Il est rare de voir des adaptations de shonens prendre le risque de se diriger vers un autre genre que le jeu de combat. Voir un jeu Fairy Tail prendre le risque de se lancer dans le grand bain des JRPG a donc de quoi attiser la curiosité des fans, et même de ceux qui ne connaissent le manga de Hiro Mashima que de loin. Une idée qui a de quoi séduire sur le papier, tant l’univers et ses nombreux personnages peuvent s’y prêter, mais qui peut rapidement tomber à l’eau si les mécaniques que l’on attend du genre ne suivent pas. Et Fairy Tail a malheureusement l’occasion de nous montrer que contrairement à ce qui se passe dans le monde de Natsu et des autres, il faut ici un peu plus que le pouvoir de la bonne volonté pour arriver à briller.
Conditions de test : Nous avons pu jouer au jeu durant plus d’une trentaine d’heures avant l’écriture de ce test, l’occasion pour nous de terminer l’aventure principale et de voir ce que réserve le end-game. Le titre a été testé sur une PlayStation 4 standard. Notons également qu’un patch day one est censé venir corriger des soucis qui seront évoqués ici. Si le patch vient effectivement enlever totalement les défauts cités, le test sera actualisé en conséquence.
Sommaire
ToggleUne adaptation à trous
Il faut bien avouer que même si le projet de Gust a réjoui dans un premier temps, beaucoup d’interrogations demeurent dans les choix effectués par le jeu. On peut tout d’abord se demander pourquoi le titre choisit de commencer son histoire en plein milieu du manga, même si l’arc des Grands Jeux Magiques permet de réintroduire la guilde de Fairy Tail.
Cela n’empêchera pas le néophyte d’être complètement perdu, tandis que certains fans pourront être déçus à l’idée de ne pas revivre le tout début de l’aventure. C’était pourtant l’occasion parfaite, surtout avec un RPG qui amènerait naturellement la montée en puissance des personnages et leur nombre.
Qu’importe, Fairy Tail se concentre avant tout sur trois arcs majeurs, à savoir les Grands Jeux Magiques, l’arc Eclipse et l’arc Tartaros, ainsi que la fin de l’arc Hades et l’arc Avatar, qui servent respectivement d’introduction et d’épilogue au jeu. Un programme déjà bien chargé, mais qui offre finalement une durée de vie plus faible qu’espérée, avec la possibilité de terminer l’aventure en une vingtaine d’heures sans trop se presser.
On lui pardonnerait facilement cet écueil si le jeu ne tronquait pas excessivement le récit qu’il adapte. Cela se voit particulièrement dans l’arc Tartaros (et à moindre échelle dans l’arc Avatar), très vite expédié car la plupart des affrontements contre les Neufs Portes Démoniaques ne sont pas jouables. On comprend rapidement pourquoi : le jeu manque cruellement de modèles 3D, ce qui se remarque surtout avec les esprits stellaires de Lucy et moitié des antagonistes qui manquant à l’appel. Et qui dit absence de modèle 3D, dit forcément absence de combat avec ces derniers.
La dream team au complet
A quelques exceptions près, seuls les personnages jouables et quelques boss (ou alliés temporaires) ont été modélisés, ce qui pose forcément problème lors de certains moments clés de l’histoire de Fairy Tail. Le manque de moyens – ou de temps – du studio se fait également ressentir dans l’absence de dynamisme des cut-scenes, en dehors de quelques trop rares cinématiques bien plus agréables à l’œil. Fairy Tail ne flatte jamais bien souvent la rétine, comme le prouve la pauvreté des décors pourtant constitués essentiellement de couloirs dans la plupart des cas.
Au moins, Gust a pris le temps de soigner ses héros, avec un chara-design qui rend honneur à la série et qui se voit essentiellement lors des combats. Ces derniers prennent donc la forme d’affrontements au tour par tour, avec une équipe pouvant être constituée de cinq mages différents. Avec seize personnages jouables au lancement, cela nous offre alors de très nombreuses possibilités, avec l’opportunité de créer des équipes loufoques réunissant Ichiya, Kagura, Juvia et Jellal (Gerald), et bien d’autres combinaisons.
