Projet en développement pendant près de treize longues années, Nioh aura finalement connu une sortie inespérée en 2017. Non content de reprendre à sa sauce la recette d’un Dark Souls, à qui il emprunte beaucoup, le titre de Koei Tecmo pioche dans nombre d’univers, notamment Ninja Gaiden et Onimusha. Le fait est que ce premier opus, que l’on prévoyait catastrophique comme nombre de titres au passé chaotique, est une réussite sous de nombreux aspects.
Alors bien entendu, après cela l’attente autour de Nioh 2 était a contrario plutôt conséquente. Il faut dire que le titre se dote, en plus d’une recette similaire – mais améliorée – à son prédécesseur, d’une bonne quantité de promesses alléchantes. Nouveautés à foison, scénario faisant plus ou moins office de préquelle aux pérégrinations de William Adams, bestiaire plus fourni… Tout porte à croire que ce second opus est aussi réussi, si ce n’est meilleur, que Nioh premier du nom. Manette en main, il est vrai que le résultat est tout à fait saisissant !
Reste à savoir si, maintenant que From Software s’est frotté au milieu féodal japonais à son tour avec l’excellent Sekiro : Shadows Die Twice, la licence de Koei Tecmo mérite toujours notre attention et nos deniers. Et la réponse va en surprendre plus d’un, d’autant que la comparaison ne tient tout simplement pas la route : les deux jeux sont complètement différents, et tenter de déterminer qui des deux est le meilleur Souls-Like n’aurait aucun sens. Même inspiration, certes, mais deux produits finis qui n’ont rien en commun.
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ToggleSuite ou préquelle ?
Ce cher William Adams, personnage historique connu comme étant le premier européen à avoir foulé le sol japonais en 1600, n’est plus de la partie dans Nioh 2. Et pour cause : l’aventure prend place au siècle précédent, en plein dans l’ère Sengoku. Une période trouble de l’histoire du pays, notamment marquée par nombre de conflits armés. En somme une pluie d’hémoglobine qui convenait plutôt bien à l’intrigue d’un titre pareil. Car comme son prédécesseur, ce second volet ne lésine évidemment pas sur les têtes coupées, et plus généralement sur l’utilisation à profusion de fluides corporels de couleur carmin.
Il y a énormément à dire sur l’ère Sengoku, ses nombreux conflits armés, les dérives politiques… Mais ne vous attendez pas à en apprendre beaucoup en suivant l’intrigue du titre. Comme Nioh premier du nom, il ne sera pas ici question d’histoire suivie ou de mise en scène prenante. S’il s’imprègne bien de l’ambiance nippone féodale dans sa conception artistique, particulièrement réussie au passage, il apparaît rapidement que le scénario n’est pas son point fort. Les personnages sont certes plus marquants, mais leur rôle reste tout à fait anecdotique dans la progression de notre guerrier aux pouvoirs de Yokaï.
La nouveauté première, en effet, c’est que ce personnage que l’on peut dessiner de la tête aux pieds – via un outil de création complet et réussi – n’est pas un humain à proprement parler. S’il profite bien de l’apparence d’un – ou d’une – samouraï, il possède néanmoins des capacités propres aux créatures du folklore japonais, autrement appelées Yokaï. Un changement majeur dans l’appréciation du gameplay, et un morceau important de l’histoire, qui tournera longuement autour de ces capacités et des nombreux monstres pavant notre route. Cela dit, dommage que ce ne soit pas l’occasion d’en apprendre sur ledit folklore…
Au cours de notre aventure, qui ne manque pas d’être conséquente et variée, notre samouraï a la joie de faire connaissance avec une poignée de personnages aux personnalités marquées. Au rang du character design, on notera une franche avancée avec ce second opus, qui sait rendre ses âmes plus vivantes ; cela notamment au cours de cinématiques joliment mises en scène, seul réel moyen utilisé pour faire avancer son intrigue. Un compliment que l’on peut par ailleurs adresser au bestiaire, qui reprend certes nombre de créatures du précédent opus, mais parvient à en sublimer l’aspect. Ce qui n’est pourtant pas aidé par une technique décevante.
