Pendant que les plus fidèles fans attendent impatiemment un nouvel opus, l’équipe de développement Team Ninja annonçait le retour de la licence lors du Nintendo Direct de février 2021 avec Ninja Gaiden : Master Collection. Une compilation regroupant la trilogie dans leur version améliorée Sigma, Sigma 2 et Razor’s Edge, tout en embarquant la totalité des DLC inclus. C’est la première fois que les jeux Ninja Gaiden débarquent simultanément sur PC, PS4, Xbox One et Switch, pour l’occasion une Edition Deluxe est proposée.
Condition de test : Jeu testé sur PS4 sans avoir pu profiter de la 4K. Nous avons passé plus de 40h réparties sur les 3 épisodes. Les versions Sigma comportaient quelques bugs, cependant le patch de correction Day One devrait les corriger. Ces faits n’influenceront donc pas notre avis. Notre rédacteur est un adepte de la franchise, il a terminé la totalité des épisodes sortis depuis la version Black.
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ToggleUn ninja dans la ville
Ce remaster édité par Koei Tecmo est justifié par le fait qu’il s’agisse des versions les plus récentes et abouties, avec rééquilibrage et contenu supplémentaire, dès lors il ne faut pas s’attendre à retrouver Ninja Gaiden Black et Ninja Gaiden II. Par ailleurs, lors de notre interview donnée à Fumihiko Yasuda, directeur et producteur sur la licence, nous apprenions que les équipes ont dû faire face à des problèmes liés à la récupération des codes sources de ces anciens jeux.
De surcroît, il convient de rappeler les intentions de Team Ninja qui vise principalement à faire (re)découvrir la franchise avec des graphismes liftés (4K disponible) et de permettre au plus grand nombre de s’approprier les jeux. L’occasion de ramener un nouveau public qui a pu découvrir le studio japonais grâce à leur travail sur la duologie Nioh. Il paraît aussi évident que ce Ninja Gaiden : Master Collection est une opportunité pour tâter le marché, et ainsi légitimer ou non la mise en chantier d’un quatrième opus. Sachant que Yasuda a avoué être tenté par la réalisation d’un nouveau jeu mettant en scène Ryu Hayabusa.
Dans un contexte porté par l’avènement des Souls-like et une philosophie de gamedesign tournée vers le challenge, il semble pertinent de remettre la franchise sur le devant de la scène, Ninja Gaiden étant réputé pour sa difficulté et son exigence. Après le retour fracassant du papa du Beat’em All 3D, Devil May Cry 5, c’est au tour du plus violent et habile des ninjas de revenir imposer sa loi.
Hayabusa, l’opération dragon
Ninja Gaiden est une mythique franchise vidéoludique de Beat’em All débutée en 1988 sur Arcade et console 8bits. Il faudra attendre la sortie Xbox en 2004 pour voir le retour de la franchise dans une version, notamment la réédition Black, devenue un classique du genre en plus d’être l’un des plus beaux jeux de la console. Une licence qui a marqué l’industrie grâce à ses prouesses visuelles, un gameplay survolté ainsi qu’une difficulté rarement atteinte pour le genre. Une vision du jeu vidéo portée par Tomonobu Itagaki, créateur de Dead or Alive et instigateur du renouveau de la saga.
Les versions Sigma sont un peu différentes des originales, particulièrement Sigma 2, puisqu’elles amènent du contenu, une I.A peaufinée, un bestiaire et un level design revu, ainsi qu’une difficulté légèrement diminuée, non sans rendre l’expérience facile pour autant. On notera aussi l’arrivée de personnages jouables diversifiant le gameplay. Pour Razor’s Edge, le principe est similaire, à la différence que cette version remplace et corrige plus en profondeur un épisode 3 hâté et totalement décrié par les fans.
Le principe de base qui régie le gameplay d’un Ninja Gaiden, c’est la nécessité d’améliorer ses propres compétences de joueur, joueuse. Les combats se différencient de ce qui peut se retrouver chez la concurrence. Il faudra rechercher l’efficacité avant tout, mais aussi manier à la perfection les systèmes de garde et d’esquive sous peine de mourir face à des ennemis agressifs et puissants, très loin des chairs à canons habituelles.
