Initialement imaginé comme un DLC pour le prochain volet numéroté de la célèbre franchise de SEGA, Like a Dragon Gaiden : The Man Who Erased His Name aura finalement pris la route de l’épisode à part entière, mais de taille réduite. Il fut en effet annoncé comme un « petit » opus, aux ambitions scénaristiques néanmoins importantes, puisqu’il s’agit de faire le pont entre Yakuza 6 : The Song of Life et Like a Dragon : Infinite Wealth, excusez du peu. Le tout à travers les yeux de Kiryu Kazuma, héros des six premiers épisodes, dans une situation plus périlleuse que jamais. Un programme alléchant !
Près de quatre ans après l’excellent Yakuza : Like a Dragon, qui offrait un peu de répit au légendaire Dragon de Dojima et ses poings, voici que le Ryu Ga Gotoku Studio le fait finalement revenir sur le devant de la scène. Et ce, le temps de nous expliquer en bonne et due forme comment il s’est retrouvé aux premières loges de Like a Dragon : Infinite Wealth, aux côtés de Ichiban Kasuga qui conserve a priori la tête d’affiche. Retour à une baston de rue sans règle, à du Beat’em All explosif et sanglant, et bien sûr au charisme froid d’un Kiryu qui, après avoir frôlé mille fois la mort, a fini par la simuler pour qu’on lui laisse la paix.
Conditions de test : Nous avons passé près de vingt heures sur la version Xbox Series X de Like a Dragon Gaiden : The Man Who Erased His Name. Ce fut suffisant pour voir le terme de son aventure et boucler une partie du contenu annexe. Ce test est garanti sans spoiler.
Sommaire
ToggleTout est question d’enjeux
Yakuza 7 sentait bon le renouveau, avec son cadre inédit, mais surtout son héros rigolo et impulsif aux antipodes d’un Kiryu presque effrayant de calme en toutes circonstances. Le pari était risqué, mais s’est révélé payant. Ichiban Kasuga a rapidement été adopté, même par les fans de longue date, notamment parce qu’il participait à la fraîcheur du premier épisode lui étant consacré. Un jeu extrêmement bien reçu, malgré tout ce qu’il tentait de neuf. Ce qui a permis à SEGA et au Ryu Ga Gotoku Studio de revoir leurs ambitions à la hausse pour la suite, avec notamment une présence sur le Game Pass de Microsoft pour l’intégralité de la série, même les opus à venir.
Ainsi, le retour de Kiryu ne semblait pas forcément écrit, même si de nombreuses zones d’ombre entouraient encore ce personnage et sa disparition de la franchise. Disparition toute relative, évidemment, puisqu’il faisait malgré tout une apparition succincte dans Yakuza 7. Mais surtout parce qu’il figure sur la jaquette de Infinite Wealth, prochain épisode principal. Il n’aura pas fallu attendre bien longtemps avant que le Dragon de Dojima ne revienne sur le devant de la scène finalement. Avant cela, le Ryu Ga Gotoku Studio tenait à nous expliquer comment il en est arrivé là (avec cette horrible coupe de cheveux).
Ne tournons pas autour du pot, sur le plan scénaristique, Like a Dragon Gaiden est évidemment une franche réussite. En même temps, on se doutait bien que le Ryu Ga Gotoku Studio n’allait pas subitement se mettre à revoir la qualité à la baisse sur ce point crucial. Yakuza a toujours été reconnu pour sa narration efficace et ses personnages forts, et ce spin-off ne fait pas exception. D’autant que, bien qu’il soit effectivement moins volumineux que ce à quoi la série nous a habitués, il demeure un gros morceau scénaristique, aux enjeux conséquents.
