D’aucun ont connu Nomada Studio avec la sortie d’un OVNI vidéoludique il y a près de 6 ans, Gris. En tant que véritable chef-d’œuvre émotionnel et visuel aux plus de 3 millions de ventes à date, Nomada Studio se devait de réitérer l’exploit pour accroitre son influence dans le JV indépendant et asseoir son expertise et sa patte artistique qui lui est propre. C’est dans cette optique que sort cet automne Neva sur PC, PlayStation 5, Xbox Series X/S et Nintendo Switch. Nous avons pu venir au bout de cette aventure narrative dans laquelle une jeune femme et un jeune loup doivent coopérer et se faire confiance et où les sentiments se mélangent subtilement, et il faut avouer que nous n’en sommes pas sortis indemnes.
Conditions de test : Nous avons terminé Neva en difficulté normale puis avons rejoué quelques chapitres pour compléter notre collecte annexe, le tout sur PlayStation 5. Quelques spoilers narratifs, notamment pour planter le décor, sont présents en tout début de cette critique, mais nous vous réservons la surprise pour le reste de l’aventure.
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ToggleNeva et Alba font grise mine
En quelques mots, Neva nous raconte l’histoire d’une jeune fille, Alba, accompagnée d’une espèce de loup aux bois magnifiques et de sa petite louve. Attaquées par des ombres ténébreuses, le trio ne s’en sortira pas indemne puisque le loup majestueux ne survivra pas. Désormais seule en compagnie de la jeune femelle du groupe, répondant au nom de Neva, Alba va chercher à se battre contre les ténèbres et surtout trouver un nouveau foyer leur permettant de grandir ensemble en sécurité.
A travers les quatre saisons d’une année complète, nous allons donc suivre les pérégrinations de ce duo qui doit apprendre à se connaître, se faire confiance et grandir ensemble, avec les frictions, dangers et modifications de chacune que cela apporte. Une œuvre complexe mais formidablement mise en scène par les équipes de Nomada Studio qui parvient à transcrire les émotions des deux personnages de la plus belle des manières tout au long de l’aventure qui vous tiendra manette en main durant environ 4h si vous souhaitez en voir le bout.
Le jeu ne cherche pourtant pas à nous expliquer sur quelle planète ou à quelle époque l’action se déroule l’histoire, ni même les véritables origines ou raisons d’agir des ténèbres, mais qu’importe, puisque tout se raconte via des cinématiques plutôt muettes et de la narration environnementale tellement efficace et juste émotivement que c’en est même troublant. Le monde va mal, gangrené par une corruption profonde, donnant finalement au jeu plus de dimensions que simplement celle d’une fable onirique entre une fille et son loup.
Une fable à plusieurs niveaux de lecture
Dans Gris, le studio espagnol Nomada Studio faisait la part belle à la solitude et à la résilience de l’être humain face à ses peurs et ses traumatismes. Pour Neva, le studio a décidé en quelque sorte d’inverser la situation en proposant quelque chose de très humaniste, coopératif et foncièrement chaleureux, tranchant indéniablement avec le côté plus rectiligne et froid de Gris.
A travers une formidable palette de couleurs rendant grâce aux différentes saisons traversées, les paysages prennent vie de par le frissonnement des végétaux ou les bruissements de la nature au sens large. Des paysages bucoliques, parfois en plans larges pour admirer la simplicité et la beauté de la nature (avec quelques difficultés de lisibilité par moments), parfois en plans plus resserrés, avec de multiples plans pour simuler par exemple des forêts denses. Nomada Studio prouve une fois de plus sa maitrise des environnements grâce à une direction artistique qui lui est propre et qui fait des merveilles une fois de plus.
Nous l’avons dit, dans Neva, nos deux héroïnes vont avoir pour objectif de trouver un nouveau foyer, une zone sure pour s’épanouir et grandir. Bien qu’il faille tout de même signaler que cet objectif s’effacera en cours d’aventure, remplacé par une fuite vers l’avant indéniable, on parvient à lire entre les lignes la désolation du monde traversé par Alba et Neva, les conséquences des ténèbres, dans cette « Terre » où le seul être humanoïde restant semble être Alba qui n’a pas de famille propre. De là à singer les agissements de l’espèce humaine peut être pas mais une manière de représenter tout le Mal au sens large et ses conséquences sur la Vie qu’elle soit animale ou végétale. Une sorte d’atteinte directe à Mère Nature qui se voit ici en grand danger sans aucun espoir de s’en sortir seule.
