Certaines séries ont complètement disparu du paysage vidéoludique, mais pas nécessairement du cœur des joueurs. C’est par exemple le cas de Banjo-Kazooie, à qui a fini par succéder à Yooka-Laylee. Mais aussi de Panzer Dragoon, licence ayant tout bonnement rendu l’âme après son troisième épisode en 2003. Pourtant tout partait pour le mieux pour ce Shoot them up de la Sega Saturn, encensé en son temps et démontrant, en 1995, des capacités techniques de son support.
Aujourd’hui la licence conserve une place de choix dans les collections des rétro-gamers. Il faut dire qu’en plus d’être reconnue pour sa qualité, elle aura fini par se vendre à prix d’or chez les passionnés. Constat qui concerne même Orta, dernier volet en date, pourtant exclusif à la Xbox première du nom, une machine sur laquelle peu de jeux ont accédé au rang de trésor. Cela étant dit, un remake du Panzer Dragoon original était annoncé au cours de l’E3 dernier, à la surprise générale.
Un remake qui sortait sans prévenir le 26 mars dernier, après un Nintendo Direct Mini riche en annonces. Temporairement exclusif à la Switch, donc, avant de faire un tour sur PC et Stadia, le titre est développé par MegaPixel Studio, une entreprise jusque-là inconnue au bataillon. Cela étant dit, il n’est néanmoins pas dénué de promesses, notamment concernant sa grande fidélité à l’œuvre originale, ainsi qu’une refonte complète de sa bande sonore. Le tout proposé à 24,99 euros sur l’eShop.
Conditions du test : Pour les besoins de cet article, nous avons bouclé deux fois l’aventure avec les deux modes de gameplay disponibles, dans deux modes de difficulté différents, et principalement en mode portable. Pour un total d’un peu plus de deux heures de jeu.
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ToggleDe bons souvenirs
Panzer Dragoon sortait il y a exactement vingt-cinq longues années sur la fameuse Sega Saturn. Une console que beaucoup connaissent, puisqu’elle signe l’entrée de la firme nippone sur le terrain glissant de la 3D – nous n’évoquerons pas ici le cas du MegaCD – au même titre que la Nintendo 64 pour son concurrent originel. Néanmoins, il est probable que peu de joueurs aient eu l’occasion d’y poser les mains. En plus d’une courte durée de vie, la machine aura en effet attiré moins de dix millions d’acheteurs. Un score risible à coté de la PlayStation de chez Sony.
L’autre problème de cette console pourtant pas dénuée de qualités, c’est sa bibliothèque. À une époque où la concurrence cherche à s’ouvrir au plus grand public, en signant des contrats avec des développeurs du monde entier pour porter fièrement la PSX et la N64, la Saturn propose quant à elle un catalogue un peu trop nippon. Un point de détail, aujourd’hui, qui explique sans détour le relatif succès de la machine sur le sol japonais, où elle s’est écoulée à cinq millions de copies, mais aussi son échec à travers le globe. Le marché se prêtait encore trop peu à cela.
Il n’y a pas beaucoup de jeux que l’Europe et l’Amérique du Nord retiendront de cette machine. Et Panzer Dragoon est assurément au sommet de cette courte liste. Il faut dire que le titre est un véritable porte étendard des capacités techniques du support démontrant, à une époque où cela ne semble pas encore évident, que la 3D peut magnifier un concept. En l’occurrence, le Shoot them up. Un genre que les bornes d’arcade ont très largement répandu, et qui a déjà investi les consoles de la génération précédentes. Mais principalement avec des jeux en 2D, évidemment.
Non content d’être une vitrine technologique, donc, Panzer Dragoon y va même de son concept singulier. Il ne s’agit pas d’un simple Shooter comme on en verra des tonnes par la suite. Il propose en effet une plus grande liberté d’action, bien que toujours attaché à une progression sur rail. Le joueur peut en effet faire bouger son dragon pour éviter les projectiles ennemis – jusque-là rien de neuf – mais aussi et surtout changer d’angle de caméra. Il peut ainsi regarder sur les flancs ou à l’arrière de la créature, afin de venir à bout d’engeances qui arrivent de toutes parts.
De l’intérêt d’un remake
Panzer Dragoon Remake a fait un petit bruit lors de son annonce à l’E3 2019. Il faut dire que cela faisait un long moment que les fans de la licence réclamaient son retour. Mais était-ce vraiment une bonne idée ? La réponse se découpe en plusieurs arguments que nous allons tâcher d’évoquer en gardant à l’esprit le travail remarquable du développeur. Parce que le premier constat est plutôt positif : la réalisation technique de cette nouvelle édition, sans être époustouflante, rend un très bel hommage au jeu original, sans en dénaturer la moindre parcelle.