Comme son prédécesseur, le titre nous laisse le choix parmi plusieurs modes vidéo. L’idée étant de nous permettre de profiter au mieux de ses environnements, au level design bien conçu et parfois vaguement retors ; ou bien de préférer une fluidité d’action supérieure pour ne jamais être surpris par une baisse de framerate en plein combat. Cela étant dit, Nioh 2 souffre d’une technique qui aurait gagné à être plus en accord avec son temps. Dépassé, il n’en reste pas moins agréable à l’œil, grâce à sa DA du tonnerre, mais n’offre jamais vraiment de moment d’émerveillement. Malgré quelques efforts à ce niveau, notamment de chouettes environnements de jour.
Une recette améliorée
Dans l’ensemble, ce second opus reprend la recette du premier. Les combats sont donc nerveux à souhait, rythmés par l’utilisation que le joueur et ses adversaires font du Ki. Une jauge qui fait office d’endurance (cf Dark Souls), et qui a tendance à baisser très vite chez les plus faibles et nous-même, tandis que les boss auront droit quant à eux à une liberté d’action beaucoup plus conséquente. Toute la difficulté du système de jeu réside ainsi dans notre appréciation et notre utilisation de ladite jauge. On retrouve heureusement les impulsions de Ki, action à effectuer à la fin d’un enchaînement afin de récupérer un brin de cette précieuse ressource.
Idem, il est toujours question des trois postures : haute, moyenne, basse. Chacune déterminant une puissance d’attaque, une utilisation du Ki et une vitesse d’action différentes. Bien entendu, la posture haute sera la plus vorace, mais la plus douloureuse à encaisser ; tandis que la basse ne fera que peu de dégâts, mais permettra une liberté d’action supérieure, et surtout une consommation moindre du Ki. Il appartient au joueur de déterminer quelle posture convient à quel affrontement, et même de changer en plein combat, ce qui est faisable très rapidement. On y est même encouragé, via l’apprentissage de capacités liées auxdits changements entre deux combos.
Des capacités que l’on apprendra une nouvelle fois via un arbre de compétences plus fourni encore que dans le premier opus. Ce dernier propose, d’ailleurs, aussi bien de faire évoluer nos techniques de combat pour chacune des armes – plus nombreuses que dans Nioh – que de gagner des capacités physiques et surnaturelles. Il faudra néanmoins s’armer de patience pour le compléter, car on y acquiert uniquement des points en combattant longuement, ou en montant de niveau. Ce qui prend, là encore, pas mal de temps, puisqu’il faudra pour cela terrasser légion d’ennemis et revenir en lieu sûr sans succomber à nos blessures. Autant vous dire que ce n’est pas toujours aisé.
Parce que, évidemment, Nioh 2 n’est pas un jeu facile, loin de là. Il jouit d’un game system dynamique, qu’il faudra savoir prendre en main avant de se lancer corps et âme dans son aventure. Comme son prédécesseur, il reste ainsi particulièrement technique, requiert patience et acharnement ; mais surtout on y meurt souvent. Surpris par une attaque ennemie inattendue, ou bien tombant à cours de Ki après une impulsion ratée… Tout est bon pour nous envoyer au tapis et nous faire recommencer. À ce niveau, la licence n’est néanmoins pas punitive, et permet d’aller récupérer l’XP gagnée, à condition de ne pas mourir à nouveau en chemin.
