Un an après sa sortie japonais, Persona 5 Strikers arrive enfin chez nous sur PlayStation 4, Nintendo Switch et même PC. Suite de Persona 5 confiée à l’équipe d’Omega Force, le jeu n’a pas hérité du nom Warriors pour autant. Il est donc temps de voir s’il s’agit d’un parfait hybride, d’un bon Persona ou d’un mauvais Musou.
Conditions de test : Nous avons passé une cinquantaine d’heures avec la version PS4 sur PlayStation 5 en mode performance pour finir l’histoire et voir la majorité du contenu annexe.
Sommaire
ToggleIt’s not a game, I’m a robot IA challenging you
On retrouve les Voleurs fantômes quelques mois après la fin de Persona 5, en pleine préparation de leurs vacances d’été. Une tâche grandement facilitée par EMMA, la nouvelle app à la mode qui est une IA à la Siri ou Alexa. Elle a d’ailleurs étrangement les mêmes fonctions que l’application de navigation dans le Métavers utilisée l’année précédente par nos héros. Comme par hasard, de nouveaux cas de Métanoïas ont également fait leur apparition.
En peine session shopping, Joker, Ryuji et Morgana se retrouvent dans une version corrompue de leur Shibuya habituel, comme s’il s’agissait d’un Palais mais cette fois-ci à l’échelle d’une ville. Après la rencontre de la maîtresse des lieux, ils tombent sur Sophia, une autre Intelligence Artificielle qui se présente comme l’amie de l’humanité. Amnésique, elle souhaite rester à leur côté pour parvenir à comprendre les émotions.
Et le fait qu’elle semble en savoir autant sur la situation actuelle que Morgana à l’époque en fait une alliée précieuse. De son côté, la Police, qui connait l’identité réelle de Joker, envoie Zenkichi Hasegawa le surveiller de près pour trouver le vrai coupable ou au pire, faire porter le chapeau aux héros pour au moins sembler efficace. Sophia et Zenkichi deviennent très attachants, contrairement à la plupart des ajouts des jeux Koei Tecmo, on aimerait les revoir après Persona 5 Strikers.
Les Voleurs fantômes font du ski nautique
Puisque les cas sont désormais dans tout le Japon, le groupe part donc en road trip estival pour mener l’enquête et sauver les différentes villes sous l’emprise de Monarques. Le scénario n’est pas une révolution, il faut dire qu’Atlus qui reste à l’écriture a préféré coller au maximum quitte à faire s’étonner un peu trop souvent ses personnages de la similarité des événements avec ceux de l’année précédente.
Notamment sur les boss eux-mêmes, on n’hésite pas à nous dire clairement que X de Persona 5 Strikers fait penser à Y de Persona 5. D’un côté, la très grosse inspiration permet d’avoir une intrigue correcte pour un jeu d’action. De l’autre, c’est un peu déroutant de voir autant de fierté à recycler. Et le cast de méchants y perd un peu vu la longueur beaucoup plus courte qui ne permet pas de les développer assez, mais fait au moins en sorte de les humaniser.
Pour les personnages secondaires, c’est beaucoup plus compliqué puisque seuls Sojiro et Lavenza ont droit d’apparaître, les autres étant trop occupés ou en vacances. Mention spéciale à quelqu’un qui intervient tout de même mais l’équipe fait clairement tout pour ne pas avoir à faire un modèle 3D. La dynamique de groupe fonctionne toujours autant et le jeu a au moins le mérite de nous faire passer un moment supplémentaire et agréable avec la bande d’amis.
Zoner en centre-ville
La structure est simple, voire un peu trop au début. Ils arrivent dans une nouvelle ville, ils parcourent deux ou trois petites zones pour enquêter sur le prochain ennemi, ils le rencontrent et un membre du groupe décide que c’est devenu personnel. Ils rentrent dans ce qu’il faut appeler la Prison où la salle du boss leur tend les bras mais souci, il y a un obstacle, il faut trouver trois « Donjons » qui sont eux aussi barrés par des obstacles et ainsi de suite.