Enjeux qui vont mettre du temps à se concrétiser. Tout ce que l’on sait, au début de l’aventure, c’est que Kiryu a virtuellement fait don de sa vie pour garantir son silence auprès d’une faction très influente, les Daidoji. Il change d’identité, se faisant désormais appeler Joryu, tandis que la mort du Dragon de Dojima est soigneusement mise en scène par ladite faction qui n’a, à première vue, rien à voir avec les habituels Yakuzas qu’a côtoyé notre héros toute sa vie. On est plutôt face à un genre de groupuscule politique, très influent sur le sol japonais, possédant énormément d’agents dans tout l’archipel. Bien malgré lui, et alors qu’il ne désirait que la paix, Joryu va devoir devenir l’un d’eux.
Ad Vitam
Un état de fait qui le mènera une nouvelle fois à traverser une quantité remarquable de péripéties variées, mais surtout risquées. S’il considère bien avoir donné sa vie aux Daidoji en changeant de nom, Kiryu, ou plutôt Joryu, va néanmoins devoir la mettre à nouveau en péril, et pas qu’un peu. Cette histoire, aux allures de dernière mission avant le trépas, le vrai, n’est toutefois pas dénuée d’impair. On aurait aimé, pour commencer que la taille réduite de cet épisode soit synonyme de rythme plus soutenu. Dans les faits néanmoins, Like a Dragon Gaiden progresse en dents-de-scie dans son histoire à l’intérêt un brin variable.
Parce qu’il fait des choix peut-être moins réfléchis dans sa construction, dans le but non avoué de gonfler un brin sa durée de vie, par exemple en contraignant le joueur à des allers et retours fastidieux, ou à un peu de Grind. Entendons-nous bien, même les quêtes annexes parfois un peu abrutissantes, dont l’objectif ne semble pas particulièrement dissimulé, se révèlent plutôt bien écrites, quand elles ne sont pas totalement absurdes. Et tout mordu de la franchise les dévorera avec un certain plaisir, notamment parce que les références aux précédentes aventures sont nombreuses. Mais c’est le fonctionnement de l’histoire qui pêche un peu.
Même si l’on reste sur un rythme assez similaire aux opus habituels, il aurait semblé logique, et plus digeste, de revoir légèrement la progression, parce qu’ici l’aventure ne dure qu’entre douze et quinze heures en ligne droite. Plus concrètement, le jeu a le don de casser son propre rythme. Certes, la série s’en est toujours un peu moqué, du rythme. Mais en contrepartie elle offrait beaucoup plus de choses à faire et à voir à côté de l’histoire principale. De sorte que ces temps morts n’étaient pas subits, mais appréciés. Or, ici on dit au revoir aux événements « aléatoires » se produisant dans les rues, au profit d’un système de missions bien moins appétissant. Et, surtout, plus du tout organique.
Reste que Like a Dragon Gaiden intègre toute une dynamique basée sur le « Grind », avec l’omniprésence de l’argent dans toutes ses stratégies, de l’achat d’items à l’amélioration des compétences du héros. Tout en s’offrant un aspect « agent secret », d’abord via les Daidoji, puis avec Akame, une jeune femme qui fera appel à nos services pour régler différents problèmes aux alentours. Jeune femme possédant une étrange agence de renseignements, ainsi qu’une certaine aura. Chaque service rendu offre une raisonnable quantité de points, permettant d’augmenter le rang de ladite agence, et servant en parallèle de monnaie dans une boutique à part, ou pour débloquer certaines compétences.
Petit opus deviendra grand
Comme dit plus tôt, oui, Like a Dragon Gaiden : The Man Who Erased His Name est un « petit » épisode. Dans la mesure, d’une part, où sa durée de vie n’égale aucun opus numéroté, encore moins Yakuza 7. Quoique, tout est relatif, puisqu’il n’est pas si loin de ce que proposent le premier et le second volet, en ligne droite. Sans trop se presser, il faudra une quinzaine d’heures pour arriver au terme de son histoire. Mais comme d’habitude, et hormis le « Grind » obligatoire, les activités annexes sont fort nombreuses. À travers la carte qui accueillera une grande partie de l’aventure, on trouve plusieurs jeux d’arcade détenus par SEGA, notamment l’étrange Sonic Fighters, mais aussi des jeux de fléchettes ou d’argent, du billard, de la course de petites voitures, des habitants à sauver des griffes de voyous, et la liste continue.