La Team Ninja a d’ailleurs voulu rendre ce second volet plus accessible, ce qui se traduit avant tout en jeu par l’ajout des pouvoirs surnaturels des Yokaï. Sous notre compteur de vie, et celui de Ki, une troisième jauge a fait son apparition : celle d’Amrita. Une nouvelle ressource, que l’on obtiendra en combattant, et qui permet d’utiliser des capacités récupérées, à l’occasion, sur la dépouille d’un monstre. Efficaces, ces attaques sont néanmoins à utiliser avec parcimonie, principalement lorsque l’on se sent acculé dans une situation délicate. Dans le cas contraire, on pourrait bien manquer d’Amrita dans un moment critique.
Et ce moment critique survient lorsque l’ennemi s’entoure d’une aura rouge et nous fonce dessus tête baissée. Il est alors plus fort que jamais, mais vulnérable à un contre spécial, utilisant nos pouvoirs de Yokai. Avec le bon timing, cette capacité inédite permettra d’immobiliser un instant l’adversaire, faire baisser sa jauge de Ki, et de lui asséner quelques coups avant que le combat ne reprenne. Il est bon de noter que cela ne rend pas les affrontements moins nerveux que par le passé, ni moins complexes, mais que cela offre néanmoins une porte de sortie non négligeable lorsqu’un boss s’apprête à nous asséner un coup mortel.
Quand abondance rime avec accessibilité
Souls-Like, c’est un terme qui a tendance à faire peur. Il faut dire que la série de From Software est reconnue pour sa difficulté exacerbée et en a fait sa marque de fabrique. Mais la licence de la Team Ninja, et en particulier ce second volet, peut se targuer de ne pas tomber dans le difficile bête et méchant. Nioh 2 est exigeant et demande une fine maîtrise de son système de jeu, qu’il n’est pas aisé de prime abord d’appréhender. Mais rien d’insurmontable, rassurez vous ; tout comme l’appétit vient en mangeant, le skill vient en s’acharnant sur les adversaires pullulants dans les environnements souvent sombres du titre.
Pour aider le joueur à s’en sortir, il compte sur ses pouvoirs de Yokaï, qui sont effectivement bien pratiques et efficaces. Récupérer lesdits pouvoirs est un travail de longue haleine, et s’assurer d’être équipé de la meilleure combinaison disponible occupe régulièrement l’esprit. Mais ce n’est pas la seule mécanique qui vise à faciliter quelque peu la tâche du joueur. Ainsi, il est par exemple possible d’acquérir des ressources, notamment des flèches ou des bombes, via le Bazar Kodama ; boutique dans laquelle la monnaie dépend du loot, toujours plus important que dans le premier volet cela dit. Une nouveauté plaisante, dont on saura abuser au cours de l’aventure.
Grâce au Bazar Kodama, on peut aussi obtenir des Coupe Ochoko, un item bien pratique puisqu’il permet de faire appel aux services d’autres joueurs. Ou du moins du fantôme de ceux-ci, dirigé par l’IA – cette dernière n’étant pas tout à fait saisissante d’intelligence, mais passons. Il est par ailleurs possible de faire appel à deux autres joueurs, nouveauté à laquelle il sera bon de se référer face à certaines créatures infernales. Les boss n’ont en effet pas calmé leurs ardeurs entre deux épisodes. Bien que ceux-ci disposent souvent de paterns assez simples à appréhender, il n’en demeure pas moins qu’ils ne laissent pas toujours le temps de réfléchir et esquiver.
Il reste encore beaucoup à dire sur Nioh 2, notamment sur sa courbe de progression douce et jouissive, sur sa forge permettant des combinaisons toujours plus puissantes, ou encore sur ses secrets – notamment ses Kodamas – disséminés à travers les niveaux. Il y a énormément à y faire et à y voir, le tout sans jamais être frustré, malgré le fait que l’on meure souvent, surtout dans les débuts. Son contenu est tout simplement colossal, sa durée de vie dantesque, l’intérêt sait se renouveler sur le long terme via une difficulté progressive et un loot conséquent… Bref, à ce niveau – comme à d’autres d’ailleurs – le titre fait partie de la fine fleur du genre.
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