Il y a une petite satisfaction à parcourir soi-même la vraie ville avant d’explorer la version du Métavers, heureusement plus grande. Mais le côté systématique du « Ah un obstacle, il faut le contourner » agace très très vite malgré les petites idées de level design. On frôle l’impression d’un copier-coller paresseux avant que Persona 5 Strikers décide enfin de faire bouger d’un coup les choses dans le scénario, le développement des personnages et la structure des niveaux.
Il faut tout de même noter la maximisation du temps passé dans les donjons à base d’allers-retours. Quand on les fait pour la première fois mais aussi lors des quêtes secondaires qui demandent par exemple d’y trouver un objet ou de le retraverser entièrement sans utiliser les points de téléportation. Des environnements plus grands et plus de variété auraient fait un bien fou à l’ensemble s’il fallait réellement grossir la durée de vie du jeu.
Persona 5 Strikers c’est pas exactement Hitman 3
Avant même d’évoquer les combats, ce sont les Prisons qui brisent déjà l’idée que Persona 5 Strikers pourrait être un simple Musou. On ne peut pas vraiment parler de niveaux mais de réels donjons à la Persona 5. On y retrouve en effet des zones séparées par des chargements, des énigmes pour progresser et surtout : pas de sens de l’urgence. On infiltre comme le jeu d’origine et l’on peut ressortir à tout moment pour reprendre plus tard.
Il n’y a donc pas d’armées mais des Ombres qui patrouillent et qu’il faut prendre en embuscade si l’on veut se simplifier le combat. Et déjà que l’on ne pouvait pas dire que le jeu d’origine appartenait au genre infiltration, ici on sent qu’Omega Force a encore plus de mal avec cet aspect qui n’est pas du tout maîtrisé. Au point que l’on nous permet de déclencher les combats à distance pour pouvoir éviter totalement le risque.
Quand une Ombre engage un combat, elle se sépare comme dans le jeu d’origine en un groupe d’ennemis et des murs apparaissent pour créer une petite arène. Il n’y a donc pas d’impression de participer à un grand affrontement mais vraiment de faire un donjon classique de RPG. Ce n’est pas un souci en soi mais on comprend parfaitement que cela puisse décevoir les amateurs de Musous.
Avec un peu de chance, on comprend le gameplay avant le boss de fin
Dans Persona 5 Strikers, l’autre gros point qui risque de froisser les amateurs de Dynasty Warriors et autres jeux du genre, c’est tout simplement le gameplay des combats qui n’est pas la priorité non plus. Il s’agit d’un hybride entre beat them all et JRPG tour par tour. Comprenez que les affrontements se font en temps réel avec des combos mais que l’on peut arrêter le temps pour utiliser les compétences des Personae.
On retrouve d’ailleurs toutes les mécaniques de Persona 5 avec les éléments, les points faibles, les assauts généraux… Souci, on ne fait aucun effort pour nous expliquer comment tout marche. Après quelques secondes de tutoriel, le jeu nous balance simplement une ou deux phrases en plein combat quand on utilise par mégarde une nouvelle technique. La palme revient d’ailleurs au fonctionnement des personnages.
Lors de leur première utilisation, on a une phrase de présentation puis un « Allez-voir le menu pour en savoir plus ». Et en cherchant dans un sous-menu de sous-menu de sous-menu, on trouve des descriptions minimalistes qui ne nous avancent pas beaucoup plus. Il n’y a donc pas vraiment d’impression de progression mais plus une épiphanie quand on comprend comment utiliser une technique à force d’expérimentations.
Comment ça faut gérer ses ressources ?
Avec deux boutons d’attaque dont un qui consomme du mana si précieux, on est donc plus dans le fonctionnel et la gestion que dans l’amour du beau combo (ou du bourrinage). Comme dans Persona, les gros ennemis demandent vraiment d’être vaincus par leur élément faible. La façon de jouer un personnage importe peu lorsque l’on sélectionne les trois qui accompagneront Joker sur le terrain. Car oui, il reste forcément.
On a le personnage contrôlé et donc trois qui peuvent prendre sa place à tout moment grâce à la croix directionnelle. Et il est beaucoup plus avantageux de créer des combos automatiques entre eux que de faire 120 hits avec son Voleur fantôme préféré. Dans Persona 5 Strikers, tout le monde est jouable, sauf Futaba qui reste en soutien et compense en ayant droit à son mini-jeu de piratage durant lequel il faut la protéger des vagues d’ennemis.