Quelques mots sur l’histoire contée dans cette Master Collection qui fait office de préquel à la trilogie des années 80/90. On suit Ryu Hayabusa, un puissant ninja appartenant au clan Hayabusa, chargé de protéger la légendaire Lame du Dragon Noir depuis des générations. Un jour, le village est attaqué par le démon Doku qui massacre la population et s’empare de la Lame. Après une défaite contre ce dernier, Ryu, en tant qu’héritier de l’épée du Dragon, entreprend une quête de vengeance, bien décidé à récupérer l’arme légendaire et à éliminer les obstacles sur son chemin.
Le deuxième opus fera suite à ces évènements et nous embarquera dans une nouvelle aventure mettant en avant les secrets qui entourent le clan Hayabusa. Ryu devra cette fois-ci protéger la Statue du Démon afin d’empêcher l’apparition du Démon Suprême. Sur son chemin l’attendent quatre puissants ennemis qu’il faudra terrasser. La trilogie va se conclure avec Ninja Gaiden 3, dans lequel notre ninja va devoir déjouer un complot terroriste, tout en évitant de sombrer dans la folie des suites d’une malédiction dont il est victime et qui l’oblige à ressentir la souffrance que lui-même inflige.
Dans la pure tradition Beat’em All, les scénarios de Ninja Gaiden n’auront que peu d’intérêts, n’étant qu’un prétexte censé justifier le parti pris d’un gameplay qui prime sur le récit.
Les ninjas ne pleurent pas
Commençons avec les opus Sigma. Qui dit remaster, dit retouches graphiques. Sur ce point, le constat est mitigé, pour ne pas dire décevant. Il est clair que les jeux ne transcendent pas la rétine comme à l’époque, même si les textures sont plus affinées, plus détaillées et qu’il y a plus d’éléments à l’écran. On ne peut passer à côté de certains loupés sur la gestion de la lumière et sur certaines textures qui paraissent vieillottes, au même titre que l’inertie des personnages secondaires. Malgré tout, cela reste convaincant, en partie grâce à des versions d’origines déjà solides graphiquement.
Le constat se veut plus flagrant quand on prend le temps de s’attarder sur les décors qui sont toujours aussi vides, une tare que se trimballe Ninja Gaiden depuis l’opus de 2004. Ceci étant, malgré un manque de vie évident, on retrouve quelques passages à la direction artistique inspirée qui parviennent à poser un semblant d’ambiance tout juste nécessaire.
Concernant le travail sonore, difficile d’appréhender les potentiels changements. Les bandes-son sont toujours qualitatives, on regrettera seulement l’absence de morceaux issus de Ninja Gaiden Black, plus marquants que sur Sigma, et ce malgré un Sigma 2 plus impactant à l’oreille. Si l’on peut déplorer certaines partitions plus discrètes, la cohérence sonore est bien présente et s’inscrit parfaitement dans le tempo et l’univers des jeux. Un rendu retrouvé dans le sound design tout aussi efficace, quoique un peu moins moderne sur Sigma.
Par contre, le gameplay qui n’a pas bougé d’un iota est toujours aussi jouissif et explosif. On pourra déplorer les faiblesses esthétiques, vis-à-vis des animations nous ne pouvons qu’être stupéfaits par cette fluidité qui ne subit aucunement les outrages du temps. Les affrontements suintent la nervosité, la classe et la violence, le tout porté par du 60fps constant. Qui plus est, la réponse des inputs fait honneur à la série, une importance capitale pour une licence exigeante où la réactivité est essentielle, dans la réponse des touches comme pour les réflexes des joueurs, joueuses qui ne devront aucunement baisser leur vigilance.
Puis, passer d’un Sigma à l’autre c’est voir l’évolution du gameplay et ressentir une véritable continuité entre les titres. Ryu gagne en aisance et en maniabilité, il se découvre de nouveaux combos et armes plus dévastateurs que jamais. Si le premier Sigma est plus orienté exploration que sa suite, on prend plaisir à retrouver un personnage que l’on connait et qui s’étoffe d’un jeu à l’autre tout en gardant les contrôles de bases. Une fois de plus, on se rend compte que Sigma 2 frôle la perfection durant les affrontements, avec des boss épiques et un challenge toujours au rendez-vous. Plus abordable que dans sa version de base, mais tellement mieux maîtrisé.
