Au-delà du fait qu’il s’agisse d’un milieu d’expression pour des passionnés du jeu vidéo, le secteur indépendant c’est aussi l’endroit où les idées les plus originales et farfelues prennent vie. Ce que ne démentirons pas des titres comme Undertale ou encore Papers Please. Monster Harvest, quant à lui, semble serti des meilleures intentions, et jouit d’un concept fort intéressant. Mêler le gameplay d’un Harvest Moon, et celui d’un Pokémon. Sur le papier, il est vrai que cela intrigue, et fait même saliver pour peu que l’on soit amateur des deux licences. Cela étant, comme nous avons pu le constater avec le récent Twelve Minutes, un bon concept ne fait pas nécessairement un excellent jeu.
Conditions du test : Nous avons joué une douzaine d’heures au titre dans sa version Nintendo Switch, principalement en mode portable. Plusieurs bugs nous ont contraint à relancer notre partie, et nous avons par ailleurs perdu une sauvegarde, visiblement corrompue pour des raisons que nous ignorons.
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ToggleBienvenue à la campagne
Comme pouvait le faire l’excellent Stardew Valley, Monster Harvest nous propulse à la campagne à l’aide d’un petit pitch scénaristique très bateau, où nous sommes censés reprendre la ferme de notre oncle. Ce dernier, trop occupé à réaliser des recherches scientifiques, n’a plus le temps de s’occuper du champ, qu’il nous laisse dans un état pitoyable. Seulement voilà, la petite spécificité de la région, ce n’est pas seulement le calme, mais c’est aussi les planimaux. Des créatures endémiques et étranges qu’il est possible de faire germer en versant une substance issue de slimes sur nos plantes. Pourquoi pas après tout ?!
Bien sûr, afin de justifier la présence de ces créatures, un dangereux donjon nous attend aux portes de la ville. Un lieu étrangement coloré et lumineux, alors qu’il s’agit bien d’une grotte, que nous n’aurons le droit d’explorer que la nuit… et à condition d’avoir au moins une sorte de planimaux en notre possession. Parce que contrairement aux autres clones de Harvest Moon, pas question de nous battre nous-mêmes dans ce dédale de salles générées aléatoirement. Il faudra nécessairement faire appel à nos petites créatures pour nous défendre, dans des combats au tour par tour empruntés, au moins dans l’idée, à Pokémon.
La journée est donc consacrée, en toute logique, à l’élaboration d’une ferme digne de ce nom, qui pourra nous rapporter de l’argent, ou bien nous permettre d’obtenir de nouveaux planimaux. Certains étant dédiés au combat, tandis que d’autres pourront servir de monture ou faire office de vulgaire bétail dans une grange. En somme, malgré la petite spécificité que représente la création de bestioles étranges, on est en terrain connu. Trop connu, d’ailleurs, au point que l’on n’est jamais surpris par ce que propose le titre de Maple Powered Games. Mais ce ne serait guère un problème si celui-ci récitait ses gammes convenablement.
De trop nombreux problèmes
Vouloir pasticher deux très grosses licences adorées de nombre de joueurs n’est pas une mauvaise idée. Le tout est de le faire convenablement. Et il est vrai qu’en constatant le résultat ici, on aurait parfois tendance à se demander comment Monster Harvest a pu dépasser le stade de l’accès anticipé, tant nous avons observé de problèmes de finition et de défauts majeurs. L’intention est bonne, c’est un fait indéniable, et nous étions plutôt enthousiastes en lançant notre partie, malgré une phase de tutoriel fastidieuse et un pitch scénaristique accessoire. Mais nous sommes ressortis déçus de cette expérience pourtant prometteuse !
D’abord parce que le style visuel ne nous a pas particulièrement convaincus. Et s’il est vrai que c’est une notion plutôt subjective, il l’est aussi que la direction artistique devrait diviser. Trop de couleurs, trop d’effets inutiles, pour une lisibilité des décors parfois compliquée. Ce à quoi s’ajoute un character design de mauvais goût, des planimaux absolument pas marquants, et bien sûr une bande-son comprenant bien trop peu de morceaux, tournant de surcroît en rond. Bref, trop de choses ne vont pas avant même que l’on ait commencé à aborder le gameplay, ce qui est très mauvais signe vous en conviendrez !