Et tant que l’on parle des alliés, il faut signaler qu’un système de consignes n’aurait pas été de trop vu leur tendance à gâcher leur mana pour rien. On aimerait bien pouvoir dire à quelqu’un de se concentrer sur les soins, les attaques sans mana ou autres. Au lieu de cela, ils font n’importe quoi et se prennent toutes les attaques. Rien de rédhibitoire, mais cela participe au ressenti que l’ensemble pourrait être clairement plus maîtrisé.
Pokémon Company devrait regarder ce jeu de près
Comme dans Persona 5, Joker garde sa particularité et peut conserver les démons vaincus pour s’en servir comme Personae. Cela signifie qu’il est très versatile et surtout qu’il peut aller dans la Chambre de Velours pour fusionner tout ce beau monde. Et cela permet d’avoir un bestiaire d’au moins une soixantaine d’ennemis différents sans compter les ennemis génériques, les sous-boss et les boss.
Les Voleurs fantômes et leurs invocations gagnent des niveaux et apprennent donc des compétences, les mêmes que dans Persona 5. Et on peut ensuite sélectionner les techniques à avoir à portée, utiliser les cartes pour en enseigner de nouvelles et ainsi de suite. Résultat en jouant à Persona 5 Strikers, on a clairement l’impression qu’il s’agit d’une parfaite audition de Koei Tecmo pour un Pokémon Warriors.
En revanche, on perd toute la dimension farm des Musou pour approfondir le gameplay des personnages. On a un système d’Arts de maître qui leur permet de s’améliorer au bout d’un certain nombre de coups qui ne doit pas être très élevé vu la vitesse à laquelle on débloque tout. Mais le jeu repose tellement sur la nécessité de pouvoir utiliser tout le monde à n’importe quel moment que l’absence d’investissement obligatoire semble logique.
Plus LIEN que lien social
Pour compenser l’évolution habituelle des Musous et tout l’aspect social de la série d’origine, Persona 5 Strikers propose le système LIEN. Chaque mission secondaire, dialogue important ou combat nous donne de l’expérience de LIEN. Chaque montée de niveau nous donne des points à dépenser pour acheter des améliorations dans une sorte d’arbre de compétences. On peut passer un peu de temps avec l’équipe mais on reste très loin du système de confidents.
Concrètement, on passe dans les 35 à 40 heures pour boucler l’aventure principale uniquement jouable en solo. Puis le post-game se contente d’ajouter quelques boss inédits. Pas de multijoueur ou de modes alternatifs. Cela enfonce bien le clou pour souligner que l’on est bien dans un jeu Persona avant tout et pas dans un énième Musou.
Le mariage des deux gameplays est donc loin d’être parfait mais il prend quand même. Chaque camp aura des reproches à faire mais la volonté de bien faire et surtout de proposer quelque chose de différent a un charme indéniable. Oui, on voudrait un aspect social plus développé mais en l’état on s’imagine mal avec une durée de vie de 120 heures.
Plein les yeux, plein les oreilles
Le côté technique est toujours un gros point faible d’Omega Force et il faut avouer que ce test ne vous avancera pas à grand-chose à ce niveau vu qu’il a été réalisé sur PS5 en mode performance. Aucune baisse de framerate à évoquer donc mais on ne peut absolument pas garantir la même chose sur PS4 classique, Switch et PC. Mais d’autres problèmes sont à soulever au niveau de la visibilité.
Avec les 4 personnages, les invocations et les ennemis, l’écran déborde déjà d’éléments. Puis arrive une interface surchargée pour limiter encore plus notre compréhension. Merci la possibilité d’arrêter l’action pour se chercher au milieu de tout cela et surtout replacer la caméra pas vraiment exemplaire. Et le système de lock est tellement mauvais qu’on préfère totalement s’en passer.
Persona 5 Strikers permet aux compositeurs Koei Tecmo de briller avec leurs nouveaux arrangements avec de la guitare forcément, mais aussi avec des compositions inédites qui se glissent parfaitement au milieu des autres musiques du jeu d’origine présentes. On retrouve les voix habituelles anglaises et japonaises mais surtout, et c’est la seule chose qui reste de Royal au milieu de tout cela, la traduction française des textes.
Cet article peut contenir des liens affiliés