À défaut de gros projet pour la fin d’année, Square Enix s’est attelé à l’édition d’une myriade de jeux aux budgets serrés. Nous accueillons donc un nouveau Star Ocean peinant un brin à convaincre, le sympathique, mais pas transcendant reboot façon Beat’em All de la série Valkyrie Profile, ou encore, dans quelques jours, l’attendu remaster de Crisis Core : Final Fantasy VII. De l’ambition, malgré la taille réduite de ces investissements, ce que viennent confirmer ces deux nouvelles licences que lance la firme : The Diofield Chronicle et Harvestella.
Puisque nous avons déjà eu l’occasion de tester The Diofield Chronicle dans nos colonnes, c’est désormais au tour de Harvestella, sorti le 4 novembre sur PC et Switch, de passer à la moulinette. Cet Action-RPG fantasy à la sauce simulation de vie, ouvertement inspiré par ce qui se fait chez Harvest Moon et consorts, compte bien éclipser un Rune Factory 5 un brin décevant paru plus tôt cette année. Sur le papier, il a toutes les armes en poche pour cela, avec son univers moins mièvre, sa direction artistique élégante, et son intrigant point de départ. Est-ce qu’on vous le recommande pour autant ? C’est ce que nous allons voir.
Conditions de test : Nous avons joué environ 25h sur Switch, principalement sur TV. Ce fut suffisant pour faire un gros tour d’horizon du contenu de Harvestella, mais pas pour venir entièrement au bout de son scénario.
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Les premières minutes de Harvestella ne dépaysent à aucun moment. Tout démarre par un éditeur de personnage qui n’a d’éditeur que le nom, proposant huit modèles féminins ou androgynes aux cheveux longs et soyeux, et aux bottes hautes façon Catwoman. Pour la customisation, on repassera, puisque le titre n’embarque rien de plus pour permettre au joueur de s’approprier son avatar. Et si celui-ci espérait pouvoir incarner un autre personnage, ne ressemblant pas à une mauvaise pioche dans Genshin Impact, il va malheureusement devoir se contenter du peu.
Vous incarnez un personnage mystérieux, se réveillant par un jour ensoleillé au beau milieu d’une forêt pour faire face à une jeune femme très inquiète. En effet, non seulement vous aviez perdu connaissance, mais en plus, vous avez été exposé au Quietus, un phénomène d’une dangerosité avérée, revenant tous les 31 jours pour marquer la fin d’une saison. Ce qui explique probablement que vous soyez amnésique… Malgré le fait que vous ne soyez qu’un simple inconnu à ses yeux, elle vous invite à rejoindre son village, qui est en proie à la panique après qu’un rocher gigantesque se soit écrasé non loin. De ce dernier sortira une autre jeune femme, convaincue d’arriver du futur.
Si vous avez déjà posé les mains sur un Rune Factory ou autre titre du genre, vous comprenez certainement que nous avançons en terrain connu. Le scénario pompe quelques poncifs, ce qui ne met pas vraiment en confiance pour la suite. Pourtant, avec ses histoires de voyage dans le temps ainsi que son univers mêlant fantasy et science-fiction plutôt bien écrit, Harvestella peut rapidement piquer la curiosité du joueur. Pour ne pas gâcher son plaisir, le titre s’offre un character design réussi, et une direction artistique élégante, portée par une réalisation technique qui remplit très bien son office, mais accuse quelques faiblesses.
Cela étant dit, et pour en finir avec la réalisation, Harvestella tourne bien sur Nintendo Switch. Quelques ralentissements sont parfois à déplorer en plein combat, surtout face aux boss contre qui c’est parfois gênant, et il demeure un certain clipping qu’on retrouve trop souvent sur la machine de Big N. Mais rien qui n’entache profondément cette expérience, qui se rattrape largement sur son aspect musical, avec des morceaux qui accompagnent parfaitement bien son aventure calme entrecoupée de moments d’action. On aurait aimé un doublage intégral, mais il faudra se contenter de quelques voix, en japonais et anglais.