On pourra saluer le fait que la plupart des personnages se démarquent de leurs pairs, avec des attaques relativement uniques et des rôles bien définis. A titre d’exemple, même si Wendy et Cherrya sont toutes deux des guérisseuses et donc identiques à première vue, la première est plus spécialisée sur le renfort offensif et défensif, tandis que la seconde aura droit à des magies infligeant plus de dégâts. Même chose pour Sting et Rogue, qui se démarquent bien de Natsu et Gajil malgré leur similarité.
On peut donc s’amuser à créer des équipes véritablement complémentaires pour tirer le maximum de bénéfice de chacun des mages, ce qui permet alors de faire face à n’importe quel ennemi.
Le festival de la Magie
La stratégie intervient également dans les capacités magiques à utiliser en combat. Durant ces derniers, les ennemis sont placés sur une sorte de damier à 9 cases, et chaque attaque possède un rayon d’effet qui va toucher une ou plusieurs de ces cases. Il faut alors bien réfléchir à l’attaque à employer pour toucher un maximum d’ennemis, ou se concentrer sur une attaque à faible portée qui fera plus de dégâts. De plus, même si une capacité peut toucher plusieurs cases, les dégâts ne seront pas forcément les mêmes selon les cases impactées.
Un système simple qui reste plaisant, surtout grâce aux animations des différentes magies très soignées (et parfois un peu longues) en comparaison de ce que peut proposer le jeu.
Cela aide à rendre les combats très dynamiques, surtout lorsque la jauge Fairy est utilisée. Cette dernière permet d’enchaîner les assauts à la suite durant le même tour, à condition que les participants possèdent un lien d’affinité suffisant pour continuer la chaîne durant plusieurs attaques. Les Unison Raids, où deux mages s’associent pour lancer une puissante capacité ensemble, viennent également contribuer au feu d’artifice.
Le mode Eveil de chaque personnage permet également de renforcer sa puissance – tout en le soignant en cas de coup dur, mais tous les mages ne sont pas égaux face à cette fonctionnalité. Natsu et les autres Chasseurs de dragons sont nettement favorisés ici, avec des attaques supplémentaires exclusives à ce mode tandis que certains personnages comme Erza ou Lucy doivent simplement se contenter d’un boost de caractéristiques.
Le pouvoir de l’amitié marche moins bien seul
En soi, le système de combat de Fairy Tail est donc satisfaisant dans la majorité, avec quelques petites subtilités bienvenues, mais cela ne l’empêche pas de tourner en rond après une dizaine d’heures même avec la grande diversité de son casting. Il faut alors attribuer cela au bestiaire très limité du jeu, qui recycle sans arrêt les mêmes créatures en modifiant seulement leurs couleurs, mais aussi à un problème qui se pose forcément lorsque l’on adapte un shonen en JRPG.
Quid des (nombreux) combats en solo ? Comment rendre ces duels intéressant en conservant ce même système et en respectant l’histoire du jeu ? Gust s’est certainement posé la question, mais n’a visiblement pas su donner de réponse satisfaisante. Quand il ne sont pas complètement mis de côté, ces combats sont relativement expéditifs et peu passionnants, loin de l’aspect épique que pouvait retranscrire le manga et l’anime dans ces moments-là.
On émet également des réserves sur l’équilibrage du jeu, qui rend la majorité des combats bien trop aisés. Cela a de quoi nous donner un vrai sentiment de puissance, mais il est dommage d’attendre le boss final pour avoir droit à une vraie tension dans un combat. Et comme si le jeu avait presque conscience de cela, le end-game monte le niveau des ennemis considérablement pour offrir un challenger intéressant. End-game qui propose d’ailleurs l’accès à des quêtes de rang S, qui font quelque peu grimper la durée de vie en plus de penser les combats différemment.
