Initialement sorti sur Apple Arcade le 12 juin 2020, Little Orpheus pourrait très bien vous étonner. D’abord par sa direction artistique, mise en avant pendant la campagne commerciale, mais aussi, espérons-le, par la force de son scénario et son humour potache. Le jeu a tout de même été primé plus de vingt fois depuis sa sortie allant des meilleurs prix Visuels et Graphismes du prix Apple Design au prix de meilleur jeu mobile aux D.I.C.E. Awards.
Le jeu développé par The Chinese Room (qui a aidé sur Everybody’s Gone to the Rapture notamment) et édité par Sumo Digital raconte l’histoire d’un cosmonaute soviétique envoyé sous Terre pour fouiller ses entrailles accompagné d’une petite bombe atomique alimentant sa capsule, Little Orpheus. Il ressort 3 ans plus tard sans s’exprimer sur sa disparition des radars et va devoir s’expliquer auprès des autorités qui veulent bien entendu tout savoir.
Depuis le 13 septembre dernier, le jeu bénéficie désormais d’un portage généralisé. Autrement dit une sortie sur presque toutes les plateformes actuelles, à savoir PC via Steam et l’Epic Games Store, PlayStation 4, Xbox One et Nintendo Switch. Il est bien entendu compatible avec les consoles de nouvelle génération mais sans amélioration quelconque notifiée par l’éditeur. Alors, prêts à plonger aux confins de notre chère planète Terre ?
Conditions de test : Nous avons arpenté les 9 épisodes de Little Orpheus avant de relancer quelques chapitres en mode recherche d’orbes perdues, le tout sur PlayStation 5 via une copie PlayStation 4 envoyée par l’éditeur. Ce test est garanti sans aucun spoiler narratif majeur.
Il était une fois Little Orpheus…
Le postulat de départ de Little Orpheus est pour le moins intéressant : alors que la Course à l’Espace bat son plein dans le monde entier et voit plusieurs missions organisées afin d’atteindre la Lune au l’aube des années 60, un cosmonaute soviétique, Ivan Ivanovitch a décidé de rejoindre une expédition de la NASA le menant sous Terre, ou plus exactement au centre de la Terre afin d’étudier le noyau terrestre voire permettre au peuple soviétique de l’utiliser.
À bord de sa capsule contenant une bombe, Little Orpheus, le soviétique est largué dans un volcan éteint et disparait dans les entrailles de la Terre. Il ne refera surface que 3 ans plus tard, sans donner de nouvelles ni vraiment d’explications sur sa disparition et son silence radio.
Il s’agit là de tout le sel de l’aventure qui vous attend dans Little Orpheus : l’histoire prend place sur deux temporalités différentes. Le présent, en 1965 donc, où Ivan Ivanovitch tente de s’expliquer auprès d’un haut gradé de l’armée soviétique voulant à tout prix savoir ce qu’il est advenu de Little Orpheus avant d’ordonner l’exécution du cosmonaute, et le moment de l’expédition, 1962, où les joueurs et joueurs vivront les aventures narrées par notre drôle d’énergumène.
S’en suivent alors un ensemble de 8 épisodes principaux, qui sont disponibles sous forme de série télévisée, avec même un générique qui leur est propre, et qui nous présenteront un nouveau lieu, ou de nouveaux événements marquants dans l’épopée de notre héros, afin que découvrir ce qui est arrivé au matériel soviétique. Une construction maligne, usant à l’excès des cliffhangers (mise en suspens d’une situation) et autres situations cocasses pour tenir en haleine les joueurs mais aussi notre militaire à bout de nerf.
Nous ne vous dévoilerons aucun détail narratif pour ne pas gâcher les quelques surprises ponctuant la progression. D’ailleurs, comptez environ 4h pour terminer l’intégralité de l’aventure puisque chaque épisode dure entre 25 et 30 min de jeu, de quoi permettre de petites sessions si nécessaire, avant de vous accueillir pour un ultime épisode rendu disponible plusieurs mois après sa sortie sur Apple Arcade, et qui vient clôturer l’histoire d’un Ivan Ivanovitch à l’imagination toujours aussi débordante.
Cet épisode supplémentaire a d’ailleurs pour mérite de narrer aux joueurs et joueuses les événements qui se sont déroulés entre la fin des histoires officielles racontées à l’armée et le retour du héros à la surface, de quoi même ajouter du potentiel si d’éventuels épisodes unitaires étaient amenés à sortir dans le futur. Sans être d’une parfaite originalité, les péripéties qui toucheront Ivan dans son aventure ont pour mérite d’être très bien orchestrées, et d’être suffisamment prenantes pour donner envie de voir la suite.
