Indika est un titre qui n’a pas énormément fait parler de lui un an après son annonce. Ce qui est relativement compréhensible d’un côté, le studio Odd Meter étant forcé de se relocaliser au Kazakhstan afin de surtout échapper au régime Russe, qui n’est pas trop adepte de satire concernant la religion. Qui plus est, l’invasion de la Russie en Ukraine a logiquement bouleversé les nombreux studios environnants comme toute l’industrie vidéoludique. Mais qu’à cela ne tienne, le soft développé en collaboration avec 11 Bits Studios a fini par accélérer un peu sa communication le mois dernier, avant de finalement se rendre disponible ce 2 mai sur PC, PS5 et Xbox Series X|S. Et sans détour, Indika est une proposition aussi originale que rafraichissante.
Conditions de test : Nous avons terminé Indika en quatre heures de jeu en prenant quand même notre temps sur certains puzzles. Le titre a été testé sur PC avec 32Go de RAM, une RTX 3070 et un i5-12400 (2.50 GHz).
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ToggleHellblade avec une nonne
On ne savait pas trop à quoi s’attendre en lançant le jeu, mais Indika est aussi étrange qu’hypnotisant dans sa narration pure. Vous endossez ici le rôle d’Indika, une nonne dans un couvent qui se déroule dans une Russie alternative du 19ème siècle. Pas forcément aimée de ses congénères, notre héroïne va se voir cependant confier une mission de la plus haute importance : délivrer une lettre dans un monastère, sans qu’elle en sache le contenu. C’est là que commence son périple où des rencontres, la découverte de soi et sa voix intérieure qui n’est autre que Satan, vont bouleverser ses habitudes monotones.
Dans cette trame, Indika propose un ton des plus burlesques, tout en traitant de thèmes sérieux comme la religion voire le bien et le mal, parfaitement dépeint dans une structure métaphorique. Toute la psychologie et le passé profond et sombre d’Indika sont très intéressant à suivre, et le soft nous offre pas mal de scènes marquantes. Si le fil rouge ne sera certainement pas facile d’accès pour tous les joueurs, il faut admettre que ces quatre heures de jeu arrivent à nous scotcher de par la qualité de son écriture, mais aussi de sa mise en scène efficace. Qui plus est, son ton très satirique et surréaliste qui ferait presque penser aux films du studio A24 (Hérédité, Beau is Afraid…), nous offre clairement un divertissement des plus jouissifs.
Dans les choses cependant un peu moins réussies dans la narration pure, il y aura cette relation Indika/Illya, mais aussi sa fin. Effectivement, si l’on arrive aisément à comprendre la psyché très torturée d’Indika par le biais de son passé, Illya est quant à lui toujours trop mystérieux. Son traitement aurait pu être plus approfondi, même si nous apprécions les échanges philosophiques qui fusent entre lui et notre héroïne tout au long de ce périple onirique.
Toutefois, on reste un peu trop sur notre faim concernant le final du jeu, trop abrupte et qui laisse quelques zones d’ombre. Cela dit, le fait de laisser une certaine libre interprétation aux joueurs est plus que louable, et nous appréciions à juste titre l’interaction qu’a Satan avec Indika, en supplément de ses nombreuses interventions en voix off.
Un gameplay qui ne lésine pas sur la diversité
Indika a aussi plusieurs cordes à son arc dans son gameplay, qui n’est pas avare en renouvellement. Outre les quelques passages purement narratifs avec une maniabilité qui reste relativement agréable, le titre propose cependant des phases de puzzles plutôt intéressants. De manière générale, la production de Odd Meter met l’accent sur des mécanismes à activer, des objets à aller chercher comme des échelles pour progresser, voire carrément des énigmes bien ficelées et très intelligentes qui ne se ressemblent jamais. En somme, notre matière grise sera mise à rude épreuve pour notre bon plaisir.
Si une poignée de puzzles peuvent parfois se révéler un poil faciles, d’autres disposent d’une inventivité folle. Par exemple, des passages où le décor se déchire totalement, et où vous devrez prier pour atténuer la voix de Satan, et tenter de progresser en alternant entre la vision diabolique et saine pour pouvoir continuer à avancer. Qui plus est, Indika devra utiliser quelques machines pour résoudre d’autres puzzles et encore une fois, c’est ingénieux et bien fichu. Soyons clair, les quatre heures d’ Indika sont grisantes, et disposent d’une variété sans faille. Qui plus est, et même si sa construction paraît linéaire, le level-design global est quant à lui plutôt plaisant avec parfois quelques rapports d’échelle qui sont au service d’une mise en scène bien pensée.
Pour poursuivre dans l’originalité, le titre va parfois basculer dans des phases tout en pixel art. Représentant la jeunesse d’Indika comme évoqué plus haut, ces séquences jouables offrent à contrario de la course et de la plateforme, rien que ça. De quoi casser un peu la routine du gameplay tout en 3D, et le parti pris de mélanger deux types de gameplay est non seulement efficace, mais permet aussi de diversifier une expérience d’ores et déjà particulièrement envoûtante. Il y aura à la rigueur les phases de plateformes un peu rageantes mais dans le fond, rien de bien méchant car cela ne casse absolument pas le plaisir et l’expérience de jeu.
Toutes les idées de game design ne sont cependant pas toutes futées, comme son système d’upgrade. À chaque fois que vous visitez les environs, vous aurez la possibilité d’allumer des cierges ou de trouver des objets à récupérer. Cela aura pour effet d’augmenter votre « score », et ainsi monter en niveau. Vous aurez ensuite le loisir de choisir entre deux compétences à chaque fois, qui ne feront qu’augmenter votre score global systématiquement. Cette mécanique d’upgrade est finalement peu utile, et n’apporte pas de réelle plus-value comme son système d’inventaire, qui est finalement juste là pour faire joli.
Une vraie pépite graphique, un peu moins sur le sound design
Là où Indika arrive à exceller sans sourciller, c’est dans sa partie graphique. En dehors de son ambiance de Russie alternative du 19ème siècle teinté d’un style fortement dieselpunk qui fait le café, Indika est terriblement beau dans toute sa plastique. Que ce soit dans les expressions faciales jusqu’aux modèles 3D ou encore la plupart des panoramas que nous visitons, le studio russe Odd Meter nous livre ici une réussite incontestable sur l’habillage graphique, soigné.
Bien que quelques bugs soient de la partie sur les textures ou les animations, le jeu arrive à être aussi beau que très impressionnant sur sa fluidité, qui n’a pas à rougir des productions narratives AAA. Nous pourrons toutefois pinailler sur quelques saccades parfois désagréables à certains endroits du jeu, mais sans que cela ne soit véritablement dérangeant tant tout le reste du jeu reste exemplaire sur sa beauté graphique.
On terminera par contre sur une note contrastée en ce qui concerne le sound design. Dans l’absolu, il faut savoir dans un premier temps que le doublage d’Indika est de haute volée. Que ce soit dans son doublage russe ou anglais, les comédiens du doublage ne font à aucun moment de fausses notes, et tout y est franchement bien joué.
En revanche, il y aura de quoi être frustré par les musiques, ne collant pas toujours à l’ambiance surréaliste proposée, optant parfois pour des thèmes électro sombres qui n’arrivent clairement pas à nous prendre aux tripes. Le style musical n’est sûrement pas le bon mais de toute façon, en prenant le risque de mélanger 3D et pixel art, il ne fallait pas s’attendre à une belle harmonie musicale.
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