Mais cet aspect peut aussi bien être vu comme une qualité, que comme un défaut. Panzer Dragoon était sublime sur Sega Saturn, avec les capacités limitées de cette machine qui était encore, à l’époque, en début de vie. Le fait est qu’en 2020, avec cette refonte très fidèle, le titre laisse un arrière-goût désagréable : ses environnements semblent trop vides, pour la plupart, son bestiaire peut-être un peu trop simpliste, et ses boss – sur lesquels il mise beaucoup dans sa version originale – n’ont plus rien d’impressionnants. Bref, on a malgré tout l’impression de jouer à du rétro.
Ainsi, malgré son appellation de remake, cette version ferait presque plus office de remaster, en cela que rien n’a vraiment changé. Les niveaux sont exactement les mêmes, les adversaires ont les mêmes paternes, et les quelques cinématiques du jeu décrivent un scénario toujours aussi frêle, voire sans intérêt. C’est bien dommage, parce qu’elles aussi ont été retravaillées de bout en bout. Reste sa bande sonore qui, à l’heure où nous écrivons ces lignes, est encore exactement la même que sur l’original. Il faudra attendre une mise à jour pour pouvoir profiter du travail de Saori Kobayashi.
Ce remake n’est donc pas moche, mais certainement trop fidèle, au point que son intérêt devient relativement discutable. Quant à sa bande sonore, certes on attend avec impatience la refonte, mais force est de constater qu’en 1995 Yoshitaka Azuma réalisait un travail remarquable. Dommage que ce grand monsieur ne soit plus parmi nous, il aurait été extraordinaire qu’il retravaille lui-même ses partitions, plus de vingt longues années plus tard. Cela étant dit, en seulement sept niveaux, on a finalement assez peu de temps pour profiter de l’ambiance musicale.
Une approche plus moderne ?
Jouer à l’original sur Saturn en 2020 c’est se heurter à un gameplay qui a, avouons-le, plutôt mal vieilli. D’abord à cause de la manette peu ergonomique de la console – et je m’attends à prendre la foudre pour cet argument – et ensuite parce que le viseur se déplace en même temps que notre dragon via la croix directionnelle. À l’époque, cette configuration a évidemment du sens, puisque les pad n’ont pas encore démocratisé l’utilisation de deux joysticks – et pas même d’un seul, d’ailleurs – mais aujourd’hui elle apparaît d’instinct comme dépassée.
Là où Panzer Dragoon Remake fait fort, c’est qu’il conserve ce gameplay originel, magnifié par l’ergonomie bien supérieure de la Switch, mais propose aussi un style de jeu dit moderne. Riche idée, inutile de le préciser, qui utilise ce coup-ci les deux joysticks de la machine. L’un servant à déplacer notre monture dans l’espace, et ainsi esquiver les projectiles et les obstacles éventuels. L’autre, vous l’aurez compris, permettant de calibrer notre visée. Le tout en utilisant, ce coup-ci, les gâchettes ZL et ZR pour tirer, au lieu d’une de la touche B. Le confort de jeu est sauf !
Nonobstant, les changements de caméra sont encore assez contre-intuitifs. N’allons pas jusqu’à dire qu’ils sont rédhibitoires, mais ils nécessitent néanmoins un temps d’adaptation certain. D’autant qu’il faudra faire bien attention à la petite carte en haut à droite de l’écran pour déterminer à quel moment changer d’angle de vue. Ce qui n’est pas forcément chose aisée dans le feu de l’action, où l’on aura plutôt tendance à se concentrer sur l’arrivée d’ennemis par-devant. Heureusement, le titre nous laisse un niveau entier pour nous y faire, et la difficulté prend une dizaine de minutes à arriver.
Coté difficulté justement, le titre n’est certes pas simpliste, mais il manque quelque peu de challenge, surtout en comparaison au reste du catalogue du genre Shoot them up, même en 3D. Un constat qui n’aurait rien de bien alarmant si la durée de vie de Panzer Dragoon, et donc de ce remake à son tour, n’excédait pas les 60 minutes de jeu. C’est très court, même pour un titre qui promulgue le scoring, puisque ce dernier n’encourage pas vraiment à relancer plusieurs fois l’aventure. Et 25 euros l’heure de jeu, ça fait quand même cher payé…
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