Une fable onirique qui met en avant aussi les changements de chacun et chacune au fil des années, au fil de l’évolution de soi, allant de l’enfance à l’âge adulte en passant par l’adolescence et ses incertitudes. Pour preuve, au commencement, Neva est apeurée en permanence, constamment rassurée par Alba qui doit porter ses propres peurs et celles de son amie louve à bout de bras, tandis qu’au fil de l’aventure, Neva grandit, déploie ses bois majestueux et devient plus féroce, plus habile au point d’aider Alba pour tous les affrontements auxquels elles feront face, que ce soit automatiquement ou à votre demande sur simple appui d’une gâchette dédiée, rendant les combats d’autant plus dynamiques et organiques.
La formule parfaite du jeu indépendant ?
Des combats qui prendront une part très importante dans la boucle de gameplay de Neva, peut-être même un peu trop diraient certains, mais qui sont toujours bien mis en scène et incroyablement intégrés à l’aventure de nos comparses. Des combats qui ne seront d’ailleurs pas si simples que cela puisqu’engendrant plusieurs game over inévitables sur la route, la « faute » à un niveau de difficulté assez relevé en mode normal surtout lors de combats clés (un mode histoire est également disponible pour celles et ceux qui le souhaitent).
Alba ne possédant que trois fleurs de vie (non améliorables), le jeu ne tolèrera que deux coups avant de vous faire trépasser et reprendre au début du combat ou à un checkpoint bien placé. Rien d’insurmontable cependant, puisque le jeu vous donnera la possibilité d’user de l’aide de Neva, et de reprendre de la vie à chaque coup donné à un ennemi sans se faire toucher, une demi-douzaine de coups vous rendant une fleur complète.
Des combats dynamiques et dynamisants puisque vous demandant d’être très mobiles à tout instant, pour échapper aux attaques à distance mais aussi au corps à corps de vos ennemis qui tenteront par tous les moyens de vous faire sombrer dans leurs ténèbres. Un apprentissage certain des patterns des plus gros boss sera une force pour triompher de ces quelques combats plus relevés que la moyenne. Mention spéciale au boss final qui vous donnera quelques suées surtout si vous êtes plutôt de la team « joueur casu », d’autant plus que les hit boxes sont pour le coup assez aléatoires et pas très fines par moments, un aspect qui pourrait être amélioré par la suite via des patchs bien sentis.
La plateforme n’est pas en reste, puisque vous devrez user de l’environnement pour progresser, allant de simples lianes à des fleurs explosives vous permettant de rebondir, ainsi qu’un dash qui ne se rechargera qu’au bout de quelques petites secondes, vous obligeant à calculer méthodiquement certains mouvements à vos risques et périls, les checkpoints n’étant pas forcément à votre avantage, et tant mieux, cela apportant un peu de défi supplémentaire.
Heureusement, les contrôles répondent à merveille et vous permettent une certaine volupté dans les airs et sur terre, parfait pour résoudre des énigmes environnementales plutôt bien mises en scène bien qu’assez simples et sommaires dans l’absolu. Mettons en lumière un certain niveau en miroir, qui en plus d’être particulièrement magnifique, nous offre des réjouissances de réussite assez salvatrices. A noter que des collectibles sont à ramasser également, sous forme de fleurs à illuminer, bien que totalement optionnelles.
Et que dire des musiques, tout simplement somptueuses de bout en bout, offrant là aussi une certaine émotion pour cette aventure, qui à défaut de toucher tout le monde, devrait au moins emporter l’adhésion de par sa réalisation technique irréprochable et artistique sans aucun doute unique et fantastique. Une partition de mélodies qui touchent justes, qui servent l’action et les émotions de nos personnages pour une aventure qui devrait avoir sa place pour concourir dans la catégorie des jeux indépendants de l’année.
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