Si l’on peut aisément dire qu’Ubisoft trouve sa place parmi les entreprises les plus rentables du jeu vidéo, possédant notamment de grosses et excellentes licences comme Assassin’s Creed ou bien Far Cry, sa proposition est néanmoins peu originale. À grand renfort de mondes ouverts, parfois dénués de vie ou manquant de personnalité, la firme nous offre de belles expériences de jeu, sans pour autant viser plus loin. Ce qui n’est pas forcément un mal, entendons nous bien.
Ces dernières années, nous avions cependant droit à quelques surprises. Par exemple, et pour ne citer que lui, un certain Mario + Lapins Crétins Kingdom Battle. Un titre qui sort un poil des clous, coté univers, mais qui n’en demeure pas moins relativement convenu en terme de progression et de gameplay. Pourtant, elle n’est pas si lointaine l’époque où Ubisoft réussissait encore à surprendre l’assistance, à grand renfort d’idées neuves.
Malheureusement, ce temps semble avoir commencé à décliner avec la mort lente de la septième génération de consoles. Ainsi, l’un des derniers jeux vraiment originaux que nous offrait l’entreprise française n’était autre que I Am Alive, paru en 2012 sur Xbox 360, PlayStation 3 et PC. Un titre axé survie qui est, depuis, tombé dans l’oubli, notamment parce qu’il n’est disponible qu’en dématérialisé et n’a pas bénéficié d’un gros traitement publicitaire.
Conditions du test : Nous avons joué une douzaine d’heures sur PlayStation 3. Le temps de boucler l’aventure classique, puis en mode survie, le tout sans nous presser. Ne disposant pas du matériel nécessaire à la prise de captures sur le support concerné, les images utilisées dans cet article n’ont pas été prises par nos soins.
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ToggleIt’s the end of the world as we know it
À l’image d’un Disaster : Day of Crisis – ou plus récemment Summer Memories – I Am Alive part d’un postulat simple et pourtant catastrophique : la planète est sens dessus dessous suite à une série de tremblements de terre hors du commun. D’ailleurs, cela fait déjà un an que le sol s’est mis à vibrer pour la première fois, et les répliques sont encore nombreuses et puissantes. Au point que rien ne subsiste, les bâtiments s’écroulent, au même titre que la civilisation, qui semble avoir fait ses bagages et s’être exilée, peut-être loin de la terre ferme.
Dans cet enfer, les hommes sont redevenus des bêtes, n’hésitant pas à voler les ressources du voisin, tuant leur prochain pour quelques vivres rassis… Pourtant, tous ne sont pas mauvais, certains survivent sans faire de mal, parfois même en groupe, cachés pour éviter les bandits qui font désormais loi. Adam, quant à lui, est seul, et ce depuis le premier jour. En déplacement à l’ouest des États-Unis lorsque les secousses ont commencé, il lui aura fallu près d’une année pour traverser tout le pays et rentrer chez lui à pieds, dans l’espoir de retrouver sa femme et sa fille.
Arrivé dans le centre ville, il trouve sa maison encore debout, étonnamment, mais personne à l’intérieur. Les bagages ont été faits à la va-vite, il reste encore des boites de conserve et des photos… Tout porte à croire que sa petite famille a quitté les lieux à la hâte, peut-être pour se joindre à un convoi de survivants. Désorienté, Adam reprend ses errances et tombe sur une jeune fille malade, qu’il prend d’abord pour la sienne, ayant perdu la trace de sa mère. En homme bon et juste, il décide de l’aider, au risque de devoir faire face à de multiples dangers.
Errances techniques, réussite artistique
La première chose qui frappe lorsqu’on lance I Am Alive, c’est le grain sombre de son image, à la limite du noir et blanc. Entendons nous bien, le titre n’est pas très beau. Son aventure est maculée de textures immondes, de réutilisation de modèles 3D – ce qui choque surtout au niveau des ennemis – et tente vainement de cacher son retard derrière une poussière environnante qui fait disparaître l’horizon. Un petit clin d’œil à Silent Hill, à ce niveau, qui utilisa le même stratagème pour faire face aux limitations de la PlayStation première du nom.
