Nous en avons l’habitude, moult jeux vidéo sortent chaque jour. Marvelous, au milieu de tout cela, est connu pour proposer d’excellentes licences de simulation agricole, à l’image d’Harvest Moon (renommée Story of Seasons) ou encore Rune Factory. Cette fois-ci, le studio fait le pari de l’audace en proposant un titre hybride avec Farmagia. Dans celui-ci, Marvelous décide de fusionner farming, RPG et dungeon crawling. Sur le papier, le mélange est prometteur, mais une fois le titre en main, est-ce que le son de cloche est toujours le même ?
Condition de test: Nous avons testé Farmagia sur PlayStation 5. Notre test a couvert l’entièreté de l’histoire du titre et quelques activités annexes, ce qui représente environ 30 heures de jeu.
En recherche de nouveauté
L’idée de base de Farmagia interpelle immédiatement : faire pousser des monstres comme des cultures. Une promesse insolite qui, si elle peut faire sourire au début, ne parvient jamais vraiment à trouver sa cohérence. Certains des compagnons récoltés, comme les navets anthropomorphiques, s’intègrent thématiquement au concept agricole, mais difficile de ne pas lever un sourcil devant des créatures animales comme les loups-renards « Fangs » qui sortent de terre déjà adultes et prêts à combattre. Marvelous, pourtant maître dans l’art de la gestion agricole avec Story of Seasons, opte ici pour une approche plus fantastique, mais au détriment de la logique et de la connexion émotionnelle que l’on peut ressentir en élevant des animaux de manière plus traditionnelle.
Sur le plan narratif, le jeu se situe quelque part entre l’animé shonen classique et l’épopée fantastique. Vous incarnez Ten, un jeune « farmagia » dans le monde de Felicidad, chargé de cultiver des monstres pour défendre sa communauté contre une coalition militaire envahissante. Si le concept semble original, le développement narratif peine à garder son rythme au long de l’aventure.
D’un côté, l’univers regorge d’idées intéressantes : pactes avec des esprits élémentaires, liens complexes entre humains et monstres, et une guerre aux enjeux étendus. D’un autre, l’intrigue principale s’embourbe dans des digressions et des quêtes secondaires souvent artificielles. Les arcs narratifs dédiés aux compagnons de Ten manquent de profondeur : beaucoup se limitent à des clichés vus et revus, avec des personnages secondaires à peine développés. Pourtant, certaines quêtes annexes liées aux esprits élémentaires parviennent à tirer leur épingle du jeu en approfondissant la mythologie de Felicidad, offrant un regard poignant sur des créatures fascinées par la vie humaine qu’elles ne pourront jamais vivre pleinement.
Là où l’histoire brille réellement, c’est dans la caractérisation des antagonistes. Leurs luttes internes et leurs motivations nuancées injectent une dose d’humanité dans une intrigue autrement linéaire. Dommage qu’il faille attendre la seconde moitié du jeu pour que ces moments de grâce se manifestent pleinement.
Le cœur du jeu, de son côté, repose sur une combinaison de dungeon crawling et de combat en temps réel avec des mécaniques rappelant Pikmin. Vous explorez des donjons labyrinthiques accompagnés de groupes de monstres que vous avez cultivés. Chaque groupe correspond à l’un des quatre rôles disponibles : mêlée, distance, soutien ou défense. Pour progresser efficacement, il vous faudra exploiter les faiblesses spécifiques des ennemis et jongler entre vos différents groupes.
Sur le papier, ce système de combat semble innovant. Les ennemis possèdent des faiblesses claires signalées par des icônes, ce qui ajoute une dimension stratégique. Malheureusement, cette profondeur supposée s’efface rapidement dans la répétitivité. Les affrontements contre les ennemis de base sont bien trop simples : maintenir un bouton suffit souvent à en venir à bout. Les combats de boss, en revanche, apportent un défi bienvenu grâce à des mécaniques de parade et de contre-attaque exigeant un bon timing.
Mais même ces affrontements plus intenses souffrent d’une certaine rigidité. Les animations de vos compagnons manquent de fluidité, et le ciblage des ennemis devient parfois laborieux, notamment dans des situations chaotiques où plusieurs dizaines de monstres s’affrontent à l’écran.
Le farming, censé être l’autre pilier du gameplay, déçoit tout autant. Contrairement à Story of Seasons ou Rune Factory, où chaque récolte ou élevage est gratifiant, Farmagia réduit cette mécanique à une simple gestion de ressources. Les monstres cultivés servent uniquement à renforcer vos équipes ou à débloquer de nouvelles variétés pour la recherche. Il n’y a ni cycle jour-nuit, ni saisons, ni variation climatique : autant d’éléments qui auraient pu enrichir l’expérience. Les animations de récolte, bien qu’adorables, ne suffisent pas à masquer le manque de profondeur de cette mécanique.
La sous-exploitation des idées
Visuellement, Farmagia est tout aussi réussi qu’il n’est frustrant. Les designs des personnages et des monstres sont charmants, avec une esthétique qui plaira aux amateurs d’animés. On reconnaît d’ailleurs très bien le style d’Hiro Mashima. Certaines cinématiques apportent une vraie intensité dramatique, mais elles sont rares. En revanche, les environnements manquent de variété : les donjons deviennent rapidement répétitifs, et l’absence d’un monde ouvert se fait cruellement sentir. Naviguer entre les différentes zones via des menus casse l’immersion et donne l’impression de jouer à un jeu terminé à la hâte.
Côté sonore, la bande originale est l’un des points forts du titre. Les compositions alternent entre des mélodies inspirées de la musique japonaise traditionnelle et des morceaux épiques dignes des meilleurs animés. Chaque moment clé est sublimé par le choix de la musique qui est bien adapté, qu’il s’agisse d’un combat ou d’une cinématique.
Mais ce qui rend Farmagia si frustrant, c’est qu’il est clair que Marvelous avait des idées plus ambitieuses les unes que les autres. Mélanger plusieurs genres et s’éloigner des conventions de leurs licences phares est un pari audacieux. Malheureusement, ce pari ne paie pas totalement. Le jeu semble constamment tiraillé entre vouloir simplifier ses systèmes pour rester accessible et essayer de proposer une profondeur qui ne se concrétise jamais pleinement.
Par exemple, la gestion des pactes avec les esprits élémentaires est une excellente idée sur le papier. Ces interactions ajoutent une dimension émotionnelle et permettent d’explorer davantage la mythologie du monde. Mais leur mise en œuvre reste trop limitée : ces quêtes secondaires manquent de variété et deviennent rapidement répétitives.
De même, les mécaniques de combat auraient pu être plus abouties si les différences entre les types de monstres étaient plus marquées. Actuellement, la distinction entre les espèces est trop superficielle pour encourager une véritable personnalisation de votre équipe.
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