Né dans l’esprit d’Helder Pinto, un artiste portugais ayant notamment travaillé sur Overwatch et Diablo III, Europa a marqué le paysage indé de ses premières images au look très Ghibli dans l’âme. À l’aide d’une équipe peu à peu constituée, et appelée Novadust Entertainment, le titre a pu donc voir le jour sur PC et Switch le 11 octobre 2024, plus d’un an après son annonce. Ce jeu de plateforme contemplatif, misant sur une superbe direction artistique ainsi qu’une aventure pacifique, a de quoi nous rappeler dans les grandes lignes un titre comme Journey. Que nous offre alors réellement Europa manette en main ? Voyons cela.
Conditions de test : Nous avons joué à la version PC via Steam d’Europa pendant 4 heures, le temps de terminer l’aventure et de ramasser 36 collectibles sur 40. Les paramètres graphiques et techniques du jeu étaient pour la grande majorité poussés au maximum. Le test aborde scénaristiquement les toutes premières minutes du jeu.
Sommaire
ToggleÀ la découverte d’une planète majestueuse
L’humanité a bel et bien dépassé les limites de la planète Terre. Dans sa course à la technologie pas totalement étrangère à la destruction de sa propre maison, notre civilisation a réussi à terraformer Europa, la lune de Jupiter. Un monde superbe en découle, où l’air frais, l’eau pure et une végétation florissante donnent le sentiment d’un paradis atteignable du bout des doigts.
Ces terres, nous les traversons sous les traits de Zee, un garçon androïde motivé par les dernières paroles de son défunt père Adam, retranscrites dans un journal. Comment est-il mort, que cache vraiment ce monde si intrigant et, surtout, qu’abrite cette Île dont il parle ? Cette zone en lévitation au-dessus d’Europa est donc notre objectif, et nous voilà partis pour une aventure contemplative.
Car oui, le ton est donné dès le départ : Europa est une expérience centrée sur l’évasion, le dépaysement et le pacifisme. Pas d’ennemis à battre, aucune forme d’arme que ce soit dans les mains, une absence quasi totale de repères et d’objectifs à atteindre, Novadust Entertainment veut nous laisser avancer à notre rythme. Le symbole de ce souhait est sans aucun doute représenté par le Zéphyr, cette jarre fixée au dos de Zee. Grâce à elle, le petit garçon peut s’élever dans les airs et planer sur de grandes distances.
Si au début on ne peut pas aller très haut, ramasser des cristaux blancs augmente notre réservoir. Et, de toute façon, des sphères bleues disposées çà et là rechargent le Zéphyr à chaque passage. À plusieurs reprises, on traverse alors des zones relativement ouvertes où l’on virevolte dans les airs en passant de sphères en sphères. On se surprend même à simplement voler avec grand plaisir tout autour de la zone, pour rien, sans forcément chercher à continuer la suite de l’histoire.
Alors, malheureusement, au départ, la maniabilité n’est pas la plus accueillante. Une certaine lourdeur se dégage de Zee et il est compliqué de se sentir à l’aise durant les premières minutes. Au sol, notre personnage glisse sur des pentes lorsqu’il a accumulé un peu de vitesse, ce qui nous pousse un peu trop souvent à aller plus loin que prévu. Il est possible de surfer sur l’eau, là encore, uniquement si l’on arrive suffisamment lancé. Enfin, les sauts accusent aussi un manque de souplesse, demandant assez régulièrement d’être chargés pour aller suffisamment haut.
C’est l’histoire de la vie
Et lorsque l’on commence à s’y accoutumer, le titre nous montre qu’il est capable de nous confisquer un peu ce candide sentiment de liberté. Par l’ajout de menaces, liées à des tourelles qui nous rappellent un peu les Gardiens de Breath of The Wild, ou encore de mines disposées à certains endroits, la tranquillité n’est finalement plus si garantie. Il arrive même que la faune locale nous prenne pour cible et, pire que tout, il existe des bestioles qui vident notre Zéphyr, nous empêchant de nous élever, rendant plus pénible notre exploration. Peu à peu, on commence alors à se méfier d’un monde qui dévoile une autre partie de son visage.
Si on ne comprend pas trop le but ludique de ces menaces alors que nous avions au départ la promesse que le monde s’offrait à nous, plusieurs raisons l’expliquent. Premièrement, c’est pour mieux nous faire apprécier les moments où l’on peut à nouveau se déplacer en toute insouciance. Notez quand même que la présence d’un mode Zen offre la possibilité de désactiver ces menaces, afin de profiter en douceur de l’aventure.
Ensuite, la nature de ces obstacles s’explique par le scénario, concrètement distillé au fil des pages du journal d’Adam, que l’on ramasse au compte-gouttes. Ces uniques points d’intérêt se repèrent de loin et font en quelque sorte office de fil rouge de la progression. Ces pages nous permettent alors d’en apprendre davantage sur ce qui a pu se passer sur Europa.
