vraiment bien, on se prend facilement au jeu de mélanger les pouvoirs et l’environnement.
Cependant, avant de ressentir ce sentiment plaisant, il est d’abord nécessaire de faire preuve de patience puisque c’est seulement après avoir débloqué plusieurs pouvoirs et surtout de les avoir amélioré que le fun s’invite réellement. En effet, au début de l’aventure les combats nous ont semblé longs, ennuyeux et assez laborieux sur les différents boss.
Ce n’est pas faute de disposer également d’un arsenal composé d’un arc, d’un ensemble épée/bouclier ou d’une arme à deux mains, mais les sensations à l’utilisation manquent à l’appel et il en résulte des affrontements plats, sans impact et sans saveur. Le tout se retrouve également couplé à un manque de précision assez global aussi bien au niveau des coups portés que reçus, l’impact des pouvoirs et quelques fois l’escalade elle-même.
Autant dire que le début de notre progression ne s’est pas fait sans mal et que l’envie n’était pas forcément là. Le plus frustrant a été les deux premiers boss, où les combat nous ont semblé bien trop longs. Et pourtant sur le papier il y avait tout pour plaire, des créatures géantes avec chacune leurs points faibles et la possibilité de les escalader pour atteindre les points les plus inaccessibles, un peu comme chez un certain Shadow of the Colossus.
Ce n’est finalement qu’après quelques heures de jeu, plus de pouvoirs et un meilleur équipement que ces joutes titanesques nous ont bien plus enchanté. On peut alors se lancer dans l’objectif d’amélioration des pouvoirs, nécessitant non pas de simplement occire le boss, mais de le vaincre selon des conditions particulières qu’il faudra comprendre du Codex présent en jeu. On regrette tout de même de ne pas avoir eu de tutoriel plus visuel pour mieux cerner cette mécanique.
Une réalisation très soignée
Si la narration et le gameplay nous ont laissé une impression plutôt mitigée, ce n’est pas du tout le cas des parties visuelles et sonores du titre. En plus du doublage de qualité en version française que nous avons mentionné plus tôt, Eternal Strands nous gratifie d’une très jolie bande son. Cette dernière accompagne joliment nos pérégrinations, avec des pistes plutôt douces et mélodieuses où l’on retrouve beaucoup la présence de violons et autres instruments de la même famille. Le jeu ne doit pas cette qualité au hasard, mais là aussi, comme pour le doublage, d’un choix d’artiste renommé en la personne de Austin Wintory ayant déjà travaillé sur des titres comme Journey, Assassin’s Creed Syndicate ou encore Towerbone.
Du côté visuel, Eternal Strands nous propose trois styles différents avec pour les cinématiques principales une animation sous forme de dessin animé que nous avons beaucoup aimé. Les dialogues sont réalisés sous forme de scènes avec les différents personnages dessinés en 2D. Le résultat est une jolie réussite, avec des designs travaillés et qui viennent donner de la substance et de la matière à tout l’univers créé par les développeurs et que l’on retrouve dans le Codex. Chaque personnage de notre groupe appartient à une race différente et chacune dispose de ses propres caractéristiques physiques.
Enfin, le cœur du jeu nous propose des environnements en 3D et un aspect visuel un peu cartoon qui nous a beaucoup fait penser à Immortals Fenyx Rising. Les lieux que l’on parcourt sont colorés, variés et plutôt jolis et les divers effets visuels liés aux conditions météorologiques, au feu et à la glace sont réussis. Nous n’avons souffert que de rares ralentissements, mais nous avions alors poussé le titre dans ses retranchements en combinant moult effets visuels et destruction de l’environnement simultanément.
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