Si vous êtes amoureux de Tactical-RPG, alors les derniers mois vous ont probablement comblés au plus haut point. Le bal débuté par Digimon Survive aura vu se succéder quelques chouettes sorties, comme The Diofield Chronicle ou Marvel’s Midnight Suns, ainsi que des pépites immanquables, telles que Tactics Ogre Reborn et Mario + Lapins Crétins : Sparks of Hope. En attendant l’intrigant Metal Slug Tactics, développé sur le sol français (cocorico), il y a donc de quoi faire. Jusqu’à un certain Front Mission 1st Remake, certes moins médiatisé que la plupart de ses compères, mais tout aussi attendu par les aficionados du genre.
Série méconnue par chez nous, Front Mission a néanmoins acquis un petit statut culte avec le temps, et ce malgré le faible nombre d’épisodes en circulation. Il faut dire qu’au-delà de ses qualités et de sa profondeur, la série a l’originalité de faire s’affronter de gros méchas. Est-ce suffisant pour que l’on vous invite à vous pencher dessus ? Non, bien entendu. Cela étant, si comme moi vous avez grandi avec des œuvres comme Gundam, ou que Code Geass vous a mis une petite baffe au premier visionnage, alors vous savez déjà que vous êtes la cible du jeu qui nous intéresse aujourd’hui. Cela étant, cible ou pas, nous peinons malheureusement à croire que ce remake trouvera son public.
Nous le verrons plus spécifiquement dans les lignes qui vont suivre, mais il était peut-être maladroit de relancer cette série sans lui offrir une plus grosse couverture médiatique, et surtout sans confier au développeur le budget (et peut-être le temps) nécessaire. Front Mission 1st Remake ne s’annonçait pas beaucoup plus ergonomique que l’original, et était principalement attendu pour sa refonte visuelle. Un habillage qui, dès le trailer d’annonce, n’avait guère l’air emballant. On peut applaudir Square Enix pour la régularité de ses sorties en cette fin d’année, mais force est de constater que chacune d’elles (ou presque) manque de quelque chose.
Conditions de test : Nous avons accordé près d’une quinzaine d’heures à Front Mission 1st Remake sur Nintendo Switch, principalement en mode portable. Ce test est garanti sans spoiler.
Une journée en enfer
Les premières minutes passées sur Front Mission 1st Remake ne sont guère enthousiasmantes. Comme attendu, la refonte graphique n’est pas particulièrement agréable à l’œil. Ce n’est pas moche, loin s’en faut, et on sent que les développeurs ont mis du cœur dans ce nouvel habillage, autant du côté des gros robots que des décors, entièrement refaits. Cela étant, le tout manque cruellement d’âme, au point qu’on en vient sincèrement à trouver plus de charme à l’aventure originale sur Super Famicom.
Le jeu a l’intelligence de proposer deux types d’expériences, afin de coller aux différents profils de joueurs. D’un côté nous avons une vision plus classique de l’aventure, ce qui se traduit par une vue isométrique en combat. De l’autre, ce que le jeu nous décrit comme la version moderne, avec une caméra plus libre. Et déjà, il y a beaucoup à dire. Parce qu’il n’est pas possible de changer ce mode de vue une fois une partie lancée, alors que les deux utilisent les mêmes ressources, le même moteur graphique. Seul l’angle de la caméra change.
Cela traduit d’emblée un cruel manque de finition, que l’on retrouvera ensuite dans toutes les strates du jeu. À commencer par la localisation en français, qui a droit à quelques aberrations disgracieuses, au point de compliquer sévèrement la compréhension d’un néophyte. Alors bien sûr, Front Mission 1st Remake ne vise pas vraiment les nouveaux joueurs. Il porte son héritage en étendard, et parlera ainsi aux amoureux du Tactical-RPG, plus précisément aux plus vieux, qui ont pu connaître (ou au moins apprécier tardivement) l’âge d’or du genre, époque qui vit naître Tactics Ogre et Final Fantasy Tactics.
