Ses ambitions, Past Cure les affiche et les assume pleinement. Il entend proposer un gameplay et une réalisation largement inspirés des jeux de Remedy, mais également offrir un scénario riche et complexe en citant ouvertement The Evil Within, Silent Hill ou Max Payne. Là où ça coince, c’est que n’est pas Remedy qui veut, et malheureusement Phantom 8 Studio va l’apprendre à ses dépens.
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TogglePast moi le sel
Vous trouvez que je force avec ce sous-titre (finement réfléchi) ? Ce sentiment est l’un des tous premiers que l’on ressent au démarrage de Past Cure. Ian, notre héros qui ressemble à un professeur de musique, se réveille sur une chaise dans une maison vide et va rapidement se faire attaquer par des créatures maléfiques. Enfin rapidement, disons que la menace elle apparaît rapidement, mais que le temps que les ennemis arrivent à nous on a de quoi se refaire l’intégral de Breaking Bad. Ce premier niveau vous enferme une grosse vingtaine de fois dans une pièce, envoie un ou deux ennemis sur vous, puis rouvre les portes et bis repetita. De temps à autre le héros se fend d’un « Mais, qu’est-ce que c’est ? » ou d’un « Oh non ils sont encore là. » et alors que le jeu semble vouloir nous intriguer sur le pourquoi du comment on en est arrivé là, on est déjà mort d’ennui après 25 minutes de la même chose sans aucune variation.
Le premier contact n’est donc clairement pas idéal et ne fait rien pour mettre le joueur dans de bonnes conditions. Pire encore, c’est probablement le meilleur niveau du jeu. Au fil des 6 niveaux à parcourir (pliés en 3 heures d’intense souffrance), 3 servent de tuto à rallonge et 3 autres se perdent entre mauvais jeu d’horreur, mauvais jeu d’infiltration et mauvais jeu d’action tout en oubliant qu’il y a une histoire à raconter. Ian est semi-amnésique, il a oublié 3 ans de sa vie et fait des cauchemars terribles en plus d’avoir des hallucinations, mais il a également des dons spirituels. Il peut ralentir le temps, faire une projection astrale de son âme pour explorer les environs et les développeurs du jeu parlent de télékinésie mais à aucun moment une telle aptitude ne nous est proposé. Ces aptitudes, pourtant présentées comme étant le cœur de l’intrigue avec un antagoniste qui possède le même genre de pouvoir, sont immédiatement reléguées au rang d’excuse pour des séquences de gameplay affreusement ratées. On en vient à littéralement oublier leur existence sauf quand le jeu nous force à les utiliser.
Past Cure met rapidement beaucoup d’éléments scénaristiques en place. En plus du côté mystique avec les démons et les cauchemars se trouve une pseudo-histoire d’espionnage dont on peine réellement à comprendre l’intérêt ou l’objectif. L’intrigue en elle-même ne décolle de toute façon absolument jamais et laisse en suspens 95% des questions posées au début. Quant aux personnages, leurs rôles sont survolés avec mépris et le final ressemble à une blague beaucoup trop longue. Ce genre de blague racontée par un type qui ne sait pas raconter une blague et qui en plus se rend compte au dernier moment qu’il a oublié la chute.
Rien à curer
Si encore le jeu était jouable, ou bien s’il corrigeait ses innombrables défauts d’écriture par une direction artistique surprenante ou des choix de gameplay audacieux, mais non ! La liste des bugs rencontrés ferait passer un Assassin’s Creed pour un modèle du genre. Outre les inévitables crashs, on a par exemple une IA aussi bien capable de vous voir à travers les murs que de vous rater alors que vous êtes littéralement sous son nez (voir screenshots), mais aussi des bugs sonores incessants. Parfois les dialogues se déclenchent en retard, d’autres fois ce sont les sous-titres qui arrivent trop en avance. Le sound design dans son ensemble est de toute façon désastreux. Outre le mixage qui est bien évidemment à côté de la plaque, plusieurs cinématiques sont littéralement dénuées d’effets sonores. Quand un énorme mur s’écroule sous nos yeux avec une mise en scène ronflante, on entend trois pauvres cailloux qui dévalent un escalier. C’est par instant franchement hilarant à entendre, les coups des poings qui sonnent comme quelqu’un qui se cogne le genou sur son bureau, les misérables tentatives de créer une ambiance horrifique avec des chuchotements tellement mal intégrés qu’on croirait entendre des voisins s’engueuler depuis son appartement.
Je passerai brièvement sur l’aspect graphique du titre et sa direction artistique entièrement pompée sur Evil Within (jusqu’aux bandes noires !), Cube et Max Payne, de toute façon la plupart du temps il n’y a pas du tout de direction artistique comme ça le problème est réglé. Techniquement on est face à ce qui se faisait de moins bon en 2006 sur Xbox 360, avec des textures tout bonnement affreuses, des personnages mal modélisés et des animations outrageusement rigides. Visuellement c’est tout simplement une insulte, s’en est stupéfiant de voir que l’Unreal Engine 4 peut offrir un rendu aussi bas de gamme. Je glisserai un simple mot sur la mise en scène qui rate des choses déjà vues et reproduites des centaines de fois ailleurs. C’est un véritable sketch qui est sublimé par des doubleurs qui n’en ont absolument rien à foutre. Il suffit de regarder l’incompréhensible vidéo d’ouverture pour se rendre compte que les seuls qui ont encore moins envie d’être là que le joueur, ce sont les acteurs. Jamais dans le bon ton, intégralement sous joué pour le personnage principal alors que son acolyte au téléphone (dont on ne saura jamais rien au fil du jeu) est lui dans le surjeu total. C’est sidérant d’incohérences artistiques, narratives et visuelles, il faut le voir pour le croire.
« 200% Gameplay »
Que serait Past Cure sans son gameplay si rondement ficelé. Entre les mécaniques de jeu ultra datées et le gameplay d’une rigidité sans pareil il y a de quoi faire. Le jeu essaye de varier les phases d’infiltration et d’action régulièrement, sauf qu’il ne semble avoir été pensé ni pour être un jeu d’infiltration, ni pour être un jeu de tir. Le level design est d’une paresse insolente. Le niveau du parking consiste littéralement à répéter plus d’un dizaine de fois la même zone avec éventuellement un garde placé à un endroit différent. Dès le premier niveau le jeu fait du recyclage de bas étages et ne varie jamais les situations intelligemment. Il faut par exemple attendre les toutes dernières minute du jeu pour voir un semblant de verticalité avec des ennemis positionnés en hauteur. Les ennemis eux sont au nombre de trois : celui qui fonce tête baissé au corps-à-corps, celui qui reste planté à mi-distance avec son arme à feu, et celui qui tire de loin avec un pointeur laser.
Les armes n’ont strictement aucun impact, les feedbacks sont aux abonnés absents et si les ennemis n’étaient pas aussi faciles à tuer on aurait probablement l’impression qu’ils sont immunisés aux balles. Les QTE ne fonctionnent pratiquement jamais parce qu’ils se déclenchent en retard, et absolument rien ne vient enrichir le gameplay passé les 20 premières minutes. Le titre est beaucoup trop facile lors de ses phases d’action avec son IA à la ramasse, et frustrant dans les phases d’infiltration puisqu’il joue la carte du « Si tu te fais voir tu recommences ». On a donc 50% d’action molle avec 50% d’infiltration qui ferait passer le chapitre 13 de Final Fantasy XV pour une référence.
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