À noter également qu’un autre mode de jeu fait son apparition à un moment donné dans votre aventure. Il s’agit des « Enregistrements perdus ». Un mode qui vous demandera de retraverser tous les niveaux dans leur entièreté à la recherche d’orbes lumineux dissimulés partout afin de débloquer artworks et autres anecdotes de développement. Sympatoche sur le papier mais avec peu d’intérêt ludique car les niveaux sont strictement identiques.
Un It Takes Two-like ?
L’une des forces de ce Little Orpheus réside en la pluralité des situations rencontrées par notre personnage, enchainant malheurs et déconvenues. Il ne faudra cependant pas s’attendre à un bouleversement du gameplay du tout au tout à chaque épisode puisque l’on retrouvera les éternels mouvements de poussée, de saut, de balancement de liane en liane, etc…
Avec leur défilement horizontal, les niveaux demeurent très linéaires et dirigistes, mais cela leur permet également de maitriser leur mise en scène allant des différents angles de caméras aux éboulements et autres jump-scares (nous ne sommes pas dans un jeu d’horreur non plus).
Jouer à Little Orpheus nous a rappelé quelques souvenirs d’un autre jeu sorti récemment et qui a obtenu les grâces du prix de GOTY l’année dernière aux Game Awards, l’excellent It Takes Two, qui dans sa construction et sa mise en scène a permis de ramener le multijoueur coopératif (et notamment de salon) sur le premier plan. Pas de coopération ici, ni de multijoueur, mais le parallèle se fait surtout sur la grande variété et l’intensité des situations traversées pour raconter une histoire loufoque. Ne vous méprenez pas, le scénario n’est cependant pas à la hauteur de sa référence.
Si vous aimez les jeux bavards, Little Orpheus devrait vous convenir. En effet, véritable mise en abyme d’un jeune homme coincé en interrogatoire qui ne doit pas se terminer très bien pour le principal intéressé, la totalité de la trame narrative est soulignée par le dialogue entre notre soviétique en mauvaise posture et son « bourreau ».
Leur relation se construit d’ailleurs au fil de l’aventure, l’agent du gouvernement relâchant un peu sa garde par moments avant de se reprendre, ou allant même jusqu’à poser des questions pour connaitre la suite tant son histoire le fascine. L’occasion parfois de revoir nos personnages dans leur pièce sombre en plein interrogatoire, pour marquer une pause dans nos péripéties.
Une vraie plus-value pour ce titre qui jouit également d’une certaine dose d’humour absurde, de malentendus ou de quiproquos qui pourront vous faire sourire si vous y êtes sensibles. Pas d’éclat de rire cependant, mais l’ensemble est très agréable à suivre, même si, il faut le noter, Little Orpheus ne bénéficie pas de voix françaises mais uniquement de sous-titres, placés par ailleurs tout en haut de l’écran, rendant parfois difficile le suivi de la discussion alors que des événements se déroulent en dessous.
Au rayon de la bande son, même si l’ensemble demeure très discret, nous avons pu nous rendre compte que les musiques et autres bruitages étaient adaptés aux situations, ce qui est très impressionnant pour une production de cette ampleur. Prenons l’exemple d’un moment où le personnage doit avancer à pas de loup pour ne pas se faire repérer. Résultat : chacun des pas mis l’un devant l’autre provoquait une tonalité musicale montant en intensité au fur et à mesure. Du pur génie. Mention particulière également pour le générique, très années 70-80 et qui fonctionne parfaitement dans la tournure que prend ce jeu véritablement décalé.
Il ne faut pas oublier cependant que Little Orpheus demeure le portage d’un jeu mobile sur consoles et PC. Même si cela ne se ressent pas au niveau du visuel, très chatoyant par ailleurs, à la colorimétrie variée et ne présentant aucun bug, clipping et autres textures floues, avec des chargements plutôt rapides, ce sera plutôt au niveau des mécaniques générales de gameplay qu’il vous faudra être vigilant.
En effet, certains contrôles pourraient ne pas répondre comme vous le souhaiteriez, vous demandant parfois de retraverser une partie du niveau depuis le dernier checkpoint (présents en nombre ceci dit) car la mort pourra être présente à de nombreuses reprises (courses-poursuites, sauts au bon moment etc.). On aurait même espéré plusieurs ajouts de gameplay, mais ce sera peut-être pour une autre fois ?
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