L’histoire ici nous est d’ailleurs racontée d’une manière simple mais assez bien fichue. Pas d’ultra-minimalisme ni de parti pris cryptique donc, comme cela peut arriver dans des créations de ce genre. Lesdites pages de journal offrent une complémentarité relativement immédiate avec ce que l’on voit dans le décor, ce que l’on traverse, ou anticipe ce que l’on va rencontrer, pour un résultat efficace. La raison de la présence des carcasses de machines un peu partout nous parait plus évidente après quelques chapitres parcourus. De la même manière que le terme « jardinier », utilisé justement pour qualifier ces machines peuplant les terres d’Europa, nous est bien plus familier.
Sans nous le crier au visage, on parvient donc à saisir le propos d’un jeu parlant notamment d’écologie, du deuil, de notre rapport à ce qui nous est étranger et, bien évidemment, de liberté donc. Et c’est encore une fois surtout sur ce point que le titre parvient à nous saisir. Si cela passe par le fait de voyager dans les airs, c’est par extension grâce au terrain de jeu que l’on nous offre. Composé d’une quinzaine de chapitres pour un total de 3-4 heures de jeu, Europa en profite allègrement pour poser des ambiances propices à cette contemplation et méditation recherchées.
Un charme incontestable malgré les hics
Oui, les menaces énoncées plus haut nous embêtent peut-être plus qu’il ne le faudrait, et quelques chapitres s’avèrent un peu plus poussifs que les autres, mais on savoure régulièrement des moments assez magiques. On ne saurait que trop vous conseiller d’apprécier au maximum les moments en soirée, où les aurores boréales tapissent le ciel, ou encore ce chapitre complètement envoûtant à l’ambiance sous-marine.
Et tout le reste du jeu arrive à nous offrir de superbes panoramas, de quoi s’émerveiller presque à chaque tableau. Cette direction artistique tout à fait charmante, souvent soupçonnée de tirer ses inspirations à la patte Ghibli, s’accompagne d’une musique tout à fait dans le ton. On pense d’emblée à ces notes de piano qui suivent nos premiers pas, donnant l’impression d’être lancées un peu au feeling, comme si elles suivaient notre découverte à tâtons de ce monde rempli de secrets.
Europa n’hésite justement pas à jouer sur les panoramas. Si le traditionnel mode Photo est logiquement de la partie, les perspectives sont aussi apportées via des angles de caméra imposés. Soit pour nous en mettre plein la vue, soit tout simplement pour nous donner une petite idée de la direction à prendre. Hélas, le titre se vautre un peu dans les problèmes de caméra les plus inhérents à de la plateforme 3D. Entre les zooms et dézooms ou les passages exigus en intérieur, quelques fois, elle a un peu de mal. Autre toute petite approximation dans l’exécution : les papouilles des créatures.
Eh oui, en tant que jeu pacifiste, il est possible d’aller caresser certaines créatures que l’on rencontre mais la touche est la même que celle qui nous permet de lancer une onde d’énergie. Si l’on n’est pas littéralement collé à une créature, on va alors spammer malgré nous cette bulle. Vous aurez sans doute envie de dire « est-ce important ? », eh bien plus qu’il n’y parait.
En effet, comme on l’a déjà évoqué, il n’y a pas que les tourelles qui nous prennent pour cible, puisqu’une espèce bien particulière de jardiniers nous envoie également des projectiles. En allant les caresser, on leur fait donc comprendre que nous ne sommes pas leur ennemi et ceux-ci se calment, nous laissant explorer plus paisiblement. Il est donc un peu dommage de s’y prendre à plusieurs fois, nous laissant à la merci d’autres créatures à côté.
Heureusement, cette imprécision ne concerne pas les quelques énigmes du jeu, très simples à réaliser au passage. Allumer des lanternes, ramener des follets à un socle d’énergie, ou encore manipuler des cubes, ces casse-têtes sont surtout là pour marquer une petite pause dans la boucle de gameplay, obligeant peut-être à explorer un poil plus en profondeur (si on ne le fait pas de base) davantage que pour nous creuser les méninges.
De la même manière, on peut partir à la recherche de la moindre espèce animale ou de jardinier, que Zee immortalisera dans son carnet de croquis grâce à son coup de crayon. Enfin, les cristaux d’émeraude à récupérer tout au long du jeu sont aussi là pour étirer un peu la durée de vie tout en nous permettant d’exploiter la mécanique de vol ainsi que le level design, et quelques-uns demeurent fichtrement bien cachés. Notons qu’une fin alternative semble accessible si les 40 cristaux sont rassemblés. Malheureusement, et bien qu’une sélection de chapitres apparaisse sitôt les crédits de fin visualisés, impossible de savoir où se trouvent les cristaux manquants, ne serait-ce que vaguement.
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