Le miel et le vinaigre
Sur le papier, le titre de Square Enix, développé par Live Wire, fait tout comme ses concurrents, en mieux. Vous aviez du mal avec Harvest Moon : Un Monde à Cultiver parce qu’il était trop moche ? Pas de problème, Harvestella est plutôt joli, et propose des décors variés. Quelques barrières invisibles très frustrantes, c’est vrai, et une exploration assez limitée, mais ça fonctionne plutôt bien malgré tout. Vous aviez détesté Story of Seasons : Friends of Mineral Town pour la pauvreté de sa proposition ? Ça tombe bien, Harvestella embarque un contenu conséquent, et renouvelle plutôt bien ses situations.
Vous avez appris à apprécier le système de combat de Rune Factory 5 ? Dommage, celui de Harvestella n’est pas folichon. La bonne volonté est là, avec plusieurs classes qui changent les mouvements de notre personnage, et parfois la portée de ses attaques. Mais il n’existe qu’une seule touche d’action en combat, et aucun combo. On n’attendait pas un gameplay à la Nier Automata, bien sûr, n’est pas Platinum Games qui veut. Mais il faut savoir faire la part des choses, trouver le juste équilibre entre fluidité d’action et complexité de gameplay.
Or, tout l’aspect action du jeu de Live Wire peut se résumer à la friction frénétique d’une unique touche, ou parfois l’utilisation d’un sort… On s’ennuie sec ! C’est d’autant plus dommage que le titre embarque un bestiaire plutôt complet, et un système d’affinités élémentaires qui aurait pu s’avérer intéressant. Mais à l’instar de la customisation limitée, les possibilités d’évolution de notre avatar sont assez maigres, en dépit d’un nombre de classes satisfaisant. Dans le même genre, impossible de toucher à l’équipement ou aux caractéristiques des personnages qui nous accompagnent. Ce qui ne favorise pas l’attachement du joueur.
Sur tout le reste, cependant, Harvestella est particulièrement solide. Complet, comme nous le disions plus haut, mais aussi assez bien pensé pour que l’on ne se perde jamais. Ses menus sont clairs, et toutes ses mécaniques agricoles sont intuitives. Pas de problème de caméra comme chez un Rune Factory 5, et le tout demeure aussi lisible que chez un Story of Seasons : Pioners of Olive Town, sans s’encombrer de sa vue du dessus évidemment. Contrairement aux combats, la progression dans les possibilités en agriculture est assez perceptible et grisante.
Auburn
Mais Harvestella a un atout en plus : son accessibilité. Parce qu’il faut du temps, dans un Rune Factory 4, un Stardew Valley ou un My Time at Portia pour toucher du doigt l’intégralité des possibilités, pour accéder à des bêtes, optimiser son rendement… Or, le titre de Live Wire permet de faire tout cela assez rapidement, sans nous contraindre à récolter moult objets ou réaliser des objectifs inintéressants. On nous livre au contraire tout dans les premières heures de jeu, à mesure que l’on se familiarise avec sa formule routinière qui marche plutôt bien.
Ce qu’il faut retenir, finalement, de Harvestella, c’est qu’il fait globalement la même chose que Rune Factory 5, mais le fait avec plus de conviction, et peut-être de moyens. L’amour était là dans le jeu de Hakama, mais le résultat souffrait de carences évidentes, notamment visuelles. Or, Live Wire a comme anticipé tout ce qui pouvait porter préjudice à son bébé. Ainsi, contrairement à la concurrence, la narration est assez légère, et on accède rapidement à de nouvelles zones de jeu, sans qu’un pic de difficulté insurmontable ne vienne nous remettre à notre place.
D’ailleurs, de manière générale, Harvestella n’est pas bien difficile. Certains ennemis peuvent se révéler agaçants, mais dès lors que l’on embarque deux compagnons, il suffit de laisser ces derniers donner des coups à notre place. Encore une fois, c’est dommage que le système de combat soit aussi minable, car il n’aide pas à rendre intéressantes ces phases d’action redondantes. Il ne met pas non plus en valeur la progression de notre personnage, qui gagne de l’expérience après chaque journée, à la condition d’avoir combattu.
Une dimension « jeu de rôle » qui se résume à son strict minimum, avec une montée en niveau nous octroyant des points dans diverses statistiques. Rien de plus, rien de moins. En somme, on peut dire que si le titre réussit beaucoup de choses, toute sa partie purement Action-RPG demeure malgré tout décevante. D’un coté ses combats ont comme oublié d’être profonds, de l’autre on n’est pas particulièrement encouragé à améliorer son avatar, à le faire combattre, puisqu’il n’est jamais bien difficile de progresser dans l’aventure.
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