Comme si cela ne suffisait pas, de gros problèmes d’optimisation sont à signaler. Avec pour commencer une localisation complètement aux fraises. Un oncle qui nous vouvoie sans aucune raison par exemple, ou encore des tournures de phrases manquant parfois de sens. L’ergonomie des menus est complètement à revoir. On est sur quelque chose de parfaitement archaïque, dans lequel le curseur est infiniment trop sensible. Ainsi on passe beaucoup de temps à essayer bêtement de placer ce dernier sur la case désirée, un comble ! Enfin, la police d’écriture est trop petite, nous forçant constamment à plisser les yeux ou à nous approcher de l’écran. Et comment ne pas parler de ces temps de chargement tout simplement atroces ?!
Notez que nous avons eu affaire à des bugs et problèmes variés, mais très handicapants. Pour commencer, après à peine cinq heures de jeu il nous a fallu lancer une nouvelle partie : notre sauvegarde initiale était toujours bel et bien présente sur l’écran d’accueil, mais impossible de la charger. Dans la seconde, notre barre d’endurance, pourtant essentielle, était invisible… À plusieurs reprises, il nous aura aussi fallu recharger notre partie suite à un bug : dans le donjon, nous sommes tombés plusieurs fois dans les bassins d’eau (ce qui n’est pas censé arriver, précisons-le) dont il nous fut ensuite impossible de ressortir. On ne va pas se mentir, après avoir subi tous ces problèmes, nous étions beaucoup moins enclins à être indulgents avec Monster Harvest.
Un mauvais plagiat ?
S’il fait un travail presque convenable sur la partie farming, puisque le contenu primaire d’un Harvest Moon ou d’un Stardew Valley est bien présent, Monster Harvest souffre néanmoins d’exactions qui lui font cruellement défaut. La précision du curseur est complètement à revoir. Notre personnage est affreusement lent. Il n’est pas possible d’aplanir la terre une fois celle-ci bêchée. Quant à l’utilisation des tuyaux pour arroser notre terrain, elle est aléatoire : tantôt ceux-ci vont fonctionner normalement, tantôt ils vont refuser de se raccorder au point d’eau, alors que nous avons bien fait tout ce qu’il fallait pour cela. Nous ne passerons pas sur tous les problèmes.
Mais le pire reste peut-être la douloureuse expérience des donjons, qui souffrent de différents bugs de son, mais surtout de combats dont on cherche encore l’intérêt et l’équilibrage. Nos planimaux ne sont pas vraiment différents des uns des autres, si ce n’est qu’il existe trois ou quatre panels de trois attaques. Le système d’expérience est très classique… Mais les combats qui nous en font gagner sont purement et simplement frustrants et soporifiques. Aucune véritable notion de stratégie, et impossible de s’attacher à l’une de nos créatures, celles-ci étant destinées à mourir pour nous servir d’engrais de toute manière… Une bien étrange façon de faire du Pokémon !
Reste une ville de taille moyenne, dans laquelle il n’y a pas grand-chose de plus à faire que d’aller acheter des objets onéreux ou faire le plein de graines. Bien sûr, comme tout clone de Harvest Moon, Monster Harvest dispose d’un calendrier qui propose régulièrement des activités. Mais celles-ci ne sont qu’un prétexte gênant pour fermer les échoppes, et n’offrent absolument rien de ludique. Leur seul intérêt, c’est qu’elles regroupent tous les habitants de la ville, et sont donc le meilleur moment pour offrir des cadeaux et se faire des amis… ce qui ne sert pas à grand-chose dans l’absolu !
C’est tout de même dommage, parce qu’il y a malgré tout de bonnes idées dans Monster Harvest. Le mélange de genres n’est pas idiot, et pourrait fonctionner à merveille. On sent qu’on n’en est pas si loin que cela. L’ajout d’enjeux scénaristiques aussi, bien que l’histoire ne soit absolument pas transcendante. Et puis bien que le développeur ait surchargé ses décors, et que la ville soit mal fichue, on sent qu’il maîtrise le moteur Unity, et aurait donc moyen de faire quelque chose de propre avec. Il ne manquerait alors que des corrections dans le gameplay, une interface moins archaïque, et des combats plus intéressants…
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