Malheureusement, cible ou non, difficile de trouver de l’intérêt à la vision dite moderne de l’aventure, tant le changement de caméra nuit à la précision des contrôles. Parce qu’il n’est pas aisé de déplacer ses unités sur les différentes maps, la faute à un curseur qui n’était, et n’est toujours pas adapté. S’inspirer de ce que propose un Advance Wars en la matière n’aurait pas été idiot, au contraire, histoire de rendre le tout plus digeste, plus facile à prendre en main. Mais Front Mission 1st Remake fait le choix d’une modernité de surface, pour un résultat jamais satisfaisant.
On aura tôt fait de plutôt vous conseiller la vision dite classique, qui conserve la vue isométrique originale. Et ce même si cette dernière vous rebute habituellement. Parce que du côté moderne, la caméra mobile est une plaie. Ce qui est dommage, parce qu’on parle tout de même d’un jeu édité par Square Enix, au même titre que Tactics Ogre Reborn. Or, il aurait pu être bon que les développeurs des deux jeux puissent communiquer un brin, se donnent des pistes. Ce qui aurait peut-être permis à Front Mission 1st Remake de s’offrir le même type de caméra que son homologue, certes plus rigide, mais diablement efficace et jamais prise en défaut.
Domo Arigato Mr. Roboto
Alors que reste-t-il à Front Mission 1st Remake une fois son habillage et ses contrôles mis à part ? Beaucoup de choses, heureusement, à commencer par un scénario parfois intéressant, se découpant en deux campagnes distinctes. Pour une durée de vie avoisinant les vingt-cinq heures, en moyenne, comme sur la version originale. Puisque ce remake ne change rien au déroulé de ses trames, narrant toutes deux les pérégrinations de Royd, dont la femme a été tuée lors d’une opération de routine, sur fond de conflit armé de grande envergure.
À côté de cela, la profondeur du jeu demeure intéressante. Car Front Mission propose de monter une armée de méchas, autrement dit de gros robots contrôlés par des humains, dont on maîtrise tous les aspects. Il est ainsi possible de changer les jambes, les bras, ou encore le corps de nos unités, ce qui influencera directement leur efficacité en combat, selon le terrain. Par ailleurs, le système de progression est assez singulier. Chaque soldat possède cinq barres d’expérience, qui représentent chacune un aspect du combat. Il va ainsi falloir se spécialiser pour devenir véritablement efficace.
C’est l’une des grandes forces de la série, et ce Front Mission 1st Remake n’y échappe pas, heureusement. La complexité toute relative de son système de jeu a quelque chose de grisant, à condition de parvenir à surmonter la quantité d’informations à ingurgiter. Mais surtout, et c’est là que le bât blesse, l’austérité de l’ensemble. Il faudra passer beaucoup de temps dans des menus rudimentaires pour maximiser ses chances de parvenir à la victoire, essayer différentes combinaisons d’armes et de membres avant de trouver un build efficace durablement. Tout le monde n’aura pas la patience, c’est évident.
De manière générale, l’ergonomie n’est jamais idéale. Nous parlions plus haut des déplacements de nos unités, qui auraient gagné à être revus et corrigés. Mais on fait aussi face à différents problèmes, notamment dans le mapping des touches loin d’être instinctif. On pourrait aussi noter la mollesse de l’ensemble, qui offre des options pour accélérer nos actions en combat, certes, sans que cela ne soit jamais vraiment dynamique. Encore une fois, Front Mission 1st Remake souffre de la comparaison avec ses pairs, et ce n’est pas son prix relativement abordable (moins de 35 euros) qui va y changer quoi que ce soit.
Enfin, toujours côté ergonomie, on notera que le titre semble oublier par moments qu’il joue dans la catégorie stratégie, en éclipsant des informations pourtant nécessaires à la bonne lecture d’une bataille. Par exemple, plutôt que d’afficher clairement la portée d’attaque d’une unité, il sera nécessaire de vérifier ses statistiques pour l’obtenir. Dans le cas où l’on ne connaît pas son équipe sur le bout des doigts évidemment. Dans le même ordre d’idée, lorsque l’on est pris pour cible par une unité ennemie et qu’il est possible de riposter ou se protéger, le titre n’affiche par les barres d’énergie de nos méchas. Or, c’est nécessaire de connaître l’état d’un soldat pour déterminer la marche à suivre.
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