Néanmoins, l’ambiance est là, et elle est réussie. Dès la première prise en main nous sommes happés par l’atmosphère poussiéreuse, triste et effrayante de cette ville détruite, où le moindre ponton de fortune peut se révéler mortel, où la moindre chute de grava peut être annonciatrice de catastrophe. Au point que les diverses rencontres avec des bandits sont si surprenantes, dans un premier temps, qu’elles peuvent faire sursauter. Et elles ont de quoi, car il n’est jamais aisé de se sortir d’une situation requérant la violence dans ce jeu de survie.
Ainsi, I Am Alive n’est donc pas très beau, mais il le cache finalement plutôt bien, et même le fait oublier, derrière le travail d’orfèvre réalisé sur son ambiance. On a tôt fait de passer outre ce que la distance d’affichage restreinte dissimule, afin de se plonger corps et âme dans cette ville sans vie. Dommage que quelques écueils subsistent encore, notamment un grand nombre de bugs en tous genres, du problème de collision relativement commun jusqu’aux textures qui mettent du temps à s’afficher, ou encore des problèmes d’IA.
Et que serait l’ambiance de ce jeu de survie sans sa bande sonore incroyablement stressante, qui va au rythme de notre personnage et ses péripéties, faisant parfois pencher la balance du coté du Survival Horror. Dommage qu’à ce niveau le travail sur les doublages ait été aussi bâclé, n’offrant aucune vie, aucune intensité, là où les personnages devraient véhiculer des émotions fortes au point de créer l’empathie ; ou au contraire accentuer l’angoisse allant à crescendo des rencontres avec des survivants mal intentionnés.
Le cœur du problème
I Am Alive est un jeu d’aventure et de survie en vue à la troisième personne. Jusque là, rien d’extraordinaire. Néanmoins, il tire en partie sa force de son environnement dévasté, dans lequel il va falloir se frayer un chemin à grand coup d’escalade périlleuse et de récupération de ressources, parfois bien cachées. À ce niveau, le concept fonctionne à merveille, surtout couplé à un système d’endurance qui ajoute une grosse part de stress à sa recette. D’autant qu’il n’est pas toujours aisé de déterminer les meilleurs passages, les meilleures prises, de quoi perdre temps et énergie rapidement.
Parce qu’il ne suffira pas de trouver les bonnes prises pour grimper à un immeuble. La gestion de l’endurance est capitale, et cette dernière fond comme neige au soleil dès lors que Adam commence à escalader une surface abrupte. Ainsi, on a tôt fait d’engranger le maximum de ressources avant de se lancer dans une entreprise difficile. De la bouteille d’eau permettant de récupérer un peu d’endurance, au piton laissant au héros le temps de reprendre son souffle en pleine grimpette. Malgré les dangers du dehors, on ne négligera donc aucune piste pouvant mener à des items utiles.
Ce qui comprend par ailleurs des balles de revolver, en nombre excessivement limité à travers ce monde à la taille restreinte. Il y a en effet moins de munitions à collecter que d’ennemis à tuer, cela vous laisse sans doute une idée du type de stress auquel I Am Alive livre le joueur lorsqu’il entend des survivants non loin. Cela étant dit, les rencontres avec des bandits se passent à peu près toujours de la même manière : l’un deux avance pour nous faire les poches pendant que les autres restent en retrait, le temps pour nous d’asséner un coup mortel au premier et de dégainer pour parer aux attaques des autres.
Un système qui fonctionne bien, dans un premier temps, et offre un gain significatif de challenge. Néanmoins, la maniabilité souffre de réels problèmes nuisant grandement à ces phases qui, sans cela, auraient trouvé un intérêt certain dans l’ambiance oppressante du soft. Un défaut qui rend régulièrement les affrontements frustrants, au même titre que l’IA inégale, et pourra faire perdre rapidement patience aux moins conciliants. D’autant que cela ne s’arrête malheureusement pas aux combats, et affecte à de nombreuses reprises les sessions d’escalade.
Et dieu sait qu’il n’est pas agréable de voir son personnage mourir bêtement suite à un problème résultant d’un gameplay mal calibré. Dommage, car sans cela la difficulté est bien dosée, offrant un nombre limité de checkpoints – sans lesquels il faudra recommencer l’aventure – pour une histoire que l’on boucle en moins de cinq heures de jeu. C’est court, certes, et pourtant intense, et l’expérience n’est finalement gâchée que par une maniabilité perfectible qui nous fait souvent mourir pour rien.
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