Il est tout de même dommage que le premier Sigma ne propose pas de raccourcis pour gérer l’équipement, l’absence d’ergonomie peut peser en jeu en plus de légèrement casser le rythme de l’action. Dans le même ordre d’idée, on aurait apprécié des efforts sur la caméra qui a toujours du mal à suivre la vivacité de Ryu d’un jeu à l’autre, préférant prioriser les cadrages esthétiques au détriment de la lisibilité. D’un autre côté, cela permet de mettre les nouveaux arrivants dans des conditions similaires à celles de l’époque. Une non attention qui confirme le désir des studios de pérenniser l’ADN Ninja Gaiden, avec ses atouts et ses faiblesses, en se reposant sur des acquis, mais qui pourra en rebuter plus d’un.
Le bras de la vengeance
Sur Ninja Gaiden 3 : Razor’s Edge, Tomonobu Itagaki n’est pas présent, c’est pourquoi cet opus prend un virage différent. Cette fois-ci, Ryu voit ses possibilités d’actions retomber en partie à zéro. Il dépend maintenant d’un arbre de compétence qu’il va falloir compléter intelligemment. Si de prime abord le choix est discutable, finalement on découvre la possibilité de personnaliser sa progression et sa façon de choix ce qui est plutôt intéressant, malgré une continuité brisée.
Cela dit, malgré des combats toujours nerveux, riches en possibilités et l’ajout de la glissade, certains partis pris tendent à rendre le jeu moins mémorable. Il va sans dire que la linéarité bien plus prononcée et gênante que sur Sigma 2 n’y est pas étrangère. Le level design est souvent discutable et il ne reste plus grand chose à dénicher, hormis des éléments même plus cachés.
En revanche, la touche Ninja Gaiden est toujours là. Le jeu est difficile et sanglant comme il se doit. Le roster regroupe maintenant Ayane, Rachel, Momiji et Kasumi, gage d’expériences variées tout aussi grisantes qu’avec Ryu manette en main. Sur la technique, le jeu suit la logique Sigma bien qu’il souffre moins de certaines faiblesses. Par ailleurs, nous saluons les apports minimes comme les QTE et les plongées Musasabi (élimination depuis les airs) qui, bien que simplistes et déjà présentes dans les premières versions, apportent un peu de fraîcheur à l’ensemble.
Côté direction artistique, cela manque de créativité, le semblant d’atmosphère jusqu’alors présent vole en éclat. Couplé au rythme frénétique du titre, on passe totalement à côté de l’ambiance, le plaisir se concentrant quasi exclusivement sur l’adrénaline des combats. Ces derniers se veulent d’ailleurs nettement plus intenses mais aussi répétitifs. Les affrontements semblent devenir plus mécaniques. Pourtant la présence de 5 personnages et les sensations de jeu finissent par accrocher.
Les musiques vont être plus dynamiques, avec des tempos rapides. La bande-son n’aide pas vraiment à poser une réelle atmosphère, exception faite à quelques morceaux de bravoure distillés contre des boss, mais elle suit une logique de gameplay et arrive tout de même à rythmer les affrontements. Par contre, on pestera contre l’omniprésence des cris des douleurs des victimes qui prennent trop le pas sur le sound design. Qualitatif mais moins réussi, Razor’s Edge se montre plus agressif et plus condensé.
La fureur du contenu
Ninja Gaiden est une licence qui attend d’être maîtrisée par les joueurs, joueuses, ce qui passe par les différents modes de jeu, les personnages aux gameplay spécifiques, sans omettre la terrible difficulté Maître Ninja, le défi ultime.
Avec les Epreuves de Ninja et le mode survie, vous aurez de quoi faire pour venir à bout du premier opus plus difficile et plus long que ses suites. Dans Sigma 2, il faudra compter sur le mode mission en équipe qui permet d’affronter des vagues d’ennemis en switchant entre vos deux personnages. Il y a également les modes Challenge Ninja et Course Ninja qui offrent leur lot de satisfaction.
Enfin, Razor’s Edge propose quant à lui un mode Défi Chapitre, pour refaire les niveaux avec le perso désiré, ainsi que les Epreuves Ninja à accomplir avec les 5 personnages. Notez la présence d’un mode facile disponible dans chacun des titres afin que les nouveaux venus puissent se lancer plus aisément. Malheureusement, les fonctionnalités multijoueurs sont absentes de la trilogie, les classements eux sont préservés.
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