Quand la fée se mord la queue
On regrette qu’il faille attendre aussi longtemps avant que les requêtes de guildes parviennent à se renouveler et à attiser notre curiosité. Certes, le jeu fait l’effort de scénariser chacune d’entre elles, lorsque ce ne sont pas que de vulgaires missions de chasse.
On appréciera alors les interactions entre les personnages, les petits récits amusants et les situations improbables que peuvent offrir le monde d’Earthland, mais le finalité des quêtes reste bien trop souvent la même. L’impossibilité de remplir plusieurs de ces requêtes sans repasser par la guilde contribue à cet effet de lassitude, avec des allers-retours permanents, qui ne sont heureusement pas couplés avec des temps de chargements excessifs (du moins sur PS4).
Il est cependant impossible de passer à côté de ces tâches annexes, puisque l’une de vos missions principales sera de redonner à la guilde sa gloire d’antan. Vous serez alors en mesure de rénover le bâtiment et ses infrastructures, afin d’améliorer les services offerts par la guilde ainsi que d’obtenir des bonus pour votre aventure. Les personnages pourront également obtenir des capacités passives dans ce QG, via un système de rang lié à la réputation amassée par la guilde lors de vos missions.
Tout cela contribue à l’aspect RPG du titre, tout comme le système de lacrimas à attribuer à chaque personnage, qui remplace l’équipement traditionnel des jeux du même genre. Rien de révolutionnaire donc, mais l’ensemble fonctionne bien à défaut d’être profond.
Pas de quoi s’enflammer
Passer du temps à Magnolia permet aussi de tisser des liens plus forts entre vos compagnons, tout en assistant à des centaines de dialogues qui assurent un tant soit peu le fan-service. Et c’est presque uniquement ici que l’on ressentira ce dernier, car à l’exception d’une scène en maillot de bain et des costumes qui vont avec, Fairy Tail se la joue très prude à ce sujet, un comble pour la série.
Même ce pauvre Grey passera plus de temps habillé que torse nu, c’est dire. Et si on pourrait se réjouir dans la plupart des cas de voir ce genre de fan-service gratuit amoindri, on doute que ce soit ce que les fans du manga recherchent dans une adaptation comme celle-ci, qui se veut aussi fidèle que possible.
Le jeu fait plus d’efforts du côté de la bande-son, en essayant de coller au mieux avec les sonorités entendues dans l’anime. En résulte alors une OST très rock, avec des thèmes agréables à écouter mais qui finissent pas tourner en boucle bien trop rapidement. Reste alors le thème des combats de boss, que l’on retiendra entre tous grâce à l’énergie qu’il insuffle à ces affrontements, et qui se veut moins répétitif que tout le reste.
Vous l’aurez constaté, Fairy Tail souffle sans arrêt le chaud et le froid, comme un bras de fer permanent entre Natsu et Grey. Mais l’expérience globale serait déjà plus satisfaisante si la version française du titre n’embarquait pas une traduction calamiteuse. Gust n’a jamais été habitué à traduire ses jeux dans l’hexagone, et on pouvait être prêt à lui pardonner certains soucis à ce sujet, mais le résultat est parfois tellement ahurissant que l’on peine à l’excuser.
Pèle-mêle, on retrouve alors des objectifs de quêtes mal traduits et donc handicapants pour la progression, des dialogues qui n’ont aucun sens, des sujets qui se confondent, certaines phrases toujours en anglais, des contre-sens à foison et même des noms de personnages traduits sans aucune raison. Alors oui, voir Juvia appeler son Grey d’amour « Gris » ou voir le nom de Gildarts remplacé par « Gil fléchettes » nous offre de quoi nous tordre de rire à plusieurs occasions, mais on s’en serait passé. Espérons maintenant que comme promis, un patch vienne corriger cela.
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