L’ennui, et c’est la première chose qui risque de déplaire aux habitués, c’est que ladite carte ne se compose que d’une petite parcelle de celle de Yakuza 7. Parcelle certes très agréable à parcourir, mais reste qu’on se sent rapidement à l’étroit, plus que dans le Kamurocho des premiers volets. Heureusement, il reste le Château, un lieu à part qui offre la possibilité de se livrer à différents combats en arène, seul ou avec une équipe qu’il est possible de recruter. Un endroit qui, là encore, n’est pas bien grand, mais propose néanmoins d’autres types de douceurs, et surtout une ambiance bien à lui, assez dépaysante.
Sans surprise, le moteur graphique ne fait pas de merveille, et Like a Dragon Gaiden connaît quelques phases moins inspirées que d’autres. Mais de manière générale, comme d’habitude avec la série, les environnements restent plutôt jolis, vivants, et les visages des personnages principaux (et même de la majeure partie des truands que l’on combattra) sont extrêmement convaincants, tant dans leur aspect que dans leurs animations. Et puisqu’on en est à parler d’habitude, autant aborder les combats, puisque l’on revient ici à du temps réel, et à un gameplay façon Beat’em All, comme tous les épisodes, du 0 au 6.
Classicisme
Un retour aux « sources » qui promet son petit lot de surprises, avec un nouveau style de combat : l’agent. Un art martial très agréable à prendre en main, dynamique et spectaculaire, qui propose par ailleurs plusieurs petits gadgets bien pratiques, et assez jouissifs à utiliser. En parallèle, on retrouve le style habituel du Dragon de Dojima, plus porté sur la force brute. Première grosse déception, aucune autre façon de jouer n’est à prévoir. Là où tous les opus précédents, avec Kiryu en tête d’affiche, proposaient quatre styles de combat, Like a Dragon Gaiden se contente de deux. Un choix qui se justifie sans doute par la mécanique d’amélioration, qui risquait d’être trop chargée pour le temps de jeu réduit… ce qui n’enlève rien à la petite redondance s’installant rapidement.
Cela étant dit, le plus gros reproche que l’on pourra faire au jeu réside finalement dans son grand classicisme. Quatre ans après un Yakuza 7 qui cassait un brin les codes de la série, on se retrouve avec un opus qui reprend une recette que l’on connaît sur le bout des doigts, en l’élaguant par endroits pour la faire rentrer au forceps dans son contenant de moindre taille, tout en ne s’émancipant pas de ses petits défauts habituels. Comme de l’aspect parfois brouillon, désorganisé, de ses joutes. N’allez pas croire que l’on y passe un mauvais moment, loin s’en faut, mais on ressent le fait que cet épisode de transition n’ait connu que six mois de développement. D’autant qu’il n’est pas exempt de coquilles dans ses sous-titres en français.
Par ailleurs, bien que l’endroit soit très appréciable, Like a Dragon Gaiden mise beaucoup sur la zone du Château, et sur la quantité de combats qu’elle propose, en parallèle d’un scénario annexe à l’intérêt quelque peu discutable. Pas que cela soit particulièrement déplaisant, d’autant que le système d’équipe fonctionne à merveille, et qu’il est possible d’y incarner une bonne quantité de personnages, notamment certaines têtes très connues. Mais il est vrai que l’on a déjà eu six épisodes, plus un préquel, sans compter le spin-off Ishin, pour pratiquer le système de combat original de la série. Or on attendait peut-être un peu plus de fraîcheur de ce volet de transition.
Cet article peut contenir des liens affiliés