Développé par Ninedots Studio et édité par Deep Silver, Outward est un RPG en monde ouvert qui ne tient pas le joueur par la main. Le titre veut jouer la carte de l’originalité en prenant plusieurs paris risqués avec un aspect réaliste qui contraste avec tous les jeux heroic-fantasy dont nous sommes habitués. Coup de génie ou concept casse-gueule ?
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ToggleUn destin que l’on se forge soi-même
Dans énormément de RPG, il est commun d’incarner un être extraordinaire avec un destin hors du commun. Outward rompt avec cette incarnation de « l’élu » pour nous mettre dans la peau d’un type tout à fait banal. Notre impression démarre plutôt mal avec une création de personnage ultra limitée et une modélisation à sauter par la fenêtre de peur, en particulier en ce qui concerne les visages. Pendant un petit moment, le titre nous agace avec son aspect de faux MMORPG, ses imperfections criardes, et l’inconfort qu’il nous fait vivre . Pourtant, quand on sait qu’il a été développé par une dizaine de personnes, il y a de quoi relativiser. Il ne s’agit pas d’excuser les défauts, mais quand on découvre petit à petit l’expérience qu’il nous fait vivre, on ne peut qu’être impressionné par tant d’ingéniosité.
En tant qu’homme (ou femme) lambda, notre introduction n’a rien d’extraordinaire. Au contraire, nous sommes d’emblée plongé dans une mouise des plus courantes. Après le naufrage d’un bateau qui était sensé rapporter bon nombre de richesses, vous échouez non loin de votre ville natale. Arrivé chez vous, les habitants vous tiennent pour responsable et vous somment de vous acquitter d’une dette avant une poignée de jours sous peine d’être expulsé et renié. C’est de cette façon que démarre votre aventure dans ce monde sauvage et dangereux. Toutefois, ce sera l’un des rares moments où le temps sera compté car le RPG vous laisse une énorme liberté d’action. L’originalité du titre réside cependant dans cette grosse touche de réalisme implanté dans un monde qui ne l’est pas du tout. On reste dans le domaine du fantastique, mais le jeu arrive a donner un rendu convainquant d’une situation où un être humain, dans la moyenne, atterrirait dans un monde médiéval-fantastique. On peut aussi voir ça comme un « Isekai » sans tous les « cheat » habituels du genre.
L’expérience qu’offre Outward est unique, mais il ne plaira pas aux joueurs refusant de laisser de côté des conforts auxquels ils sont habitués.
Nous sommes ainsi plongé dans un jeu de rôle sans cadeaux. On part à l’aventure avec un sac à dos, un peu de nourriture, des outils et quelques piécettes. Il nous place dans un réalisme extrêmement exigeant et déconcertant, mais assez juste quand on y regarde de plus près. Il nous prend de nombreux éléments de confort pour les transformer en mécaniques de gameplay, et de survie. Par exemple, pour se diriger, pas de mini-map. Il y a bien une carte mais vous devez déterminer par vous-même où est-ce que vous vous trouvez. Votre avatar ne gagne pas non plus de niveau, il peut uniquement obtenir de meilleurs équipements et des compétences en s’entraînant avec des PNJ que l’on paye. Même l’apprentissage de la magie s’obtient à la sueur de votre front en allant dans un endroit bien particulier, et rempli de dangers, pour activer votre mana.
Dehors c’est la mort
Les développeurs assument entièrement tous ces choix qui vont forcément diviser les joueurs, mais ils nous forcent également à assumer les nôtres. Votre sauvegarde est unique, il est donc impossible de faire le filou pour corriger une erreur. C’est très malin dans la mesure où Outward est aussi imprévisible. On le disait, le jeu est sévère mais juste. En cas de mort, pas de game over, vous subissez seulement un événement aléatoire. La majeure partie du temps, vous revenez près d’une ville avec tous vos biens et votre argent. Dans le meilleur des cas, vous pouvez même être sauvé par quelqu’un. Il arrive même que l’on soit envoyé en prison, il faut alors trouver un moyen de sortir et de récupérer ses affaires. Autant vous dire que la mort sera votre compagne car les dangers ne manquent pas en dehors des villes biens sécurisées. Même les ennemis les plus faibles font de lourds dégâts avec un équipement correct, et le remplissage de votre jauge de stamina est inversement proportionnelle à la vitesse à laquelle elle se vide. Il y a neufs types d’armes différentes (épée, arc, lance, baton, chakram…), mais il ne suffit pas d’avoir un joujou performant et de bien esquiver avec des roulades. La comparaison peut être facile, mais Outward n’est pas un énième fils caché des Souls de FromSoftware.
Il est presque impossible de prendre plusieurs ennemis à la fois, surtout au début. Partant de ce constat, vous êtes obligé de vous préparer un minimum et de bien jauger les situations. Il est possible de concocter des potions pour résister aux dégâts, de cuisiner de la nourriture pour obtenir des bonus, utiliser un chiffon imbibé sur une arme pour lui donner une caractéristique temporaire (poison, flamme…) ou encore poser des pièges. L’anticipation va même jusqu’au sac qu’il vaut mieux enlever avant de combattre sous peine de gagner en lenteur et de perdre en esquive (avec des frames d’invincibilité en moins). Car l’inventaire se divise en deux avec, d’un côté votre sac, et de l’autre votre poche où il vaut mieux garder les indispensables pour faire face aux joutes. L’originalité du RPG de Ninedots n’est pas seulement d’incorporer des choses originales que l’on a citées précédemment, mais aussi de prendre le risque de ne pas nous laisser le choix sur des points bien précis comme les préparatifs face aux menaces. On note tout de même deux ombres au tableau sur cet aspect. Le bestiaire donne l’impression de sortir tout droit des pires MMO F2P, et les sensations avec les armes ne sont pas très bonnes, notamment les impacts. En revanche, l’IA des ennemis est assez satisfaisante. Il ne font pas n’importe quoi en combat, et il n’est pas rare de voir des bandits en découdre avec des monstres au loin.
Outward maîtrise ce qu’il veut nous faire vivre bien plus qu’il n’y parait avec un challenge sévère mais juste.
L’autre chose qui ne va pas plaire à tout le monde, ce sont toutes les mécaniques de survie qui ponctuent toute la progression. C’est typiquement ce que l’on déteste au début, mais que l’on finit par apprécier à la longue. En effet, cela se marie parfaitement avec cette idée de l’aventure où l’on est livré à nous-même. Le craft intervient donc régulièrement avec des recettes que l’on peut tenter de trouver tout seul ou en investissement dans des parchemins. Avec un sac de couchage en tant que néophyte, il est souvent question de dormir à la belle étoile. Même dans votre sommeil, il y a un risque de se faire attaquer si l’endroit n’est pas sûr, c’est pourquoi vous bénéficiez de trois types de repos (le classique, celui qui répare vos équipements, et celui qui vous protège, mais, de ce fait, le repos est moins efficace). Car l’environnement est votre pire ennemi, à commencer par la météo. Le froid de l’hiver, la chaleur de l’été, une pauvre attaque de loup, les causes sont nombreuses lorsque l’on choppe une maladie dans Outward. Cela vous donne un malus qui peut vous plomber pendant un long moment. Pour se soigner, il faut simplement se reposer ou boire du thé pour accélérer la guérison. Toutes ces idées peuvent paraître enquiquinantes sur le papier, mais cela accentue intelligemment l’expérience que l’on veut nous faire vivre. On prend un malin plaisir à couper du bois pour faire un feu après avoir ramasser quelques ressources afin de cuisiner un bon petit plat avant de dormir avant de repartir de plus belle.
Un écran coupé en deux ? Quelle est cette folie ?
Le soft fourmille d’idées ingénieuses de ce genre. L’usage de la magie en est une autre avec des cercles que l’on doit d’abord créer à l’aide de pierres, ce qui a pour effet d’augmenter l’efficacité des sorts (autrement dit de les rendre utiles). En ce qui concerne la durée de vie, comptez pas moins plusieurs dizaines d’heures, mais tout dépend de votre rythme. Outward offre une bonne rejouabilité puisque, après avoir payé la dette, il est possible de rejoindre l’une des trois factions proposées ce qui vous donne accès à des terrains de jeu bien distincts. lA grande variété des armes et des compétence font qu’il est difficile de rejouer de la même façon que la fois précédente. Malgré tout, la surprise du titre est son mode coopération en écran splitté, et tout ça en ligne ou en local. Le fait est désormais assez rare dans un RPG pour qu’on puisse le signaler haut et fort, voire le considérer comme une qualité. Car la chose fonctionne plutôt bien et la difficulté s’adapte en perspective.
Le mode coopération en écran splitté est une très bonne surprise.
Malgré toutes ces qualités, Outward souffre d’un manque de peaufinage flagrant. La direction artistique arrive tout de même à briller dans bon nombre de décors, toutefois on ne peut pas s’empêcher d’avoir cette impression de vide comme lorsque l’on se balade dans un MMO en extérieur. En revanche, les donjons profitent d’une ambiance maîtrisée, bien plus que le reste. Graphiquement, il est correct, mais il y a un mélange bizarre de neuf et de vieux à ce niveau-là. Il est même assez agréable sur PC avec les options visuelles poussées à fond, mais les versions consoles ne peuvent pas en dire autant. Même impression en demi-teinte concernant les musiques qui sont réussies mais qui se répètent beaucoup trop. Il y a aussi des performances inégales en matière de doublages.
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